Détection de processus écologiques à l’échelle du paysage aquatique

Déclin universel des poissons d’eau douce et altération des paysages
aquatiques

Au cours des dernières années, les humains ont rapidement et largement transformés les écosystèmes à l’échelle planétaire, en grande partie pour répondre aux besoins croissants en nourriture, en eau, en bois, en fibres et en carburant (MEA 2005). Ces transformations ont affecté de manière substantielle les milieux d’eau douce, qui font parties des écosystèmes les plus menacés au monde (Gleick 2003; Jenkins 2003; Collen et al. 2014). Alors que les poissons sont d’excellents indicateurs de l’état de santé des écosystèmes aquatiques (Harris 1995), près de 30% des espèces d’eau douce sont menacées d’extinction (Collen et al. 2014). Les grands fleuves, qui supportent une diversité ichtyologique élevée et qui se distinguent des autres rivières par la taille de leur bassin versant (> 900 000 km²) et leur débit annuel (> 7 500 m³.s⁻¹) (Bethemont 2003), ont vu plusieurs de leurs espèces décliner ou disparaître (par ex. Mississippi, Volga, Danube, Gange; Usova 2004; Holcík 2009; Sparks 2010; Das et al. 2013). Parmi les 97 espèces de poissons inventoriées dans la portion fluviale du Saint-Laurent, l’abondance de plusieurs d’entre elles d’importances écologique et économique telles que l’anguille d’Amérique, la perchaude et le grand brochet s’affaiblit (Smith et al. 2007; Verreault et al. 2012; de la Chenelière et al. 2014; Mingelbier et al. 2016).

La dégradation et la fragmentation des paysages aquatiques sont les principales causes du déclin et de la disparition des poissons d’eau douce (Aarts et al. 2004; Fischer et Lindenmayer 2007; Collen et al. 2014). Le paysage est défini comme un environnement hétérogène composé d’habitats ou d’écosystèmes en interaction (Dunning et al. 1992; Wiens 2002). L’approche des systèmes fluviaux sous l’angle du paysage permet de considérer l’ensemble du cycle de vie du poisson, de ses besoins en habitats souvent diversifiés, et de ses réponses aux changements d’habitats principalement engendrés par les activités humaines. En effet, les usages nombreux et variés tels que la consommation en eau, le développement de la pêche, des usages urbains, industriels, énergétiques, agricoles, de voies navigables et aussi touristiques ont profondément transformé les paysages aquatiques des grands fleuves en modifiant l’hétérogénéité et la connectivité de leurs habitats (Vincent et Dodson 1999; Hudon et Carignan 2008; Mingelbier et al. 2008b; Foubert 2015). C’est le cas du fleuve SaintLaurent, où la régularisation du débit a entrainé l’homogénéisation d’habitats aquatiques en amont de sa portion fluviale et a créé une rupture de connectivité en raison de la présence de barrages (La Violette et al. 2003). De surcroît, de nouvelles pressions, telles que l’introduction d’espèces envahissantes et les changements climatiques, s’ajoutent aux pressions existantes et complexifient le diagnostic de l’état de la ressource ichtyologique. La multitude des pressions qui agissent sur la dégradation et la fragmentation des paysages aquatiques souligne le besoin de quantifier l’ampleur de leurs effets sur l’organisation spatiale des communautés et des populations de poissons en vue de définir des unités de gestion écologiques.

Détection de processus écologiques à l’échelle du paysage aquatique

L’écologie du paysage a permis de faire le pont entre des disciplines bien établies telles que la géographie et l’écologie, et aussi entre la recherche et la conservation (Fausch et al. 2002). Ces concepts, tels que l’hétérogénéité et la connectivité, ont été traditionnellement développés dans les systèmes terrestres et ont récemment été adaptés aux systèmes fluviaux (Ward 1998; Fausch et al. 2002; Poole 2002; Wiens 2002). Bien que certains des concepts développés en écologie du paysage ne soient pas nouveaux en écologie aquatique, l’approche des systèmes fluviaux sous l’angle du paysage – ou « riverscape » – permet de les intégrer dans un cadre théorique plus large et spatialement plus réaliste et explicite (par ex. Falke et al. 2013; Massicotte et al. 2014).

Les caractérisitiques du paysage aquatique, tel que le degré d’hétérogénéité et de connectivité de ses habitats, s’expriment à des échelles spatiales (1 à 100 km) et temporelles (5 à 50 ans) variées et imbriquées (Fausch et al. 2002). Ainsi, les analyses multi-échelles visent à évaluer le rôle du paysage sur des processus écologiques qui agissent à différents niveaux d’organisation (par ex. Downes et al. 2000). Alors que les communautés de poissons peuvent reflèter les caractéristiques du paysage à l’échelle d’une portion de rivière (par ex. la présence de lacs fluviaux le long d’un continuum), le niveau d’organisation populationnelle permet d’évaluer le rôle du paysage à plus fine échelle spatio-temporelle .

Table des matières

INTRODUCTION GÉNÉRALE
0.1 Déclin universel des poissons d’eau douce et altération des paysages aquatiques
0.2 Détection de processus écologiques à l’échelle du paysage aquatique
0.2.1 Niveau d’organisation : la communauté
0.2.2 Niveau d’organisation : la population
0.3 Site d’étude : le fleuve Saint-Laurent
0.4 Objectifs et plan de la thèse
CHAPITRE I
SPATIAL ORGANIZATION OF FISH COMMUNITIES IN THE ST. LAWRENCE
RIVER: A TEST FOR LONGITUDINAL GRADIENTS AND SPATIAL
HETEROGENEITIES IN A LARGE RIVER SYSTEM
1.1 Abstract
1.2 Introduction
1.3 Methods
1.3.1 Study area
1.3.2 The standardized fish survey
1.3.3 Indices of diversity
1.3.4 Data analysis
1.4 Results
1.4.1 Fish communities collected
1.4.2 Longitudinal gradients
1.4.3 Longitudinal discontinuities
1.4.4 Spatial heterogeneities
1.5 Discussion
1.5.1 Longitudinal patterns
1.5.2 Spatial heterogeneities at different scales
1.5.3 Implications for management
1.6 Acknowledgments
CHAPITRE II
THE MANY FACETS OF CONNECTIVITY: MODELLING THE EFFECTIVE
SPAWNING AND NURSERY HABITATS WITHIN A LARGE SPATIOTEMPORALLY VARIABLE RIVER LANDSCAPE (ST. LAWRENCE RIVER, CANADA)
2.1 Abstract.
2.2 Introduction
2.3 Methods
2.3.1 Study area
2.3.2 Habitat modelling from 1965 to 2013
2.3.3 Temporal analysis
2.3.4 Spatial analysis
2.4 Results
2.4.1 Temporal analysis
2.4.2 Spatial structure of spawning and nursery habitats
2.4.3 Effective and non-effective spawning habitats
2.5 Discussion
2.5.1 The riverscape modelling
2.5.2 Spatial constraints on early-life habitat connectivity
2.5.3 Temporal variations of effective spawning habitats and hydrological
conditions
2.5.4 Two ecologically distinct regions
2.5.5 Implications for management
2.6 Acknowledgments
CHAPITRE III CONCLUSION 

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