Généralité sur les Cyanobactéries

Généralité sur les Cyanobactéries

Description, organisation cellulaire et reproduction : Au début du printemps, les eaux de surface des pays du bassin méditerranéen, enrichies en sels nutritifs durant l’hiver, voient leurs phytoplanctons se multiplier en progression géométrique profitant de l’énergie solaire renaissante et de la température hausse . Toutefois les pressions anthropiques conduisent à l’enrichissement excessif des eaux en sels nutritifs (essentiellement le phosphore et l’azote) , et par conséquent l’eutrophisation rapides des eaux stagnantes. Ce phénomène est devenu un problème planétaire croissant. La disponibilité des nutriments inorganiques est l’un des principaux facteurs qui contrôle la croissance, la biomasse et la composition taxinomique  du phytoplancton.
Ces derniers regroupent deux types d’organismes qui se diffèrent au niveau cytologique essentiellement par la présence (eucaryotes) ou l’absence (procaryotes) d’un noyau cellulaire , à ce jour, huit classes différenciés selon des critères morphologiques, cytologiques, biochimiques et reproductifs sont recensées dans les milieux aquatiques , entre autres les cyanobactéries.
Les cyanobactéries vivent à l’état séparé (unicellulaires), en colonies ou en filaments. Les formes unicellulaires peuvent être sphériques, ovoïdes, coccoïdes, en bâtonnets, ou irrégulières . Les cyanobactéries pluricellulaires se présentent soit sous forme d’agrégats ou de colonies plus ou moins réguliers, soit sous forme de filaments . Les filaments peuvent être unisériés ou plurisériés, non ramifiés ou à vraies ou fausses ramifications, sans gaine ou avec gaine mucilagineuse homogène ou stratifiée . Les cellules organisées dans les filaments sont de formes sphériques, cylindrique isodiamétrique, plus courte ou plus longue que large .

Les Cyanotoxines

Les cyanobactéries forment, sous certaines conditions environnementales, des écumes en surface de l’eau appelées « blooms ». Le développement massif de ces blooms dans les eaux douces à travers le globe est devenu une vraie menace pour la santé humaine, mais aussi pour la faune et la flore aquatique, notamment à cause de la production des toxines accompagnant ces blooms à cyanobactéries .
Les cyanotoxines sont des toxines produites par 40 espèces répartissent en 22 genres potentiellement toxiques des cyanobactéries en tant que métabolites secondaires. Le terme secondaire signifie, d’une part, que ces composants ne sont pas nécessaires au métabolisme primaire (la photosynthèse, la respiration et la synthèse de macromolécules) et, d’autre part, que les composants biologiques n’ont pas tous un rôle connu . Orr & Jones (1998) suggèrent que lescyanotoxines de type microcystine et nodularine pourraient être des métabolites primaires, des composés azotés essentiels au métabolisme cellulaire, pouvant servir de transporteurs transmembranaire pour certains métaux

Classe des Cyanotoxines

Les cyanotoxines peuvent être classés en cinq groupes fonctionnels en se basant sur leurs effets biologiques, on distingue les hépatotoxines, les neurotoxines, les cytotoxines, les dermatotoxines et enfin les toxines avec un potentiel irritant (les lipopolysaccharides) .
Les hépatotoxines : Les hépatotoxines sont les plus impliquées dans les cas d’intoxication. Elles sont produites par diverses espèces appartenant principalement aux genres Microcystis, Anabaena, Planktothrix, Oscillatoria, Nodularia, Nostoc, Cylindrospermopsis et Umezakia. Elles peuvent être divisées en deux groupes selon leur nature chimique : des toxines de structure peptidique cyclique, microcystines et nodularines, et une toxine de structure alcaloïdique, la cylindrospermopsine.
Les neurotoxines : Elles ciblent la jonction neuromusculaire. Elles sont essentiellement produites par les genres planctoniques Anabaena et Aphanizomenon, mais également par le genre benthique Phormidium.
Les cytotoxines : Une cytotoxine hautement toxique soit par voie orale ou par voie orale ou par injection c’est la cylindrospermopsine . C’est un alcaloïde de 415 Da, produit principalement par Cylindrospermopsis raciborskii , Umezakia natans , Aphanizomenon ovalisporum  et Raphidiopsis curvata, possède une unité guanidine tricyclique .
C’est une molécule très polaire et très soluble dans l’eau, en solution sa demi-vie est supérieure à 10 jours. Briand et al., (2003), ont pu isoler deux congénères de cette molécule, une toxique dite la 7 épicylindrospermopsine et l’autre non toxique dite la désoxycylindrospermopsine.
Les dermatotoxines et les toxines irritantes La lyngbyatoxine A , la débromoaplysiatoxine et les aplysiatoxines sont des alcaloïdes retrouvés chez des cyanobactéries benthiques telles que Lyngbya majuscula, Oscillatoria nigroviridis et Schizothrix calcicola. Ces toxines sont responsables de cas de fortes irritations cutanées et d’inflammation gastro-intestinales en zones de baignade . La lyngbyatoxine A a par ailleurs une structure similaire à la téléocidine A produite par un actinomycète (Streptomyces) qui est un agent potentiel de promotion tumorale. Aplysiatoxines et débromoaplysiatoxine sont également de potentiels agents promoteurs de tumeurs et des activateurs de protéines kinase C .

