Cours pdf finance durable et investissement responsable

Cours finance durable et investissement responsable, tutoriel & guide de travaux pratiques en pdf.

Qu’est-ce qu’un projet socialement responsable ?

Reste donc cette question centrale, que se pose tout acteur de l’ISR, qu’ils soient gestionnaire de fonds, investisseur individuel ou institutionnel, ou agence de notation extra-financière. Comment déterminer si un actif déterminé mérite d’apparaître dans un portefeuille ISR ? Evidemment, il est facile d’exclure l’industrie de l’armement ou du tabac, sur quelques principes généraux simples. Mais qu’en est-il du nucléaire, dont certains vantent les bénéfices sociaux en termes de lutte contre le changement climatique, ou les OGM, dont d’autres prétendent qu’ils sauveront l’humanité de la faim ? Comment juger d’une politique de délocalisation de la production vers des pays africains, dont certains d’entre eux ont bien besoin de ces nouveaux emplois pour résoudre des problèmes bien plus vitaux que ceux des pays riches ? Et l’industrie du téléphone portable, n’est-elle pas irresponsable de ne pas se préoccuper plus intensément des conséquences sanitaires des ondes qu’elle fabrique ?
Avec Nicolas Treich et d’autres chercheurs du Laboratoire d’Economie des Ressources Naturelles (LERNA/INRA) de la Toulouse School of Economics, nous développons les outils de l’évaluation sociale et environnementale qui permettent d’intégrer certaines de ces dimensions dans l’évaluation des impacts des investissements sur le bien-être collectif.7 Nos axes majeurs d’analyse sont centrés sur le changement climatique, l’énergie, l’eau, la sécurité industrielle et le risque. L’idée centrale consiste à ce que pour chaque projet d’investissement, l’ensemble des impacts sur l’ensemble des parties prenantes soit monétarisé, et qu’une comparaison des bénéfices sociaux avec les coûts sociaux soit réalisée. Il s’agit d’être le plus inclusif possible dans la prise en compte des impacts, en considérant le présent et l’avenir, les considérations sociales, environnementales, psychologiques, ou en termes de redistribution des richesses. Un projet sera dit socialement responsable, si les bénéfices sociaux excèdent les coûts sociaux. Une entreprise, définie comme un nexus d’investissements de toutes sortes, est socialement responsable si chacun des investissements qui la défini l’est. Cette approche, souvent appelée « analyse coût-bénéfice », a été appliquée depuis de nombreuses années pour l’évaluation socioéconomique des infrastructures (autoroute, TGV,…), de la politique sanitaire, et plus récemment pour l’évaluation du changement climatique (Stern Review, valeur carbone,…). Nous proposons de mettre en œuvre le même type d’approche pour l’évaluation des investissements privés.

a. La valeur Carbone

L’exemple du carbone, qui fait déjà l’objet d’un marché d’émission, est éclairant à plus d’un titre. Emettre du CO2, c’est faire porter des dommages aux générations futures. Il est donc socialement responsable d’essayer de réduire ces émissions. Comment ? Jusqu’où ? Prenons l’exemple d’une entreprise qui produit de l’électricité en installant des panneaux photovoltaïques. Elle permet de fermer une petite centrale au charbon en Allemagne. Ce projet est-il socialement responsable ? Une réaction simple consisterait à reconnaître qu’en éliminant une pollution néfaste pour autrui, ce projet est responsable, et devrait être intégrée dans les fonds ISR. Néanmoins, d’après des travaux de la DGTPE, ce type de projet a un coût social de 600 euros par tonne de CO2 évitée. L’analyse coût-bénéfice donne donc une réponse négative. Deux arguments peuvent être invoqués. Premièrement, la plupart des évaluations des impacts du changement climatique donnent un coût de la tonne de CO2 inférieur à 100 euros. L’investissement considéré appauvrit donc la Société dans son ensemble. Effectivement, il réduit l’intensité de la catastrophe climatique, mais le coût que devra payer le citoyen final, par le prix de son électricité ou par ses impôts, sera supérieur au dommage évité. De ce point de vue, mieux vaut investir dans l’éolien par exemple, dont le coût par tonne de CO2 évitée est 10 à 20 fois inférieur au photovoltaïque. C’est le deuxième argument en défaveur du projet photovoltaïque. Avec le même budget consacré aux efforts environnementaux, on pourrait réduire les émissions entre 10 et 20 fois plus en réallouant l’investissement vers l’éolien. Faire le bien environnemental ne suffit donc pas pour être ISR. Encore faut-il le faire du mieux possible. On pourrait aussi parler par exemple des efforts d’isolation thermique des bâtiments, des normes de construction automobile, ou de réduction de la vitesse sur autoroute.
Comment un fonds ISR doit-il évaluer la qualité environnementale d’un projet d’entreprise ? La bonne méthode consiste à fixer une valeur au carbone et aux autres polluants, à monétariser toutes ces émissions en utilisant cette valeur, et finalement à imputer cet élément extra-financier de la performance dans les coûts du projet. Il est crucial d’utiliser la même valeur du carbone dans l’évaluation de l’ensemble des projets disponibles pour la collectivité, de manière à ce que seuls les projets les plus efficaces soient entrepris. Cela ne laisse sans doute au photovoltaïque qu’un faible rôle socialement responsable dans les zones sans vent comme au Sud Sahel dans le cadre de l’alimentation en énergie des puits d’irrigation.
En France, la Commission Quinet mise en place par le Premier Ministre Fillon en 2008 a proposé que la valeur carbone soit fixée à 32 €/tCO2, et que cette valeur croisse au taux d’intérêt pour atteindre 200 €/tCO2 en 2050.

b. Valeur de la vie

Dans les années 70, Ford développa un nouveau modèle de voiture bas de gamme, la Pinto, qui avait son réservoir d’essence à l’arrière. Ce réservoir pouvait exploser en cas d’accident par l’arrière. Ford avait estimé que ce risque pouvait être évité en réalisant une modification dans la structure du modèle qui aurait coûté 110 millions de dollars de l’époque. Par ailleurs, les ingénieurs avaient estimé aussi que cela permettrait d’éviter 200 morts sur l’ensemble de la durée de vie de la série. En conséquence, Ford avait conclu au maintien du design initial. C’était évidemment socialement irresponsable, car cela faisait peu de cas de la vie humaine des clients de Ford. En l’occurrence, Ford estimait la valeur de la vie de chacun de ses clients à un montant seulement légèrement supérieur à un demi-million. Sinon, l’analysez coût bénéfice aurait conclu à la recommandation d’effectuer la modification de structure. Les tribunaux américains allouèrent d’ailleurs une pénalité de 1.2 milliards de dollars à Ford sur ce dossier, ce qui montre dans ce cas que l’irresponsabilité sociale ne paie pas nécessairement !..

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