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Les conséquences pour le contexte socio-démocratique

Il existe un pluralisme de fait au sein de la société malgache, représenté essentiellement du moins aujourd’hui par les clivages ethniques.
Comme nous avons pu le voir, l’idée républicaine est née d’un sentiment d’appartenance à un commun. Cependant, cela a été essentiellement en réaction à la menace extérieure de la domination coloniale. Ainsi, la société reste plurielle en son intérieur.
La République peut trouver là une de ses plus belles formes d’expressions en ce sens que réussir à transcender les clivages pour s’unir autour d’une seule nation est un exemple suprême de démocratie.
Il a existé et il existe encore des Etats reposant sur des communautés qui s’affirment différentes. C’est le cas de Belgique, de la Suisse ou encore du Canada.
Certes, cette cohabitation n’est pas sans difficultés comme peut en attester au Canada la réclamation permanente d’une souveraineté par le Québec et « il n’est pas indifférent de
constater que deux de ces Etats sont fédéraux et que le troisième, la Belgique, à l’origine Etat unitaire, a été amenée à réviser sa Constitution dans un sens fédéral sur la base d’une répartition des compétences quiavantage considérablement les entités fédérées au détriment du pouvoir fédéral et qui reconnaît à celles-ci un large pouvoir dans le domaine des relations extérieures ».110
D’autres exemples montrent une difficile cohabitation comme dans le cas de Chypre ou encore l’explosion des nationalismes en Yougoslavie.
Il semble que la forme fédérale soit d’autantplus satisfaisante que lorsque chaque communauté vit sur une partie déterminée du territoire à laquelle correspond un ou plusieurs Etats fédérés. Si les communautés sont territorialement imbriquées, les solutions sont plus difficiles à trouver.111
Nous ne pouvons nier l’authenticité de la République malgache en ce qu’elle repose aussi dans son insularité. Ainsi, si les expériences d’autres pays montrent une cohabitation multicommunautaire difficile, nous ne pouvons cependant tirer des conclusions hâtives concernant le cas de Madagascar. En effet, la société malgache est forte d’une langue commune bien qu’avec des variantes (on peut quand même se comprendre en communiquant), et c’est là un point qui peut nous faire voir la nécessité de s’unir plus que de se diviser.
De plus, il est des valeurs communes telles que nous avons pu les voir précédemment dans ce travail, qui sont même reconnues constitutionnellement, faisant l’identité du Malgache au-dessus des identités particulières de chacun.
Fondamentalement, l’Etat gouverne un peuple et non des peuples, il agit sur la masse que la société constitue.
Si l’on revient aux sources de la démocratie, c’est-à-dire à l’époque du dème113 à Athènes, unité de base de la citoyenneté, à l’intérieur de cette circonscription se trouvaient différentes tribus.
Si l’on considère Madagascar comme étant le dème en question, alors l’esprit de la République devrait exclure la prise en compte des clivages et ne tenir compte que de la citoyenneté unique du Malgache.
L’Histoire politique montre que le paramètre ethnique est souvent entré en jeu dans les luttes d’opinion et pour le pouvoir114, se caractérisant essentiellement par une dichotomie Merina-Côtiers.
Le complexe malgache, caractérisé par l’hostilité à l’altérité qui n’est que très relative du fait de l’appartenance à un même tanindrazana, est assez problématique. Il soulève en effet selon nous le doute sur l’amour, l’acceptation de soi.
En effet, la haine de soi entraîne inévitablement la haine des autres. Plutôt que de parler de réconciliation nationale à la moindre occasion comme cela est d’ailleurs défendu par la Constitution dans son préambule115, il est primordial que tout un chacun se réconcilie d’abord avec lui-même.
Le grand pardon entre gouvernants et gouvernés et entre gouvernants eux-mêmes et gouvernés eux-mêmes tel qu’il est souvent défendu dans les débats politiques, doit être réorienté vers un pardon de soi et du passé.
En effet, il nous faut tirer les leçons du passé pour mieux avancer.
b –Des identités nationales
Comme nous l’aurons compris, la diversité des particularités culturelles entraine une remise en cause de l’efficacité du jeu républicain de la démocratie.
Ainsi, dans le dème unique malgache se trouve une réalité indéniable qui est celle du multicommunautarisme dont est porteuse la société.
Malgré notre insularité et la force unificatrice qui est la nôtre que l’on retrouve dans le commun de la langue ou des valeurs fondamentales qui constituent la République, un danger demeure, bien qu’à peine perceptible, et c’est celui de l’éclatement de nationalismes.
Le seul moyen cependant de parvenir à instaurer une égalité de principe entre tous les membres de la nation est de faire naître un sentiment commun d’appartenance nationale chez des citoyens partageant une même identité collective.
Il est dommage que lorsque l’identité collective transcende les identités nationales, ce ne soit qu’en réaction à la menace étrangère.
Le pays manque alors de l’expérience véritable du sentiment national.
Nous entendons par cela le fait que pour être véritable, ce sentiment se doit d’émerger beaucoup plus de la mysticité représentée par le patriotisme, attachement à la mère patrie, jusque-là perceptible de façon individuelle et non collective.
Mais nous pouvons dire que cela est quelque peu ambitieux dans ce sens où la mysticité même du sentiment patriote trouve son essence dans le caractère très personnel de celui-ci.
Il s’agit selon nous d’une expérience intime qui ne peut être vraiment partagée collectivement. Par exemple, on peut inculquer le nationalisme par l’apprentissage à la citoyenneté, mais on ne peut pas (sinon difficilement) en faire de même avec le patriotisme116. Ce dernier ne se commande pas.

