Aspects bio-écologiques des moustiques vecteurs du virus de la fièvre de la vallée du Rift (FVR)

Généralités sur la FVR

La FVR est une maladie infectieuse virale (commune à l’animal et à l’Homme), dont l’agent causal est transmis par des arthropodes vecteurs, due à un virus de la famille des Bunyaviridae du genre Phlebovirus. Elle est responsable chez les ruminants d’une hépatite nécrosante, d’avortements et de mortalités périnatales (Morou, 1999) et chez l’Homme d’une pathologie allant d’un syndrome pseudo-grippal à des formes graves de syndromes ictéro-hémorragique, d’encéphalite et choriorétinite. Les lésions hépatiques dominantes et la sensibilité particulière des ovins à cette infection ont fait que la maladie est appelée hépatite enzootique du mouton ou hépatite nécrosante infectieuse (Seye, 1995 ; Morou, 1999). Selon l’origine où elle a été décrite pour la première fois et le caractère fébrile, elle est appelée FVR ou Rift Valley Fever (RVF en anglais).
Historique et répartition géographique : D’un point de vue chronologique et géographique l’apparition et la diffusion de la FVR se sont faites et en trois étapes : son émergence au Sud et à l’Est de Afrique, sa diffusion en Afrique du Nord puis en Afrique de l’Ouest, enfin son apparition en dehors des frontières de l’Afrique dans la Péninsule Arabique.

Importance de la maladie

L’impact de la FVR est avant tout économique avec des pertes qui peuvent être directes et indirectes. L’impact direct résulte des pertes animales et humaines : 100 000 ovins en Afrique du Sud en 1951, plus de 600 humains et un taux d’avortement de 70% en Egypte en 1977, 66 personnes en Arabie Saoudite, 121 en Yémen (MMWR, 2000), 224 humains en 1987 et 8 en 2015 en Mauritanie (Jouan et al., 1988 ; OMS, 2015). L’impact économique indirect englobe le manque d’apports protéiques (chute de la production), la perte de vue chez l’Homme, les pertes monétaires (Gueye, 2015) etc. Une liste de 13 impacts socio-économiques, induits par la FVR avec leurs caractéristiques générales a été définie par Peyre et al. (2013). Au Sénégal, l’évaluation de l’impact économique de la dernière épizootie de la FVR est estimée à plus de 3,5 milliards en 2013 (Gueye, 2015). L’importance médicale et vétérinaire découle de la morbidité élevée (jusqu’à 100 %) chez les petits ruminants domestiques avec 90-100% de mortalité chez les agneaux (Ayoub, 1988) et des avortements pouvant atteindre 100 % chez les brebis.

Les symptômes de la maladie

Les symptômes occasionnés par la FVR sont variables en fonction de la sensibilité de l’espèce animale, de la forme clinique, de la classe d’âge considérée, de la voie et la dose d’inoculation ainsi que de la souche virale (Smith et al., 2010). Chez les ruminants, les espèces ovines et caprines sont les plus sensibles à la FVR et la symptomatologie développée peut se présenter sous plusieurs formes : suraiguë (Gerdes, 2004), aiguë, subaiguë et inapparente (FAO, 2003). Seuls les jeunes carnivores domestiques sont sensibles à la maladie (Decome, 2011).
Chez l’homme, les patients atteints de la FVR peuvent présenter quatre formes cliniques dont la forme bénigne est la plus fréquente avec 96 à 97% des cas (Decome, 2011). Toutefois, une petite proportion de patients atteints de FVR peut développer une des trois formes graves : oculaire (0,5 à 2% des patients), méningo-encéphalite (<1% des patients) et hémorragique (<1%) (OIE, 2008a).

Description du cycle de vie des moustiques

Les femelles pondent leurs œufs dans des zones humides appelées gites larvaires. Après une période d’incubation, l’œuf éclos pour donner une larve qui subit trois mues larvaires et une quatrième nymphale pour atteindre le stade adulte ou imago. La vitesse d’éclosion dépend des conditions de température et de la qualité de l’eau (Pin-Diop, 2006 ; Soti, 2011). Les mâles meurent assez rapidement et se contentent de butiner les nectars des fleurs tandis que les femelles ont une longévité de l’ordre du mois (Cléments, 1992 in Soti, 2011), sont hématophages et partent à la recherche de repas de sang nécessaire à la maturité de leurs œufs après l’accouplement. Une fois le repas de sang pris, la femelle, après une période de repos, cherche un endroit propice à la ponte. Mondet et al. (2005) estiment que le cycle gonotrophique d’Ae. vexans et de Cx. poicilipes est de 3 à 4 jours.

