« Le changement social et les mass médias dans les sociétés rurales et urbaines »

Le changement et l’équilibre social, voilà deux termes qui tiennent en tension la société et concernent d’emblée le domaine de la sociologie. Les mutations et les bouleversements que subissent les sociétés ne sont pas des spéculations mais des constats réels. Les réflexions spontanées affirment à cet effet que ce sont les médias et les différents réseaux de communication nouveaux qui sont les principaux véhicules de ces transformations au niveau social. Les articles journalistiques comme les discussions simples entre citoyens font rapport de l’influence directe qu’ont les outils de communication sur l’organisation sociale mais aussi sur le devenir même de la société. Sujet qui nous préoccupe car entrant dans le champ de notre souci scientifique de recherche mais aussi par rapport à notre sensibilité académique sur les questions liées à la communication et la société.

La prise en compte de la place des médias dans la société relève de plusieurs évènements majeurs dans la tracée des bouleversements sociopolitiques qu’a subis Madagascar ces dix dernières années. Il s’avère que beaucoup d’acteurs dans le corps social ont émis l’idée que les médias ne sont pas innocents durant ces conjonctures. D’autre part, l’effervescence de l’industrie des médias durant cette même époque, tant sur le plan des nombres de médias qui sont apparus que sur les zones de couverture qui se sont élargies, démontre un engouement certain au niveau social. La demande de savoir et de connaissance à ce propos est légitimée par la fréquence dans les débats publics, voire dans l’espace public des thématiques reliées aux changements-médias-société. Nous partons aussi du constat qu’à Madagascar, il n’y a pas qu’un seul type de société, mais une diversité non unifiée qui se reconnaissent en fonction de certains critères contextuels. Ces indices sociologiques nous ont mené à nous poser de réelles questions scientifiques sur le sujet. D’abord sur les impacts et les effets des médias sur la société, mais aussi sur l’usage des médias dans le quotidien des gens, du public, de la masse. L’intérêt d’un tel type de recherche est de donner une piste compréhensive des rapports qui existent entre ces deux entités qui ne peuvent pourtant être prises séparément. Consécutivement, les problématiques liées au développement se posent en background d’une telle réflexion. En effet, l’idée de transformation est sous-tendue par le couple société et médias ; un changement qui n’a de sens dans le contexte institutionnel actuel que dans une dynamique de développement du pays.

Le premier contact avec notre terrain fut un hasard, un voyage anodin qui s’est vite transformé en un questionnement scientifique concernant une société présentant les signes d’une mutation dans les modes de fonctionnement. Ce pré-terrain de deux jours qui a permis de faire le contour du milieu comme des sujets concernés par les futurs entretiens. Le contexte, un village dans les profondeurs d’une commune rurale à 160km d’Antananarivo. Au sein de la Région Vakinankaratra, Commune Rurale d’Ambano, le Fokontany d’Androkavato. Un village au milieu de champs, de verdures et de vallées. Il faudra faire 14 km quand même pour y parvenir à partir de la Route nationale à Antsirabe. Une route secondaire, sinueuse, rocailleuse, au-delà de la Route nationale, aucun mètre carré n’est goudronné …

Pour parvenir au Fokontany d’Androkavato il faudra trois heures de marche, soit deux heures et demi en taxi-brousse… quand il y en a. Le décor laisse présager l’activité principale locale, l’agriculture. Des deux côtés de la route, des champs verts à perte de vue, seules les montagnes ne sont pas cultivées, laissant des parcelles pour des pins et autres conifères. Le Fokontany de notre destination est encore à sept kilomètres de la Commune d’Ambano, là où s’arrêtent les poteaux et donc l’électricité. Les charrettes de bœufs et les camions des collecteurs se croisent sur cette route rouge terre. Ceci illustre la transformation de cette société, toujours en contact avec le monde extérieur via ses moyens de communication, mais toujours en retrait dans son mode de vie traditionnelle et paysanne. Ce paradoxe est plus significatif quand, au passage d’un champ, résonne en écho le son rythmé d’une radio portative. Un paysan qui travaille la terre et à ses côtés un petit récepteur ambiance ses cadences de mouvements répétitifs qui écorchent son lopin. Dans les prochaines lignes, nous ne ferons plus de distinction entre « village » et « Fokontany» pour décrire cette assise territoriale de la réalité communautaire. Notons que le terme « Fokontany », sera plus souvent cité même s’ilest plus administratif que social.

