L’attachement et l’amour

Triangle de l’amour de Sternberg 

Plusieurs travaux de recherches sur la relation de couple chez les adultes (Acker & Davis, 1992; Crevier, Poulain, & Boislard, 2012; Lemieux & Hale, 2002; Sternberg, 1997) ont favorisé l’élaboration de la théorie sur l’amour de Sternberg (Sternberg, 1986, 1988, 2006). Fehr et Russell (1991) soutiennent qu’il est important d’étudier le concept de l’amour, car il influence de manière importante la vie des personnes. Le modèle triangulaire de l’amour de Sternberg (1986, 1988, 2006) fut repris dans plusieurs études (p. ex., Aron & Westbay, 1996; Chojnacki, & Walsh, 1990; Crevier et al., 2012; Lemieux & Hale, 2002; Madey & Rogers, 2009). Il définit trois composantes de la relation amoureuse conceptualisées sous la forme d’un triangle. Ces trois constituants fondamentaux sont l’intimité, la passion et l’engagement.

L’intimité concerne le sentiment de proximité et de connectivité avec le partenaire (Sternberg, 1986, 2006). Elle inclut le sentiment qui donne lieu à l’expérience de la chaleur dans la relation amoureuse (Sternberg, 2006). La passion comprend la romance, l’attirance physique et la sexualité (Sternberg, 1986, 2006). Également, l’estime et l’actualisation de soi, ainsi que le sentiment de sécurité ou d’affiliation, dans la relation de couple, peuvent contribuer à l’expérience de la passion (Sternberg, 2006).

L’engagement se définit, dans un premier temps, comme la décision d’aimer quelqu’un, puis par la décision de demeurer dans la relation et de la poursuivre sur une longue période de temps (Sternberg, 1986, 2006). L’intimité représente la composante émotionnelle de l’amour, la passion sa composante motivationnelle et l’engagement sa composante cognitive (Diessner, Frost, & Smith, 2004). Les adultes vivent différents niveaux d’intensité à l’égard de ces composantes. Ainsi, une intensité équivalente du niveau d’intimité, de passion et d’engagement, pour chacun des conjoints permettrait une satisfaction conjugale accrue (Sternberg, 1986). Par ailleurs, le nombre d’années de vie commune influence les composantes du triangle de l’amour. L’intimité ainsi que la passion diminuent et l’engagement augmente lorsque la durée de la relation conjugale augmente (Lemieux & Hale, 2002).

Bien qu’il existe d’autres modèles pour conceptualiser l’amour (p. ex., le « Modèle typologique des couleurs de l’amour » (Lee, 1973, 1977, 1988) et la « Typologie de l’amour de Berscheid » (Berscheid, 2010)), ce modèle sera utilisé, car, selon Dugal, Bigras, Laforte, Godbout et Bélanger (2017), il a été validé empiriquement à plusieurs reprises. De plus, toujours selon ces auteurs, « l’intérêt de ce modèle réside donc dans sa capacité d’expliquer plusieurs types d’amour entre conjoints, ce qui permet de rendre compte d’une multitude d’expériences amoureuses » (p. 20).

L’attachement et la satisfaction conjugale 

Il est important de considérer l’attachement dans les études impliquant le fonctionnement conjugal (Castellano, Velotti, Crowell, & Zavattini, 2014). Plusieurs études (Butzer & Campbell, 2008; Charania & Ickes, 2007; Collins & Read, 1990; Hirschberger, Srivastava, Marsh, Cowan, & Cowan, 2009; Kirkpatrick & Davis, 1994; Kobak & Hazan, 1991; Scott & Cordova, 2002) ont démontré un lien significatif entre l’attachement amoureux et la satisfaction conjugale. Malgré l’utilisation de différentes méthodes servant à la mesure de l’attachement, soit l’évaluation catégorielle ou dimensionnelle, les résultats de plusieurs études indiquent que la sécurité d’attachement et la satisfaction conjugale sont liées empiriquement (Mikulincer, Florian, Cowan, & Cowan, 2002). Une revue de littérature (Mikulincer & Shaver, 2007) rapporte que, nonobstant les outils utilisés, les individus affichant un style d’attachement sécurisant rapportent les plus hauts degrés de satisfaction en lien avec leur relation conjugale. D’autres études démontrent le lien entre l’attachement sécurisant et un haut degré de satisfaction conjugale (Hirschberger et al., 2009; Monteolivia & Garcia-Martinez, 2005). Une étude réalisée au Québec va dans le même sens (Boisvert, Lussier, Sabourin, & Valois, 1996). D’ailleurs, une autre étude québécoise a démontré qu’un individu au style d’attachement sécurisant présente une satisfaction conjugale accrue, et ce, sans égard au style d’attachement de son conjoint (Pistorio, 2013). De même, l’attachement détaché serait négativement associé à la satisfaction conjugale (Collins, Cooper, Albino, & Allard, 2002; Fuenfhausen & Cashwell, 2013; Mondor, McDuff, Lussier, & Wright, 2011). De plus, les personnes présentant un style d’attachement préoccupé seraient moins satisfaites dans leurs relations conjugales (Fuenfhausen & Cashwell, 2013), mais seulement chez les femmes dans l’étude de Mondor et al. (2011). Des études longitudinales suggèrent que la sécurité d’attachement peut être influencée par la  satisfaction conjugale au fil du temps, cette dernière pouvant permettre une transition vers un attachement sécurisant (Crowell et al., 2002; Davila, Karney, & Bradbury, 1999). Une étude a également révélé que les couples développent un attachement plus sécurisant au fil du temps, mais qu’ils sont moins satisfaits dans leur relation conjugale (Hirschberger et al., 2009).