Les Vecteurs principaux de la FVR

Le rôle des moustiques dans la transmission du virus de la FVR a été prouvé par l’isolement du virus chez de nombreuses espèces trouvées naturellement infectées et par la coïncidence des épizooties de FVR avec la présence de populations anormalement élevées de moustiques (Meegan et al., 1980 ; Linthicum et al., 1984 ; Fontenille et al., 1998 ; Diallo, 1995 ; Diallo, 2000 ; Jupp et al., 2002 ; Ndione et al., 2005 ; El Mamy et al., 2011).
En Afrique de l’Est, des enquêtes entomologiques menées au Kenya autour des mares temporaires, appelées « Dambos », ont permis d’identifier les vecteurs les plus abondants dans ces zones humides (Linthicum et al., 1984). Il s’agit des Aedes dont Ae. lineatopennis et Ae. cumminsii et les Culex dont Cx. pipiens et Cx. zombaensis. Dans une autre étude, la transmission verticale du virus de la FVR a été identifiée chez Ae. mcintoshi au Kenya par l’isolement du virus chez des mâles et des femelles n’ayant pas pris de repas sanguin (Linthicum et al., 1985). En 1977, Culex pipiens fut largement incriminé comme responsable de la diffusion de la maladie (Hoogstraal et al., 1979 ; Meegan et al.,1979) mais aussi Ochlerotatus caspius jouant un rôle vecteur enzootique avéré lors de l’épidémie d’Égypte. En Afrique du Sud, Stey et Schulz (1955) identifient Aedes. caballus et Cx. theileri comme vecteurs potentiels du virus de la FVR. Sur la Péninsule Arabique, en 2000, les études de Jupp et al. (2002) réalisées en Arabie saoudite ont permis d’isoler le virus en majorité chez Cx. tritaeniorhynchus, et chez Ae. vexans arabiensis.

Les espèces affectées et la notion de réservoirs

De nombreux mammifères domestiques et/ou sauvages sont touchés par la FVR, mais avec une réceptivité et une sensibilité qui varient en fonction de l’espèce et de l’âge de l’animal . La sensibilité des antilopes sauvages n’a pas complètement été démontrée, mais on pense que le virus est la cause chez ces animaux d’avortements et d’une mortalité accrue (FAO, 2003a in Decome, 2011). L’épidémie de 2010 en Mauritanie a démontré que les dromadaires, en plus des séroconversions, pouvaient mourir de la FVR (El Mamy et al., 2011). Le rôle de réservoir par la faune sauvage n’est toujours pas élucidé (Lefèvre, 2006 in Decome, 2011). Toutefois, le virus fut isolé chez le rat (Rattus rattus frugivorus) par Imam et al. (1979) et des rongeurs tels que les souris Arvicanthis niloticus et Mastomys erythroleucus pourraient servir «d’hôtes intermédiaires» et amplifier le virus lors des phases inter-épizooties (Diop et al., 2000).

Table des matières

INTRODUCTION
Chapitre I : Synthèse Bibliographique
I) Généralités sur la FVR 
I-1) Définition et Synonymes
I-2) Historique et répartition géographique
II) Etiologie 
III) Etude Anatomo-clinique 
III-1) Les symptômes de la maladie
III-2) Les Lésions
IV) Epidémiologie de la FVR
IV-1) Les espèces affectées et la notion de réservoirs
IV-2) Les Vecteurs principaux de la FVR
IV-2-1) Description du cycle de vie des moustiques
IV-2-2) Bio-écologie des principaux vecteurs de la FVR au Sénégal
IV-2-2-1) Bio-écologie d’Ae. vexans
IV-2-2-2) Bio-écologie de Cx. poicilipes
IV-3) Mode de Transmission
V) Diagnostics et Méthodes de Lutte 
V-1) Méthodes de Diagnostic
V-2) Méthodes de Lutte
V-2-1) Traitements
V-2-2) Prophylaxie
V-2-3) Lutte anti-vectorielle (LAV) ou Contrôle des vecteurs
Chapitre II : Matériel et Méthodes 
I) Matériel et Méthodologie de recherche 
I-1) Localisation des zones d’étude
I-1-1) Village de Diama
I-1-2) Village de Dandé Mayo Loboudou
I-1-3) Commune de Younouféré et villages environnants
I-3) Collecte des données entomologiques et leur conservation sur le terrain
I-4) Identification des spécimens
I-5) Identification de l’origine des repas sanguins
I-5-1) Animaux domestiques rencontrés et choix des amorces utilisées
I-5-2) Extraction des acides nucléiques (ADN)
I-5-3) Amplification du gène d’intérêt (le Cytochrome b) et électrophorèse
II) Analyses Statistiques
Chapitre III : Résultats et discussion
I) Résultats
I-1) Diversité spécifique des moustiques dans les différentes localités
I-2) Distribution et dynamique de populations des vecteurs du virus de la FVR
I-2-1) Distribution des populations
I-2-2) Dynamique de populations des vecteurs de la FVR et effets des paramètres environnementaux sur celle-ci
I-3) Etude de la préférence trophique et de l’âge physiologique des populations
I-3-1) Âge physiologique des populations
I-3-2) Préférences trophiques
II) Discussion
Conclusion et Perspectives 
Références bibliographiques 
Annexes 

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