ETUDE DU COURANT DE LA RECHERCHE-ACTION

ETUDE DU COURANT DE LA RECHERCHE-ACTION

Ce travail s’inscrit fondamentalement dans la ligne de la recherche-action, car il y existe une volonté délibérée de transformation de la réalité. Selon Grawitz (1996) la recherche-action initialement élaborée par Lewin, «a pour objectif une production de connaissance: comprendre ce qui se passe, mais en même temps, elle implique la participation des membres du groupe concerné par cette recherche» (p. 747). CurIe (1949) pense que la recherche-action peut être utilisée pour modifier des conditions insatisfaisantes d’une entité sociale, car elle «vise non seulement à découvrir desfaits mais aussi à aider à la transformation de certaines conditions ressenties comme insatisfaisantes par la communauté» (p. 169). Notre approche méthodologique part de l’idée que la recherche doit conduire à un changement et par conséquent, ce changement doit être intégré au processus même de la recherche. Wacheux (1996) signale que, pour entrer effectivement dans le processus de la recherche-action, «le chercheur doit être responsable d’un projet de changement organisationnel. Le rôle d’expert conseil auprès des décideurs ou la participation aux activités de l’entreprise ne donne qu’un point de vueprivilégié pour observer» (p. 118). De même, mais en moins radical, Lewin (1944) considère que pour reconstruire une réalité, l’observation n’est p as suffisante et i 1exige que 1a convivialité so it réellement une expérimentation. Il attribue au chercheur un rôle d’expérimentateur qui doit modifier la réalité sociale afin de la connaître et il justifie sa décision en se fondant sur les études de leadership: «Tant que le chercheur se contente de décrire ce qu’est uneforme de leadership, ilpeut être sujet à des critiques stipulant que 1es catégories qu’il utilise reflètent simplement s es vues 129 subjectives mais ne correspondent pas aux propriétés réelles du phénomène étudié. Si le chercheur met en place des expériences où les formes de leadership varient, il s’appuie sur une définition opérationnelle q ui relie 1e concept « forme dei eadership » à des procédures concrètes qui permettent de créer cette forme de leadership ou à des procédures permettant de tester son existence. On établit la réalité à laquelle se réJêre un concept en agissant sur elle plutôt qu’en l’observant et cette réalité devient indépendante des éléments subjectifs de classification» (p. 9). Ainsi, Lewin propose la mise en pratique de recherches expérimentales, devant être organiquement liées à l’action du changement car les interventions qui doivent être réalisées doivent l’être en temps réel. Pour Lewin (1947), l’étude des effets du changement fait partie de l’action du changement: «Une manière efficace de diriger l’action sociale présuppose que soient développées des méthodes de recherche qui permettent de déterminer de manière satisfaisante la nature et la position des objectifs sociaux ainsi que la direction et le déplacement qui résultent d’une action donnée. Pour être effectives, ces méthodes doivent être liées à l’organisation de l’action» (p. 150). En ce qui nous concerne, nous justifions l’usage de la recherche-action dans le cas des entreprises hôtelières moyennes ayant une gestion familiale, par le fait que celles-ci ont besoin d’instruments de gestion pour se transformer et faire face plus efficacement à la concurrence. Alors comme le signale Wacheux (1996), «la méthode se justifie lorsque l’on peut concilier une volonté de connaissance et une exigence de transformation» (p. 119). Cette recherche réunit même l’ensemble des éléments qui, selon Liu (1997), définissent l’originalité et la pertinence de la recherche-action: «C’est la rencontre entre une intention de recherche (chercheurs) et une volonté de changement (usagers). Elle a un objectif dual: résoudre le problème des usagers et faire avancer les connaissances fondamentales. C’est un travail conjoint qui est un apprentissage mutuel entre chercheurs et usagers. Elle a un cadre éthique négocié et accepté par tous» (p. 85). Pour résumer, nous estimons que notre recherche vise trois objectifs: produire de nouvelles connaissances sur la situation des PME familiales, influencer la transformation de leur situation et produire des connaissances relatives à ces transformations. Ces trois objectifs fondent à nos yeux la pertinence de l’usage de la recherche-action.

SCHEMA DE RECHERCHE 

Comme nous l’avons indiqué auparavant, la première idée de ce travail s’est essentiellement concentrée sur l’impact de l’implantation d’un système formel de gestion sur la cohérence, la cohésion et la performance de l’équipe de direction. Nous avons voulu mettre à la portée des petites et moyennes entreprises participantes, des outils de gestion qui leur permettent de mieux faire face à la concurrence actuelle. L’intention de l’étude nous a mené à l’application d’un schéma de recherche expérimental. Le lien entre recherche-action et méthode expérimental a été en particulier analysé par Lesage (2000). La démarche expérimentale constituant une forme de méthode matérialisant la méthodologie de la recherche-action. Wacheux (1996) argue que la méthode expérimentale cherche à démontrer la relation qui existe entre la variable dépendante et la variable indépendante, à travers la vérification de l’hypothèse de recherche. La variable indépendante est appliquée ou manipulée par le chercheur: elle est la cause, tandis que la variable dépendante est celle qui reflète (ou pas) l’effet de la variable dépendante. Elle est l’effet obtenu. Les schémas expérimentaux (plans d’expérience ou plans expérimentaux) traduisent et opérationnalisent la mesure de l’impact entre les variables. On y utilise classiquement la représentation suivante: x= exposition du groupe au traitement par la variable indépendante 0= observation ou mesure de la variable dépendante R= sélection d’un groupe au hasard.

