Le Soleil et son atmosphère

Le Soleil et son atmosphère

Vue générale 

Par sa proximité avec la Terre (1 U.A = 1.5×1011 m), le Soleil joue un rôle primordial dans notre existence, puisqu’il apporte une partie de l’énergie nécessaire à la vie (de l’ordre de 1400 W.m−2 ). Le Soleil est une étoile ordinaire, une naine jaune de type G2- V, située dans la séquence principale du diagramme d’Hertzprung-Russel. Sa masse avoisine M⊙ = 2×1030 kg et il présente un rayon de R⊙ = 6.96×108 m. Le Soleil est une sphère de gaz ionisé, i.e. un plasma, constitué majoritairement d’Hydrogène (∼ 90%) et d’Hélium (. 10%) et d’éléments plus lourds, uniquement sous forme de traces. Comme toutes les étoiles, il est maintenu en équilibre par les forces de pression engendrées par les réactions nucléaires, qui compensent l’effondrement gravitationnel. Bien que le Soleil soit une étoile tout à fait banale, il constitue en réalité un formidable laboratoire de physique ; son étude permet de progresser dans la compréhension du fonctionnement stellaire, mais aussi les relations étoiles-planètes. La surface du Soleil à 1R⊙ sépare les régions internes de l’atmosphère, dont les caractéristiques sont très différentes. Le Soleil interne se compose de trois zones distinctes, au sein desquelles le transport de l’énergie se fait de manière différente. Dans le noyau, siège des réactions de fusion nucléaire, une partie de l’énergie est libérée sous forme de photons qui se propagent ensuite dans les couches supérieures du Soleil interne. Dans la zone radiative, où la température et la densité ne sont plus suffisamment élevées pour générer les réactions de fusion, les photons sont absorbés puis ré-émis un grand nombre de fois par les composants du plasma interne. Puis, une fois dans la zone convective (∼ 0.7R⊙), le transport d’énergie se fait par convection au cours de laquelle la matière chaude monte vers la surface, où une fois suffisamment refroidie, elle redescend. La convection est à l’origine de la structure granulaire observable en lumière blanche sur la photosphère ; avec une taille caractéristique de l’ordre de 1000 km, la granulation est constituée de cellules ascendantes de plasma chaud, entouré de plasma plus froid. Le libre parcours moyen des photons étant inférieur au cm dans les couches internes du Soleil, il faut environ 1 million d’années pour qu’un photon émis dans le noyau émerge à la surface (à comparer avec ∼ 2 s dans le cas d’un plasma optiquement mince, i.e. sans absorption). Du fait de l’opacité de ces régions, il n’est pas possible de les analyser grâce au rayonnement. On utilise alors des méthodes d’héliosismologie qui, combinées aux modèles hydrodynamiques, permettent d’obtenir des informations relatives à la structure interne. On définit la surface du Soleil comme la zone pour laquelle le plasma devient brusquement optiquement mince : au delà, les photons s’échappent alors dans l’atmosphère solaire, avec des énergies correspondant principalement au rayonnement visible. Depuis une cinquantaine d’années, les différentes campagnes d’observations en visible, UV et X ont largement contribué à améliorer notre compréhension de l’atmosphère solaire. Ces observations vinrent alors confirmer la présence de plasma à très haute FIGURE 1.1: Principales missions et instruments dédiés à l’étude du Soleil, dans l’ordre chronologique, et classés en fonction des gammes de longueur d’onde étudiées. D’après Aschwanden (2005). température, de l’ordre de 1 − 10 MK, dans la couronne solaire, idée