Généalogie de la FPC l’engagement dans un « purpose » comme alternative de gouvernance

Généalogie de la FPC l’engagement dans un « purpose » comme alternative de gouvernance

La vague d’adoption de nouvelles formes juridiques est un phénomène juridique dont la portée ne se limite pas au droit. Elle s’inscrit dans un débat qui mobilise également les disciplines économiques et gestionnaires, celui du renouvellement de la gouvernance de l’entreprise. Par rapport aux voies explorées par les chercheurs comme par les praticiens, elle semble cependant porter des propriétés difficilement interprétables, et dont les implications sont encore à investiguer. Dans ce chapitre, nous avons choisi d’adopter une démarche généalogique à partir de l’une des formes juridiques, la FPC (1.1.), afin d’exhumer les choix de conception faits par les juristes à l’origine du projet de loi et mieux comprendre : Nous mettons en évidence que la propriété distinctive de la FPC, qui bouleverse les voies classiques du débat sur la gouvernance, est l’introduction du purpose comme engagement des associés. Nous résumons ainsi les raisons pour lesquelles ce purpose conduit à une énigme théorique (3.1.), et soulignons les questions de recherche que ce nouvel objet suscite (3.2.). A l’issue du chapitre 1, l’intérêt pour les nouvelles formes juridiques adoptées en Californie est confirmé : alors qu’elles semblent apporter des éléments nouveaux par rapport aux modèles de l’entreprise et de sa gouvernance discutés dans la littérature, très peu d’efforts théoriques ont pour l’instant porté sur ces formes. Les champs de recherche identifiés au chapitre précédent nous ont cependant apporté un riche vocabulaire pour décrire ces formes. Dans cette première partie, nous réaliserons donc une investigation plus poussée sur l’une d’entre elles, la Flexible Purpose Corporation (FPC), afin de disposer d’éléments suffisants pour comprendre et théoriser leur apport.

Pourquoi et comment étudier la Flexible Purpose Corporation ?

La FPC n’est certainement pas la première des formes juridiques adoptées pendant les dernières décennies à prétendre créer une structure adaptée aux entreprises à but lucratif souhaitant défendre des finalités supplémentaires non lucratives. Nous avons déjà évoqué au chapitre précédent les formes de Société à Finalité Sociale (SFS) belge, et de Community Interest Company (CIC) britannique, pour n’en citer que deux. Nous explicitons ici les raisons qui nous ont orienté sur le choix particulier de la FPC comme premier objet de recherche. En outre, il est rare qu’une forme juridique constitue un objet de recherche en sciences de gestion. Nous explicitons donc également les choix méthodologiques que nous avons pris pour réaliser la première partie de notre recherche. Plusieurs approches étaient envisageables pour comprendre les apports des nouvelles formes juridiques citées aux théories gestionnaires. L’une d’entre elles aurait pu consister à étudier l’ensemble de ces innovations selon une méthode comparative, et saisir les enjeux de cette vague à travers les différences et les points communs entre ces nouvelles formes, de façon à en tirer une typologie face à laquelle placer les modèles plus classiques. Quoique nous ayons également porté notre attention sur ces autres formes, ne serait-ce que pour en vérifier une certaine unité de revendication face aux formes conventionnelles, ce n’est pas l’approche que nous avons choisie. Nous avons préféré analyser plus en détail l’une de ces formes juridiques en particulier, la Flexible Purpose Corporation, et comprendre les enjeux d’une innovation particulière, pour les raisons suivantes.

Un regard rapide sur chacune des formes juridiques que nous avons évoquées montre facilement la grande diversité qui caractérise cet ensemble : malgré des ambitions que l’on peut considérer, en première approximation, convergentes, les propositions juridiques concrètes sont en fait très contrastées. De nombreux critères différencient ainsi ces formes juridiques : existence de règles sur la distribution de dividendes ou la dissolution de la société, restrictions sur les finalités acceptables, modes de création et régime juridique, droits et obligations des différentes parties, etc. Corrélativement, une grande variété d’acteurs (origines, statuts, motivations etc.) en est à l’origine. Ces quelques détails ne permettent ainsi pas de faire apparaître de façon flagrante une certaine unité au sein de cette vague de nouvelles formes. A l’inverse, l’étude de la généalogie de l’une d’entre elles, particulièrement si celle-ci est récente, peut permettre à la fois de montrer les nouveautés par rapport au cadre classique, et les liens qu’une telle forme entretient avec des propositions précédentes. Nous avons choisi d’étudier la FPC car ses promoteurs lui défendent une forme d’universalité : elle a été spécifiquement conçue pour être la plus proche possible d’une corporation californienne classique, tout en introduisant l’élément minimal permettant de poursuivre sa finalité sociale avec efficacité. Elle porte ainsi la double ambition de pouvoir concerner un maximum d’entreprises, existantes comme futures, et de répondre de façon simple à un certain nombre d’enjeux sociétaux.

 

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