Limites à l’intégration du solaire dans l’écosystème de production d’énergie

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Du semi-conducteur à la cellule solaire

Les cellules solaires sont des dispositifs optoélectroniques capables de fournir de l’électricité lorsqu’ils sont exposés à la lumière. Leur fonctionnement repose sur le principe de l’effet photovoltaïque. Découvert en 1839 par le français Edmond Becquerel, l’effet photovoltaïque désigne, de manière générale, la capacité d’un matériau à générer de l’électricité lorsqu’exposé à la lumière.
Les matériaux actifs utilisés dans les cellules solaires, et capables de générer des charges libres sous illumination, sont des semi-conducteurs. Le principe d’une cellule solaire consiste alors à collecter les charges libres produites de cette manière, afin de générer de l’électricité. Le principe de fonctionnement est présenté en Figure 5[19]. Les caractéristiques spécifiques des semi-conducteurs reposent sur la répartition des électrons au sein du matériau. La théorie qui décrit l’organisation des électrons au sein d’un matériau est appelée théorie des Figure 5 : Principe de fonctionnement d’une cellule solaire. Adapté de [19]. bandes.

Théorie des bandes, semi-conducteurs et niveaux d’énergie

La théorie des bandes est utilisée pour décrire les niveaux d’énergie que peuvent occuper les électrons dans un solide cristallin, dans lesquels les atomes sont arrangés de manière périodique. A l’image des niveaux d’énergie discrets que peuvent occuper les électrons dans un atome isolé, dans un solide, ces niveaux d’énergie forment des bandes qui sont séparées entre elles par des bandes dites « interdites » qui consistent en des niveaux d’énergie qu’aucun électron du solide ne peut occuper. La répartition de ces bandes d’énergie dans un solide dépend des éléments qui le composent et de leur organisation cristalline et dicte les propriétés du matériau. La répartition des électrons dans les bandes d’énergie à température nulle (T = 0 K) dicte la nature du matériau et ce notamment à travers leur répartition entre deux bandes spécifiques : la bande de valence (VB) et le bande de conduction (CB). La bande de valence est définie comme la dernière bande remplie complétement, elle est notamment composée des électrons situés en périphérie des atomes qui jouent le rôle de la cohésion du solide. D’autre part, la bande de conduction juste au-dessus, peut, à T=0K, être vide ou partiellement remplie, les électrons qui s’y trouvent sont quasiment libres et sont responsables des propriétés de conduction du matériau. Une quantité importante est également définit, la bande d’énergie interdite, autrement appelé gap d’énergie, qui correspond à la différence d’énergie entre le haut de la bande de valence et le bas de la bande de conduction. Différents cas se distinguent alors[20] :
– La bande de conduction est partiellement remplie : le matériau est un métal
– La bande de conduction est vide et le gap d’énergie est nul : c’est le cas des semi-métaux
– La bande de conduction est vide et le gap d’énergie est non nul : le matériau est alors un semi-conducteur ou un isolant. La distinction entre les deux cas n’est pas nette et dépend de la valeur en énergie du gap. De manière générale, le matériau est défini comme semi-conducteur lorsque le gap ne dépasse pas quelques électron-volts (eV) et isolant lorsqu’il est supérieur.
Ces considérations sont résumées en Figure 6[21]. Ainsi, dans un semi-conducteur, pour qu’un électron participe à la conduction, il doit être promu de la bande de valence vers la bande de conduction, et ce par excitation thermique ou par l’absorption d’un photon dont l’énergie hν est supérieur ou égale à la valeur du gap d’énergie. Dans le cas des molécules, se trouvant entre l’atome isolé et le solide périodique, le dernier niveau occupé et le premier niveau libre sont nommés respectivement HOMO et LUMO (dénominations anglaises de « Highest Occupied Molecular Orbital » et « Lowest Unnoccupied Molecular Orbital »). A T= 0K, l’énergie de Fermi, EF, est définie[20] comme le niveau d’énergie maximal que les électrons occupent ou autrement dit, l’énergie que possède l’électron le moins lié à l’atome. Ce niveau de Fermi correspond à une loi statistique d’occupation des niveaux d’énergie par l’ensemble des électrons et est représentée par une loi de distribution dite de Fermi-Dirac, dans laquelle pour en donner une représentation simple, le niveau de Fermi correspond à l’état d’énergie qui a une probabilité de ½ d’être occupé. Ainsi, le niveau de Fermi se trouve dans la bande de conduction pour les métaux tandis qu’il se trouve au milieu de gap pour les semi-conducteurs. Dans un semi-conducteur, lorsqu’un électron est promu dans la bande de conduction, il laisse alors derrière lui un trou dans la bande de valence, dont on peut également décrire les états pour représenter l’organisation des électrons restants dans la bande valence, autrement dit, la réorganisation des électrons de la bande de valence restants est plus simplement décrite en parlant des états du trou que s’il fallait décrire les états de tous les électrons restants. Les propriétés de ce trou sont également des facteurs qui influent les propriétés de conduction du matériau. Lorsqu’un électron est promu dans la bande de conduction, il peut soit être collecté par l’application d’une différence de potentiel électrique, soit il se recombinera avec le trou dans la bande de valence en réémettant un photon. Différentes quantités définissent la structure électronique d’un matériau, Figure 7[22], et dictent les propriétés électroniques des semi-conducteurs :
– Le niveau d’énergie du vide (EVAC) : les électrons d’un solide sont piégés dans le potentiel périodique que représente la structure cristallographique du matériau. Il existe aux frontières du solide une barrière de potentiel empêchant les électrons de s’échapper du matériau. Le niveau d’énergie du vide est défini comme le niveau d’énergie qu’aurait un électron qui aurait passé cette barrière de potentiel et serait au repos à quelques nanomètres en dehors du solide.
Ce niveau d’énergie est au cœur des définitions des propriétés qui suivent.
– L’énergie d’ionisation (IE) est l’énergie nécessaire pour extraire un électron du matériau depuis la bande de valence. Autrement dit, envoyer un électron de la VB vers EVAC. Plus l’énergie d’ionisation est grande, plus l’extraction d’un électron de la surface nécessitera d’énergie. La différence de valeur d’IE à l’interface entre deux matériaux dicte le transfert des trous photogénérés d’une couche vers une autre.
– L’affinité électronique (EA) est en quelques sortes le processus inverse et correspond à l’énergie perdue par l’électron qui passe du niveau du vide vers la bande de conduction. La différence de valeur d’affinité électronique entre deux matériaux à l’interface dicte l’extraction des électrons d’une couche vers une autre.
– Le travail de sortie (WF) : Il correspond à l’énergie nécessaire pour promouvoir un électron du niveau de fermi vers EVAC. Dans les métaux, le niveau de Fermi correspond à la séparation entre les états occupés et les états non-occupés et ainsi, les valeurs de IE, EA et WF sont communes. Dans un semi-conducteur, WF dépend directement de EVAC et du niveau de Fermi qui dépendent de la densité d’états, de la température, de la densité de porteurs de charges (électrons/trous) et du pourcentage de dopage (ce concept est rappelé dans le prochain paragraphe). La différence de travail de sortie à l’interface entre deux matériaux est responsable en grande partie de l’alignement relatif de leurs niveaux d’énergie et dicte le transfert de charges d’une couche vers l’autre. La valeur du travail de sortie reflète l’énergie nécessaire pour extraire des charges du matériau, plus le WF est grand, plus il faut d’énergie pour extraire un électron de la surface du matériau.

