Caractérisation et valorisation de sédiments fluviaux pollués et traités dans les matériaux routiers

La sédimentation est un phénomène naturel qui, à long terme, conduit à l’envasement des ports et des 525 000 km de cours d’eau que compte le territoire français. L’origine de la matière qui se dépose est soit naturelle (érosion des sols, décomposition de la matière végétales, etc.), soit anthropique. Il s’agit dans ce cas de rejets agricoles, industriels ou urbains qui peuvent contenir de nombreuses toxines inorganiques (métaux lourds) et organiques (hydrocarbure, HAP, PCB, etc.). La région Nord Pas-De-Calais, qui a connu son essor avec la révolution industrielle du début du XXe siècle en accueillant de nombreuses activités polluantes (industrie métallurgique, tannerie, etc.), est particulièrement touchée par ces problèmes environnementaux.

Afin de garantir un tirant d’eau suffisant pour la navigation et de restaurer les milieux naturels, il est indispensable d’entretenir les cours d’eau en effectuant régulièrement des opérations de dragage. En 2002, une étude recommandée par le Ministère de l’Aménagement du Territoire et de l’Environnement (MATE) portant sur l’historique des opérations de curage d’entretien des sédiments continentaux en France a estimée que le volume dragué chaque année était de 2,8 millions de m³ . Pour éliminer ces sédiments, il existe 4 grandes filières : la mise en décharge, le stockage, la valorisation et le traitement. Lorsque les boues de dragage sont fortement polluées, les 2 premières solutions nécessitent de mettre en œuvre certaines précautions afin d’éviter tout transfert des contaminants dans l’eau ou l’air. Cela engendre un coût important, monopolise des espaces fonciers devenus de plus en plus rares et soulève de nombreuses interrogations dans une politique actuelle de développement durable. La valorisation (épandage, utilisation en Génie Civil, etc.) confère aux sédiments une valeur incontestable mais elle n’est envisageable que si leur taux de contamination respecte les seuils réglementaires en vigueur. Afin de trouver une issue à ces problèmes environnementaux, de nombreux procédés de traitement ont vu le jour. Ils permettent, par différentes technologies (traitement biologique, physico-chimique, thermique, etc.), d’éliminer ou de stabiliser les polluants contenus dans les produits de dragage.

Solvay s’est associé à de nombreux partenaires industriels, institutionnels et universitaires pour développer son projet. L’ADEME (Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Energie) s’assure de la qualité environnementale du procédé. La société Bertin Technologie s’occupe de l’étude de faisabilité technique et économique ainsi que de la coordination globale du projet. Le BRGM (Bureaux de Recherche Géologique et Minière) réalise les études minéralogiques afin de comprendre les mécanismes mis en jeu lors du traitement. L’EMAC (Ecole des Mines d’Albi Carmaux) travaille à l’optimisation des différentes étapes du procédé. L’ENTPE (Ecole Nationale des Travaux Publics de l’Etat) effectue l’évaluation de l’impact écotoxicologique des sédiments traités. Les laboratoires de Génie Civil de l’Ecole Centrale de Lille et l’INSA de Toulouse s’intéressent quant à eux à la mise au point de tests environnementaux sur matériaux monolithiques ainsi qu’à la valorisation des produits traités. Enfin, des partenaires industriels tels que l’entreprise Eurovia et la Briqueterie Du Nord apportent leurs compétences et leurs moyens afin de passer de l’échelle du laboratoire à l’échelle industrielle.

L’accumulation des sédiments au fond des canaux, cours d’eau et plans d’eau est un phénomène naturel souvent amplifié par l’activité humaine. Le curage constitue alors une opération de restauration, d’entretien voire d’assainissement indispensable pour prévenir les risques d’inondation , pour rétablir le tirant d’eau pour la navigation mais aussi pour restaurer le milieu naturel. Ainsi, l’entretien des 525 000 km de cours d’eau que compte le territoire français nécessiterait l’extraction de près de 6 millions de m³ de sédiments chaque année [Schneider, 2001].

D’autre part, ces sédiments sont potentiellement pollués par des rejets industriels et agricoles ainsi que des eaux urbaines par temps de pluie. La région Nord Pas-De-Calais lourd de son passé industriel lié à l’exploitation du charbon et à l’industrie métallurgique est une des régions dont les cours d’eau sont les plus affectés par ces problèmes de pollution.

Faces aux volumes générés et à leur pollution, la problématique liée aux filières d’élimination des sédiments fluviaux soulève de nombreuses questions écologiques et économiques d’autant plus délicates à aborder que le cadre législatif est particulièrement flou dans ce domaine.

Dans le dictionnaire de géologie [Foucault & Raoult, 1980], les sédiments, plus communément appelés vases, sont définis comme « un ensemble constitué par la réunion de particules plus ou moins grosses ou de matières précipitées ayant, séparément, subi un certain transport ». La sédimentation désigne l’ensemble des processus par lesquels ces particules organiques ou minérales en suspension et en transit cessent de se déplacer.

On distingue 2 origines aux sédiments [Schneider, 2001], [Bertreau & al., 1993] :
– Origine endogène : les particules proviennent de la production autochtone du milieu. Il s’agit de débris de macrophytes comme les plantes aquatiques, les cadavres de microphytes et d’animaux ;
– Origine exogène : il s’agit des particules qui sont issues du ruissellement des eaux ou bien transportées par les vents. D’origine naturelles ou anthropiques, elles proviennent de l’érosion des sols, de la décomposition de matière végétale, de l’apport de matière en suspension, de matières organiques, de nutriments ou de micro-polluants en raison des rejets agricoles, industriels et domestiques.

