Les enjeux scientifiques actuels de l’altimétrie en bande Ka 

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L’altimétrie Nadir delay/Doppler

L’altimètre Doppler se base sur un principe similaire au traitement SAR des radars imageurs. La taille de l’antenne embarquée étant petite, elle possède une mauvaise résolution. Le radar à synthèse d’ouverture permet de recréer une antenne dite « synthétique » en augmentant de ma-nière artificielle sa taille dans la direction de déplacement du satellite, assurant ainsi une meilleur résolution du système dans cette dimension. Cette technique permet également de différencier, grâce au traitement Doppler, les pixels radar entre eux au sein de la fauchée. À la différence des SAR classiques à visée latérale, l’altimètre Doppler fonctionne toujours pour des angles de visées Nadir, ce qui introduit une ambiguïté quant à la différenciation de l’origine du signal retour entre la partie droite et gauche de la fauchée. À la différence de l’altimétrie Nadir conventionnelle, la fréquence de répétition des impulsions (PRF 3) est très grande pour bien échantillonner la bande Doppler relative à une petite antenne. Un traitement SAR est alors appliqué aux échos retour per-mettant d’améliorer la résolution dans la direction azimut, par exemple, une résolution de l’ordre de la centaine de mètre contre 10 km en altimétrie conventionnelle. Le concept d’altimétrie Nadir Doppler permet donc d’améliorer la résolution au sol par rapport à l’altimétrie conventionnelle, mais présente également un fort intérêt pour les zones de transitions, c’est-à-dire, des surfaces comme les lacs, les fleuves, ou encore les côtes. Nous aborderons plus en détails le principe du SAR dans le paragraphe suivant.

L’altimétrie à large fauchée

Le concept de l’altimétrie large fauchée (Li and Goldstein [1990]; Rodriguez and Martin [1992]; Rosen et al. [2000]) utilise un instrument interférométrique légèrement dépointé de la visée Nadir avec un traitement SAR dans la direction azimut. Contrairement aux radars imageurs qui utilisent souvent l’interférométrie multipasses (plusieurs survols successifs d’une même zone sont effec-tués, comme par exemple les satellites ERS-1 et ERS-2), l’altimétrie interférométrique exige une configuration monopasse pour faire face à la variabilité de la surface océanique. Les acquisitions sont faites par deux antennes portées par la même plateforme qui forme alors la base interféro-métrique. Nous développons ici les principes de base, dans un premier temps du SAR et ensuite de l’interférométrie radar. Nous faisons des liens avec la mission SWOT le cas échéant. Les différents principes énoncés dans ce paragraphe sont inspiré du livre de Massonnet and Souyris [2008].

Le radar imageur

Le radar à ouverture réelle (RAR 4) permet d’imager une surface éclairée. Le fonctionnement d’un radar est différent d’un instrument optique (à l’exception des LIDAR 5) car il fait de la discri-mination de cibles en distance et non angulaire. En effet, un radar va mesurer un temps de trajet de l’onde électromagnétique émise, c’est la vision distance du radar (range vision). L’image obtenue par un radar imageur dépend du déplacement du porteur de l’antenne, qui vise latéralement par rapport au sens de déplacement (appelé direction cross-track 6). Le radar émet des impulsions, chaque implusion éclaire une bande de surface que l’on souhaite aussi petite que possible. La fauchée, qui définit les dimensions de l’image, est déterminée par les distances Near Range (NR, distance proche) et Far Range (FR, distance lointaine). Les caractéristiques du RAR sont illustrées sur la figure 1.4 suivante où L correspond à la longueur de l’antenne dans la direction azimut (aussi appelée direction along-track 7), Vs at est la vitesse de déplacement du satellite sur son orbite, raz est la résolution dans la direction azimut du RAR.
• La fréquence porteuse f0, c’est la fréquence de l’oscillateur de l’instrument, également ap-pelée fréquence électromagnétique du radar. Cette fréquence est reliée à la longeur d’onde électromagnétique par la relation : λ0 = c/ f0, où c est la vitesse de la lumière.
• La fréquence d’échantillonnage en distance fd , définit le temps de l’impulsion du radar, elle est reliée à la durée de l’impulsion par la relation : τd = 1/ fd . Cette fréquence permet de définir la résolution distance du radar qui s’exprime, en prenant compte du trajet aller-retour du radar