Jonction P-N

Dans un semi-conducteur, une force est nécessaire pour extraire les charges excitées thermiquement ou par l’absorption d’un photon afin d’empêcher leur recombinaison. Différentes stratégies ont été développées, et sont à l’origine de l’effet photovoltaïque, dont la plus connue est la jonction P-N. Il existe aussi d’autres types de jonctions telles que métal/isolant/semi-conducteur (MIS) ou encore les contacts sélectifs. Une brève explication des phénomènes au cœur de la jonction P-N est présentée ici. La concentration intrinsèque de porteur de charges (électrons et trous) dans un semi-conducteur à température ambiante influe les propriétés de conduction du matériau et peut être contrôlée par le phénomène de dopage. Ce mécanisme consiste à introduire dans la structure cristalline des « dopants » en faible quantité, qui de par leur nature vont soit apporter des électrons supplémentaires (dans ce cas, le dopage est dit de type N pour négatif) soit en retirer (le dopage est alors dit de type P). Un exemple connu est celui du Silicium, un semi-conducteur largement utilisé dans l’industrie, que l’on peut doper N par l’incorporation de Phosphore (un électron de valence de plus que le Silicium) dans la structure, ou doper P par l’ajout de Bore (un électron de valence de moins que le Silicium), le principe est schématisé en Figure 8[19]. Lors d’un dopage de type N, le surplus d’électrons implique un déséquilibre dans le nombre de charges, ainsi les électrons représentent les porteurs de charges majoritaires et les trous les porteurs de charges minoritaires (et inversement dans le cas d’un dopage de type P). Ce dopage créée de nouveaux niveaux d’énergies dans la structure de bandes qui se situent alors proches de la bande de conduction dans le cas d’un dopage N et proche de la bande de valence dans le cas d’un dopage P. Ces nouveaux niveaux changent l’environnement électronique du matériau et résulte en une modification de la position du niveau de Fermi dans le gap du semi-conducteur, se situant alors plus proche de la bande de conduction pour un dopage N et inversement pour un dopage P. Un semi-conducteur qui n’est pas dopé est dit « intrinsèque ». Il est également important d’ajouter que le dopage n’est pas nécessairement volontaire, la présence d’impuretés dans la structure du matériau ou à sa surface joue également le même rôle. Une jonction P-N consiste en la mise en contact de deux semi-conducteurs, l’un dopé P et l’autre dopé N. La dénomination « homojonction P-N » est utilisée lorsque les deux semi-conducteurs de base sont les mêmes, sinon le terme « hétérojonction P-N » est employé. Pour reprendre l’exemple du Silicium, la mise en contact d’une couche de Silicium dopé au Bore avec une couche de Silicium dopée au Phosphore consisterait en une homojonction P-N. Leur mise en contact résulte en une réorganisation des charges à l’interface, les électrons en excès dans le matériau dopé N vont diffuser vers le matériau dopé P et inversement pour les trous du matériau dopé P. Les atomes de dopant se retrouvent alors chargés à l’interface, et la différence de potentiel électrique, ΔU, entre les couches donne lieu à un champ électrique E à l’interface. L’extension spatiale de la région où les atomes dopants sont chargés et où né le champ électrique E, est dénommée « zone de déplétion » ou encore SCR (pour « Space Charge Region »). Cette différence de potentiel à l’interface se retrouve par une différence du positionnement relatif des niveaux d’énergie d’un matériau par rapport à l’autre. La présence du champ électrique à l’interface permet la séparation des charges générées par l’absorption d’un photon en évitant leur recombinaison. En circuit fermé, la jonction P-N sous illumination permet de générer un courant électrique, le photocourant. En condition d’équilibre et sans contribution externe, la génération de porteurs de charges libres et leur recombinaison se contrebalancent. De plus, deux types de courants sont présents dans la jonction, le courant de dérive correspond au mouvement des porteurs minoritaires à travers la SCR, tandis que des porteurs majoritaires ayant suffisamment d’énergie peuvent diffuser dans l’autre sens, à travers la jonction et malgré le champ électrique, et former un courant de diffusion. Le courant de dérive et le courant de diffusion sont également contrebalancés en condition d’équilibre de sorte que le courant total soit nul. Ces considérations sont résumées Figure 9. Ce processus est l’un de ceux au cœur du fonctionnement d’une cellule solaire.

