Etude expérimentale et numérique de la propagation d’ondes de gravité en zone de déferlement

Etude expérimentale et numérique de la propagation d’ondes de gravité en zone de déferlement

La propagation

Définition 

Les vagues sont générées par le vent. En l’absence de vent, les vagues continuent à se propager librement, c’est ce qu’on appelle la houle. Aux abords des côtes, ces vagues sont modifiées par la présence du fond (pour des profondeurs inférieures à leur demi-longueur d’onde) et en particulier par la topographie du fond. Enfin les vagues déferlent sur la plage ou les hauts-fonds, récifs et autres, perdant toute ou en partie leur énergie par dissipation, génération de courants et surélévation du niveau moyen de la surface libre. Ces courants et les vagues sont en partie responsables de l’essentiel des mouvements de sédiments sur les plages : érosion, formation de barres…et des forçages hydrodynamiques sur les structures. La zone côtière peut ainsi se diviser en quatre parties (Fig. 2.3) : Fig. 2.3 – Schéma de la zone côtière (Abadie 1998) – La zone de levée (shoaling zone) : la vague est affectée par le fond et commence à se déformer. L’écoulement est considéré irrotationnel et les effets visqueux du fluide peuvent être négligés. – La zone de brisants s’étend du point où le profil aval de la vague devient vertical au point d’impact du jet. Des études montrent que l’écoulement dans cette 32 Présentation générale zone peut être encore considéré comme irrotationnel (Grilli et al. 1997),(Grilli and Horillo 1998). – La zone de déferlement correspond à la propagation de la vague déferlante jusqu’à la zone de swash. On distingue parfois deux zones différentes par la nature de l’écoulement. La zone de surf externe où l’écoulement est rotationnel, fortement instationnaire et turbulent dans toute la colonne d’eau. La zone de surf interne correspondant à un écoulement quasi-stationnaire comparable à un ressaut hydraulique. – La zone de « swash » ou jet de rive est la zone d’écoulement oscillant observé sur les plages. Lorsque les vagues se propagent sur de longues distances, l’hypothèse de la conservation de l’énergie totale n’est plus valable. Les effets de la dissipation d’énergie, due à la viscosité en volume et au frottement sur le fond, atténuent la hauteur de la houle. Il existe différentes approches pour étudier la propagation de la houle. L’approche déterministe décrit le phénomène de manière cinématique par la période et la longueur d’onde de la houle alors que l’approche spectrale conduit à superposer des ondes sinusoïdales et à en déduire une répartition d’énergie en fréquence et en direction. Ceci permet une meilleure représentation des houles réelles, par contre l’information sur les phases est perdue (on les appelle également méthodes à phases moyennées). 

Approche déterministe

 Les modèles de propagation de la houle sont un moyen d’investigation pour comprendre les processus physiques induits par la propagation et le déferlement des vagues. Christensen et al. (2002) proposent une revue des différentes méthodes numériques actuellement utilisées pour l’étude du déferlement. Ainsi, on distingue les méthodes issues de la théorie cinétique, les modèles basés sur les équations de Boussinesq, les modèles basés sur la théorie des écoulements potentiels et ceux basés sur les équations de Navier-Stokes. Les méthodes issues de la théorie cinétique sont adaptées à l’étude des écoulements à phases dispersées où le fluide est représenté par un ensemble de particules en mouvement. En particulier, les méthodes SPH (Smooth Particle Hydrodynamics, Lucy 1977), récemment développées, ont été appliquées entre autres au déferlement (Monaghan 1994, Fontaine et al. 2000) et à la propagation de vagues (Shao and Yat-Man 2001). Elles sont simples à mettre en oeuvre et ne nécessitent pas de maillage, toutefois un grand nombre de particules est nécessaire pour une description précise de l’écoulement. Les modèles reposant sur les équations de Boussinesq sont basés sur les équations de continuité et d’Euler (pas de viscosité) intégrées sur la verticale. Ces modèles donnent une bonne description de la propagation du soliton, cependant le déferlement n’est pas paramétrisé à ce stade. Le déferlement génère de la vorticité et de la dissipation d’énergie qui peut être modélisé par l’ajout d’un terme dans l’équation de conservation de la quantité de mouvement. Cependant, ces modèles ne permettent pas de décrire l’écoulement avec précision. Les équations utilisées sont intégrées sur la verticale, il en résulte des difficultés à représenter les profils verticaux des champs de vitesses. Une autre façon de modéliser le déferlement est de simuler l’écoulement avec une méthode numérique basée sur la théorie des écoulements potentiels. Le principe de cette méthode sera abordé dans le chapitre 5.1. On considère un fluide irrotationnel, non visqueux et incompressible. Les travaux pionniers de LonguetHiggins and Cokelet (1976) sont consacrés aux développements d’une approche Lagrangienne-Eulérienne (Mixed Eulerian-Lagrangian, MEL) de suivi de surface libre combinée avec une formulation intégrale aux frontières (Boundary Integral Equation, BIE). Cokelet (1979) et Peregrine et al. (1980) ont utilisé la même méthode pour détailler l’écoulement interne avant le déferlement. Grilli et al. (1997) ont repris ce modèle et l’ont appliqué à la propagation d’une onde solitaire, générée par un piston dans un canal numérique sur une pente de 1/35. Yasuda et al. (1997) l’ont appliqué au déferlement d’une vague au-dessus d’un récif immergé. Cependant, ces méthodes sont uniquement applicables pour des configurations bi-dimensionnelles. Les problèmes de propagation d’ondes fortement non-linéaires requièrent des méthodes plus stables et adaptées. Des méthodes d’éléments frontières d’ordre élevées ont été développées pour résoudre les équations de l’approche MEL. Grilli et al. (2001) ont développé une méthode numérique en 3D pour la description de ces ondes fortement non linéaires au-dessus de topographies complexes. D’autres travaux (Guyenne and Grilli 2003), (Fochesato 2004) ont prouvé son efficacité. Ces méthodes sont précises et donnent des résultats satisfaisants jusqu’à l’impact du jet sur la surface libre. Ensuite, l’écoulement devient rotationnel, fortement visqueux, turbulent et diphasique. Ainsi les hypothèses de ces modèles ne sont plus valables. Une des meilleures façons de modéliser l’écoulement dans la zone de surf est de résoudre les équations de Navier-Stokes. Ces méthodes sont capables de modéliser des écoulements complexes tels que le déferlement et donnent de nombreuses informations comme le champ de vitesses, de pression et d’accélération sous la vague déferlante. Il existe plusieurs méthodes de suivi de surface libre appliquées au déferlement, détaillées dans le paragraphe 2.4.2. Pour modéliser la propagation d’une vague de la zone de levée jusqu’à la zone de swash, l’utilisation d’une méthode numérique basée sur la théorie des écoulements potentiels jusqu’à la zone de déferlement couplée avec une méthode numérique de type VOF permet de combiner les avantages des deux modèles. 