Le SAR interférométrique

Le SAR conventionnel permet de mesurer la position d’une cible dans un plan (range, azimut). Le développement de l’interférométrie SAR (InSAR 9, voir Li and Goldstein [1990]; Rodriguez and Martin [1992]; Rosen et al. [2000]) a permis de mesurer la troisième dimension, qui n’est autre que la hauteur. Cette technique est particulièrement bien adaptée aux missions topographiques, ce qui est le cas de la mission SWOT.
Le principe de l’interférométrie radar est assez simple. Deux images radar observées à partir de deux antennes voisines ont des délais de propagation de leurs signaux presque identiques mais des phases différentes. En interférométrie, le signal complexe de la première image est multiplié par le conjugué du signal de la deuxième image (après co-registration des deux images), cela cor-respond simplement à une différence de phase des deux signaux. La contribution inconnue des cibles élémentaires à l’intérieur de la cellule de résolution est éliminée dans le calcul de la phase différentielle. La phase différentielle est alors proportionnelle au délai de propagation de la phase entre les deux images. Cette opération consiste à former un interférogramme.
Considérons maintenant la géométrie du système interférométrique, comme illustré sur la figure 1.8 où :
• Hs at est l’altitude du satellite par rapport au plan moyen de la surface d’eau
• η est la variation de la hauteur d’eau autour du plan moyen au point considéré
• θ est l’angle de visée en incidence par rapport à la verticale de l’antenne S1
• R1, respectivement R2, est la distance de l’antenne S1, respectivement S2, au point considéré
• B est la distance du mât qui sépare les deux antennes (Baseline en anglais)
Le délai entre les deux phases des deux signaux complexes s1 et s2 associés, respectivement aux antennes S1 et S2, se rapporte alors à une différence de chemin entre les deux antennes : ∆R=R2−R1 (1.15)
Il existe deux modes de fonctionnement d’un système interférométrique :
• le mode dit « standard », ou encore appelé « non ping-pong », est un mode de fonctionnement où une antenne émet (par exemple S1) et les deux antennes reçoivent le signal diffusé (S1 et S2).
• le mode dit « ping-pong » dans lequel chaque antenne émet et reçoit alternativement les si-gnaux radars.

La mission SWOT

Le projet SWOT : Surface Water Ocean Topography est un projet en collaboration entre le labo-ratoire JPL 10 de la NASA 11 et le CNES 12 (Lee-Lueng et al. [Mission Science Document]). C’est une mission altimétrique innovante dont l’instrument principal KaRIn, Ka Radar Interferometer, est un SAR interférométrique à faible incidence en bande Ka. L’interféromètre devrait fonctionner en mode « standard » (« non ping-pong »). L’objectif principal de cette mission est d’améliorer la cou-verture spatio-temporelle des mesures altimétriques océaniques mais aussi d’étendre les mesures altimétriques à l’hydrologie continentale (lacs, rivières, etc…).
L’instrument KaRIn a deux modes de fonctionnement :
• Un mode océanographie, ou encore mode LR (Low Rate), spécifique à la mesure altimé-trique sur océans permettant une précision de hauteur altimétrique de 1 à 2 cm sur une surface d’ 1 km2.
• Un mode hydrologie, ou encore mode HR (High Rate), spécifique à la mesure altimétrique hydrologique, pour la surveillance des réserves d’eau douce de la planète. La précision es-pérée est de l’ordre de 11 cm (après moyennage sur des surfaces de 1 km2) sur la mesure de hauteurs d’eau et une détection des lacs de dimensions supérieures à 250×250 m2 (objectif ≥ 100×100 m2) et des rivières dont la largeur est supérieure à 100 m (objectif ≥ 50 m).
Les caractéristiques principales de l’instrument KaRIn et du satellite SWOT sont résumées dans le tableau 1.1. L’incidence proche Nadir de visée de SWOT fait que la taille des pixels au sol (pg ) varie fortement le long de la fauchée range. Elle s’étend de 60 m en Near Range jusqu’à 10 m en Far Range. La fauchée en range de SWOT s’étend de 10 km en Near Range par rapport à la verticale jusqu’à 60 km en Far Range.
Stratégie de traitement du mode LR :
Afin de diminuer la quantité de données à envoyer au sol, on augmente la taille des pixels en pro-cédant à un moyennage distance et azimut. La synthèse SAR n’est pas complète, le processus de moyennage s’effectue à bord sur 9 impulsions successives (appelées burst), ce qui donne, pour un ensemble de 9 impulsions successives, 9 pixels de 250 m en azimut (la résolution azimut du RAR étant d’environ 2 km). Le processus de moyennage à bord est un processus de synthèse SAR non focalisée, c’est-à-dire que l’erreur de phase ∆φ(t ) (voir équation 1.23) n’est pas corrigée sur les vues. La condition d’application du processus de synthèse non focalisée est que l’évolution de la distribution de phase en azimut reste inférieure à π/4 durant le processus de moyennage : ∆φ(t ) ≤ π/4. Cette étape nécessite de moyenner des échos radar cohérents entre eux. Les pixels sont ensuite sommés entre eux, tant qu’ils se trouvent à une distance inférieure ou égale à la taille du pixel final (1 km) du premier pixel sommé. La sommation des pixels de 250 m permet la réduc-tion du bruit sur le pixel final, bruit dont l’amplitude décroît en 1/ N avec N le nombre de pixels de 250 m sommés. Ce processus est appelé processus multi-vues (multi-look en anglais). Pour des pixels de 250 m, des vues décalées de 15 m (= 9 × paz , voir équation 1.3) et une taille finale de pixel de 1 km, environ 50 vues successives peuvent être sommées (N=(1000-250)/15). La moyenne spatiale range, pour aboutir à des pixels de 1 km, est obtenue en groupant les échantillons suivant leurs tailles dans la fauchée (de 60 m à 10 m).