Effet photovoltaïque et cellule solaire

Le principe de base d’une cellule solaire tient sur le fonctionnement d’une jonction P-N et sa capacité à séparer les charges générées afin de pouvoir les collecter et éviter leur recombinaison. Dans des conditions idéales, lorsqu’une jonction P-N est exposée à la lumière, les charges libres supplémentaires qui ont été photogénérées sont séparées et s’accumulent aux bornes de la jonction P-N, Figure 10(a). Dans des conditions de circuit ouvert, cette accumulation de charges résulte en une tension aux bornes qui s’oppose au potentiel de la jonction P-N jusqu’à la compenser entièrement à la lumière, les charges photogénérées se déplacent en direction des electrodes. (b) En conditions de circuit ouvert, les charges photogénérées vont s’accumuler aux interfaces, le potentiel induit par leur accumulation compense progressivement le potentiel U de la jonction P-N jusqu’à atteindre dans une situation idéale un potentiel qui compense entièrement celui de la jonction. Ce potentiel est appelée tension de circuit ouvert, VOC. Les quasi-niveaux de Fermi, EF-P et EF-N, représentent réspectivement un équilibre local des charges aux bornes du matériau P et du matériau N. (dans un système idéal). Cette tension maximale obtenue aux bornes de la jonction est appelée tension de circuit ouvert, VOC, voir Figure 10(b).
Les cellules solaires actuelles fonctionnent sur ce principe ou sur un principe équivalent, comme par exemple notamment, les hétérojonctions P-I-N dans lesquelles un semi-conducteur intrinsèque dont le rôle est de photogénérer les charges, est encapsulé entre deux couches dont le rôle aux interfaces sera de séparer sélectivement les charges. Les concepts liés aux interfaces entre les différentes couches seront abordés par la suite. Une architecture solaire performante consiste en l’ingénierie d’empilement de couches énergétiquement favorables pour l’extraction efficace des charges photogénérées. De manière générale, on parlera de jonction simple ou unique lorsqu’un seul matériau absorbant est utilisé pour photogénérer les charges.
La mesure courant-tension (I-V) sous illumination permet de caractériser une cellule solaire : Une tension drain (VBIAS) est appliquée et le courant I (ou plus généralement, la densité de courant J) est mesurée. Différentes grandeurs caractéristiques sont extraites d’une telle mesure. La valeur de la tension de circuit ouvert, VOC, est représentative de la capacité qu’a la cellule à générer une tension ou autrement dit, à séparer les charges jusqu’au bornes de la cellule. Elle représente la valeur maximale de tension que peut produire la cellule lorsque plus aucun courant n’y circule et correspond au régime dans lequel la séparation des charges et leur recombinaison s’équilibrent. Le courant de court-circuit, ISC, correspond au courant lorsque la tension aux bornes de la cellule est nulle, ou encore la densité de courant, JSC, lorsque celui-ci est rapporté à l’aire de la cellule (mA/cm²). Cette densité de courant correspond au courant maximal qui peut être obtenu d’une cellule solaire. Ainsi, la puissance d’une cellule solaire est un compromis entre ces deux valeurs. En effet, la puissance maximale correspond au point de compromis où la tension et le courant sont maximaux, et le facteur de remplissage (ou « Fill Factor (FF)» en anglais) est défini comme le rapport de cette puissance à la puissance théorique maximale qui correspond au produit de VOC et JSC, il peut être représenté graphiquement comme le ratio entre les deux rectangles (voir Figure 11[23]). Ainsi, l’efficacité d’une cellule solaire (« power conversion efficiency (PCE) ») est définie par le rapport : = Où PIN correspond à la puissance d’entrée dans la cellule, ou autrement dit, la puissance lumineuse incidente. Les valeurs de VOC, JSC et la forme de la courbe J-V sont ainsi une représentation directe des performances d’une cellule solaire.
