La MP et l’apprentissage d’une L2

La MP, caractérisée par la capacité de reconnaitre et de mémoriser de nouvelles unités lexicales phonologiques, a fait l’objet de nombreuses études s’intéressant à l’influence des différences individuelles cognitives dans l’apprentissage d’une L2 (Aliaga-Garcia et al., 2010; Andrade & Baddeley, 2011; Cheung, 1996; French & O’Brien, 2008; Kormos & Sáfár, 2008; Martin & Ellis, 2012; Masoura & Gathercole, 2005; O’Brien et al., 2006; Service, 1992; Speciale et al., 2004). Cette capacité cognitive semble contribuer au développement des différentes compétences langagières en L2, et ce, dans divers contextes d’apprentissage et auprès de différents groupes d’âge.

La MP et l’apprentissage d’une L2 chez l’enfant

Cheung (1996), Masoura et Gathercole (2005) et Service (1992) ont examiné la contribution qu’apporte la MP dans la réussite de l’apprentissage du vocabulaire en anglais L2 auprès de jeunes apprenants lors d’un cours régulier d’anglais L2. Afin d’évaluer la MP et la compétence lexicale, les chercheurs des trois études ont utilisé une tâche RNM anglais, dans laquelle les participants devaient répéter des séries de non-mots anglais dans un ordre précis, ainsi qu’une tâche pour l’évaluation du vocabulaire, qui consistait, par exemple, à ce que les participants choisissent le mot anglais qui décrivait le mieux l’élément présenté. Les résultats des trois études ont indiqué une corrélation significative entre la tâche RNM et la tâche de vocabulaire, ce qui signifie que la capacité du jeune apprenant à répéter des non-mots dans l’ordre donné est liée directement à l’apprentissage de nouvelles formes lexicales. Ainsi, Cheung (1996), Masoura et Gathercole (2005) et Service (1992) ont constaté que la capacité de la MP d’un enfant peut prédire l’apprentissage de son vocabulaire en anglais L2.

Toutefois, Cheung (1996) et Masoura et Gathercole (2005) mentionnent qu’il existe une interaction entre la MP et les connaissances phonologiques/lexicales de la L2 déjà existantes dans la MLT. En effet, la vitesse d’apprentissage de nouveaux mots semble varier selon leur niveau de familiarité avec des mots déjà présents dans le lexique mental. De ce fait, l’influence de la MP dans l’apprentissage du vocabulaire est plus forte lorsque le matériel à apprendre a peu de relation avec les formes lexicales déjà emmagasinées dans la MLT. Ce résultat peut être causé par le choix de la langue utilisée pour la construction des non-mots dans la tâche RNM. Étant donné que ce sont des non-mots construits à partir de la L2, les connaissances linguistiques peuvent avoir influencé les résultats.

Une autre étude qui s’est intéressée au rôle de la MP dans l’apprentissage d’une L2 chez les jeunes apprenants est celle de French & O’Brien (2008). Contrairement aux études antérieures (Cheung, 1996; Masoura & Gathercole, 2005; Service, 1992), French & O’Brien (2008) se sont penchés sur l’apprentissage de la grammaire en anglais L2, lors d’un programme d’anglais intensif de cinq mois offert dans une école primaire pour locuteurs natifs du français. Ils se sont également intéressés à savoir si la capacité de la MP pouvait augmenter pendant l’apprentissage d’une L2. Pour ce faire, au début et à la fin du programme, ils ont évalué la MP, à l’aide des tâches RNM anglais et RNM arabe, et ont évalué la grammaire en L2 grâce à un test écrit ciblant spécifiquement des structures morphosyntaxiques, telles que les formes verbales, les formes d’interrogation ou de négation et l’emploi des déterminants possessifs. Les résultats de l’étude ont indiqué que la MP pouvait expliquer jusqu’à 27,9 % de la variance dans le développement de la grammaire en anglais L2 lors d’un programme d’anglais intensif de cinq mois. Ainsi, cette étude fournit la preuve que la MP contribue non seulement à l’apprentissage de nouvelles unités lexicales, mais également à l’apprentissage de nouvelles structures morphosyntaxiques dans un contexte développemental en L2.

Par ailleurs, un autre résultat intéressant de l’étude de French et O’Brien (2008) est celui concernant les tâches RNM anglais et RNM arabe. Bien que les deux tâches aient été fortement corrélées et aient prédit l’apprentissage de la grammaire en L2, elles ne semblent pas être toutes deux sensibles aux connaissances antérieures de la L2. Contrairement aux résultats de la tâche RNM arabe qui sont restés stables tout au long de l’étude, les résultats de RNM anglais ont augmenté de manière significative entre le début et la fin du programme. Ces observations démontrent que les deux tâches RNM fournissent la même mesure de la MP, mais que la tâche RNM arabe est indépendante des connaissances de la L2 déjà existantes dans la MLT. Ce résultat va dans le même sens que ceux des études de Cheung (1996) et de Masoura et Gathercole (2005) indiquant que les résultats des participants à la tâche RNM anglais sont influencés par leurs connaissances lexicales en L2. Ainsi, l’ensemble de ces études (Cheung, 1996; French & O’Brien, 2008; Masoura & Gathercole, 2005) révèle que les résultats d’une tâche RNM contenant des non-mots construits à partir de la L2 seront automatiquement influencés par les connaissances lexicales ou phonologiques de la L2 déjà emmagasinées dans la MLT.

