Dynamique de la productivité et efficience allocative des marchés

Ces vingt dernières années ont été marquées par un arrêt net de la convergence des niveaux de vie des pays européens vers ceux des États-Unis. Le rattrapage économique à la suite de la seconde guerre mondiale s’est essouf- flé en deux étapes. Premièrement, les années 80 ont été marquées par un fort ralentissement de la croissance économique des pays développés puis, dans un deuxième temps, les années 90 ont vu apparaître une augmentation de l’écart des niveaux de vie entre, d’un coté, la majorité des pays de l’Union Européenne et de l’autre, les États-Unis et les pays scandinaves. Ainsi, à partir du milieu des années 90, les États-Unis, le Royaume-Uni et l’ensemble des pays scandinaves ont exhibé une croissance élevée de leur revenu alors que les pays de l’Europe Continentale et du Sud ont exhibé un ralentissement économique.

Plus précisément, si on regarde la base de données Penn World Tables  (PWT) de 1960 à 1980, les États-Unis ont vu leur Produit Intérieur Brut (PIB) par tête croître à un taux annuel moyen d’environ 2,62% alors que la France affichait un certain rattrapage économique avec un taux de croissance annuel moyen de 3,64%. Après les crises pétrolières fin des années 70, les chiffres s’inversent. De 1980 à 2005, la France n’a plus qu’un taux de croissance annuel moyen de son revenu de 2,77% alors que l’économie américaine exhibe un taux de 3,61% par an.

Les différences internationales de taux de croissance économique entre pays développés sont principalement attribuables à des différences de croissance de la productivité selon le rapport de l’OCDE (2004). Et effectivement, on retrouve des écarts de même ordre de grandeur entre la France et les ÉtatsUnis que l’on regarde ces écarts en termes de croissance du revenu par tête comme précédemment ou en termes de croissance de la productivité. Ainsi, les États-Unis ont connu une croissance de la productivité du travail de 1990 à 1995 de 1,5% par an et de 1995 à 2000 de 2,7% par an selon Jorgenson, et al (2002) alors que l’économie française a exhibé un taux de croissance de 1,6% lors de la première période et de 1,1% lors de la seconde période selon Cette et al. (2002).

De même, Artus (2012) montre que la France a connu une augmentation de 5% de sa productivité totale des facteurs (PTF) de 1995 à 2005 alors que les États-Unis ont connu une croissance de l’ordre de 15%. La France a ainsi une croissance de la productivité plus faible que celle des Etats-Unis ce qui expliquerait la faible croissance économique française après les années 70.

Cette faible croissance relative de la productivité s’observe dans d’autres pays européens tels que l’Espagne ou l’Italie. Ces pays ne semblent pas avoir réussi à bénéficier du progrès technique issu des innovations et, particulièrement, des Technologies de l’information et de la Communication (TIC), aussi bien que les États Unis ou les pays scandinaves. Mais quels enjeux découlent de cette course aux gains de productivité ? Toujours selon le rapport Artus (2012), la France est assujettie à une chute de la qualité de ses produits sur la scène internationale, qui, elle-même induit une perte de parts de marché et une chute du poids relatif de l’industrie française sur la scène internationale.

La faiblesse de l’industrie française est-elle effectivement la clé du déclin de l’économie française par rapport à d’autres pays développés ? Lorsque l’on regarde l’industrie, il apparaît que nous avons eu une désindustrialisation ces vingt dernières années en parallèle à la faible croissance française que ce soit  en productivité ou en revenu. Même si l’industrie reste un secteur important dans l’économie française représentant un quart de l’emploi et du PIB, elle a subi un recul sur 25 ans de sa part dans la valeur ajoutée (- 9 points) et de sa part dans l’emploi (- 9,4 points).

L’industrie mondiale a elle-même subi de fortes transformations avec l’avènement de nombreuses innovations ces vingt dernières années et la montée en puissance des pays émergents. L’évolution de l’industrie française reflète en partie cette réalité. Néanmoins, nous pouvons nous demander si la France fait face à des problèmes spécifiques de restructuration de son industrie. En effet, pourquoi sinon des pays qui ont une structure semblable à la France tels que les États-Unis, ou plus près de nous les pays scandinaves ou, plus récemment, l’Allemagne exhibent-t-ils de meilleurs performances ?

Une première hypothèse de travail est que la France n’a pas su tirer pleinement parti des gains de productivité permis par la révolution des TIC. Cette hypothèse a été largement explorée dans la littérature au travers de travaux qui ont cherché à quantifier le retard de certains pays européens, dont la France, par rapport aux USA en matière d’adoption et de diffusion des TIC.

Il est apparu que les États-Unis avaient été les pionniers dans l’adoption et la diffusion des TIC dans leur industrie. Selon le rapport de Thomas (2007), les USA apparaissent toujours en tête dans la diffusion des TIC tandis que la France n’apparaît qu’à la 18ème position.

Un certain rattrapage a pourtant eu lieu entre la France et plus généralement l’Europe et les USA au début des années 2000. Ainsi, selon le rapport de la commission européenne de 2006 intitulé Task-Force on ICT Sector Competitiveness and ICT Uptake, même si les entreprises européennes des secteurs des TIC dépensent moins en Recherche & Développement que leurs homologues américaines, ces secteurs exhibent une croissance en termes réels supérieure à celles des secteurs américains de 2000 à 2003.

Table des matières

Introduction générale
I Dynamique industrielle et croissance de la productivité.
1 Décompositions microéconomiques de la croissance de la productivité
2 Une application à l’industrie française : 1990-2006
II Structures de marché et ecience allocative.
3 Structures de marché et dynamique industrielle
4 Une approche quantitative de l’ecience économique
Conclusion générale

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