Approche spectrale

 L’approche spectrale concerne la description des états de mer par une répartition d’énergie en fréquence et en direction. Pour cela, différentes théories de houle ont été étudiées (Horikawa 1988), (Bonnefille 1992). En profondeur infinie, le modèle de Stokes au premier ordre ou d’Airy est le plus utilisé. Il repose sur l’hypothèse d’une onde de « faible » amplitude ce qui revient à négliger les termes non linéaires. Ainsi pour une houle réelle, la déformée de la surface libre s’exprime comme une somme de modes linéaires se propageant à leur propre vitesse (onde dispersive en fréquence). Cette méthode est la plus classique car elle est relativement simple et offre une information globale intéressante. De plus, pour des houles réelles, elle permet une représentation de l’état de mer par une superposition de ces houles par une description spectrale. 2.3 Instruments de mesures 35 Cependant, en zone littorale, la houle devient de plus en plus cambrée, ainsi les effets non linéaires ne peuvent plus être négligés et cette méthode n’est alors plus valable. Les formulations de Stokes aux ordres supérieurs pour les profondeurs intermédiaires, infinies ou celles en “eau peu profonde” prennent en compte ces effets non linéaires tant qu’ils restent assez faibles. Par exemple, la théorie de Stokes au troisième ordre fait apparaître que l’onde est aussi dispersive en amplitude (voir section 3.1, page 57). En eau peu profonde, les effets non linéaires sont de plus en plus importants. Bien que la dissipation par frottement au fond augmente à l’approche de la côte, les modèles analytiques supposent encore que le fluide est parfait et l’écoulement, dans les conditions eau peu profonde, reste quasi-hydrostatique jusqu’au déferlement. Cette approche est donc bien adaptée tant que les effets non linéaires restent peu importants. Pour des houles fortement cambrées ou en eau peu profonde, une approche déterministe sera plutôt utilisée.

Table des matières

1 Introduction
2 Présentation générale
2.1 Généralités sur la houle
2.2 La propagation
2.2.1 Définition
2.2.2 Approche déterministe
2.2.3 Approche spectrale
2.3 Instruments de mesures
2.4 Le déferlement
2.4.1 Le déferlement glissant
2.4.2 Le déferlement plongeant
2.5 Le soliton
2.6 La réflexion
I Mesure de houles partiellement stationnaires en zones
côtière et littorale
3 Théories des ondes
3.1 Théories de Stokes
3.1.1 Théorie linéaire
3.1.2 Théories non linéaires
3.2 Interactions onde-onde
3.2.1 Houle partiellement stationnaire
3.2.2 Interaction onde-onde
3.3 Houle réelle et analyse spectrale
3.4 Méthodes de calcul des caractéristiques de la houle à partir de données de pression et de vitesses
3.4.1 Onde progressive
3.4.2 Onde partiellement stationnaire
3.4.3 Influence du courant
3.4.4 Houle réelle
3.4.5 Limites d’applicabilité
4 Applications
4.1 Mesures en bassin pour l’étude des effets non linéaires
4.1.1 Dispositif expérimental
4.1.2 Résultats
4.1.3 Conclusion
4.2 Mesures en bassin pour l’étude de l’influence du courant et applications in situ
4.2.1 Introduction
4.2.2 Wave reflection measurement
4.2.3 Validation from experiment with strong reflection
4.2.4 Application to the nearshore
4.2.5 Conclusions
4.3 Conclusion
II Modélisation du déferlement
5 Description des modèles utilisés
5.1 Modèle BIEM
5.1.1 Formulation mathématique
5.1.2 Résolution numérique des équations
5.2 Modèle Navier-Stokes/VOF
5.2.1 Formulation mathématique
5.2.2 Résolution numérique des équations
5.2.3 Méthode de suivi d’interface SL-VOF
5.3 Couplage BIEM/Navier-Stokes/VOF
6 Validation des modèles sur des cas d’études
6.1 Propagation d’une onde solitaire sur fond plat
6.1.1 Description du calcul
6.1.2 Dissipation d’énergie
6.2 Validation expérimentale
6.2.1 Introduction
6.2.2 BEM Model
6.2.3 VOF-NS Model
6.2.4 Applications
6.2.5 Conclusions
6.3 Complément : comparaison du champ de vitesses
6.4 Conclusion
7 Conclusion générale et perspectives
8 Annexe
Bibliographie

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