Figure 11 : Courbe typique J-V d’une cellule solaire sous illumination. La tension de circuit ouvert VOC et la densité de courant de court-circuit JSC y sont représentés. Le rectangle orange correspond à la puissance maximale qui peut être produite par la cellule trandis que le rectangle en pointillé est la puissance maximale théorique. Le ratio de ces deux rectangles correspond au facteur de remplissage [23].
La densité de courant de court-circuit d’une cellule dépend de l’aire de la cellule, mais aussi du spectre de la lumière incidente puisque seuls les photons d’énergie supérieure à l’énergie du gap pourront générer des charges libres, ainsi plus l’énergie du gap du matériau actif est faible, plus la densité de courant sera grande sous le même spectre solaire. Elle dépend également du nombre de photon incidents, et des pertes optiques (absorption par les autres matériaux, réflexions à la surface), mais aussi, de la probabilité de collection des charges aux électrodes qui dépend directement du temps de vie des porteurs de charge (électrons et trous) et d’éventuels états de pièges aux interfaces. De plus, la densité de courant est représentative de l’alignement des niveaux d’énergies au sein du dispositif et des potentiels aux interfaces entre les couches. En effet, la présence de barrières de potentiel aux interfaces peut empêcher une extraction efficace des charges et réduire le courant produit par la cellule. Des courants de fuite peuvent également exister dans la cellule, ils correspondent au mouvement des charges à contresens qui réduit la densité de courant produite par la cellule. Les courants de fuite sont généralement limités par l’utilisation de couches de transport sélectives, qui seront présentées par la suite.
La valeur de la tension de circuit ouvert maximale qu’une cellule solaire peut produire est en première approximation dépendante de l’énergie du gap du/des matériaux actifs de la cellule, comme présenté dans un cas idéal en Figure 10(b), et des travaux de sorties des électrodes. Ainsi, en prenant pour exemple une hétérojonction dans une cellule solaire organique, dans laquelle la jonction P-N est réalisée en utilisant un matériau accepteur d’électrons et un matériau donneur d’électrons dont les énergies de gap sont différentes, l’alignement des niveaux d’énergies entre les deux matériaux détermine la valeur de VOC maximale qu’il est possible d’obtenir, voir Figure 12(a). Cette valeur maximale dépend de la différence d’énergie entre le niveau HOMO du donneur et le niveau LUMO de l’accepteur. En revanche, cette valeur maximale ne peut être obtenue qu’à condition d’un alignement des niveaux HOMODonneur/EFAnode et LUMOAccepteur/EFCathode. Dans le cas où une différence de potentiel existe entre ces niveaux, comme dénotés par ΔHOMO et ΔLUMO dans la Figure 12(a), alors la valeur de VOC sera plus faible et dépendra de la différence de travail de sortie entre l’anode et la cathode, ce principe est résumé Figure 12(b). Ce cas idéal, présenté ici, correspond à un contact ohmique entre les molécules et les électrodes et en l’absence de réactivité chimique aux interfaces[24].
Dans les systèmes réels, différentes couches sont introduites entre le(s) matériau(x) actif(s) et les électrodes afin d’optimiser la séparation des porteurs de charge vers les électrodes et d’obtenir des alignements de niveaux d’énergie qui maximisent la valeur de VOC de la cellule. Les valeurs, dans un système réel, de JSC et de VOC résultent principalement de l’alignement des niveaux d’énergies, des différences de potentiel aux interfaces, et du temps de vie des porteurs de charge. Ces trois aspects qui dictent les performances d’une cellule peuvent être influencés par de multiples facteurs tels que l’épaisseur des couches, la formation de dipôles d’interfaces, la formation d’états d’interfaces qui peuvent jouer le rôle d’états de pièges, ou encore d’une modification des liaisons aux interfaces et de transferts de charges, jusqu’à la formation de nouvelles espèces chimiques entre les couches. Ces différentes propriétés aux interfaces vont toutes influer directement la capacité d’une cellule solaire à séparer les charges photogénérées et éviter leur recombinaison, et ainsi, sa capacité à générer le maximum de puissance sous illumination.