L’exclusion comme frein à la construction socio-démocratique

La théorie montre la revendication de l’harmonie du vivre ensemble.
Mais la société connaît diverses formes d’exclusion.
Parfois, les exclusions se dissimulent sous un prétexte consensualiste et de solidarité117.
On observe alors un paradoxe identitaire prouvant que le Malgache est encore incomplet et doit très certainement se chercher.
Comment peut-on prôner des valeurs d’harmonie et par la tradition même défendre l’exclusion ?

Table des matières

REMERCIEMENTS
LISTE DES ABREVIATIONS
SOMMAIRE
INTRODUCTION
Partie 1 – L’idée républicaine aujourd’hui L’objet de cette partie sera de déterminer le sens que nous donnons de nos jours à cette idée républicaine.
Chapitre 1 – La République, cette étrangère
I – Qui est-elle ?
1 – Le gouvernement républicain
2 – La vertu politique en tant que principe spécifique du gouvernement républicain
3 – Le sens de l’intérêt général et de la justice
II – Avons-nous besoin d’un guide ?
1 – La sociabilité insociable de l’Homme
2 – Le paradoxe républicain
3 –La Constitution en tant que guide émanant de la République
a- L’expression d’une philosophie politique
b – Le poids de la Constitution
Chapitre 2 – La malgachéité de la République
I –Un contexte historique particulier
1 – Le réflexe républicain
a – Les germes monarchiques de l’idée républicaine
b – L’empreinte de la colonisation
2 – L’originalité de l’idée républicaine malgache
a – Dans le religieux
b – Dans la croyance aux ancêtres
II –Quelle connaissance de la chose publique ?
1 – La culture politique nationaliste
2 – Une notion imparfaite du bien commun
a – La préférence des changements radicaux à la continuité du pouvoir
b – Des valeurs culturelles pourtant en faveur de la communauté du bien
Partie 2 – Quel idéal social ?
Chapitre 1 – La coexistence politique
I – Un pluralisme prôné
1 – Un pluralisme de fait
a – Les conséquences pour le contexte socio-démocratique
b –Des identités nationales
2 –L’exclusion comme frein à la construction socio-démocratique
II – L’homogénéisation de la société : un idéal à atteindre ?
1 – L’identité nationale comme finalité
a – L’inclusivité et la représentativité à l’épreuve de l’exclusion
b – La relativisation de l’identité nationale
2 – Quelle unité nationale ?
a – L’urgence de l’unité
b – L’importance du leadership politique
c – Le consensus au coeur de l’unité nationale
Chapitre 2 – La condition individuelle au coeur de l’idée républicaine malgache
I – Analyse à travers la question de la souveraineté populaire
1 –Une citoyenneté incomplète
a – La Constitution en cause
b – Une liberté politisée
2 – Les valeurs traditionnelles comme obstacle à l’épanouissement citoyen
II – Une démystification nécessaire de l’Etat
1 – Pour une meilleure cohésion citoyen-République
a – L’Etat en tant qu’allié de l’individu
b – L’importance de l’éducation civique
2 –La rupture avec les facteurs d’échec pour une légitimité renforcée de l’Etat
Conclusion
BIBLIOGRAPHIE

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