Les vases sont constituées de 4 éléments principaux [Agence de l’eau (1), 2002] :
• La matrice minérale (quartz, feldspaths ou carbonates) ;
• La fraction argileuse (kaolinite, illite ou smectite) ;
• La fraction organique (débris végétaux, micro-organismes, acides fulviques et humiques) ;
• Une certaine quantité d’eau, présente sous différentes formes.

Les argiles sont des silicates d’aluminium hydratés qui présentent une structure cristalline en feuillets. Cette constitution permet l’hydratation des argiles, avec parfois un phénomène de gonflement très important. La plupart des argiles sont thixotropiques. Elles perdent leur rigidité en présentant le comportement d’un liquide lorsqu’elles subissent une sollicitation mécanique, et retrouvent leurs caractéristiques initiales au repos. La souplesse des liaisons entre les feuillets, permet aux argiles d’avoir un comportement plastique. La dernière propriété des argiles est l’interaction avec les espèces ioniques. En effet, les charges négatives des argiles sont neutralisées par des cations compensateurs. Or, ces cations peuvent s’échanger avec ceux présents dans le milieu et notamment avec les métaux lourds : c’est le phénomène d’adsorption.

En ce qui concerne la matière organique, on retrouve dans les sédiments tous les composés organiques naturels, issus des végétaux, des algues et des animaux, ou biosynthétisés par la microflore, ainsi que les colloïdes humiques. La décomposition de ces matières est très lente (plusieurs centaines d’années) et combine de très fortes propriétés tensioactives et complexantes. Les substances humiques colorent la vase en noir et interagissent avec la partie minérale, provoquant des conglomérations. En général, la proportion massique de matière organique est de l’ordre de 2 à 10 % pour les sédiments des cours d’eaux et elle est constituée à 60% de composés humiques [Schneider, 2001].

Enfin, la nature de l’eau contenue dans les vases, appelée « eau interstitielle » afin de la différencier de la colonne d’eau qui se trouve au-dessus, peut être répartie en 4 catégories :
• L’eau libre qui n’est pas liée aux fines ;
• L’eau capillaire, liée aux fines par des forces de capillarité ;
• L’eau colloïdale qui hydrate les colloïdes ;
• L’eau adsorbée qui est liée à la surface des particules et constitue un film autour d’elles.

Table des matières

INTRODUCTION GENERALE
CHAPITRE 1 : PRESENTATION DE LA PROBLEMATIQUE
1. Introduction
2. Les sédiments
2.1. Définition et origine
2.2. Constitution des sédiments
2.3. Granulométrie des sédiments
3. La pollution des cours d’eau
3.1. Origine et comportement des polluants
3.2. Nature des polluants
3.2.1. Les polluants organiques
3.2.2. Les métaux lourds
4. La problématique du dragage
4.1. La nécessité des opérations de dragage
4.2. Etats des lieux des quantités draguées
4.3. La gestion des sédiments dragués
4.3.1. Le contexte législatif
4.3.2. Les filières d’élimination
5. Le procédé de traitement Novosol®
5.1. Présentation générale
5.2. La phosphatation et le séchage (Unité A)
5.3. La calcination (Unité B)
5.4. Evaluation des performances du procédé Novosol®
6. La valorisation des STN dans les matériaux routiers
6.1. Avantages des matériaux routiers
6.1.1. La consommation de granulats en France
6.1.2. La diversité des matériaux
6.1.3. La tradition du recyclage et de la valorisation
6.2. Dans quel type de matériau routier peut-on valoriser les STN ?
6.2.1. Description d’une structure routière type
6.2.2. Rôle des différentes couches
6.2.3. Objectif de valorisation des STN
7. Conclusion
Liste des tableaux et figures
Bibliographie
CHAPITRE 2 : CARACTERISATION DES SEDIMENTS TRAITES
1. Introduction
2. Observations des STN
2.1. Observations macroscopiques et binoculaires
2.2. Observations au microscope électronique à balayage
3. Caractérisation physico-chimique des STN
3.1. Composition chimique et minéralogique
3.1.1. Chimie totale
3.1.2. Teneur en chaux libre
3.1.3. Analyse DRX
3.2. Caractérisation environnementale
3.3. Teneur en eau
3.4. Masse volumique
3.5. Porosité et surface spécifique
3.6. Potentiel hydrogène (pH)
3.7. Conclusion
4. Caractérisation en géotechnique routière
4.1. Granulométrie
4.2. Argilosité
4.2.1. Indice de plasticité
4.2.2. Essai au bleu de méthylène
4.3. Paramètres de compactage et portance
4.3.1. Essai Proctor Normal
4.3.2. Détermination de l’IPI
4.3.3. Résultats
4.4. Conclusion
5. Etude de la pouzzolanicité des STN
5.1. La pouzzolanicité
5.2. Mise en évidence expérimentale de l’activité pouzzolanique des STN
5.2.1. Principe
5.2.2. Confection des éprouvettes
5.2.3. Mise en œuvre des essais
5.2.4. Résultats et interprétations
5.3. Analyses thermogravimétriques (ATG)
5.3.1. Principe
5.3.2. Calcul de la teneur en chaux et en calcite
5.3.3. Application de l’ATG pour l’étude de l’activité pouzzolanique des STN
5.3.4. Origine de la pouzzolanicité des STN
6. Conclusion
Liste des tableaux et figures
Bibliographie
CONCLUSION GENERALE

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