Limites et tendances actuelles

Limite de Shockley-Queisser et stratégies

L’efficacité maximale théorique d’une cellule solaire à jonction unique est définie par la limite de Shockley-Queisser. Cette limite théorique calculée la première fois en 1961 par William Shockley et Hans-Joachim Queisser[25], définie pour les cellules à une seule composante qui absorbe la lumière, situe l’efficacité maximale d’une cellule aux alentours de 30% et correspond à un semi-conducteur dont le gap est optimal à 1.1eV. Cette estimation dans un modèle simple, utilise différents facteurs : le spectre solaire est approximé par un spectre de radiation d’un corps noir d’une température de 6000K, elle prend en compte les taux de recombinaisons des charges photogénérées et les effets de pertes spectrales. Ces pertes se décomposent en deux sources, à savoir les pertes dues à la partie du spectre non absorbée (environ 19% de la puissance disponible se trouve sous 1.1eV) et l’énergie perdue lorsqu’un électron est promu au-dessus de la bande de conduction (hν > EG) et qu’il thermalise jusqu’à la CB, perdant ainsi sont surplus d’énergie. Ces limitations sont donc directement associées au gap des matériaux, et à la capacité de la cellule à séparer les charges en évitant leur recombinaison, qui dépendent donc de l’alignement des différents niveaux d’énergie des matériaux. Un calcul plus précis a ensuite été réalisé [26] qui utilise le spectre solaire AM1.5G sur des cellules qui possèdent une surface réfléchissante à l’arrière de la cellule, et situe la limite maximale d’efficacité à 33.7% pour un gap optimal de 1.34eV. A titre d’indication, les panneaux solaires à base de Silicium monocristallin actuellement dans le commerce atteigne une efficacité d’environ 25%[27]. Différentes stratégies sont étudiées afin de palier à cette limité intrinsèque dont est présenté ici une liste non exhaustive :
– Les cellules multi-jonctions ou cellules tandems : elles consistent en l’utilisation de plusieurs jonctions P-N dans une même cellule, dans lesquelles des semi-conducteurs de gap différents sont utilisés pour absorber des parties différentes du spectre solaire.
– Les concentrateurs : ce sont des éléments optiques qui sont ajoutés sur les cellules, tels que des lentilles ou des miroirs, afin de concentrer la quantité de lumière qui arrive dans la cellule.
– La capture du surplus d’énergie porté par les électrons qui sont photogénérés bien au-dessus de la bande de conduction du semi-conducteur. En effet, dans ce cas, l’électron qui est promu en haut de la bande de conduction va se désexciter vers le bas de la bande de conduction et perdre cette énergie supplémentaire sous forme de pertes thermiques la plupart du temps.
Cette énergie n’est pas récupérée par la cellule, or ce processus est présent pour toute la partie du spectre strictement supérieure à l’énergie du gap du matériau (hν > EG) qui, pour un matériau ayant par exemple un gap à 1.1eV, représente une grande partie de puissance perdue.
Récupérer ce surplus d’énergie est donc un enjeu important. C’est un des points explorés notamment dans les nanocristaux à confinement quantique (Quantum Dots, QD) pour la raison qui suit.
– La génération multiple d’excitons (MEG). Dans les matériaux tels que les QD ou les nanostructures, lorsque l’énergie de photon est bien supérieure au gap, il existe le processus de génération multiple d’excitons qui consiste à ce que le surplus d’énergie génère directement une ou plusieurs autre(s) paire(s) électron-trou. Ce processus a été découvert la première fois dans des QD de PbSe en 2004[28] et a également été démontré dans des nanotubes de carbone en 2010[29] montrant alors une efficacité de génération de paires électron-trou de 130% par photon. L’exploitation du principe de MEG est prometteur dans l’obtention de cellules à haute efficacité[30]. La limité théorique est alors repoussée à 68.7% d’efficacité pour les cellules tandems et même jusqu’à 86.8% lorsque les concentrateurs sont ajoutés[31]. En revanche, les efficacité des cellules en laboratoire restent encore majoritairement en dessous de la limite de Shockley-Queisser, comme démontré Figure 13 où l’efficacité des différentes technologies actuelles y est comparé à la limite théorique[32].