Influence d’une surface d’observation mouvante

L’observation des surfaces d’eau présente une difficulté principale pour l’altimétrie à large fau-chée. En effet, les surfaces observées bougent au cours du temps, et donc entre les différentes acquisitions radars et interférométriques. Nous présentons dans ce paragraphe les différentes er-reurs sur la synthèse SAR et sur la phase interférométrique dues aux mouvements de la surface observée.

Erreurs sur le processus de synthèse SAR

Nous reprenons ici les principes énoncés dans le paragraphe 1.1.3.2 mais en considérant cette fois-ci une surface observée qui évolue dans le temps. Les effets dûs aux mouvements orbitaux des vagues ont longuement été étudiés (Raney [1971, 1980]; Alpers and Rufenach [1979]; Rufenach and Alpers [1981]). Le mouvement de cette surface entraîne un déplacement de la distance surface – satellite au cours du temps, comme représenté sur la figure 1.9.

Erreurs d’estimation de la hauteur d’eau

Une cellule de résolution est composée de différentes cibles élémentaires cohérentes spatia-lement. La phase du signal rétrodiffusé est alors la somme des phases élémentaires de ces cibles élémentaires, qui peuvent s’annuler si celles-ci sont en opposition de phase ou se renforcer si leurs phases sont proches. Ces phases de diffusion forment le phénomène de scintillement (speckle en anglais) qui donne cet aspect granulaire aux images SAR. La contribution de l’ensemble des cibles élémentaires donne un aspect aléatoire à la phase de rétrodiffusion et est représentée par une loi uniforme entre [−π; π]. Cet effet de speckle ne rend pas avantageux l’estimation de la phase in-terférométrique Φ sur une seule impulsion radar. Il est préférable de l’estimer sur un échantillon de NL vues successives. Un estimateur non-biaisé modulo 2π de cette phase interférométrique est l’estimateur du minimum de vraisemblance (Rodriguez and Martin [1992])

Table des matières

Introduction 
1 Les enjeux scientifiques actuels de l’altimétrie en bande Ka 
1.1 Les différentes techniques altimétriques radar
1.1.1 L’altimétrie Nadir conventionnelle
1.1.2 L’altimétrie Nadir delay/Doppler
1.1.3 L’altimétrie à large fauchée
1.2 Influence d’une surface d’observation mouvante
1.2.1 Erreurs sur le processus de synthèse SAR
1.2.2 Erreurs d’estimation de la hauteur d’eau
2 La télédétection océanique en micro-onde 
2.1 Description de la surface océanique
2.1.1 Généralités
2.1.2 Relation de dispersion des vagues de capillarité-gravité
2.1.3 Description statistique de la surface
2.1.4 Description spectrale de la surface
2.2 Modèles de diffusion électromagnétique
2.2.1 L’approximation du Plan Tangent
2.2.2 L’approximation de l’Optique Géométrique
2.2.3 Le modèle deux échelles
2.3 Implémentation numérique
2.3.1 Implémentation numérique dumodèle PO
2.3.2 Implémentation numérique dumodèle GO
3 Le modèle GO4 
3.1 Contexte
3.2 Lemodèle GO4
3.2.1 Modèle GO4 isotrope
3.2.2 La courbure effective
3.2.3 Exemples et résultats
3.3 Lemodèle GO4 directionnel
3.3.1 Modèle GO4 anisotrope ou directionnel
3.3.2 Modèle GO4 omnidirectionnel
3.3.3 Courbure effective directionnelle
3.3.4 Exemples de SERN directionnelle
3.3.5 Corrections non-gaussiennes
3.4 Estimation de paramètres de surface à partir de données expérimentales
3.4.1 TRMM
3.4.2 SRA
3.4.3 Jason 2
3.4.4 Synthèse des données
3.5 Lemodèle GO4 dans la simulation deux-échelles
3.6 Conclusions sur lemodèle GO4
3.A Annexe – Développement du calcul deux-échelles
3.A.1 Principe
3.A.2 Calcul de la modulation par les grandes échelles
4 Mesure de spectre et de SERN bande Ka en environnement contrôlé 
5 Approche temporelle 
5.1 Temps de corrélation du signal rétrodiffusé
5.1.1 Expression de l’autocorrélation spatio-temporelle du signal rétrodiffusé
5.1.2 Temps de corrélation du signal rétrodiffusé
5.2 Étude de la phase du signal rétrodiffusé
5.2.1 Détermination du décalage Doppler des vagues
5.2.2 Application au spectre demer d’Elfouhaily et implémentation numérique
5.3 Application à la synthèse SAR non focalisée
5.3.1 Critères d’application de la synthèse SAR non focalisée
5.3.2 Application à la synthèse SAR non focalisée de SWOT
5.A Annexe – Implémentation numérique des fonctions de corrélation
6 Conclusion et perspectives 
6.1 Synthèse des principaux résultats de ce manuscrit
6.2 Perspectives
6.3 Conclusion générale
Bibliographie 
Communications scientifiques
Table des figures
Liste des tableaux

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