Evaluation ex-post d’actions de rénovation énergétique en maison individuelle

Comparaison par rapport aux caractéristiques des logements français pour lesquels ont été effectués des travaux

Ci-dessus, nous avons comparé les caractéristiques techniques des logements avant les travaux de l’échantillon MDE 52-55 avec celles des parcs régionaux et national de MI. S’agissant d’un échantillon de logements ayant réalisé des travaux d’efficacité énergétique, il nous semble également intéressant de comparer ses caractéristiques avec celles des logements français pour lesquels ont été effectués des travaux à même finalité. Pour se faire, nous utiliserons les résultats de la vague 201030 de l’enquête « Maîtrise de l’énergie » menée par la TNS Sofres pour l’ADEME (TNS SOFRES, 2012). Sur les 10 000 ménages enquêtés, échantillon conçu afin d’être représentatif des ménages et des logements français, 14,4 % ont déclaré avoir effectué durant l’année 2010 des travaux de MDE dans leur résidence principale (TNS SOFRES, 2012). C’est par rapport aux caractéristiques de ce sous-échantillon que nous allons comparer celles de l’échantillon MDE 52-55 avant les travaux. Toutefois, il faut noter dès maintenant l’existence d’un biais entre les chiffres fournis par l’enquête (TNS SOFRES, 2012) et ceux relatifs à l’échantillon MDE 52-55.

L’analyse faite par la TNS Sofres est à l’échelle des travaux, i.e. qu’un ménage ayant réalisé deux interventions (e.g. isolation des combles et remplacement du système principal de chauffage) est comptabilisé deux fois. Tandis que l’analyse que nous menons est à l’échelle des ménages, i.e. qu’un ménage ayant réalisé deux interventions n’est comptabilisé qu’une seule fois. Sachant que le nombre moyen d’intervention par ménage est de 1,6 dans le cadre de l’enquête nationale (TNS SOFRES, 2012), celle-ci surestime les caractéristiques des ménages et des logements pour lesquels ont été effectués plus d’une intervention. Par conséquent, les résultats des comparaisons seront à considérer avec précautions. De part l’implantation des logements étudiés dans les départements 52 et 55 (zone climatique H1, seulement deux villes présentant plus de 20 000 habitants : Saint-Dizier dans le 52 avec 25 526 habitants en 2010 (INSEE_b) et Chaumont dans le 52 avec 23 011 habitants en 2010 (INSEE_c)), l’échantillon MDE 52-55 ne peut représenter toutes les situations géographiques et climatiques du territoire français. Cependant, notons qu’en 2010 à l’échelle nationale, 61 % des travaux ont été effectués dans la zone climatique H1 et 53 % ont été réalisés dans des villes de moins de 20 000 habitants (TNS SOFRES, 2012). Par conséquent, les caractéristiques géographique et climatique de l’échantillon MDE 52-55 correspondent aux caractéristiques majoritaires à l’échelle nationale sur ces aspects.

En 2010 à l’échelle nationale, 75 % des travaux ont été effectués dans des MI dont 65 % ont été construites avant 1975 (TNS SOFRES, 2012). En cela, l’échantillon MDE 52-55 constitué uniquement de MI et parmi celles-ci d’une très grande majorité construite avant 1974 (62 %) est plutôt concordant avec ces caractéristiques. Par contre, les logements de l’échantillon MDE 52-55 présentent dans une proportion plus importante des surfaces de 150 m² et plus (38 %) qu’à l’échelle nationale (13 % des travaux effectués à l’échelle nationale en 2010 l’ont été dans des logements de 150 m² et plus (TNS SOFRES, 2012)). De même, l’échantillon MDE 52-55 présente des surreprésentations en termes de MI utilisant avant les travaux, comme énergie principale de chauffage, le fioul (39 % contre 23 % des travaux effectués à l’échelle nationale dans des MI l’ont été dans des MI chauffées au fioul (TNS SOFRES, 2012)) et le bois ou le GPL (23 % au lieu de 17 % (TNS SOFRES, 2012)). Ces surreprésentations entraînant des sous-représentations concernant les MI se chauffant, avant les travaux, principalement avec de l’électricité (17 % pour l’échantillon MDE 52-55 au lieu de 30 % pour l’enquête nationale (TNS SOFRES, 2012)) et du gaz (21 % l’échantillon MDE 52-55 au lieu de 30 % pour l’enquête nationale (TNS SOFRES, 2012)). Concernant les comportements des ménages et les consommations d’énergie avant travaux, faute d’informations apportées par l’enquête « Maîtrise de l’énergie », il n’est pas possible de faire de comparaison avec l’échantillon MDE 52-55. En conclusion, l’échantillon MDE 52-55 présente sur un certain nombre de caractéristiques générales une relativement bonne concordance avec les caractéristiques majoritaires des logements ayant effectué des travaux de MDE à l’échelle nationale mais des discordances avec ces dernières sur les caractéristiques plus détaillées que sont la surface et l’énergie principale de chauffage avant travaux.