Impact sur la faune

Un nombre important de cas d’empoisonnement est maintenant rapporté dans la littérature concernant les ovins et surtout les bovins . Georges Francis, chimiste Australien, fut le premier, le 2 mai 1878, à impliquer les cyanobactéries dans le décès d’animaux d’élevages quand il rapporta la mort de bétail, moutons, chevaux et porcs qui avaient consommé de l’eau contenant une efflorescence hépatotoxique de Nodularias pumigena dans le lac Alexandrina, à Milang, dans le Sud de l’Australie. Les intoxications reportées par Francis sont dues probablement à la nodularine-R. Les intoxications animales par des eaux contaminées avec des cyanobactéries toxiques ont fait l’objet de plusieurs études dans le monde. Les cyanotoxines peuvent entraîner des symptômes de morbidité ou causer la mort de mammifères, d’oiseaux ou de poissons qui ingèrent une quantité suffisante de cellules toxiques ou de toxines extracellulaires . Carmichael (1992) a rapporté la mortalité d’animaux ayant consommé de l’eau contenant de grands nombres (>106/ml) de cellules cyanobactériennes. Les animaux incapables de sélectionner leur nourriture comme les oiseaux et les poissons sont directement affectés à la fois par les hépatotoxines et les neurotoxines . La principale voie d’exposition des animaux aux cyanotoxines est l’ingestion. La microcystine-LR et la nodularine-R sont véhiculées par le système de transport biliaire dans le foie essentiellement, mais aussi vers les reins et l’intestin . Henriksen et al. (1997) ont rapporté une intoxication des oiseaux d’eau dans un lac au Dannemark suite à un fort développement de l’espèce Anabaena lemmermannii développant ainsi une neurotoxitose. Une mortalité de flamants roses a été enregistrée au lac Bogoria à Kenya suite à une exposition à des neurotoxines et des hépatotoxines de type microcystine . Récemment, Nasri et al., (2008) ont rapporté la mortalité de deux espèces de tortues Emys orbicularis et Mauremys leprosa dans le lac Oubeïra en Algérie suite à une efflorescence de Microcystis spp . Les concentrations en microcystines les plus importantes ont été détectées au niveau du foie représentant ainsi 87 à 98 % du total de microcystines détectés dans les organes étudiés (viscères et chaire).

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Contamination des réseaux trophiques par les cyanotoxines

Les organismes vivant dans/près des eaux où prolifèrent des cyanobactéries productrices de microcystines peuvent se contaminer de manière directe par celles dissoutes dans l’eau (ou adsorbées sur les sédiments) et par celles intracellulaires (en consommant des cyanobactéries toxiques), et de manière indirecte par les microcystines accumulées dans leurs proies (transfert trophique).
Contamination directes par les microcystines présentes dans le milieu:  Sous formes dissoutes ou adsorbées sur les sédiments ou de particules alimentaires, les MCs pénètrent dans les organismes via l’eau de boisson, la peau ou les branchies . De manière générale, il existe une relation allométrique pour la concentration de toxine dissoute tolérée et les petites espèces (algues, bactéries, protozoaires, etc.) ainsi que les macrophytes semblent plus sensibles que les espèces de moyenne (zooplanctons) ou de grande taille (macro-invertébrés et les poissons) . Les MCs inhibent la croissance et la photosynthèse de certaines espèces de phytoplanctons. Chez les macrophytes, l’absorption de ces molécules toxiques engendre une réduction des taux de croissance et de germination, induit des changements morphologiques (réduction du nombre des feuilles) et physiologiques (changement dans les ratios de chlorophylles a et b) et entraine un stress oxydant c’est le cas de Ceratophyllum demersum et Lemna minor . De même la toxicité des MCs dissoutes a été démontrée sur les protozoaires (réduction du taux de croissance des flagelles, inhibition du taux de respiration) . Par contre, les poissons se montrent globalement peu sensibles à des expositions de MCs dissoutes de concentration proches de celles des milieux naturels. De manière générale, les zooplanctons, les macroinvertébrés et les poissons se contaminent principalement par ingestion de cyanobactéries toxiques . Chez l’homme, Dawson (1998), suggère qu’une consommation régulière d’eau contaminée pourrait favoriser des cancers du foie et du tube digestif. L’OMS, en 1999, a fixé une concentration maximale des hépatotoxines de 1µg MC-LR/l d’eau potable.
Contamination directe par ingestion des cyanobactéries toxiques : De nombreux travaux mettent en évidence l’ingestion de cyanobactéries toxiques par le zooplancton (Rotifères, Copépodes et Cladocères), consommateurs primaires au sein du réseau trophique . Cependant, certaines espèces de Copépodes et de Rotifères présentent des adaptations comportementales (i.e. tri des souches non toxiques de cyanobactéries) qui augmentent leur capacité à coexister avec les algues bleu-vertes toxiques, c’est le cas des Copépodes. La sélection des particules alimentaires par filtrage actif est courantes chez les Copépodes , alors que la plupart des Cladocères (Daphnies) font un filtrage passif et sont incapables de trier les particules alimentaires . En présence de cyanobactéries toxiques, les Daphnies se protègent en inhibant leur filtration et en augmentant les rejets post-abdominaux, et diminuent fortement leur alimentation. Ainsi, en milieu naturel, les blooms sont souvent associés au déclin des populations de grands Cladocères et au développement des populations de Copépodes et Rotifères . Néanmoins, les études sur les zooplanctons sont nombreuses et parfois controversées du fait de l’hétérogénéité des souches de cyanophycées utilisées, et des larges différences entre les espèces .
Au sein des macro-invertébrés aquatiques (crustacés, mollusques et insectes), les données disponibles suggèrent que l’ingestion de cyanobactéries serait la voie prédominante d’intoxication . Liras et al. en 1998 ont trouvé les cyanobactéries dans l’estomac de 99% des écrevisses (Pacifastacus lemusculus) après un bloom massives des algues bleu-vertes. Les cyanobactéries toxiques ont aussi un impact écologique sur les bivalves car elles peuvent favoriser les espèces capables de trier les souches toxiques des non toxiques. Ainsi, certains bivalves ont la capacité de trier les particules ingérées et parfois rejeter sélectivement les cyanobactéries toxiques c’est le cas du Planctothrix agardhii qui est prélevés par Anodonta anatina mais son taux d’ingestion est faible car elle est fortement rejetée dans les pseudofaeces . Juhel et al., en 2006, ont remarqué que les dreissenes sont également capable de détecter la toxicité des cyanobactéries et éviter leur ingestion par réduction des taux de filtration et augmentation du taux de rejet.

