Le Potentiel des matières organiques dissoutes pour le traçage hydrogéologique

Le Potentiel des matières organiques dissoutes pour le traçage hydrogéologique

Un traceur naturel est un élément, une substance, un corps ou un ensemble de molécules, présent naturellement dans l’eau courante de surface et/ou souterraine, dont les variations dans l’espace et/ou dans le temps peut marquer et différencier une masse d’eau particulière, et permet d’identifier son origine ou de repérer son évolution [Office Québécois de la Langue Française (1990)]. Pour cela, un traceur requiert les propriétés suivantes : A cela s’ajoute une condition pratique importante, à savoir une limite de détection basse et une méthode analytique associée peu coûteuse. Il est vain de vouloir trouver un traceur qui remplisse à 100 % toutes les exigences. Le traceur idéal n’existant pas, le choix du traceur naturel va dépendre de la problématique, de la situation hydrogéologique et des variations de son signal d’entrée.  Notre problématique est donc d’obtenir un traceur hydrogéologique naturel dans les eaux souterraines karstiques. En effet, les vitesses de transit dans ce type d’aquifère peuvent être très rapides, avec des temps de séjour généralement inférieurs à un an, pour la zone non saturée (nous l’avons montré pour notre secteur dans la partie II.3.2). Jusque là, seuls certains traceurs isotopiques dans des conditions très particulières ont permis la quantification d’un temps de séjour. Les MOD semblent, par leurs caractéristiques décrites dans la partie I.3, pouvoir combler ce manque. Tout d’abord, nous avons vu que les petites molécules organiques sont assez solubles dans l’eau. De plus, bien que la plupart des MOD présentes dans une eau du sol soient très rapidement dégradées, certaines d’entre-elles (généralement des résidus terminaux de la biodégradation) ont des structures récalcitrantes vis-à-vis de la biocénose. Elles sont, par conséquent, chimiquement plus stables et peuvent donc séjourner assez longtemps dans l’eau souterraine sans être modifiées ou biodégradées [Bahri et al. (2008)]. D’autre part, nous avons vu que le sol est le réservoir principal des MOD mobilisables par l’eau infiltrée (cf. I.2.1). Ainsi, les variations de la nature des MOD du sol dans le temps [Guggenberger et al. (1994) ; Hongve (1999) ; Batiot et al. (2003b)] et le fait que chaque type de sol possède sa propre composition-type en substances organiques mobilisables pourraient marquer et différencier une masse d’eau particulière ; et, par conséquent, nous permettre d’en identifier l’origine (traçage spatial) ou encore la période d’entrée dans le système (traçage temporel) dans le système.

A partir de cette analyse, il semble que les MOD peuvent théoriquement être utilisées comme un traceur hydrogéologique. Dans le cas où cela s’avère exact dans la pratique, elles pourraient être un outil très puissant nous donnant à la fois des informations sur la délimitation du bassin d’alimentation et sur le temps de séjour. Cependant, le fait que ces molécules organiques aient une tendance à l’adsorption sur les argiles, nous indique qu’elles ne pourront être utilisées que pour la quantification de temps de séjour assez courts. En outre, ce phénomène ne causera qu’une diminution progressive de la concentration de ces molécules dans l’eau souterraine [Pitois et al. (2008)], mais en aucun cas, ne modifiera leur nature. Ceci n’est donc pas réellement un inconvénient. En effet, on retrouve la même situation dans le cas des traçages artificiels : la restitution de traceur à l’exutoire n’est généralement pas complète et une fraction dite « perdue » de ce dernier reste piégé dans le système. La seule conséquence est qu’il faut une concentration assez forte en signal d’entrée et/ou un mode de détection suffisamment sensible.

Les principales méthodes de caractérisation des MOD

Les méthodes d’étude des MOD sont nombreuses, variées et leurs développements récents ont permis des progrès importants de leurs connaissances. Elles sont regroupées en trois catégories : • Les méthodes d’analyses chimiques permettant d’obtenir les compositions élémentaires et fonctionnelles ; elles sont décrites de façon détaillée dans plusieurs ouvrages comme ceux de Stevenson (1994) et de Klute (1986). • Les méthodes partiellement destructives qui ont pour objet de dégrader les substances auxquelles elles sont appliquées et permettre d’obtenir des informations sur leurs parties constitutives. La destruction des molécules est obtenue soit par des réactions chimiques, soit par un traitement thermique. • Les méthodes physiques, non destructives, qui donnent des informations sur les substances sans devoir nécessairement les extraire ou, si c’est le cas, sans toutefois les transformer et les dégrader. des résultats est délicate pour plusieurs raisons. Les produits de dégradation ne sont pas toujours identifiables et parfois ne donnent aucune information quand les transformations aboutissent à H2O et CO2, comme dans le cas de l’oxydation. Les nombreux produits obtenus peuvent ne pas provenir des MOD mais des molécules qui leur sont associées. Cette difficulté peut être partiellement évitée par des traitements préalables destinés à les éliminer [Riffaldi & Schnitzer (1972)]. Enfin, les réactifs très agressifs peuvent donner des composés aliphatiques (alcanes, acides gras, acides carboxyliques) résultant de la destruction de structures aromatiques.

 

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