De la méconnaissance de la spécificité juridique de l’image sportive

Au commencement, le sportif. Au commencement était le sportif, et le sportif était avec l’Homme ; et le sportif était l’Homme. Il était au commencement avec l’Homme. Tout fut par lui et sans lui rien ne fut. Ce qui était en lui était la force et la force était le droit des Hommes. La force constituait le sport des Hommes. Il y eut un sport révélé de et parmi tous : le football. Il vient, dans les présents travaux, pour servir de témoin, pour se faire le support d’un témoignage face à l’inadéquation de la norme. Cette norme s’entend du véritable droit, qui, en venant s’appliquer au footballeur professionnel exploitant commercialement son image sportive , s’applique à tout Homme pour régir la société dans laquelle il évolue.

Du terrain du jeu au terrain des affaires. Le footballeur professionnel peut avoir la volonté, ou son club, d’exploiter son image publique notoire à des fins commerciales. Dès lors, serait-il envisageable de qualifier le footballeur professionnel de sportif-interprète ? Autrement dit, serait-il possible de capitaliser contractuellement l’image footballistique en permettant au sportif professionnel de disposer d’un droit de propriété sur son image sportive ? A défaut de droit spécifique applicable, la liberté guide le cheminement du sportif sur les sentiers parfois incertains ou inconstants du droit commun. Cette réflexion mérite d’être conduite à la lumière des droits français et italien, sous les auspices du droit de l’Union européenne.

Du temps du jeu au temps par le droit. L’homme, a fortiori le juriste, cherche, depuis l’origine, à maîtriser les effets du temps, à les apprivoiser de la même manière qu’il cherche à donner à l’argile la forme qui lui sied. « Le droit dépend du temps comme le temps du droit se construit par le temps » . Le sport est marqué par le temps, qui lui donne sa cadence de jeu. Le droit applicable au sport est, de même, façonné en tenant compte du temps sportif, et notamment du temps nécessairement court de la carrière du joueur. Il tient aussi compte du temps de la société, c’est-à-dire de l’évolution économique et sociale.

Aujourd’hui, certains sports collectifs constituent plus une activité économique – c’est-à-dire lucrative – que de simples activités humanistes . Le football est l’exemple clef de cette évolution, au cœur de la mondialisation. Ainsi, la presse spécialisée ne s’interroge plus seulement sur la qualité sportive d’un joueur mais sur sa nationalité, sur la valeur économique de son transfert, sur son salaire, sur la gestion de son image, sur la protection juridique de son talent, et sur les conséquences fiscales desdites opérations. Ce sont les enjeux de notre temps, un temps où le droit est entré d’un coup d’un seul dans un univers à la base propice au respect de la discipline mais si peu préparé au contentieux. De même, l’Etat ainsi que ses démembrements et leurs représentants ont trop souvent considéré le sport au mieux comme un instrument du pouvoir, au pire comme un simple loisir, alors qu’il constitue une pièce maîtresse de l’économie.

Dans un premier temps, il conviendra de définir le sport. A priori, il semble aisé de définir, d’un point de vue purement commun, le sport. Il n’en est rien tant les dictionnaires ont donné, au cours du siècle dernier, des définitions mouvantes. Le Littré définit le sport par l’exemple en renvoyant à un nombre déterminé d’activités. D’autres, comme le Quillet en France ou le Devoto en Italie, ont mis en exergue les objectifs du sport, à savoir le développement de la force musculaire et des aptitudes psychophysiques, l’agilité, le courage, la maîtrise de soi, etc. En tout état de cause, le sport peut être défini comme une activité physique, récréative ou lucrative, constituée d’un ensemble de jeux individuels ou collectifs, donnant généralement lieu à compétition, et pratiquée en observant des règles précises et pré-établies en vue d’améliorer sa condition physique et sa santé psychique. Mais qu’entendre par activité physique ? Qu’est-ce qui est physique ? Une activité intellectuelle de concentration forte constitue-t-elle une activité physique ? Alors que le cerveau n’est pas un muscle, il est difficile d’affirmer qu’une activité intellectuelle soit une activité physique au sens strict du terme mais il est admis qu’une telle activité produise une fatigue physique. Si nous nous rapportons aux objectifs du sport (amélioration de la condition physique et psychique), la stimulation intellectuelle qui, assurément, améliore la condition physique et psychique, constitue-telle un sport ? Nous penchons vers une définition large du sport, qui englobe l’activité intellectuelle lorsqu’elle génère une fatigue physique et donnant lieu à une amélioration de la condition physique et psychique. Mais c’est une thèse subjective – au demeurant non partagée par le Conseil d’Etat français – et, si le juriste développe des interprétations subjectives du droit, il doit se fonder sur des repères objectifs. Interpréter subjectivement une norme subjective revient à éluder toute exigence de sécurité juridique. En effet, l’acception du sport sus-indiquée ne constitue pas une définition juridique, encore moins une définition légale. Qu’est-ce qu’une définition juridique ? C’est l’appréhension par le droit positif d’une situation de fait en vue de lui appliquer un régime propre ou de la rattacher à un régime déjà existant d’où il résultera des effets de droit susceptibles de contrôle par le juge. L’opération de qualification du juriste est ainsi essentielle. La France, comme l’Italie, se trouvent dans une situation pour le moins paradoxale. Alors qu’il est de l’essence de la loi d’ériger des définitions et du rôle du juriste de les mettre en oeuvre, il n’existe pas de définition légale du sport. Et les deux pays ne reconnaissent pas comme sports les mêmes disciplines. Le silence de la loi française comme italienne quant à la définition juridique du sport est problématique d’une part quant à la reconnaissance aléatoire d’un sport par l’Etat, d’où il résulte une inégalité injustifiée entre les sports et entre les Etats , d’autre part quant à la sécurité juridique des athlètes participant à un sport non reconnu. La seule définition juridique connue à ce jour du sport est celle posée par l’article 2-1-a de la Charte européenne du sport du 24 septembre 1992. Cet article dispose que « On entend par « sport » toutes formes d’activités physiques qui, à travers une participation organisée ou non, ont pour objectif l’expression ou l’amélioration de la condition physique et psychique, le développement des relations sociales ou l’obtention de résultats en compétition de tous niveaux. ». Adopté par le Conseil de l’Europe, ce texte n’a toutefois aucun effet normatif dans le droit interne des Etats. Il s’agit d’une définition certes juridique mais en aucun cas légale. En 1992, l’Europe a ainsi invité les Etats à se saisir de son initiative pour, à leur tour, définir légalement le sport. Ce vœu est resté sans effet quoique le sport ait été, depuis, de plus en plus appréhendé et encadré par le droit.

Table des matières

INTRODUCTION GENERALE
PARTIE I : DE LA MÉCONNAISSANCE DE LA SPÉCIFICITÉ JURIDIQUE DE L’IMAGE SPORTIVE
TITRE I – De la régulation étatique de l’image sportive
TITRE II – Du besoin de financement du football professionnel
PARTIE II : VERS LA RECONNAISSANCE EUROPEENNE DE LA SPECIFICITE JURIDIQUE DE L’IMAGE FOOTBALLISTIQUE
TITRE I – De la nécessaire libéralisation du traitement juridique de l’image footballistique en Europe
TITRE II – Du caractère minimaliste du cadre juridique européen applicable à l’exploitation de l’image des footballeurs professionnels
CONCLUSION GENERALE

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