Tentative de schéma expérimental avec 2:roupe de contrôle

Nous avions d’abord pensé à utiliser un schéma de recherche expérimental classique avec mesure préliminaire et postérieure sur un groupe expérimental et un groupe de contrôle. Voici la représentation de ce schéma dans le tableau qui suit: 131 Première étape, Deuxième étape, Troisième étape, avant l’intervention pendant après l’intervention (mesure initiale) l’intervention (mesure finale) Groupe 01 X O2 Expérimental Groupe 01 O2 Contrôle Tableau 4.1 : Appréciation du schéma de recherche originellement proposé Où: 01 = Observation ou mesure initiale de la variable dépendante (comportements ou résultats que l’on désire affecter) 02 = Observation ou mesure finale de la variable dépendante x = Traitement ou application par la Variable Indépendante (dans ce cas, l’implantation du Plan d’Activités pour 1999 de chaque hôtel) L’interprétation des symboles indique que le premier groupe doit avoir subi une mesure de la variable dépendante (01), avant de participer à l’application de la variable indépendante (X), pour postérieurement subir de nouveau une mesure de la même variable dépendante (02)’ Le deuxième groupe se voyait imposer les mêmes mesures (01 et OÙ à la même période, mais ne participait pas au traitement de la variable indépendante (X). Nous avons déjà expliqué que nous espérions appliquer ce schéma expérimental à trois entreprises et à trois entreprises de contrôle. Nous aurions évalué les niveaux de cohérence, de cohésion de l’équipe de direction, les résultats économiques et commerciaux de chacun de ces groupes, avant et après l’implantation (ou l’absence) du Plan d’Activité. Mais nous avons signalé, dans la première partie de ce chapitre, que la méfiance et le manque de confiance des propriétaires d’hôtels avaient réduit à trois le nombre total d’hôtels participants. Malgré ces contretemps, le chercheur décidait de maintenir sa position et de réaliser la recherche en appliquant ce schéma de type expérimental, c’est-à-dire en considérant que l’expérimentation est la forme à travers laquelle le chercheur manipule une variable 132 (indépendante) puis en observe les effets sur la variable (dépendante) afin de démontrer l’existence ou l’intensité d’une relation causale entre ces variables à travers la vérification de 1’hypothèse. En sciences sociales, lorsque l’on utilise la recherche expérimentale, on fait généralement l’objet de nombreuses critiques. Les plus courantes sont les suivantes: L’expérimentation doit être réalisée dans un milieu contrôlé (un laboratoire) où il soit possible de manipuler et de mesurer les variables à observer. Or cela s’applique mal aux sciences sociales. Selon Grawitz (1990): «l’expérimentation provoquée [. ..] est rare dans les sciences humaines. Dans le cas où l’expérience est possible, la situation artificielle risque de modifier les réactions» (p. 448), tandis que Wacheux (1996) signale que «les plans d’expérience manipulent souvent les dimensions théoriques et les données empiriques pour parvenir à simuler le réel [… et] la reconstruction du réel demeure artificielle. Les situations reproduites en laboratoire sont construites et factices, les attitudes de l’individu ne sont pas identiques à la réalité, d’autres variables affectent les conditions de l’expérience et les déterminismes perçus du contexte interviennent peu en laboratoire» (p. 108). L’expérimentation est limitée à l’interprétation du phénomène observé: [bien qu’] elle contribue à la connaissance du « comment les événements se produisent », c’est-à-dire, « les mécanismes, les interactions, les résultats des situations …,{elle} ne donne pas de réponse sur la réalité des phénomènes. La réplication d’une réalité ne préjuge en rien des causes qui lui donnent naissance» (p. 106). Les résultats obtenus sont considérés comme difficilement généralisables à d’autres contextes. Grawitz (1990) attire l’attention sur les dangers encourus par les chercheurs qui prétendent généraliser les résultats obtenus à travers l’expérimentation en petits groupes: « croire [ …] que l’on peut transposer à 1a société, 1es résultats 0 btenus dans des groupes restreints, c’est méconnaître la nature des groupes et mouvements sociaux. En ce qui concerne la généralisation à d’autres groupes, il est évident que l’expérimentation dépend non seulement du type de situation vécu en laboratoire, mais aussi des conceptions de l’expérimentateur, de celle des volontaires observés et de leur culture» (p. 952). Pourtant et malgré les critiques qu’elle reçoit, « l’expérimentation est un des élémentsclés de la méthode scientifique» (Usunier et al. 2000, p. 47); et on la reconnaît comme «le moyen privilégié de prouver qu’une variable quelconque est la cause d’une autre variable … (…). E n effet dans 1es conditions normales de test d’une relation causale, 1e chercheur n e maîtrise pas les biais liés à l’existence de multiples causes pour expliquer un même 133 phénomène 0 u encore 1es biais 1iés au contexte de collecte de données. L’expérimentation fournit alors au chercheur un outil de collecte de données réduisant au maximum l’incidence de ces biais» (Thiétart et al., 1999, p. 362). Finalement, l’expérimentation sera toujours un recours pour le chercheur désirant obtenir des inférences causales de ses résultats. Usunier (2000) argue que l’on trouve normalement, des conditions propices à l’expérimentation dans le domaine de la psychologie, où les chercheurs utilisent, comme souris de laboratoire, les élèves de première année mais cela n’arrive généralement pas dans le domaine de la recherche du management, où les recherches avec schéma de recherche expérimental sont «infiniment plus dures à mettre en oeuvre en situation réelle, en entreprise,…, lorsqu’il n y a pas de population captive sur laquelle mener ces expériences» (p. 47)

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