L’attachement et l’amour 

Plusieurs études ont exploré la relation entre l’attachement et l’amour (Dillow, Goodboy, & Bolkan, 2014; Feeney & Noller, 1990; Fricker & Moore, 2002; Hazan & Shaver, 1987; Levy & Davis, 1988; Madey & Rodgers, 2009; Zamora, Winterowd, Koch, & Roring, 2013). En effet, certains styles d’attachement auraient une influence sur l’amour ressenti envers son partenaire (Hazan & Shaver, 1987). En ce qui a trait à la théorie du triangle de Sternberg, l’attachement serait lié à l’intimité, l’engagement et la passion (Madey & Rodgers, 2009). Shaver et Mikulincer (2006) suggèrent qu’un style d’attachement sécurisant augmente l’intensité de ces trois composantes. Ainsi, l’attachement sécurisant est corrélé positivement avec l’intimité, la passion et l’engagement, tandis que l’attachement préoccupé et détaché sont corrélés négativement avec ces trois composantes (Levy & Davis, 1988). D’autres études, n’ayant pas utilisé le triangle de Sternberg (Monteoliva & Garcia-Martinez, 2005; Pielage, Luteijn, & Arrindell, 2005), corroborent partiellement les résultats de cette étude, identifiant une corrélation positive entre l’attachement sécurisant et les composantes de l’intimité et de l’engagement. Simpson (1990) identifie une corrélation positive entre l’attachement sécurisant et l’engagement. La passion, quant à elle, n’était pas évaluée par les questionnaires utilisés dans ces études. Également, les hommes qui se déclarent en amour présentent moins d’évitement de l’intimité et d’anxiété d’abandon que ceux qui ne se déclarent pas en amour (Zamora et al., 2013). Par ailleurs, Dillow, Goodboy et Bolkan (2014) ont utilisé un instrument de mesure différent, The Love Scale, qui conceptualise l’amour comme le degré auquel un conjoint se sent en amour avec son partenaire. Les résultats de leur étude révèlent que le style d’attachement sécurisant n’est pas corrélé avec l’amour. Selon les auteurs, ce résultat, divergeant avec la théorie du triangle de Sternberg et d’autres résultats empiriques, s’expliquerait par l’instrument de mesure utilisé. En effet, une partie significative de ce questionnaire évalue les comportements dépendants des individus, ce qui est incompatible avec les caractéristiques de l’attachement sécurisant. Également, leurs résultats indiquent que le style d’attachement préoccupé est positivement corrélé à l’amour, alors que les styles craintif et détaché y sont corrélés négativement.

L’amour et la satisfaction conjugale 

Le triangle de l’amour de Sternberg n’évalue pas la satisfaction conjugale (Acker & Davis, 1992), bien que ces deux concepts soient reliés selon Sternberg (1997, 2006). Plusieurs études ont d’ailleurs démontré que la satisfaction conjugale corrélait de façon positive avec les trois composantes du triangle de l’amour (Acker & Davis, 1992; Douglas, 2014; Lemieux & Hale, 1999; Levy & Davis, 1988; Madey & Rodgers, 2009; Overbeek, Ha, Scholte, De Kemp, & Engels, 2007). Dans l’étude de Cheng et Christopher (2010) réalisée auprès d’un échantillon de participants chinois, l’intimité et l’engagement étaient associés à la satisfaction conjugale, mais pas la passion. Selon Lemieux et Hale (1999), l’intimité serait le meilleur facteur prédictif de celle-ci. Dans l’étude de Cusack, Hughes et Cook (2012), ayant comme participants des femmes, 66 % de la variance à l’égard de la satisfaction conjugale étaient expliqués par l’intimité et la passion.

Table des matières

Introduction
Contexte théorique
L’attachement
La satisfaction conjugale
Triangle de l’amour de Sternberg
L’attachement et la satisfaction conjugale
L’attachement et l’amour
L’amour et la satisfaction conjugale
Attachement, triangle de l’amour de Sternberg et satisfaction conjugale
But de l’étude et hypothèses
Méthode
Participants
Procédure et déroulement
Instruments de mesure
Questionnaire sociodémographique
Attachement
Satisfaction conjugale
Triangle de l’amour de Sternberg
Analyses statistiques
Résultats
Résultats descriptifs
Effet modérateur du triangle de l’amour sur l’attachement et sur la satisfaction conjugale
Modèle médiateur de l’attachement, du triangle de l’amour et de la satisfaction conjugale
Invariance selon le genre
Discussion
L’attachement et la satisfaction conjugale
L’amour et l’attachement
L’amour et la satisfaction conjugale
Attachement, triangle de l’amour de Sternberg et satisfaction conjugale
Effet modérateur du triangle de l’amour sur l’attachement conjugal
Variance selon le genre
Forces et limites de l’étude
Implications cliniques
Conclusion

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