Les générations de cellules solaires

Les recherches actuelles sur les cellules solaires s’articulent autour de multiples technologies. Ces différentes technologies photovoltaïques peuvent être regroupées en différentes générations en fonction du ou des matériaux semi-conducteur(s) utilisé(s) et des technologies sous-jacentes :
– Les cellules à base de Silicium (monocristallin ou polycristallin)[33], [34]
– Les cellules à base de GaAs[35], [36]
– Les cellules à couches minces : Les cellules CIGS (Cuivre, Indium, Gallium, Sélénium), CdTe ou encore au silicium amorphe a-Si:H[37]–[40].
– Les technologies émergentes : Cellules organiques et hybrides[41], [42], Cellules pérovskite[43]–[46] et Quantum Dots[47]–[49].
– Les cellules à jonctions multiples (tandems) qui combinent plusieurs couches actives[50], [51]. L’évolution de l’efficacité des cellules solaires en laboratoire correspondant aux différentes technologies est présentée Figure 14 (page suivante). Les objectifs de recherche sont l’amélioration des performances ainsi que la réduction des coûts de production. Les technologies émergentes, apparues depuis une vingtaine d’années, s’inscrivent bien dans cette problématique : l’utilisation de matériaux abondants et peu couteux, la simplicité de production et la rapide augmentation dans le temps de l’efficacité des cellules ainsi que la possibilité de les intégrer dans des modules à grande échelle par des techniques simples comme le roll-to-roll ou le doctor-blade, ainsi que la compatibilité avec les nouveaux schémas d’intégration du photovoltaïque tels que les panneaux flexibles ou transparents, sont des points importants qui rendent ces technologies émergentes attrayantes.

Surfaces et interfaces dans les cellules solaires

Architectures des cellules solaires

De manière générale, les cellules solaires actuelles comportent de multiples couches de différents matériaux aux propriétés spécifiques dont le but est d’optimiser l’efficacité de conversion de la lumière en puissance électrique. Le principe général de fonctionnement et le rôle des différentes couches sont présentés en Figure 15(a). Ce schéma présente l’alignement des niveaux d’énergie dans une cellule en fonctionnement. Le matériau actif au cœur de la cellule, et dont le rôle et de transport selectives est indiquée. Deux architectures de cellules solaires des technologies émergentes : en (a) Cellule Organique [53] et (b) Cellule à base de nanocristaux de Pérovskite [54].
photogénérer les charges par absorption du spectre solaire, se retrouve entre deux couches dénotées ETL et HTL sur la Figure 15(a). Ces couches correspondent respectivement à la couche de transport d’électrons (ETL) et la couche de transport de trous (HTL). Le rôle de chacune de ces couches est double : la couche de transport des trous permet à la fois d’extraire les trous vers l’anode et également d’empêcher les électrons d’y être extraits (et inversement pour la couche de transport d’électrons). En effet, dans ce cas, la différence d’énergie entre les bandes de valence du matériau actif et de la couche HTL, notée ΔVBHTL, est favorable à l’extraction des trous, tandis que la différence d’énergie ΔCBETL est favorable à l’extraction des électrons. Ainsi, réduire les valeurs de ΔVBHTL et de ΔCBETL permet de maximiser la tension de circuit ouvert de la cellule, qui est dans ce cas mesuré comme la différence de potentiel entre les quasi niveaux de Fermi EF-P et EF-N. De plus, la différence d’énergie entre les bandes de conduction du matériau actif et de la couche de transport de trous, notée ΔCBHTL, est défavorable au transport des électrons vers l’anode (respectivement ΔVBETL pour le transport des trous vers la cathode). La présence des barrières de potentiel ΔCBHTL et ΔVBETL permet la réduction des courants de fuite dans la cellule, et ainsi de maximiser JSC et également d’empêcher des recombinaisons non désirées aux électrodes, qui réduisent VOC. De manière générale, pour posséder ces propriétés, les couches de transport sont des semi-conducteurs dont l’énergie de gap est plus grande que celle du matériau actif. Les couches de transport de trous consistent généralement en un semi-conducteur à grand travail de sortie, entre 4 et 7 eV, tel que MoO3[24] ou spiro-OMeTAD[52] tandis que les couches de transports d’électrons ont un travail de sortie faible, comme TiO2[24]. Ainsi, la présence des couches de transport permet de favoriser la séparation des charges et une extraction sélective efficace vers les électrodes, et permet ainsi de réduire les recombinaisons et les courants de fuite dans la cellule. Le schéma présenté en Figure 15(a) reste cependant une représentation simple, dans laquelle les niveaux de vide sont alignés, ce qui n’est pas forcément le cas dans les systèmes réels. Les aspects liés aux potentiels aux interfaces ainsi que le rôle joué par les défauts, seront expliqué par la suite. En Figure 15(b) est présenté une architecture[53] de cellule solaire organique dont la couche absorbante est une couche moléculaire de PTB7 :PC70BM comprise entre des couches de transports d’électrons (TiOx) et de trous (MoOx)[53]. Une cellule semblable est présentée Figure 15(c) cette fois-ci ayant pour matériau absorbant une couche de nanocristaux semi-conducteurs de pérovskite halogénées[54]. De multiples architectures sont étudiées et diffèrent tant par le nombre de couches que par les matériaux utilisés et les traitements qu’ils ont subis. Ainsi, l’efficacité d’une cellule solaire dépend de multiples facteurs, tant au niveau des propriétés des matériaux utilisés que des interfaces entre les différentes couches, mais également par leur stabilité dans le temps et dans des conditions d’utilisation (exposition à l’air et l’humidité ambiante, et température pouvant aller jusqu’à 80°C sous le soleil). Ces propriétés doivent être optimisées pour extraire au maximum les charges photogénérées. L’optimisation de l’adéquation entre deux couches adjacentes dans un dispositif s’articule autour de deux aspects : la connaissance des propriétés des surfaces des matériaux et leur évolution ou modifications lorsque deux matériaux différents sont mis en contact, à l’interface.