Table des matières

I. Introduction Générale 
II. Synthèse Bibliographique 
II.1. Généralité sur les Cyanobactéries 
II.1.1. Description, organisation cellulaire et reproduction
II.1.2. Habitat et Ecologie
II.1.3. Paramètres de croissance
II.1.4. Classification
II.2. Les Cyanotoxines 
II.2.1. Classe des cyanotoxines
II.2.1.1. Les hépatotoxines
II.2.1.2. Les neurotoxines
II.2.1.3. Les cytotoxines
II.2.1.4. Les dermatotoxines et les toxines irritantes
II.2.1.5. Autres métabolites secondaires
II.2.2. Impact des Cyanotoxines
II.2.2.1. Impact sur la santé humaine
II.2.2.2. Impact sur la faune
II.2.2.3. Impact sur la flore
II.2.3. Contamination des réseaux trophiques par les microcystines
II.2.3.1. Contamination directes par les microcystines présentes dans le milieu
II.2.3.2. Contamination directe par ingestion des cyanobactéries toxiques
II.2.3.3. Accumulation de MCs et impact dans le réseau trophique aquatique
II.2.3.4. Contamination indirecte par ingestion de proies contaminées
II.3. Les cyanobactéries et les cyanotoxines : contrôle et moyens de lutte
II.3.1. Tests et techniques d’analyse
II.3.1.1. Tests biologiques
II.3.1.2. Tests biochimique et immunologique (PP, ELISA)
II.3.1.3. Techniques Physico-chimiques
II.3.1.4. Techniques Moléculaires
II.3.2. Contrôle et moyens de lutte
III. Matériels et Méthodes 
III.1. Présentation du site d’étude : Lac Oubeïra 
III.2. Les modèles biologiques 
III.2.1. La Carpe Commune Cyprinus carpio
III.2.2. L’Anguille européenne Anguilla anguilla
III.3. Méthodes d’étude 
III.3.1. Etude qualitative et quantitative des cyanobactéries récoltées au niveau du lac Oubeïra
III.3.2. Etude de l’impact des cyanotoxines sur les poissons
III.3.2.1. Variation de MC contenant dans les divers organes de poissons
III.3.2.2.Etude histologiques des prélèvements (Hould, 1984)
IV. Résultats et Interprétation 
IV.1. Etude qualitative et quantitative des cyanobactéries récoltées au niveau du lac Oubeïra
IV.1.1.Identification générique des cyanobactéries potentiellement toxiques au niveau du lac Oubeïra
IV.1.2.Etude quantitative des cyanobactéries identifiées au niveau du lac Oubeïra durant la période d’étude
IV.1.3.Etude de la dynamique temporelle des Cyanobactéries potentiellement toxique au niveau du lac Oubeïra
IV.2. Variation des concentrations en microcystines dans l’eau 
IV.3. L’identification des congénères des Microcystines par LC-MS/MS 
IV.4. Etude de l’impact des cyanotoxines sur les poissons 
IV.4.1.Variation de MC contenant dans les divers organes de poissons
IV.4.1.1. Chez l’anguille européenne Anguilla anguilla
IV.4.1.2. Chez l’anguille européenne Cyprinus carpio
IV.5. Interprétation des coupes histologique 
V. Discussion 
VI. Conclusion 
VII. Références Bibliographiques 
VIII. Annexes

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