Calcul des économies d’énergie unitaires annuelles

Nous entendons par économies d’énergie unitaires les économies d’énergie obtenues par un participant à l’opération après avoir réalisé une seule action ou plusieurs actions à la fois. Plus particulièrement, nous choisissons d’étudier les consommations totales (tous usages) d’énergie au périmètre du logement des participants (consommations recueillies au travers des enquêtes). En effet, suivre uniquement les consommations des usages impactés par les actions d’efficacité énergétique aurait nécessité la mise en place d’une chaîne de mesure. Au-delà de la difficulté technique, ces dernières par leur coût n’auraient pu être réalisées sur les tailles des échantillons qui ont été enquêtés. Par ailleurs, l’option alternative consistant à décomposer par usage, à l’aide de valeurs forfaitaires ou d’un modèle de calcul, la consommation totale déclarée par les ménages présente un risque d’introduire des incertitudes supplémentaires sur les consommations. Ceci d’autant plus qu’un grand nombre des actions analysées impacte plusieurs usages ou énergies à la fois sans que leurs interactions soient toujours simple à établir. L’inconvénient de l’approche retenue basée sur l’analyse des consommations totales est l’incorporation des variations aléatoires ou inexpliquées des consommations à l’échelle d’un logement. Ainsi celles-ci doivent être faibles devant les changements des consommations liés à l’action ou aux actions de MDE pour que les économies d’énergie calculées puissent être considérées comme significatives.

Selon le protocole IPMVP46 (option C, le site entier), si la période de suivi après travaux est inférieure à deux années, les économies doivent dépasser les 10 % des consommations totales concernées pour être significatives (EVO, 2009). Dans le cas des échantillons étudiés, une année de consommation d’énergie après les travaux est en moyenne disponible. Par conséquent, nous nous devrons de vérifier la satisfaction de ce critère dans le cadre de notre analyse. Disposant en moyenne d’une année de consommation après les travaux, nous calculons des économies d’énergie annuelles. Il est usuel de faire de la sorte afin d’étudier les consommations sur un cycle complet de saisons. Comme indiqué dans l’IPMVP, tout autre nombre de mois de suivi des consommations peut engendrer une sous ou une surreprésentation d’un mode de fonctionnement particulier (EVO, 2009). Par ailleurs, faute d’un suivi après travaux sur le long terme permettant d’évaluer la performance des actions dans le temps, nous préférons ne pas calculer les économies d’énergie sur la durée de vie des actions.

Dans le cadre de ce travail, les économies d’énergie sont calculées par rapport à la situation avant travaux. Afin de pouvoir juger de la performance réelle des actions réalisées et non seulement des changements des consommations entre les états avant et après travaux, nous sommes amenés à ajuster les consommations avant et après travaux à des conditions extérieures communes. Par conditions extérieures, nous entendons tout paramètre influençant la consommation d’énergie dont la variation est indépendante de l’action mise en place et prévisible car fréquente dans le temps47. Dans le cas de logements, le principal paramètre extérieur présumé changer entre les périodes avant et après travaux est le climat. Nous choisissons donc d’appliquer une correction climatique aux consommations afin de les ajuster à un climat dit normal correspondant à une moyenne sur plusieurs décennies. Ainsi, nous ne faisons pas le choix d’une utilisation du climat de la situation avant travaux comme référence commune car celui-ci nous semble trop arbitraire et par conséquent limitant dans la comparaison des résultats des différentes actions48. Dans la suite de ce paragraphe, nous reviendrons plus en détail sur la correction climatique appliquée. Ainsi les économies d’énergie unitaires annuelles sont calculées selon l’équation suivante : $$% = ‘%,() *+,-(. − ‘%,(0 *+,-(. (eq.1) avec EEi : économies d’énergie unitaires annuelles du cas i, en kWh, ‘%,() *+,-(. : consommation énergétique annuelle tous usages avant travaux ajustée à un climat normal du cas i, en kWh,49 ‘%,(0 *+,-(. : consommation énergétique annuelle tous usages après travaux ajustée à un climat normal du cas i, en kWh.50 Couramment l’ajustement des consommations d’un logement se limite à cette seule correction climatique.

