Instrument-artefact-dispositif

Instrument-artefact-dispositif

En s‟appuyant sur les travaux de Rabardel, nous parlerons, dans ce chapitre, de l‟instrument, de l‟artefact. Puis, nous envisagerons les interactions hommes-ordinateurs. Nous traiterons les deux concepts de l‟instrumentation et de l‟instrumentalisation. Nous devons prendre tout cela en considération avant de proposer une façon pour intégrer les TIC dans notre pratique. Celle-ci aide l’apprenant à l’interaction et l’élaboration des activités avec les autres apprenants et l‟enseignant. Il est à constater que la communication à distance via des artefacts est passé par plusieurs étapes commençant par le télégraphe, selon Jutand déjà cité : « Puis le téléphone, puis la télévision, puis les satellites et les mobiles, le traitement automatique de l’information avec l’ordinateur et le logiciel, puis les microordinateurs, l’enregistrement de contenues sur les bandes magnétiques, puis les cassettes, les disquette les CD, créent les éléments d’une deuxième couche artefactuelle dédiée à l’information, à la communication et à la connaissance » (2013 : 23). Toutes ces technologies exigent une certaine maîtrise, Bruillard (2012) souligne que « la maîtrise est jugée nécessaire pour pouvoir prendre toute sa place dans la société actuelle. Il conviendrait de ne pas s‟enfermer dans une opposition stérile entre TIC et informatique (Tort et Bruillard, 2010 ; Bruillard, 2010), la maîtrise des outils requiert des connaissances informatiques ». En manipulant les machines, des interactions apparaissent. Deux domaines de travail scientifique peuvent alors être distingués pour les interactions qui se trouvent entre l‟homme et la machine, la machine et l‟objet : les interactions homme-machine relevant du domaine de la communication homme-machine et celles machine-objet étant celui de la robotique. Au cours des premiers et de troisièmes chapitres, nous avons expliqué que la situation l‟enseignement/apprentissage dans le pays est complexe, ainsi l‟intégration des TIC n‟est pas facile comme montrent Bertin et Gravé (2009 : 23) pour qui « certainement, l‟une des caractéristiques les plus marquantes du processus de médiatisation, c‟est-à-dire de l‟intégration de la technologie au sein de la situation d‟apprentissage, est la complexité du paysage ». Cela nécessite de trouver des solutions pour que nous puissions intégrer les TIC comme souligne De Montmollin (1996 : 189) « l‟ergonome n‟est pas le psychologue, ni le sociologue, car il doit non seulement observer et interpréter mais aussi résoudre des Instrument-artefact-dispositif 137 problèmes pratiques de conceptions et d‟améliorations ». Tricot et Nanard (1998 : 37) expliquent que l‟ergonomie peut se définir par « Un but à atteindre dans un environnement donné au moyen d‟actions ou d‟opérations ». Bertin distingue l‟ergonomie didactique des sciences traditionnelles et souligne la proposition de nouveaux modèles permettant d‟appliquer une pratique innovante : « L‟ergonomie didactique se distingue principalement des sciences traditionnelles, sur lesquelles elle se fonde toutefois, par un accent prononcé placé sur la recherche appliquée. La théorisation qu‟elle implique, en tant qu‟activité scientifique, vise à observer l‟existant pour tenter de distinguer quelques universaux à travers la diversité du paysage proposé. En retour, elle cherche à proposer, tant au chercheur qu‟au praticien, de nouveaux modèles, de nouveaux cadres de réflexion à partir desquels établir une pratique innovante, idéalement plus proche des