La thérapie psychomotrice comme soutien au processus de construction identitaire

La thérapie psychomotrice comme soutien au processus de construction identitaire

Construction d’une unité psychocorporelle 

La Peau, première interface de relation 

Composantes physiologiques 

La peau recouvre quasiment l’ensemble de notre organisme et représente le quart de notre poids pour une surface de deux mètres carrés. Elle est constituée de trois couches épiderme, derme et hypoderme. C’est également le premier sens à se mettre en place in-utero, toute la surface du corps a des récepteurs tactiles dès 24 semaines d’aménorrhées (SA). La peau informe alors le système nerveux central de toutes variations venant de l’extérieur et ce, grâce à de multiples récepteurs – Les thermorécepteurs qui apprécient les variations de température ; – Les nocicepteurs, sensibles à la douleur ; – Les mécanorécepteurs qui vont sentir les vibrations, variations de pression et de contacts. Elle a de nombreuses fonctions physiologiques un rôle de barrière immunitaire, un lieu de synthèse de nombreuses substances, une fonction thermorégulatrice, un régulateur métabolique (stockage des graisses, de l’eau) (Pireyre, 2021). Elle représente aussi la frontière entre l’intérieur du corps et l’environnement. Elle constitue donc le lieu privilégié de relation avec le milieu à travers le toucher. 

Être touché pour exister

A la naissance, le toucher occupe une place primordiale dans l’univers sensoriel du bébé. Totalement dépendant, il a besoin, pour continuer d’exister, d’être porté, nourri, changé. Aucune de ses actions ne peut s’effectuer sans que le toucher ne soit mis en jeu. Outre ces soins, c’est la fonction affective du toucher qui est indispensable pour la survie de l’enfant. En témoignent, les troubles des bébés dans les orphelinats de Roumanie où ilsrecevaient uniquement les soins vitaux (nourriture, hygiène et médicaux) sans être cajolés, regardés et câlinés. C’est ce que Spitz appelle le syndrome de l’hospitalisme (Lecomte, 2019). Selon D.W. Winnicott (1969), pour qu’une dimension affective existe lors des soins il faut que la mère puisse s’identifier à son bébé et comprendre ses besoins. C’est ce qu’il appelle la préoccupation maternelle primaire. Grâce à cette dernière, elle peut se mettre à la place de son enfant et lui prodiguer les soins les plus adaptés possible. Dans cette perspective, il existe deux termes pour décrire leur dimension affective – Le holding, correspond à la manière dont la mère porte l’enfant tant physiquement que psychiquement afin de répondre à tous ses besoins. Il s’agit donc autant du portage physique que de la disponibilité psychique dont elle fait preuve ; – Le handling, concerne la dimension de plaisir présente dans toutes les manipulations physiques prodiguées au bébé tant dans les soins quotidiens que dans les câlins. Les soins maternels vont alors permettre à l’enfant de faire de toutes ses expériences un ensemble cohérent. Cela va d’une part, lui conférer un sentiment de sécurité et d’autre part, lui permettre d’accéder à un sentiment continu d’exister. Le bébé va progressivement sentir ses limites et venir, grâce à cette enveloppe, différencier le « soi » du « non -soi ». Ainsi, toutes ces expériences vont pouvoir donner à la peau une fonction psychique (Houzel, 2016).

