La technique de membrane induite selon Masquelet

La technique de reconstruction osseuse par membrane induite a été décrite pour la première fois par Masquelet en 2000 [1], cette équipe a pu reconstruire des grandes pertes osseuses diaphysaires des os longs du membre inferieur en deux temps opératoires, par autogreffe spongieuse à l’intérieur d’une membrane constituée autour d’un Spacer en polyméthylmétacrylate (PMMA) préalablement interposé dans une pseudarthrose septique de jambe.

Le succès de cette technique a permis à cette équipe chirurgicale de reconstruire des pertes d’os de 5 à 25 cm de longueur sans recours à une autogreffe vascularisée [1] Utilisée initialement dans le traitement des pseudarthroses septiques de jambe, l’interposition de ciment de PMMA permet d’éviter le comblement de la zone de résection par du tissu d’interposition et permet de différer la reconstruction quand le sepsis est contrôlé médicalement [2]. Ce n’est qu’à cette condition qu’est envisagée une reconstruction osseuse dans un deuxième temps.

Dès la première chirurgie pratiquée, une membrane biologique, aujourd’hui appelée« membrane induite » est mise en évidence autour du ciment d’interposition, 6 semaines après le premier temps opératoire. La solidité apparente de cette membrane biologique et le saignement excessif que l’excision de celle-ci aurait entraîné, ont amené le chirurgien à conserver cette membrane et à greffer [2] de l’os spongieux morcelé dans cet espace clos lorsqu’il est suturé au-dessus des greffons. Cette approche chirurgicale a donné lieu à une reconstruction osseuse rapide (14 semaines) et efficace (structure osseuse d’excellente qualité) de la zone lésée.

En 1990 les travaux menés par Romana [3] ont mis en évidence qu’un lambeau périosté vascularisé favorise une formation osseuse lorsqu’il est comblé par une autogreffe spongieuse.

Ainsi, les travaux menés par l’équipe de Masquelet et de Romana renforcent l’intérêt de la « chambre biologique » afin d’optimiser la reconstruction osseuse chez l’Homme. Cette membrane induite (MI) est décrite comme un élément biologique capable de prévenir la résorption des greffons et simultanément de favoriser leur vascularisation et la corticalisation de la zone greffée.

Description de la technique

Le principe de la membrane induite, comme il a été décrit par Masquelet consiste à provoquer une réaction à corps étranger en interposant une entretoise de ciment dans la perte de substance osseuse. Une membrane induite par ce corps étranger créé un effet de chambre biologique qui s’oppose à la résorption de la greffe en lui apportant sa vascularisation et des facteurs de croissance.

La technique de la membrane induite se déroule en deux temps opératoires [1,2]:

Le premier temps opératoire:

La perte de la substance osseuse:
Cette étape comporte l’excision large des zones non viables, infectées et de la zone tumorale ou dystrophique selon la pathologie à laquelle on s’adresse. Cette excision osseuse doit aboutir en amont et en aval de la zone lésionnelle des extrémités osseuses saines et vascularisées. Une bonne couverture cutanée en regard de la zone traitée est fondamentale.

La stabilisation:
La stabilisation stricte des extrémités osseuses d’amont et d’aval est indispensable avant la mise en place de l’entretoise. Elle est assurée le plus souvent par une plaque vissée ou un enclouage centromédullaire, sauf dans le contexte septique, le recours à une fixation externe est préconisé.

L’entretoise:
La zone de perte de substance osseuse est comblée par une entretoise en ciment chirurgical à savoir du polyméthylmétacrylate (PMMA). Cette entretoise doit couvrir la zone tant dans sa longueur que dans son diamètre.