Un certain nombre d’autres facteurs (e.g. nombre d’occupants), a priori indépendants de l’action mise en place51 et supposés être fixes, peuvent être amenés à changer entre les périodes avant et après travaux et ainsi changer les conditions de fonctionnement52. Comme ce type de changement n’est pas fréquent et ses conséquences sont le plus souvent difficile à prédire53, il n’existe pas de lois, simples et partagées, permettant de les estimer. Pour cette dernière raison, les lois d’ajustement des consommations à ces changements sont à déterminer en fonction de chaque étude. Dans le cas présent, nous tâchons d’étudier leur impact au travers d’une modélisation statistique de la consommation après travaux, de type « Change Model » (TECMARKET WORKS, et al., 2004 pp. 108-109) :

Nature des actions et nombre associé de cas pour l’échantillon MDE PACA Rappelons ici que par la définition même de l’opération MDE PACA (uniquement des travaux de rénovation du type multi-lots, voir Chapitre 2, sous-partie 2.2.1) et des critères employés de sélection des enquêtés sur la nature des travaux (uniquement multi-lots PAC et absence pour le second lot du remplacement des ouvrants, voir Chapitre 2, sous-partie 2.2.2), les actions présentes au sein de l’échantillon sont beaucoup plus homogènes que celles de l’échantillon MDE 52-55. Pour cette raison, les actions de l’échantillon MDE PACA peuvent être décrites à un niveau plus détaillé, d’autant que si nous avions retenu le niveau de description utilisé pour l’échantillon MDE 52-55, nous n’aurions plus qu’une seule catégorie : multi-lots PAC. La dénomination de ces actions d’efficacité énergétique est alors la suivante : la nature de la PAC installée suivi de la description du second lot réalisé (e.g. PAC air/eau + second lot) ou dans certains cas la réalisation de deux lots supplémentaires (e.g. PAC air/air + 2 autres lots). Les travaux les plus fréquemment présents au sein de cet échantillon sont avec 60 cas (soit 66 % de l’échantillon) le couplage d’une PAC air/air avec une isolation de la toiture. Dans le cadre de ces travaux d’isolation, nous retrouvons une majorité de renouvellement de l’isolation (53 cas soit 88 % des 60 cas).

Par ailleurs, grâce à une question ajoutée pour l’enquête MDE PACA, nous savons que dans 34 cas sur 53 (soit 64 %) ce renouvellement d’isolation se fait en conservant l’ancienne isolation. Les seconds travaux les plus fréquents avec 13 cas (soit 14 % de l’échantillon) sont l’installation d’une PAC air/eau couplée à un second lot. Ce second lot est à 54 % (7 cas) une installation d’un CESI et à 46 % (6 cas) une isolation de la toiture77. Ces derniers ont été regroupés dans une seule catégorie car séparément, les cas concernés sont trop peu nombreux. Ensuite, 10 cas (soit 11 % de l’échantillon) correspondent au couplage d’une PAC air/air et d’un CESI. Les travaux liés à une PAC air/air et deux autres lots et à une PAC eau/eau et un second lot, avec respectivement 6 cas et 2 cas, ne seront pas retenus par la suite de l’analyse en raison de leur trop faible nombre. S’agissant de la comparaison avec les types de travaux réalisés par les ménages français en 2010 (voir Figure 3.7), de par la présence pour tous les cas de l’échantillon MDE PACA de l’installation d’une PAC, la nature des actions réalisées est très différente de celle des travaux effectués à l’échelle nationale (1 % des travaux effectués (ADEME, 2011)). Parmi les seconds lots des actions de l’échantillon, la prépondérance d’une isolation de la toiture et l’absence du remplacement d’ouvrants accentuent la spécificité des travaux accomplis (voir Figure 3.7, isolation de la toiture : maximum 18 % des travaux effectués par les ménages français ; changement fenêtres avec double vitrage : 28 % des travaux effectués par les ménages français (ADEME, 2011)). Maintenant que nous connaissons les actions réalisées et leur proportion au sein des échantillons, intéressons-nous aux économies d’énergie qu’elles engendrent.