objectifs linguistiques – quantitativement ou qualitativement – que les pratiques traditionnelles ». (Bertin, 2000 : 27). Bertin et Gravé (2009 : 31) empruntent à Ardouin (2007) la définition de la démarche d‟ingénierie envisagée comme « une démarche où le concepteur de formation a par des méthodes appropriées à Analyser, Concevoir, Réaliser et Évaluer des actions ou dispositifs de formation en tenant compte de l‟environnement et des acteur concernés ». En ce qui concerne cette ingénierie dite éducative ou pédagogique ou de formation, plusieurs auteurs ont tenté de la définir. Chaptal (1991), explique qu‟elle est une « activité de service visant à faciliter le travail de l‟enseignant, afin de lui permettre d‟utiliser dans de bonnes conditions les nouveaux moyens audiovisuels et informatiques ». Pour qu‟elle réponde aux besoins des enseignants, il faut formuler des conseils, mener des expertises, proposer des projets, préparer des actions et offrir l‟information et l‟assistance. Le Journal officiel du 11 septembre 1992 définit l’ingénierie éducative comme « l’ensemble des activités de conception, de mise en place, d’aide au fonctionnement et d’évaluation de structures de formation ». L‟association française de normalisation (AFNOR) développe la notion de l‟ingénierie de formation ainsi : « Ensemble des démarches méthodologiques cohérentes qui s’appliquent à la conception de systèmes d‟actions et de dispositifs de formation pour atteindre efficacement l’objectif fixé ». L‟association a fait une distinction entre cette ingénierie et l‟ingénierie pédagogique. Cette dernière se base sur la « fonction d‟étude, de conception et d‟adaptation des méthodes et/ou des moyens pédagogiques ». Nous devons nous poser les questions suivantes à propos du dispositif envisagé dans notre contexte : premièrement, quel dispositif pourrons-nous proposer à l‟université ? Ensuite, 138 comment organiserons-nous ce dispositif ? Pourquoi devons-nous penser à un dispositif spécifique ? Barbot (2002) se demande également : « Quelle adaptation à l‟apprenant s‟effectue ? Quelle est la marge d‟appropriation, de détournement laissée à l’usager ? ». Quant au terme de dispositif, nous constatons qu‟il est largement utilisé dans des domaines variés soit scientifique ou social. Ce terme prend des définitions multiples. Montandon (2002 : 5-17) montre que ce terme est « initialement issu du domaine technique, se caractérise toujours par un ensemble : ensemble d‟éléments […] mis en œuvre pour une intervention précise ». Il explique que le rapport au savoir est : « Rapport au monde, à l‟autre et à soi-même d‟un sujet confronté à la nécessité d‟apprendre ». Tenir compte de cet ensemble organisé de relations qu‟un sujet entretient avec tout ce qui relève de l‟apprendre et du savoir est par définition une des caractéristiques du dispositif : cette définition liminaire, qu‟il conviendra d‟approfondir, montre comment un dispositif, digne de ce nom, est une configuration finalisée, en vue de faciliter la construction des apprentissages, s‟appuyant sur ce réseau de relations pour les articuler à des contenus représentatifs ». (2002 :5). Zitton et al. (2013) définissent le dispositif comme « un assemblage intentionnel d‟éléments hétérogènes (instruments, méthodes, actions publiques, etc.) répartis spécifiquement en fonction d‟une finalité attendue ». En nous appuyant sur les caractéristiques de la notion de dispositif, nous serons en mesure de présenter, au cours de la troisième partie, celui que nous souhaiterons appliquer dans notre contexte.

