Action du groupe symétrique sur les polynômes

Action du groupe symétrique sur les polynômes

Les bases de l’anneau des polynômes étudiées dans ce chapitre apparaissent naturellement dans un problème ancien de géométrie algébrique, le calcul de Schu- bert. Le principe est de décomposer une variété géométrique en ce qu’on appelle des cellules de Schubert en fonction de leurs intersections avec un drapeau, c’est- à-dire un ensemble d’espaces vectoriels emboîtés. Le cas où la variété de départ est la Grassmannienne est en particulier décrit par Fulton [Ful84]. Les intersections de cellules de Schubert peuvent alors être obtenues par un calcul algébrique dans l’anneau de cohomologie qui correspond ici à un quotient de l’anneau des fonctions symétriques. En particulier, les images des cellules de Schubert sont les fonctions de Schur. Quand la variété de départ est une variété de drapeau, l’anneau de coho- mologie est un quotient de l’anneau des polynômes non symétriques et l’image des cellules de Schubert est donné par les polynômes de Schubert [LS82]. Malgré leur origine géométrique, ces polynômes se calculent de façon purement combinatoire et font intervenir les structures vues dans la partie I. En particulier, l’action du groupe symétrique joue un rôle fondamental. Les propriétés des polynômes sont donc fortement liées à celles du groupe symétrique et en particulier aux structures d’ordres que nous avons définies. Nous expliquons ici comment certains opérateurs particuliers, les différences divisées, permettent de retrouver les bases des polynômes multivariés et le lien ténu qui existe entre ces opérateurs et les ordres sur les permutations, en particulier l’ordre de Bruhat. Dans tout ce chapitre, nous nous appuyons sur le travail de Lascoux et Schützen- berger à qui l’on doit en particulier les polynômes de Schubert et de Grothendieck [LS82, LS83, Las90]. Si les différences divisées étaient connues depuis Newton, ce n’est que récemment qu’elles ont été utilisées dans le contexte de la combinatoire et de la géométrie, d’abord par Demazure [Dem73, Dem74] et Bernstein-Gelfand- Gelfand [BGG73] puis de façon plus systèmatique par Lascoux et Schützenberger [LS92]. On trouvera dans l’oeuvre de Lascoux de nombreuses explications sur les calculs à partir de différences divisées. On peut par exemple se reporter à l’his- torique des polynômes de Schubert [Las95]. L’article [LS96] que nous avons déjà largement utilisé dans le chapitre 2 fait le lien entre les différences divisées et les ordres sur les groupes de Coxeter. Par ailleurs, la thèse de Veigneau [Vei96] aborde la théorie d’une façon très similaire à la nôtre avec des explications détaillées de l’interprétation géométrique.

Dans le paragraphe 3.1, nous définissons l’action de base du groupe symétrique sur les polynômes et introduisons les différences divisées. Le paragraphe 3.2 est un rapide survol de la théorie des fonctions symétriques et plus précisément de la construction des fonctions de Schur par différence divisée. Dans le paragraphe 3.3, nous généralisons cette construction au cas des polynômes non symétriques. Enfin, dans le paragraphe 3.4, nous étudions plus particulièrement les différences divisées isobares π et ˆ π, générateurs de l’algèbre 0-Hecke. Les relations entre ces opérateurs permettent de faire le lien avec l’ordre de Bruhat vu en partie I. Le cadre formel que nous définissons ici sera la base de notre travail sur les polynômes de Grothendieck dans le chapitre 4.

Opérateurs sur les polynômes

Le groupe symétrique, et plus généralement les groupes de Coxeter, agissent fidèlement sur les vecteurs. Soit v = [v1, . . . , vn] ∈ Zn on a :où les opérateurs agissent sur leur gauche. On vérifie facilement que les relations définies dans les paragraphes 2.1.1 et 2.1.3 sont bien respectées. On rappelle que le groupe BCn (resp. i ) pour i 6= n. On a vu que Sn était legroupe des permutations, ce qui correspond bien à l’orbite du vecteur [1, . . . , n] . Dans le cas de BCn (resp. Dn), on obtient les permutations signées (resp. signéesDn) est engendré par s1, . . . , sn−1 et sB Ainsi, les polynômes sont vus comme des sommes formelles de vecteurs (les exposants). L’action du groupe symétrique sur les vecteurs nous donne alors une opération sur les polynômes. De la même façon, les groupes BC et D agissent La différence entre f et f si symétrise le polynôme f . C’est-à-dire que si g = f ∂i, on a gsi = g. Par ailleurs, le résultat est toujours un polynôme car la symétrie fait que f − f si s’annule pour xi = xi+1. Plus précisément, on peut écrire la différence divisée directement comme une somme.

 

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