Pour favoriser la fusion aux deux extrémités de la résection, le ciment doit manchonner l’os sain sur au moins 1 cm et ceci sur toute sa circonférence. La polymérisation du PMMA est une réaction chimique exothermique. Il est alors indispensable, lors de cette étape de durcissement, de protéger l’environnement au contact du PMMA pour éviter une transmission de la chaleur aux tissus sains environnants. Pour ce faire, une irrigation régulière est réalisée sur les extrémités osseuses. Une protection par des manchons en plastiques (seringues coupées) est réalisée dans la résection avant la mise en place du ciment, ceci afin de protéger les parties molles de la chaleur [4,5]. Ces manchons ont également l’avantage de servir de moule pour le ciment lors de sa polymérisation  . Lors d’une reconstruction métaphysaire, plusieurs manchons peuvent être fixés entre eux pour recréer la forme de l’évasement métaphysaire en ciment, forme que prendront successivement la MI puis l’os final reconstruit. Après durcissement et refroidissement du PMMA, les manchons sont retirés. La MI va se former autour du ciment en réaction à un corps étranger.

Le plan musculaire est ensuite refermé au-dessus du PMMA. L’environnement immédiat doit être propre et bien vascularisé. C’est en général à cet instant que sont réalisés les lambeaux de couverture musculaires et cutanés.

Le deuxième temps opératoire : 

Le deuxième temps opératoire est réalisé 6 à 8 semaines après le premier acte [6,7], ce délai est nécessaire pour la cicatrisation définitive des tissus des partie molles et pour traiter une éventuelle infection.

Lorsqu’il s’agit d’une exérèse de tumeur, lors de la reconstruction, le deuxième temps opératoire est différé. En effet, une greffe spongieuse pendant la chimiothérapie risquerait de détruire les cellules ostéoprogénitrices et de compromettre la reconstruction. Ainsi, dans ce cadre, la reconstruction est réalisée 6 à 8 semaines après la chimiothérapie soit 6 à 8 mois après le premier temps opératoire [4,8].

L’ablation du ciment:
Réalisé par une incision longitudinale de la membrane formée autour du Spacer cimenté  , en limitant au maximum le décollement. Le ciment est ensuite retiré par morcellement. Les deux extrémités osseuses sont décortiquées, de manière à augmenter au maximum la surface de contact entre l’os néoformé et l’os d’origine [2].

La greffe:
Le prélèvement de la greffe morcelée autologue se fait le plus souvent au niveau des crêtes iliaques postérieures. Cette greffe est déposée à l’intérieur de la membrane afin de couvrir l’ensemble du champ de résection osseuse . D’autres techniques de greffes peuvent être utilisées notamment le Reamer-Irrigator-Aspirator (RIA) [9].

La membrane induite est ensuite soigneusement suturée au fil résorbable sur aiguille ronde de manière à ne pas la déchirer. Il faut à cet instant vérifier la qualité de la stabilisation osseuse, qui doit être parfaite pour autoriser un appui précoce et une meilleure corticalisation de la greffe .

Table des matières

INTRODUCTION
MATÉRIELS & MÉTHODES
I. Type d’étude
II. Les observations des trois cas
1. Observation N° 1
2. Observation N° 2
3. Observation N° 3
RÉSULTATS
DISCUSSION
I. La technique de membrane induite selon Masquelet
1. Historique
2. Description de la technique
3. Données expérimentales
II. Technique de MI en chirurgie maxillo-faciale
1. Application expérimentale de la reconstruction mandibulaire par MI
2.Étude de l’influence de la radiothérapie sur la formation de la MI
3. Application clinique
III. Discussion de nos cas cliniques
1. Discussion du cas 1
2. Discussion du cas 2
3. Discussion du cas 3
IV. Généralités sur les reconstructions mandibulaires
1. Etiologies des PSIM
2. Classification des PSIM
3. Particularités locales (anatomiques et physiologiques)
V. Les moyens classiques de reconstruction des PSIM
1. Les greffes osseuses conventionnelles
2. La reconstruction par prothèse
3. La distraction ostéogénique
4. Le transfert osseux libre vascularisé (TOLV)
VI. Les buts des reconstructions mandibulaires
1. Vital
2. Fonctionnel
3. Esthétique
VII. Avantages et les inconvénients des moyens de reconstruction classiques
VIII. La membrane induite : nouveau moyen pour les reconstructions des PSIM
IX. Indications de la MI dans les PSIM
X. perspectives
CONCLUSION

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