Instrument-artefact

L‟usager est invité à utiliser un instrument qui est défini selon Larousse : « Objet fabriqué servant à un travail, à une opération ». Rabardel (1995 : 27‑95) le définit ainsi : « L‟usage par le sujet de l’artefact en tant que moyen qu’il associe à son action. Le point de vue qui sera pris est celui où les machines, les objets techniques, les objets et systèmes symboliques, c‟est-à-dire les artefacts, sont considérés en tant qu‟instruments matériels ou symboliques ». L‟instrument est décrit dans l’essentialité de la relation qui en est constitutive. De même, il explique que l‟instrument est une « entité mixte » comprenant un composant artefact et un composant schème. La notion d‟ »artefact », est définie selon Larousse comme : « Produit ayant subi une transformation, même minime, par l‟homme, et qui se distingue ainsi d’un autre provoqué par un phénomène naturel ». Rabardel (Ibid. : 4) l‟explique à plusieurs reprises en précisant : « Un terme alternatif, neutre, permettant de penser différents types de relations du sujet à l‟objet ou au système anthropotechnique ». Selon lui, « un artefact est donc tout objet technique ou symbolique ayant subi une transformation par l‟homme ». Rabardel définit l‟artefact (Ibid. : 50-51) comme : « Système technique ayant ses spécificités et considéré indépendamment des hommes ». Du côté de la logique du processus de transformation des choses, « le rapport aux artefacts peut-être centré sur les évolutions, les changements d‟états des objets (matériels ou non) qui sont traités par le système et sur lesquels le système agit ». Pour une troisième logique celle de l‟activité et de l‟utilisation, il montre que « l‟artefact prend place dans une activité finalisée du point de vue de celui qui l’utilise, il a alors un statut de moyen d‟action pour le sujet, un moyen qu‟il se donne pour opérer sur un objet. Ici le rapport à l‟artefact est appréhendé du point de vue du sujet, de son activité et de son action ». Rabardel (Ibid. : 95) résume qu‟un instrument est formé de deux composantes : « un artefact, matériel ou symbolique, produit par le sujet ou par d’autres et un ou des schèmes d’utilisation associés, résultant d’une construction propre du sujet… » Ces deux composantes sont associées l‟une à l‟autre, mais elles sont également dans une relation d‟indépendance relative. Les conceptions des artefacts et des instruments ne sont pas pareilles, mais d‟après Rabardel (op.cit 1995 : 4‑22), « dans la plupart des conceptualisations c‟est l‟artefact qui est 140 considéré de façon explicite ou implicite comme l‟instrument ». Cependant, comme d‟autres auteurs, il distingue trois pôles qui sont engagés dans les situations d’utilisation d’un instrument : « Le sujet (utilisateur, opérateur, travailleur, agent…) ; l’instrument (l’outil, la machine, le système, l’ustensile, le produit …) ; l’objet vers lequel l’action à l’aide de l’instrument est dirigée (matière, réel, objet de l’activité, du travail, autre sujet…).» Suite à une telle distinction, Rabardel & Vérillon (1985) proposent le modèle « S.A.I. » pour caractériser les classes de Situations d’Activités Instrumentées (Cf. Figure 8). Figure 8: Modèle S.A.I. : la triade caractéristique des Situations d’Activités instrumentées (d‟après Rabardel & Vérillon, 1985). 5.2 Interactions homme-ordinateur Dans le domaine des interactions homme-ordinateur, Kammersgaard (1988) cité par Rabardel (Op.cit. 1995 : 15) considère que « le poids excessif de la perspective “système” comme un problème sérieux posé pour le développement des “applications” : beaucoup des conséquences négatives de l’usage des applications au travail sont le résultat d’une attention insuffisante portée aux approches centrées sur l‟homme au travail ». D‟autre part, l‟utilisation de l‟instrument peut entrainer des moments propices comme montre Guichon (2012 : 73) : « La théorie de la genèse instrumentale (Rabardel, 1995 ; Rabardel & Pastré, 2005) s’appuie sur l’idée que les moments les plus propices pour observer le développement professionnel sont les moments de transition d’une situation à une autre ». Une gestion spécifique des objets se montre en utilisant l‟ordinateur. Rabardel (op.cit.1995: 44) souligne qu‟« en conception assistée par ordinateur (Rabardel & Beguin 1993 Beguin1994) nous mettons en évidence l’apparition d’une gestion spécifique des objets de l‟activité en tant que matière d’œuvre en fonction d‟une anticipation des productions futures et des instruments qui seront alors 141 disponibles ». Pour savoir quelle est la relation entre hommes-artefacts, un questionnement psychologique spécifique peut déterminer une telle relation de l‟utilisation de ces instruments dans le domaine de la vie quotidienne et celui du travail, pour le même auteur : « L‟idée de la nécessité d‟un questionnement psychologique spécifique des modalités et caractéristiques des relations des hommes aux artefacts est largement partagée, aussi bien dans le domaine de la vie quotidienne que dans celui du travail avec des instruments tels que les ordinateurs ». Ce questionnement psychologique apparaît clairement pour les activités qui sont en relation avec les systèmes techniques complexes. En ce qui concerne le modèle « S.A.I. » cité plus haut, des interactions peuvent exister entre : sujet-objet directe ou médiatisée par l‟instrument, sujet-instrument et instrument-objet, elles sont figurées dans la figure (8). D‟après cette figure, des interactions directes sujet-objet (S-Od), de multiples autres interactions doivent être considérées : les interactions entre le sujet et l’instrument (S-I), les interactions entre l’instrument et l‟objet sur lequel il permet d’agir (I-O), et enfin les interactions sujet-objet médiatisées par l’instrument (S-Om).

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