Notre destination est donc ce village perché entre deux monts, une communauté alimentée par cette route secondaire qui la tient en haleine. Tout le monde y est agriculteur, même l’instituteur est un agriculteur avant d’être l’enseignant d’école. Les espaces noncultivés sont rares aux alentours. Soit un champ de patates, soit un champ de carotte, sinon des maïs sur des hectares et des hectares. D’autres cultures sont remarquables comme le riz et des arbres fruitiers. Aménagés en « terroir » , les espaces non agricoles sont très rares. Les types d’habitations s’alternent, les plus récentes sont en souvent en matériaux modernes (des briques et des toits en tôle, du ciment), les plus vieux se distinguent par leurs toits de chaume et des briquettes ainsi qu’une construction selon les techniques anciennes. Tout s’organise apparemment autour de la vie agricole et un élevage domestique de petite envergure pour l’autoconsommation familiale.

des arbres fruitiers. Aménagés en « terroir », les espaces non agricoles sont très rares. Les types d’habitations s’alternent, les plus récentes sont en souvent en matériaux modernes (des briques et des toits en tôle, du ciment), les plus vieux se distinguent par leurs toits de chaume et des briquettes ainsi qu’une construction selon les techniques anciennes. Tout s’organise apparemment autour de la vie agricole et un élevage domestique de petite envergure pour l’autoconsommation familiale.

Les individus habitant le village d’Androkavato forment une communauté réelle. Ils sont dans une disposition où tous les membres de la société se connaissent et sont en interaction perpétuelle. Le nombre d’habitants, soit 3.479 individus, ainsi que la structure physique même du village dont la majorité des habitats sont regroupés aux alentours du marché font que les interactions et les interrelations sont constantes. Une communauté où les différents membres se disent parents plus ou moins proches. Rares sont ceux qui sont des transfuges des autres villages, ou les étrangers sans liens directs avec l’histoire du village. Le Chef Fokontany est le chef du village, il dispose d’une double légitimité, l’ancienneté et la légitimité sociale. Il occupe la fonction depuis 2002, soit une douzaine d’années à la tête de son fief.

Notre point d’ancrage pour ce terrain est une famille d’agriculteurs. Le chef de foyer dispose d’une maison et de plusieurs parcelles de terre qui lui fournissent le nécessaire, de quoi faire de lui un « bon père de famille ». Composée de deux enfants de cinq et trois ans, cette famille est à l’image de plusieurs autres dans le village. Typique d’une famille nucléaire, un père, une mère et deux à quatre enfants en moyenne. Maison en brique, toit en tôle, deuxième construction en dur en guise de cuisine et d’une petite ferme. Nous pouvons dire que sans pour autant laisser de côté les valeurs locales et traditionnelles dans la mise en disposition cosmogonique de la maison, le propriétaire a évolué dans ses choix de matériaux. Il nous expliquera plus tard que c’est par souci pratique de durabilité et non un choix esthétique.

La durée de notre séjour au sein de cette famille a permis de constater le fonctionnement et les différentes manières dont se gère le foyer dans le contexte rural. Ruralité qui évolue et s’intègre petit à petit avec la société globale à travers différents moyens et médias de contact. Ainsi que leurs fréquences d’interaction et les stratégies de repli adoptées par les ruraux, en tout cas par la famille rurale observée en question.

Les membres de la famille tiennent chacun des rôles respectifs dans le fonctionnement de la maison. Si ce sont toujours les parents, le père et la mère qui en sont les grands tributaires ; il n’en reste pas moins qu’aux enfants incombent des devoirs significatifs. Les champs et la terre ainsi que la vente des produits sont l’apanage du père. Le ménage et la maison à la mère et pour les enfants l’école et la messe du dimanche.

Table des matières

Introduction
PREMIERE PARTIE : Contexte, cadrage théorique et appareillage méthodologique
Chapitre 1 Contexte d’étude, choix et justifications
Chapitre 2 Cadre théorique
Chapitre 3 Cadre méthodologique
DEUXIEME PARTIE : Confrontation au réel et vérification des hypothèses
Chapitre 4 Principaux Résultats
Chapitre 5 Analyse des résultats et comparaison compréhensive
Chapitre 6 Vérification des hypothèses
TROISIEME PARTIE : Approche prospective et pistes de réflexion
Chapitre 7 Les prolongements de la réflexion sur les résultats obtenus
Chapitre 8 Recommandations sur la pratique médiatique
Chapitre 9 Ouvertures disciplinaires et transdisciplinaires
Conclusion générale 

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