Les entrées royales de Louis

Les entrées royales de Louis

Pour mieux saisir le sens profond de l’entrée royale il faut en étudier quelques unes appartenant à différentes périodes afin d’en observer l’évolution. Nous étudions les entrées royales qui ont marqué le XVIIème provençal. A présent nous allons voir les différentes entrées de Louis XIII lors de son voyage en Provence en 1622. Le trente octobre 1622, Louis XIII entra à Arles, le trois et dix novembre à Marseille et le seize novembre il se rendit à Avignon. Il y fut bien entendu reçu avec les fastes habituels et les marques usuelles de fidélité. Nous aurons l’occasion de voir que l’intérêt qui lui était porté différait selon la ville d’accueil. En effet, les entrées diffèrent selon la cité d’accueil car les différences géopolitiques vont plus ou moins déterminer le degré d’importance accordé au monarque. Toutes les villes n’ont pas le même statut et les mêmes attachements au souverain. Avignon, Aix et Marseille ont une place et des avantages différents par rapport à la royauté. La situation géopolitique d’Avignon est considérable, ville papale et ville « étape », elle est une escale inévitable dans le voyage. Aix est une ville parlementaire et aristocratique; quant à Marseille elle est une ville côtière et marchande, elle est ouverte sur le monde et fait le lien entre l’extérieur et la France. Et comme nous l’avons dit précédemment dans notre étude, l’intérêt des entrées royales ne se réduit pas à la simple glorification du roi. Donc, même si Louis XIII était venu en Provence en automne 1622 pour se glorifier d’avoir réduit le Languedoc à l’obéissance et d’avoir mis un terme à la révolte des protestants, il existait un autre enjeu à cette démarche. Il s’agissait pour les villes d’obtenir le maintien des privilèges, coutumes et autres franchises, mais aussi d’affirmer l’irréductible différence et indépendance de la ville et de la province tout entière. L’entrée royale est perçue comme légitime dans le sens où elle manifeste le droit du monarque au triomphe. Et la glorification est adressée plus à la fonction qu’à la personne même du roi. C’est le nom et la haute signification du mot « roi » qui sont honorés et dont on illustre les valeurs. Nous verrons que durant les entrées, certaines villes, notamment Aix, détournaient les cérémonies à leur avantage. Les entrées étant différentes suivant le contexte et la ville où elles avaient lieu, on constate que leur importance se mesure en fonction de ces paramètres. Les entrées sont parfois le reflet d’une société à un moment donné de l’Histoire. C’est pourquoi il est possible de rencontrer des éléments locaux dans ces cérémonies. Pour les entrées d’Aix et de Marseille, on trouve des ambiguïtés et des non-dits qui suggèrent assez un certain désaccord entre les parties.

L’entrée de Louis XIII à Aix, le trois novembre 1622

L’entrée du roi à Aix était significative. Sa venue, le trois novembre 1622, étant relativement inattendue, il avait été reçu dans la joie et avec des acclamations. La ville n’avait pas eu le temps de préparer la décoration, le monarque promit de revenir et on activa les préparatifs. Il entra finalement le neuf novembre. Passant par la porte des Augustins, il se rendit à Saint-Sauveur par sept arcs de triomphe auxquels avaient travaillé les meilleurs peintres de la ville. Tout cela se fit dans le vacarme des pétards, l’éclat des illuminations, les feux d’escopettes et la démesure des compliments. Louis XIII fut enchanté de cette cérémonie d’héroïsation et de cet accueil d’honneur prestigieux qu’on lui avait réservé. Dans l’entrée d’Aix, on constate qu’on aime à rabaisser les prétentions de Marseille. Il faut noter qu’une rivalité opposait les deux villes. Ainsi, les arcs de triomphe à Aix lors de l’entrée de Louis XIII insinuaient la tendance à la trahison de Marseille et sa révolte durant les guerres de religion. Notons que Marseille devient une république indépendante en 1591. Marseille est reconnue terre distincte par les clauses des « chapitres de paix » passés en 1257 avec le comte de Provence et garantis plus tard par les rois de France. Ainsi pour les Marseillais, la ville ne faisait pas partie du royaume. Et le protocole même de l’entrée royale dans la ville insistait sur la volonté d’affirmer sa particularité. Quant à Aix, Chasteuil (auteur de la relation d’Aix) insiste sur l’inaltérable fidélité d’Aix pendant les troubles. Mais cela ne veut en rien prétendre que la ville n’émet pas le souhait d’être reconnue et favorisée par le monarque, mais bien au contraire. Parce que, effectivement, c’est dans l’entrée d’Aix que l’on trouve la plus nette et la plus explicite affirmation de l’identité provençale.

 

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