établie pour la première fois par Edlén (1943) après avoir observé la présence de raies d’émission provenant d’atomes fortement ionisés. L’atmosphère solaire est structurée en quatre régions aux propriétés physiques différentes : la photosphère, épaisse de seulement 400 km, marque la frontière entre l’intérieur et l’atmosphère solaire, puis la chromosphère, la région de transition, et enfin la couronne. L’atmosphère terrestre absorbant en grande partie le rayonnement X et UV, des instruments spatiaux ont donc été développés pour s’en affranchir, les principales missions correspondantes sont présentées figure 1.1. Les plus récentes, non mentionnées sur la Figure 1.1, sont les sondes jumelles Solar TErrestrial RElations Observatory (STEREO) (Kaiser 2005), ainsi que les satellites Solar dynamics Observatory (Pesnell et al. 2012) et Hinode (Kosugi et al. 2007), avec à leur bord différents instruments, dont magnétographes, spectromètres, coronographes, imageurs visible, UV et X. Pour une revue des observations spatiales, le lecteur pourra consulter Aschwanden (2005). La Figure 1.3 montre plusieurs images simultanées prises par l’instrument Atmospheric Imaging Assembly (AIA ; Lemen et al. 2012), révélant la structure des différentes couches de l’atmosphère. Un magnétogramme, obtenu simultanément par l’instrument Helioseismic and Magnetic Imager (HMI ; Schou et al. 2012), est également présenté figure 1.3 (e), fournissant une mesure du champ magnétique photosphérique. Les zones noires indiquent un champ magnétique dont la direction est opposée à celle de la ligne de visée (vers l’observateur) alors que les zones claires indiquent une direction positive. On peut ainsi clairement observer la corrélation qui existe entre activité magnétique et les structures présentes dans les différentes couches de l’atmosphère solaire. Les zones présentant une forte concentration de lignes champs, sont aussi les plus lumineuses et les plus actives et les plus chaudes sur les images de la couronne. Dans le soleil interne, la température diminue continuellement entre le noyau (∼15 MK), source d’énergie, et la surface (∼5800 K), en accord avec la première loi de la thermodynamique. En revanche, le constat est différent dans l’atmosphère solaire. La figure 1.2 montre l’évolution de la température et de la densité dans chacune des couches qui constituent l’atmosphère solaire. Dans la chromosphère, la température atteint un minimum ∼ 4400 K, puis augmente progressivement, jusqu’à atteindre des températures de l’ordre de 20 000 K à une altitude d’environ 2000 km au dessus de la surface solaire, tandis que la densité diminue (de 10−4 à 10−8 fois plus faible que dans la photosphère). La chromosphère et la couronne solaire (cf Section 1.1.2) sont séparées par une région très fine, appelée la région de transition, dans laquelle les gradients de température et de densité sont très élevés. Les températures dans la couronne solaire atteignent ensuite des valeurs de l’ordre du million de degrés, voire au-delà : le premier principe de la thermodynamique n’est dans ce cas plus respecté. Un mécanisme physique additionnel d’apport d’énergie, d’origine non radiatif, est donc nécessaire pour expliquer ce phénomène. C’est ce dont nous parlerons dans la Section 1.1.3. Il est à noter que les altitudes exactes de chacune des zones atmosphériques dépendent en fait de l’activité solaire ; en outre, la courbe présentée figure 1.2 est obtenue dans le cadre d’un modèle 1D hydrostatique, donc simplifié. 