Table des matières

Liste des figures
Liste des tableaux
Liste des abréviations
Chapitre 1. Introduction
1.1. Contexte
1.2. Enjeux
1.3. Objet, objectifs et approche de la thèse
Bibliographie
Chapitre 2. Opérations étudiées, enquêtes réalisées et échantillons obtenus
Introduction
2.1. Opération « Ensemble, économisons l’énergie ! » en Meuse et Haute-Marne
2.1.1. Présentation de l’opération
2.1.2. Enquêtes réalisées
2.1.3. Nettoyage des données recueillies et échantillons disponibles
2.1.4. Description des situations avant travaux
2.2. Opération « Solution Bien-Etre » en Provence-Alpes-Côte d’Azur
2.2.1. Présentation de l’opération
2.2.2. Enquête réalisée
2.2.3. Nettoyage des données recueillies et échantillons disponibles
2.2.4. Description des situations avant travaux
2.3. Conclusions
Bibliographie
Chapitre 3. Evaluation ex-post d’actions de rénovation énergétique en maison individuelle
Introduction
3.1. Méthode de calcul des économies d’énergie
3.1.1. Calcul des économies d’énergie unitaires annuelles
3.1.2. Conversion des consommations énergétiques issues des enquêtes
3.1.3. Corrections climatiques
3.2. Quantification et qualification des économies d’énergie réalisées
3.2.1. Histogramme des économies d’énergie
3.2.2. Etude de la robustesse des économies d’énergie
3.2.3. Etude des économies d’énergie par action
3.3. Modélisation statistique de la consommation après travaux
3.3.1. Echantillons étudiés
3.3.2. Méthode statistique
3.3.3. Variables explicatives
3.3.4. Résultats
3.3.5. Discussions
3.4. Conclusions
Bibliographie
Chapitre 4. Analyses statistiques des écarts entre évaluations ex-ante et ex-post
Introduction
4.1. Echantillons étudiés, modèle de calcul ex-ante utilisé et résultats ex-post exploités
4.1.1. Echantillons étudiés
4.1.2. Modèle de calcul ex-ante utilisé
4.1.3. Résultats ex-post exploités
4.2. Quantification des écarts
4.2.1. Ecarts sur les consommations en situation avant travaux
4.2.2. Ecarts sur les consommations en situation après travaux
4.2.3. Ecarts sur les économies d’énergie
4.3. Modélisation statistique des écarts
4.3.1. Détection par modélisation statistique des sources d’écart entre consommations
calculées et observées : revue de la littérature
4.3.2. Modélisation des écarts de consommations avant travaux
4.3.3. Modélisation des écarts de consommations après travaux
4.4. Conclusions
Bibliographie
Chapitre 5. Pistes d’amélioration des modèles utilisés
Introduction
5.1. Pistes d’amélioration des évaluations ex-ante par modèle de calcul
5.1.1. Amélioration concernant l’estimation de la performance thermique des logements
5.1.2. Amélioration concernant la prise en compte de la gestion spatiale du chauffage par les ménages
5.1.3. Amélioration concernant la prise en compte des consommations de bois d’appoint très élevées
5.2. Pistes d’amélioration des modèles statistiques des écarts
5.2.1. Amélioration du modèle statistique des écarts avant travaux
5.2.2. Amélioration du modèle statistique des écarts après travaux
5.3. Conclusion
Bibliographie
Chapitre 6. Conclusion générale et perspectives
6.1. Conclusion générale
6.2. Perspectives
Annexes
Annexe 1 : Article soumis à la revue Energy and Buildings
Annexe 2 : Carte des zones climatiques de la RT
Annexe 3 : Liste complète des paramètres d’entrée de Diag Serie

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