Mis à part la réussite de l’apprentissage du vocabulaire et de la grammaire en L2, la MP influencerait également l’apprentissage de la production orale en L2 chez les jeunes apprenants, et ce, plus particulièrement pour les apprenants avancés. En effet, Kormos et Sáfár (2008) ont examiné la relation entre la MP et l’apprentissage des compétences orales en anglais L2 entre les apprenants débutants et avancés auprès de 121 jeunes apprenants hongrois dans un programme intensif de dix mois. À l’aide de la tâche RNM hongrois et d’une évaluation orale contenant une entrevue, une description d’images et une tâche de résolution de problème, les chercheurs ont pu observer une corrélation significative entre la MP et les performances orales en anglais L2 des apprenants. Ils ont également constaté que la MP jouait un rôle différent dans l’apprentissage de la L2 selon le niveau de compétence de l’apprenant. Plus précisément, ils ont trouvé une relation significative entre la MP et l’apprentissage des compétences de la L2 lorsque les jeunes apprenants étaient avancés. Ce résultat va à l’encontre des résultats de Cheung (1996) et Masoura et Gathercole (2005) dans lesquels la MP semblait jouer un rôle plus important lorsque les apprenants n’ont pas de connaissances antérieures de la L2. Toutefois, Kormos et Sáfár (2008) ont mentionné que les participants ont tous obtenu des résultats élevés à la tâche RNM hongrois. L’homogénéité de ces résultats a peut-être été causée par la présence des composantes articulatoires dans ce type de tâche. En effet, étant donné que l’étude de Kormos et Sáfár (2008) a évalué la production orale en anglais L2, les résultats de la tâche RNM ont probablement été biaisés par la présence d’articulation. Ainsi, les corrélations significatives qui pourraient exister entre la MP et l’apprentissage des compétences orales en L2 ont possiblement été difficiles à observer dans l’analyse des résultats en raison du choix de la tâche RNM qui impliquait également les composantes articulatoires.

Tout compte fait, ces études nous démontrent que la MP apporte une contribution importante dans l’apprentissage de la L2 chez l’enfant, que ce soit dans un contexte d’apprentissage traditionnel (Cheung, 1996; Masoura & Gathercole, 2005; Service, 1992) ou intensif (French & O’Brien, 2008; Kormos & Sáfár, 2008). Plus précisément, l’ensemble de ces résultats indique que la MP influence l’apprentissage du vocabulaire (Cheung, 1996; Masoura & Gathercole, 2005; Service, 1992) et de la grammaire en L2 (French & O’Brien, 2008) de même que le développement de la production orale en L2 (Kormos & Sáfár, 2008). Cependant, les études portant sur la MP et l’apprentissage de la L2 chez l’enfant contiennent certaines limites méthodologiques. Par exemple, en ce qui concerne la capacité de la MP, il est difficile de savoir si cette dernière peut changer avec le temps, puisqu’une seule parmi ces études a mentionné que la capacité de la MP reste constante au fil du temps (French & O’Brien, 2008). Par ailleurs, une autre difficulté apparue dans la mesure de la MP est le choix de la langue dans la tâche RNM. En effet, les connaissances phonologiques antérieures de la L2 ont parfois interféré dans la capacité de la MP en raison de l’utilisation de la L2 dans la construction des non mots dans la tâche RNM (par ex. Cheung, 1996; French & O’Brien, 2008; Masoura & Gathercole, 2005).

Table des matières

1 INTRODUCTION ET PROBLÉMATIQUE
1.1 Objectifs de l’étude
2 CADRE THÉORIQUE
2.1 Définition de la MP
2.2 Définition de l’AAO en L2
2.2.1 Les mesures temporelles et quantitatives de l’AAO en L2
2.3 Définition du contexte d’apprentissage : PIE
3 REVUE DES ÉCRITS
3.1 La MP et l’apprentissage d’une L2
3.1.1 La MP et l’apprentissage d’une L2 chez l’enfant
3.1.2 La MP et l’apprentissage d’une L2 chez l’adulte
3.2 La MP et le développement de l’AAO en L2 chez l’adulte
3.3 Questions de recherche
4 MÉTHODOLOGIE
4.1 Origine de l’étude
4.2 Contexte d’apprentissage
4.3 Profil des participants
4.4 Tâche d’évaluation de la MP
4.4.1 Tâche RSNM
4.4.2 Procédure
4.5 Évaluation de l’AAO en L2
4.5.1 Tâche de production orale
4.5.2 Procédure
4.5.3 Mesures temporelles de l’AAO
4.6 Analyse acoustique
4.7 Transcription orthographique
4.8 Analyse statistique des données
5 RÉSULTATS
5.1 La MP et le développement de l’AAO en L2 dans un PIE de courte durée
5.2 L’influence de la MP des apprenants sur leur développement de l’AAO
5.3 La variation de la performance à l’AAO au T2 et la capacité de la MP
6 DISCUSSION
6.1 Une corrélation positive et significative entre la tâche RSNM et les mesures temporelles de l’AAO
au T2 du PIE de courte durée (cinq semaines)
6.2 La capacité de la MP et le niveau global d’AAO au T1
6.3 Limites de l’étude
7 CONCLUSION

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