L’état de stress post-traumatique (ÉSPT)

En raIson des séquelles traumatiques persistantes avec lesquelles sont restés les soldats qui ont participé à la guerre du Vietnam, l’American Psychological Association (A PA) introduit officiellement en 1980 le diagnostic psychiatrique d’ÉSPT dans la catégorie des troubles anxieux du Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSM). Depuis son intégration au DSM, quelques chercheurs et cliniciens ont remis en question les critères diagnostiques s’y rapportant, provoquant même des débats sur des critères précis (Breslau & Kessler, 2001; Brewin, Andrews, & Rose, 2000; McNally, 2009; O’Donnell, Creamer, McFariane, Silove, & Bryant, 2010).

Puisque le diagnostic d’ÉSPT ne peut être établi que si les symptômes se manifestent pendant une période d’au moins un mois (American Psychological Association, APA, 1994), l’APA incorpore l’état de stress aigu (ÉSA) au DSM-IV pour diagnostiquer les conditions dont les symptômes perdurent depuis moins d’ un mois. De plus, dans cette quatrième version du DSM, pour qu ‘ un évènement soit qualifié de traumatique, il devait avoir suscité chez l’ individu un sentiment de peur, d’ horreur ou d’ impuissance (APA, 1994). Ce critère s’avérait très important et l’ individu pouvait avoir vécu lui-même l’évènement ou en avoir été témoin. Enfin, pour la toute première fois, une consigne spéciale était émise quant aux possibles difficultés reliées à l’application des critères du manuel diagnostique lors de l’évaluation de l’ÉSPT chez des personnes d ‘autres groupes ethniques ou culturels (Friedman, Resick, Bryant, & Brewin, 20 Il ; Josse, 2013).

Comparaison des critères de l’ÉSPT selon le DSM-IV et le DSM-S 

L’APA a publié, en 2013, la cinquième version du DSM. Des modifications importantes ont été apportées aux troubles post-traumatiques: l’ÉSA et l’ÉSPT. À l’origine, l’ÉSA et l’ÉSPT étaient classés dans la catégorie des troubles anxieux, mais depuis la parution du DSM-5 , ces deux diagnostics se retrouvent dans le nouveau chapitre portant sur les troubles consécutifs aux traumatismes et au stress (APA, 2013). De plus, l’ÉSPT porte dorénavant le nom de trouble de stress post-traumatique (TSPT).

Premièrement, pour qu ‘ un TSPT soit reconnu, la personne doit avoir été exposée à un ÉT (critère A). Le DSM-5 ajoute l’agression sexuelle et sa menace aux ÉT retenus dans le DSM-IV : la mort ou la menace de mort, les blessures graves ou la menace de telles blessures et la menace pour l’ intégrité physique . Alors que le DSM-IV considérait que seules les victimes directes (critère Al) pouvaient souffrir d’un état posttraumatique aigu ou chronicisé (APA, 1994), la nouvelle version admet qu’un sujet puisse être traumatisé du fait de sa proximité émotionnelle avec une victime directe (famille et amis proches) ou parce qu’il a été confronté de manière répétée à des situations traumatisantes en raison de ses activités professionnelles (APA, 2013).

Le critère A2 du DSM-IV, portant sur les réactions émotionnelles, exigeait que l’individu ait manifesté une peur intense, un sentiment d’ impuissance ou d’horreur face à l’ évènement. L’ ajout de ce critère avait pour objectif de réduire tout diagnostic d’ÉSPT nébuleux lorsque le critère A 1 était imprécis. Par contre, la pertinence de conserver le critère A2 comme critère diagnostique de l’ÉSPT a été remise en question par certains auteurs (Breslau & Kessler, 2001 ; Brewin et al., 2000; McNally, 2009; Ü’Donnell et al., 2010). Ainsi, Breslau et Kessler (2001) considéraient que la composante « subjective » du critère A2 ne renforçait pas de manière significative le diagnostic de l’ÉSPT autant que pouvait le faire « objectivement » le critère Al. Ceux-ci proposaient d’ ailleurs d’ utiliser le critère A2 comme critère de dépistage plutôt que comme critère diagnostique. En s’ appuyant sur des données empiriques, Brewin et al. (2000) ont constaté que des niveaux intenses de peur, ressentis immédiatement après l’exposition à l’ÉT, tout comme l’impuissance et l’horreur, permettaient une faible prédiction de l’ÉSPT SIX mois après l’ évènement. Ils ont également découvert que d’autres réactions émotionnelles post-traumatiques, telles que la colère et la honte, prédisaient de manière plus importante l’ÉSPT. Par contre, le risque de trouble ultérieur était aussi présent chez ceux qui ne présentaient pas ces émotions, et ce, après un délai de six mois. O’Donnell et ses collaborateurs (2010) rapportent que dans un échantillon d’individus répondant au critère Al , ainsi qu’aux autres critères B à F de l’ÉSPT, une minorité non négligeable, soit 23 %, n’ avait pas reçu le diagnostic d’ÉSPT à cause de l’ absence du critère A2, de sorte que l’APA a finalement décidé de reclassifier ce critère sous forme de symptôme dans la rubrique de l’ altération négative des cognitions et des affects (critère D4) à l’intérieur de la cinquième version du DSM.

