EMERGENCE DU CONCEPT D’ENTREPRENEUR ET INTERDISCIPLINARITÉ DANS LE CHAMP DE L’ENTREPRENEURIAT

EMERGENCE DU CONCEPT D’ENTREPRENEUR ET INTERDISCIPLINARITÉ DANS LE CHAMP DE L’ENTREPRENEURIAT

La notion d’entrepreneur étant à la fois polysémique, équivoque et insaisissable, plusieurs chercheurs et académiciens ont mobilisé leurs efforts dans trois directions. Une première voie synthétise les définitions en vue de l’élaboration d’une théorie capable de décrire, d’expliquer et de prédire les phénomènes entrepreneuriaux à l’instar d’autres champs de recherche structurés. Une deuxième voie fournit une proposition de typologies de l’entrepreneur, préalable à toute tentative de théorisation. Et enfin une troisième voie profère la transition du problème définitionnel et la construction du cadre théorique pour surpasser la crise d’identité du champ de l’entrepreneuriat. L’objectif de ce chapitre n’est nullement de faire le tour de toutes les écoles de pensée qui se sont intéressées au personnage de l’entrepreneur, ni l’inventaire de toutes les disciplines qui se sont intéressées au champ de l’entrepreneuriat, et de dresser un tableau exhaustif des contributions disciplinaires multiples, mais d’en présenter un résumé succinct, qui met en exergue les grands traits de cette osmose entre le champ de l’entrepreneuriat et d’autres champs, en s’attardant davantage sur le courant économique. Notre chapitre sera structuré en deux volets. Dans un premier temps, on s’attachera à réexaminer la théorie économique de l’entrepreneur. Il est dès lors intéressant de remonter dans l’histoire de la pensée économique, d’une part, pour connaître l’émergence du concept et, d’autre part, pour comprendre l’évolution de la notion d’entrepreneur à travers les diverses écoles de pensée. Puis, dans un deuxième temps, nous aborderons le champ de l’entrepreneuriat, vu selon son caractère interdisciplinaire.

Emergence et évolution du concept d’entrepreneur

« Les besoins de l’humanité sont innombrables et variés mais la créativité humaine est sans limite. Dans toute société se trouvent des personnes habiles à transformer des rêves ou des occasions d’affaires en entreprises viables qui sauront satisfaire les besoins humains, on les nomme entrepreneurs. » Historiquement, la recherche en entrepreneuriat a été initiée à partir du 17ème siècle par des économistes tels que Cantillon, Turgot, Say, puis plus tard par Knight, qui ont focalisé leurs réflexions sur l’entrepreneur, dans un objectif, de présenter une conception claire de l’ensemble de ses fonctions et de son profil d’une part, et de son importance dans le développement économique, d’autre part. En effet, l’entrepreneur fait son entrée dans la théorie économique avec Cantillon dans son ouvrage Essai sur la nature du commerce en général publié en 1755. Il pose « pour principe que les propriétaires de terres sont seuls indépendants naturellement dans un État; que tous les autres habitants […] peuvent se diviser en deux classes, à savoir en entrepreneur et en gens à gages ; et que les entrepreneurs sont comme à gage incertains, et tous les autres à gage certains pour le temps qu’ils jouissent, bien que leurs fonctions et leur rang soient très disproportionnés […], et que le troc et la circulation de l’État se conduit par l’entremise de ces entrepreneurs » (Cantillon, 1952 [1755], p. 31). Ce dernier opère une division socio-économique en identifiant deux grands groupes : celui des indépendants, composé des aristocrates et des propriétaires terriens, et celui des dépendants qui sont à leur tour divisés en deux classes : à savoir les individus à « gage certain », c’est-à-dire les salariés, et les individus à « gage incertain », c’est-à-dire les entrepreneurs (Schmitt et al., 2009). Le marchand, le fermier ou l’artisan sont selon cette classification des entrepreneurs. Ainsi, Cantillon décrit l’entrepreneur comme un individu qui assume le risque inhérent à l’activité économique.

Cantillon fait de l’incertitude un élément fondamental de la définition de l’entrepreneur, qui « prend des risques dans la mesure où il s’engage vis-à-vis d’un tiers de façon ferme, alors qu’il n’a pas de garantie certaine de ce qu’il peut en attendre » (Boutillier et Uzunidis, 1999). Cette incertitude quant à l’issue de l’entreprise et la proportionnalité à l’achalandage (Allali, 2001) caractérise l’activité de l’entrepreneur, et cette prise de risque est justiciable d’une rémunération basée sur le produit de la terre, et en rapport avec la valeur du travail.

 

Cours gratuitTélécharger le document complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *