Considération et champ d’intervention de l’aménagement du territoire au cours du processus de planification du développement
Dans la littérature spécialisée, l’aménagement du territoire est une référence au cours des phases d’élaboration, d’exécution, de suivi et d’évaluation des plans de développement économique, social, culturel et environnemental. Dans la mesure où l’état des lieux et la prospective territoriale sont des maillons importants de la planification du développement. Cependant, l’aménagement du territoire, pour certains scientifiques, n’est autre que la phase de mise en route effective des plans de développement. De ce fait, la phase d’élaboration des plans d’actions est précurseur à l’aménagement du territoire. Toutefois, nous pensons que l’aménagement du territoire va au delà de l’élaboration du plan d’action. Selon nous, l’aménagement du territoire peut-être considéré comme la prise en compte de la tactique au cours de la phase d’élaboration des plans d’action. Il s’agit de considérer et d’intégrer les réalités du terrain dans le but de mener à bien les programmes et les projets de développement retenus au cours du processus de planification du développement (Marc-Urbain Proulx, 1992). Il est reconnu que le territoire n’est pas neutre et que chaque espace recèle aussi bien des potentialités comme des obstacles.
L’aménagement du territoire permet la considération des spécificités du territoire dans les politiques publiques. C’est ainsi que l’aménagement du territoire est défini comme la recherche d’une meilleure répartition des hommes en fonction des ressources naturelles et de l’activité économique sur un territoire donné (Eugène Claudius-Petit, 1950). Cette discipline sert, pendant le processus de planification du développement, à assurer la territorialisation des politiques publiques dans le but de promouvoir un développement participatif, durable et harmonieux du territoire national (MEEDDAT, 1995). Car il permet de répondre techniquement à l’une des cinq questions fondamentales au cours de la phase d’élaboration des stratégies de développement celle de savoir À quel endroit les divers biens et services seront-ils produits ou réalisés? Grosso modo, l’aménagement du territoire est un moyen indispensable pour une meilleure répartition spatiale des fruits de la croissance économique dans le but d’assurer un développement soutenu , harmonieux et équilibré du territoire. C’est sous cet angle que Jean-François Gravier (1947) trouve trois idées au contenu de la définition de l’aménagement du territoire. Il s’agit de la justice spatiale par la correction des disparités, de l’exigence économique et de la spécialisation fonctionnelle des territoires.
Les doctrines d’aménagement du territoire et les approches de développement
Si, depuis belle lurette, la confrontation idéologique entre les étatistes, les libéraux et les urbanophiles est certaine, il a été prouvé que la question sociale est au centre de cette dichotomie doctrinale en aménagement du territoire (Philippe Langevin, 2000). Il s’agit de coupler impérativement la justice sociale et la justice spatiale au cours du processus de planification du développement pour les étatistes. En bref, les mutations conceptuelles en 28 aménagement du territoire a permis de passer d’un modèle de régulation où l’État négocie uniquement avec les élus vers un modèle où l’État négocie et coopère avec tous les acteurs régionaux et locaux au cours des opérations de planification du développement, en tenant compte des aléas du marché (polycentrisme) (ibid.). Selon notre analyse, la discordance entre les orientations se situe autour de l’application du principe de solidarité nationale au cours des opérations de planification du développement. Toutefois, à travers les instruments d’aménagement et de planification spatiale tels que le schéma régional d’aménagement et de développement du territoire (SRADT), les schémas des services collectifs (SSC) spécifiques à chaque secteur et la directive territoriale d’aménagement (DT A), l’aménagement du territoire offre des dispositifs techniques et juridiques indispensables à la planification économique, sociale, culturelle et environnementale (ibid.).
Ces outils sont indispensables à la promotion du développement durable, de la selfreliance et de l’empowerment dans les différents paliers territoriaux. L’émergence de la planification stratégique du développement répond à cette dernière exigence. La planification du développement, en permettant de penser globalement l’aménagement du territoire à travers l’exécution des programmes et des projets de développement, habilite et crédibilise l’action régionale et locale (Didier Graillot; Jean-Philippe Waaub, 2006). Claude Lacour (2008) partage ce point de vue. Par contre, celui-ci affirme que la mondialisation s’érige parfois comme une contrainte à la gouvernance territoriale. Cependant, l’aménagement du territoire demeure encore la passerelle la plus crédible pour la fixation des actions de développement sur le territoire. La responsabilisation des acteurs territorialisés de développement au cours des exercices de planification du développement institutionnalise l’implication de ceux-ci dans la prise de décision sur le devenir et sur la gestion du territoire (Jean Lapèze, 2007).
En dépit de la pensée libérale axée sur la fin de l’État-gendarme et le règne sans partage du secteur privé, la territorialisation des actions de développement vise aussi à promouvoir un développement endogène basé sur l’authenticité spatiale, le territoire étant considéré comme une ressource (ibid.). Bref, une logique et une approche sectorielles de développement dans lesquelles l’espace est absent, ou neutre et passif sont très faillibles et limitées. En outre, l’approche territoriale en planification du développement permet d’instaurer une économie de proximité et une gestion participative des interventions de développement (Amédée Mollard; Sauboua Emmanuelle; Hirczak Maud, 2007). Ainsi, la dimension spatiale du développement permet de prendre en compte la multifonctionnalité des territoires au cours de l’élaboration des stratégies de développement et résout la sempiternelle dualité entre les approches macroéconomique et microéconomique au cours de l’élaboration des politiques publiques (ibid.). Néanmoins en référence à Jean Puech (2006, 2), les effets multiplicateurs directs et indirects liés à la crise des subprimes de 2007-2008 fragilisent les libéraux en repositionnant les étatistes et les urbanophiles au cours des exercices de planification du développement. En conclusion partielle, l’aménagement du territoire facilite la cohérence entre la vision globale et la vision régionale et locale au cours des opérations de planification du développement (Jean Lapèze, 2007).
Les faiblesses méthodologiques et politiques de la planification soviétique du développement
Les faiblesses de la planification soviétique du développement pouvaient être classées en plusieurs catégories. Il s’agit d’abord des faiblesses liées à l’environnement politique; ensuite des faiblesses d’ordre méthodologique et technique; enfin des faiblesses liées à la mobilisation et à la gestion des moyens matériels et humains indispensables à la planification soviétique du développement. S’agissant des faiblesses liées au paysage politique, nous pouvons relever la domination et la mainmise du parti politique sur tout le processus de planification du développement. Les instances supérieures du parti constituaient, en fait, l’ultime et l’unique centre de prise de décision. Ces instances politiques contrôlaient tout le processus décisionnel, d’où l’absence de débat élargi et constructif. Car les structures administratives et les unités de production étaient inféodées au parti politique.
Cette suprématie du parti politique sur toutes les institutions de l’URSS soulève des questionnements sur le non-respect des principes de démocratie participative, de l’absence de gouvernance dans les administrations publiques, dans les unités de production et dans les régions en général et au cours du processus de planification du développement en particulier. Pour Loïc Blondiaux (2005,120), la démocratie participative peut être perçue comme la garantie des principes de consultation , de l’information, de la concertation et de la délibération impliquant tous les acteurs de développement quels que soient la forme d’organisation , le type de participation et l’échelle territoriale ou l’échelon spatial. En résumé, la démocratie participative exige l’instauration d’une gestion de proximité des initiatives de développement et la mise en place d’assemblées, de conseils ou autres formes de participation au niveau local et périphérique (Bacqué Marie-Hélène; Rey Henry; Sintomer Yves, 2005). Le système politique et administratif soviétique très centralisateur, très monopolisateur et impératif ne favorisait pas l’éclosion de la démocratie participative dans cet ex-État du bloc de l’Est. La gestion de proximité de la chose publique, la représentativité et l’implication réelle de tous les acteurs de développement dans le processus de planification soviétique du développement étaient alors un leurre. Les faiblesses méthodologiques et techniques étaient les plus criantes. Dans ce registre, nous pouvons noter entre autres les faiblesses procédurales qui faisaient de la planification soviétique du développement un outil de gestion opaque. Ces faiblesses sont :
Le rôle des principes fondamentaux et de la procédure méthodologique dans le système français de planification du développement Le principe de concertation peut être considéré comme l’outil indispensable pendant l’élaboration des plans de développement français dans la mesure où ce principe a fait de la planification française du développement un instrument collectif au service du développement de la nation. Les acteurs de développement et particulièrement les citoyens étaient alors associés directement ou indirectement à l’élaboration et à l’exécution des plans de développement. Ces plans de développement n’étaient pas uniquement l’apanage de l’État et des services publics déconcentrés et décentralisés. Sous cet angle, les plans de développement étaient «l’expression véritable des intérêts et des voeux de la nation» (ibid., 153). Les organes de concertation, dans le cadre de la planification du développement, étaient des plates-formes de dialogue véritable entre toutes les catégories d’acteurs de développement. Le principe de concertation exigeait l’association des acteurs de développement à «un acte économique qui les concerne au premier chef, et de développer en eux un sentiment de participation fondé sur les faits» (ibid.). La concertation était alors le facteur fondamental de la réussite de la phase d’élaboration de planification française du développement.
En outre, le principe de concertation allait de pair avec celui de participation au cours des exercices de planification du développement. C’est pourquoi Atreize (1971, 55) insiste sur la philosophie qui régissait la planification du développement en France: Puisque l’exécution du Plan exigera la collaboration de tous, il est indispensable que tous les éléments vitaux de la nation participent à son élaboration. C’est pour cela que la méthode de travail proposée associe dans chaque secteur l’administration responsable, les experts les plus qualifiés, les représentants des syndicats professionnels (ouvriers, cadres et patrons) [ … ] C’est ainsi seulement que les problèmes pourront être réglés par un échange permanent d’idées entre l’administration et le pays, dans une économie concertée et non pas dans une économie dirigée à caractère bureaucratique ou corporatif Cette concertation favorisait la mise en place d’un environnement fertile à la coopération économique, technique et culturelle pendant tout le processus de planification du développement. Nous pensons que l’institutionnalisation des actions concertées et participatives est une voie idéale pour démocratiser et éjecter l’élaboration, l’exécution, le suivi et l’évaluation des plans de développement économique, social, culturel et environnemental des bureaux. La mobilisation des acteurs de développement centraux et périphériques, par le bais de l’approche participative, pourrait favoriser l’ancrage d’un plan de développement dans un territoire. Par ailleurs, le principe de concertation symbolisait le caractère concerté de l’économie française que certains préféraient dénommer «économie discutée, économie persuadée, économie orientée et économie contractuelle». La notion de concertation
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