 

La couronne Constituée d’un plasma chaud, peu dense et presque totalement ionisé, la couronne présente une dynamique intrinsèquement liée au champ magnétique. Le rapport de la pression cinétique, liée à l’agitation thermique, sur la pression magnétique oscillant autour de β ∼ 1−10% (Aschwanden 2005), les déplacements de matière au sein de la couronne sont intimement reliés à la topologie et à l’intensité du champ magnétique coronal. C’est précisément à des observations de cette région de l’atmosphère que nous allons nous intéresser dans la suite de ce travail. Dans la couronne, une grande variété de structures différentes se côtoient : régions actives, localisées autour des régions à fort champ magnétique, trous coronaux, « streamers », des zones calmes, points brillants, plumes, protubérances, etc… La température y dépasse souvent le million de degrés, particulièrement dans les régions actives où elle est de l’ordre de 4-5 MK. Des phénomènes éruptifs parfois impulsifs et énergétiques y sont aussi observés, comme les flares par exemple, dans lesquels la température peut parfois dépasser les 20 MK. Comprendre l’origine de telles températures constitue aujourd’hui l’un des enjeux majeurs de la physique coronale. La structure du champ magnétique de la couronne solaire peut être grossièrement séparée en deux zones aux propriétés différentes : les régions où les lignes de champ magnétique sont ouvertes et celles où au contraire, les lignes sont fermées. Les régions aux lignes de champ ouvertes sont principalement situées dans les régions polaires (voir figure 1.5), zones qui s’étendent parfois jusqu’à l’équateur, et connectent la photosphère solaire au milieu interplanétaire. Ce type de configuration magnétique permet un transport efficace du plasma chromosphérique vers le milieu interplanétaire : c’est ce qu’on appelle le vent solaire rapide, avec une vitesse de l’ordre de 800 km.s−1 (Krieger et al. 1973). On observe alors la formation de trous coronaux (voir Cranmer 2009, pour une revue de leurs propriétés physiques), zones pour lesquelles la température et la densité sont plus faibles, puisque la majorité du plasma s’échappe via les lignes de champ ouvertes. Ils apparaissent alors comme des zones plus sombres sur les observations UV ou X de la couronne desquelles s’échappent des structures  fines et brillantes qui s’étendent depuis la chromosphère jusqu’à la haute couronne : c’est ce qu’on appelle les plumes polaires (voir Wilhelm et al. 2011, pour une revue de leurs propriétés). Dans les régions aux lignes de champ fermées, le champ magnétique émerge en un point de l’astre et rejoint la surface en un autre, formant ainsi une boucle, jusqu’à des altitudes de l’ordre de 1.2-1.3 R⊙ (Bray et al. 1991). Ce zones sont concentrées autour de l’équateur, à des latitudes en général inférieures à 45° (voir figure 1.5). Pour des altitudes plus importantes au dessus de ces zones, les lignes de champ sont ouvertes et le plasma peut à nouveau s’échapper ; c’est ce qu’on appelle le vent solaire lent, avec une vitesse deux fois moins élevée que celui issu de trous coronaux, de l’ordre de 400 km.s−1 (Aschwanden 2005). Si l’origine géographique des deux types de vents solaires est à peu près bien comprise, les mécanismes physiques à l’origine de l’accélération des particules demeurent encore mal compris. Les boucles coronales, présentes dans ces zones de champ magnétique fermé, sont d’extraordinaires laboratoires nous permettant de comprendre comment se déroule le transfert d’énergie depuis la photosphère jusqu’à la couronne, et sont souvent considérées comme des composantes de bases de la couronne. Dans les boucles, le plasma est confiné à l’intérieur de tubes flux magnétique d’intensité de l’ordre de 0.1-10 Gauss, ancrés au sein même de la photosphère. Observables dans les X et dans l’extrême Ultraviolet, comme illustré par exemple sur la Figure 1.4 par le télescope Transition Region And Coronal Explorer (TRACE ; Handy et al. 1999), les boucles présentent une structure en forme d’arches et existent à toutes les échelles : les points brillants, par exemple sont modélisés comme de « petites » boucles (∼ 1 MK), non résolues spatialement par les instruments, alors que les plus grandes, au sein de régions actives peuvent atteindre des longueurs d’environ 4 ordres de grandeur supérieurs (Reale 2010) (cf. première colonne de la Table 1.1). Les boucles coronales sont localisées principalement dans les régions actives, associées aux taches solaires, mais peuvent aussi exister dans les régions plus calmes. D’après Aschwanden (2001), les régions actives produiraient un peu plus de 80% de l’énergie requise pour chauffer la couronne en période de soleil actif. Certaines boucles (les flaring loops) peuvent être accompagnées d’une libération soudaine d’énergie, appelée flare et associée à une augmentation de l’émission dans un large intervalle du spectre électromagnétique. La majorité des flares sont observés dans les régions actives et sont parfois suivis par une éjection coronale de masse. Pour une description détaillée de ce type de boucles d’intérêt majeur pour la compréhension des phénomènes de transfert d’énergie, le lecteur pourra se référer au chapitre 4 de Bray et al. (1991). La figure 1.6 montre des observations simultanées d’un système de boucles coronales acquises par le spectromètre Hinode/EIS : on peut particulièrement bien observer l’embrillancement associé à une forte émission X dans les deux raies les plus chaudes. Les boucles coronales sont remplies d’un plasma complètement ionisé provenant initialement de la chromosphère. L’énergie thermique est transportée principalement le long des lignes de champ. Isolées thermiquement de leur environnement par le champ magnétique, les boucles peuvent présenter différentes températures, de ≃ 105 K (boucles froides) à quelques 106 K (boucles chaudes), et même jusqu’à plus de 107 K pour les flaring loops. La densité peut quant à elle varier entre 108 et 1010 cm−3 (cf. troisième colonne de la Table 1.1), Hormis leurs températures différentes, les propriétés physiques de ces deux classes semblent être identiques

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