Le Moi Peau 

  1. Anzieu reprend les propos de Freud pour dire que « Toute activité psychique s’étaie sur une fonction biologique » (Cité dans Pireyre, 2021, p.62). Ainsi, en se basant sur les caractéristiques physiques de la peau, frontière poreuse mais contenante, entre l’intérieur et l’extérieur du corps, D. Anzieu a développé la théorie du Moi-Peau. « Par Moi-Peau, je désigne une figuration dont le Moi de l’enfant se sert au cours des phases précoces de son développement pour se représenter lui-même comme Moi contenant les contenus psychiques, à partir de son expérience de la surface du corps. » (Anzieu cité dans Pireyre, 2021, p.64). Il théorise alors différentes fonctions du Moi-Peau, dont je ne citerai aujourd’hui que celles nécessaires, pour les besoins de mes propos – La fonction de contenance comme la peau qui recouvre toute l’étendue du corps, le MoiPeau enveloppe tout l’appareil psychique. En lien avec le handling cité précédemment, les sensations perçues viennent faire émerger la perception de la peau comme un sac ; – La fonction de maintenance à l’image de la peau qui soutient les différents systèmes de notre organisme, le Moi-Peau maintient ensemble dans un état d’unité les premiers éléments du psychisme. Cette fonction n’est possible que parce que le bébé a lui-même été maintenu par les mains de sa mère, en référence au holding de D.W. Winnicott, et a intériorisé cette expérience ; – La fonction de pare-excitation la peau est la barrière naturelle permettant de se protéger des agressions extérieures biologiques (UV, bactéries etc.). Le Moi-Peau joue alors la même fonction avec le psychisme et filtre les multiples informations reçues de l’extérieure ; – La fonction d’individuation pas un grain de peau ne ressemble à un autre, elle est donc un vecteur de différenciation. D’un point de vue psychique, « Elle assure une fonction d’individuation du soi qui apporte à chacun le sentiment d’être unique » (D. Anzieu cité dans Pireyre, 2021, p.66) ; – La fonction d’inter sensorialité sur la peau se trouve tous les récepteurs sensoriels. Il émerge alors sur le plan psychique une surface reliant toutes les modalités sensorielles. Le Moi-Peau, va donc transformer les expériences tactiles vécues dans la relation, en représentation symbolique d’un contenant. Cela confère au bébé un premier sentiment d’existence qui permet de lui faire prendre conscience de ses limites corporelles. Il émerge alors un sentiment d’intégrité corporelle offrant « au Moi une enveloppe narcissique et un bien-être de base » (Ducret, 2011, p.30). Ainsi, c’est à travers le toucher que le processus de subjectivation commence. En effet, il vient grâce aux bons soins maternels fonder les premières limites physiques et psychiques entre soi et autrui. « Il faut que le sujet se sente séparé et protégé d’autrui pour que se constitue son identité. » (Edmond, 2005, p.). Lors du toucher, le tonus est également mis en jeu. Si la peau est la première interface de relation, le tonus est, quant à lui, le premier mode de communication.

Table des matières

INTRODUCTION
PARTIE CLINIQUE
I. Présentation du Centre Médico Psychologique
1. Présentation générale
2. Dynamique d’équipe
3. La place de la psychomotricité
4. Ma place de stagiaire
II. Présentation des cas cliniques
1. Hakim
1.1. Anamnèse
1.2. Premières rencontres ou l’impossible séparation
1.3. Profil psychomoteur
2. Maria
2.1. Anamnèse
2.2. Rencontre avec Maria
2.3. Profil psychomoteur
3. Présentation d’extraits de séances
3.1. La rencontre avec Hakim
3.2. La fragilité de Maria
3.3. De la sidération à l’élaboration
PARTIE THEORIQUE
I. Identité et psychomotricité
1. Définition de l’identité
2. Liens avec la psychomotricité
3. Développement psychomoteur et construction identitaire
II. Construction d’une unité psychocorporelle
1. La Peau, première interface de relation
1.1. Composantes physiologiques .
1.2. Être touché pour exister
1.3. Le Moi Peau .
2. Le Tonus, premier mode de communication.
2.1. Composantes physiologiques .
2.2. Dialogue tonique
2.3. Théorie de l’étayage psychomoteur
2.4. La fonction alpha de Bion
3. La proprioception comme frontière avec le milieu
3.1. Composantes physiologiques
3.2. Fonction proprioceptive et processus de subjectivation
III. Inscription dans l’environnement et émergence d’une continuité spatiotemporelle
1. Temps, base d’un sentiment de sécurité et vecteur d’intersubjectivité
1.1. Structuration temporelle et rapport à l’environnement .
1.2. Rythmicité et inscription dans la relation
2. Interactions corps-environnement et émergence de l’espace
2.1. Développement postural et accès à l’espace
2.2. Construction d’une aire transitionnelle
IV. Emergence des premières représentations corporelles, soutien de l’identité
1. Schéma corporel
2. Image spéculaire
3. Image du corps
PARTIE DISCUSSION
I. Les outils du psychomotricien
1.Du corps à la corporéité du psychomotricien
2. Instauration d’un cadre thérapeutique adapté facteur d’intersubjectivité
2.1. Hakim, le cadre comme organisateur de la relation
2.2. Maria, un cadre contenant soutien à son processus d’individuation
3. L’utilisation d’objets comme médiateurs thérapeutique
3.1. Le gros ballon, objet facilitateur de relation
3.2 Le drap de danse, médiateur entre dedans/dehors
II. Corps en relation et émergence du sujet
1. Corps accords, création d’un rythme intégratif
2. Corps à corps, du toucher à l’affrontement
3. Du jeu au « je »
3.1. D’Hakim le tyran à Hakim le partenaire
3.2. De Maria la timide à Maria la chanteuse
III. Différences et relations avec l’environnement familial
IV. Quand la relation pose question
1. Maria l’adhésive
2. Hakim le fuyant
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE

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