Dans le DSM-IV, les critères diagnostiques de l’ÉSPT étaient répartis en trois catégories : l’intrusion (critère B), les comportements d’évitement et l’ émoussement de la réactivité générale (critère C) et l’activation neurovégétative (critère D). En ajoutant une catégorie supplémentaire, soit celle de l’ altération négative des cognitions et des affects, le DSM-5 regroupe dorénavant un ensemble de 20 symptômes cliniques liés au TSPT. De plus, trois nouveaux symptômes ont été introduits et certains ont été révisés. Dans la version du DSM-IV, les symptômes décrivant les comportements d’ évitement et l’ émoussement de la réactivité générale appartenaient à un seul critère. Le DSM-5 distingue ces deux types de symptômes et crée le critère C pour les comportements d’ évitement et le critère D pour l’ altération négative des cognitions et des affects, ce dernier intégrant deux nouveaux symptômes, soit le blâme persistant par rapport à soi ou à autrui ainsi que les émotions négatives persistantes de 1 ‘ humeur (peur, horreur, colère, culpabilité ou honte). L’ancien critère D du DSM-IV devient alors le critère E et regroupe les symptômes associés à l’ altération de la vigilance et à la réactivité associée à l’ÉT, tout en ajoutant un nouveau symptôme, le comportement autodestructeur ou imprudent (APA, 2013). Le critère E du DSM-IV, concernant la durée de la perturbation (plus d’un mois), n’a pas été modifié, mais est devenu le critère F dans la nouvelle parution du manuel diagnostique. De plus, l’ ancien critère F de la quatrième version, soulignant que la perturbation devait entrainer une souffrance cliniquement significative ou une altération du fonctionnement social ou professionnel, prend le nom de critère G dans le DSM-5. Un critère supplémentaire a été ajouté afin de préciser que les troubles ne peuvent être attribués à la prise d’ une médication, à un abus de substance psychotrope ou à une maladie. Finalement, une spécification quant à la dissociation et la dépersonnalisation pouvant accompagner le TSPT a été adjointe à la liste de ces critères (APA, 2013).

Quelques études ont exploré le fait que de nombreux individus semblaient manifester des signes de dissociation, autres que lesflashbacks et l’ amnésie, ces derniers se trouvant déjà dans le DSM-JV (Griffin, Resick, & Mechanic, 1997; Lanius, Bluhm, Lanius, & Pain, 2006; Lanius et al., 2010; McNally, 2009). Dans le contexte de l’ÉSPT, la dissociation pourrait être interprétée comme une stratégie d’ évitement pour réduire la conscientisation des émotions aversives telles que l’ anxiété extrême (Griffin et al., 1997). De plus, comme le mentionne Kédia (2009), le phénomène de dissociation « altère la qualité du contact avec le thérapeute et entrave les capacités d ‘ introspection puisque le patient a tendance à se dissocier lorsque des émotions pénibles l’envahissent » (p. 494). De plus, Griffin et ses collaborateurs (1997) ont avancé que des victimes de viol récent, manifestant une forte dissociation post-traumatique, présentaient une diminution de la fréquence cardiaque et de la conductance de la peau lorsqu’elles discutaient de leur traumatisme, mais la réaction inverse s’observait aussi chez celles présentant une faible dissociation. Cette observation justifiait ainsi que des mesures auto rapportées de l’ÉSPT peuvent parfois s’ avérer non-valides, en raison justement du détachement de l’affect amené par la dissociation (Griffin et al., 1997; Lanius et al., 2006, 2010). Or, le DSM-5 permet maintenant d’accompagner le diagnostic du TSPT d’une spécification basée sur des symptômes dissociatifs (critère H) comme la dépersonnalisation et/ou la déréalisation (APA, 2013). De plus, le DSM-5 retire la spécification liée à l’atteinte aigüe ou chronique. Des ajouts ont également été faits concernant le TSPT préscolaire, mais ne seront pas traités ici .

Table des matières

Introduction
L’état de stress post-traumatique (ÉSPT)
Comparaison des critères de l’ÉSPT selon le DSM-IV et le DSM-5
Outils d’évaluation de l’ÉSPT
Impact of Event Scale
Impact of Event Scale-Revised
Version francophone de 1 ‘IES-R
Structure factorielle de l’Impact of Event Scale-Revised
Objectifs de la thèse
Article 1. L’Impact of Event Scale-Revised : première évaluation de la structure
factorielle de la version francophone avec une population de personnes âgées
Résumé ..
Abstract
Évaluation de l’impact des évènements traumatisants
Version francophone de l’IES-R
Méthode
Participants
Analyses statistiques
Résultats
Structure factorielle de la version francophone de l ‘IES-R
Évènements traumatisants chez les ainés
Discussion
La structure factorielle de l’IES-R avec une population d’ainés
Types et fréquences d’évènements traumatisants chez les ainés
Forces et limites
Recherches futures
Références
Article 2. Validation de contenu de la version francophone du questionnaire Impact
of Event Scale-Revised selon les critères du DSM-5
Résumé
Abstract
Impact of Event Scale-Revised
Méthode
Participants
Dérou lement.
Analyses
Résultats
Clarté du langage
Pertinence théorique
Critères diagnostiques en fonction du DSM-5
Discussion
Formulation des énoncés
Compatibilité avec les critères diagnostiques du TSPT du DSM-5
Forces et limites
Suggestions pour un meilleur dépistage du TSPT
Références
Conclusion générale

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