Les propriétés de surfaces des matériaux

Comme exposé plus haut, les propriétés électroniques d’un semi-conducteur (ou de tout matériau de manière générale) sont dictées par l’arrangement périodique des atomes qui le constituent. La surface d’un matériau, définie ici comme la région séparant le cœur du matériau et le vide, représente une rupture de cette périodicité, tout comme les défauts dans la structure. Les atomes à la surface du matériau, de par cette césure de la structure cristalline, présentent des liaisons dites « pendantes » qui correspondent à une valence non satisfaite des liaisons. Une représentation de ces liaisons pendantes est proposée Figure 16(a) pour le Silicium[55]. Ces liaisons pendantes, étant par nature réactives, peuvent être compensées à l’aide de différents processus et ce notamment à travers une relaxation et/ou reconstruction de la surface, autrement dit, à un réarrangement de la disposition des atomes de surfaces et/ou une modification de la configuration des liaisons chimiques entres atomes, ou encore peuvent être saturés par l’adsorption d’atomes à la surface, tels que des impuretés. Ces processus correspondent à un changement de structure et donnent donc lieu à l’apparition de nouveaux niveaux d’énergie propres à la surface que l’on retrouve généralement dans le gap du semi-conducteur et à une redistribution des charges entre le cœur du matériau et sa surface. En effet, la présence d’états à la surface induit un déséquilibre entre les charges dans le volume du matériau et la surface, ainsi, la condition d’équilibre est atteinte lorsque les charges du volume se redistribuent vers la surface pour compenser les états de surface. Cette redistribution des charges donne lieu à un déplacement des niveaux d’énergies à la surface pour les matériaux dopés, connu sous le nom de courbure de bande. Par exemple, dans le cas de défaut à la surface d’un matériau dopé N, les électrons du volume se déplacent vers la surface pour compenser l’état de surface, ce qui mène à une réduction de l’énergie de liaison des niveaux proches de la surface. La Figure 17[56] est une représentation de ce phénomène qui prend pour hypothèse que l’état de surface formé est à moitié rempli par les électrons et centré au milieu du gap d’énergie du semi-conducteur[56]. En revanche, la nature des défauts à la surface et donc la position en énergie des états de surface, peut également induire un caractère N ou P dans un semi-conducteur intrinsèque et c’est ce que montrent par exemple Zu et al.[57] en mettant en évidence que la formation de Pb0 à la surface de MAPbI3-xClx est responsable du caractère N du matériau. Dans les systèmes réels, la surface est rarement parfaitement plane et continue, la présence d’ilots, d’agrégats ou de marches donnent également lieu à une différence du paysage énergétique à la surface du matériau comparé à son volume, tout comme les défauts de structure ou l’adsorption de contaminants[56].
Par ailleurs, comme cela a été stipulé plus haut, la surface représente une barrière de potentiel pour les électrons du matériau, dont le haut de la barrière correspond au niveau du vide[58] et qui s’exprime à travers, entre autres, la valeur que prend le travail de sortie, voir Figure 16(b)[59]. Ainsi, différentes contributions liées à l’état de la surface du matériau vont moduler la valeur du travail de sortie. Parmi ces contributions se retrouve le dipôle de surface, qui correspond à la formation d’une double couche de charges à la surface associée au « débordement » de la densité électronique à la surface[60]. Cet effet, qui se retrouve à la surface des métaux[61], dépend de multiples facteurs. Cependant, ce dipôle de surface est dépendant de l’organisation des atomes à la surface et est à l’origine des différences de travaux de sorties observées sur les différentes facettes cristallines des métaux. C’est par exemple le cas pour le tungstène dont le travail de sortie associé aux faces cristallines (111) et (110) sont respectivement de 4.47eV et 5.25eV[58]. De manière générale, la valeur du travail de sortie étant liée au potentiel électrostatique à la surface du matériau, sa valeur varie avec l’organisation des atomes à la surface[62]. Des variations de travail de sortie sont par exemple rapportés pour les facettes TiO2(100) et TiO2(110) dont les WF sont respectivement de 4.13eV et 4.20eV[63]. De plus, l’adsorption de molécules à la surface modifie le travail de sortie[64]. Ces variations de potentiels peuvent être de l’ordre de grandeur de l’électron-volt. Pour exemple, le travail de sortie de l’or (matériau souvent utilisé comme contact électrique de par sa faible propension à être oxydé) prend pour valeur entre 4.4 et 4.7 eV lorsqu’exposé à l’atmosphère tandis que cette valeur est aux alentours de 5.0eV lorsqu’il est nettoyé sous UHV[22]. Enfin, le phénomène de courbure de bandes est aussi un facteur qui influe la valeur du travail de sortie puisqu’il correspond à un décalage en énergie de tous les niveaux induit par un changement du potentiel électrostatique à la surface du semi-conducteur. Enfin, de ces différents effets en résulte le fait que les défauts de structure cristalline, comme les lacunes d’atomes, influent le travail de sortie. C’est par exemple le cas des lacunes d’oxygène dans les structures des oxydes métalliques et de leur influence sur le travail de sortie, comme rapporté par Greiner et al.[24], [59] et illustré Figure 18(a). En l’occurrence, les études présentées par Greiner et al. ne sont pas restreintes à la surface des matériaux et rapportent l’influence de la stœchiométrie et de la présence de défauts dans la structure des oxydes sur le travail de sortie. Cependant, pour prendre l’exemple du dioxyde de titane, il est rapporté que la formation des états de défauts liées aux lacunes d’oxygène et la présence d’atomes de Ti interstitiels dans la structure, sont trouvés dans la région proche de la surface[65]–[67].
Pour résumer, les différences de potentiel à la surface trouvent pour origines, de manière non exhaustive, la pureté du matériau (dopage), la structure cristallographique de la surface, sa morphologie (rugosité) et s’il y a ou non présence d’atomes de contamination adsorbés. Ainsi, les propriétés liées à la surface des matériaux vont être responsables en grande partie des propriétés aux interfaces entre les couches des dispositifs. Une description des principes généraux associées aux interfaces dans les cellules solaires est faite dans la partie suivante.

Propriétés aux interfaces dans les dispositifs

Dans les cellules solaires (ou dans tout dispositif optoélectronique de manière générale) de multiples couches sont empilées, et il existe donc de multiples interfaces. Notamment des interfaces semi-conducteur/métal et semi-conducteur/semi-conducteur. L’interface est définie comme la région spatiale entre deux matériaux en contact qui peut être comprise virtuellement comme la mise en contact de la surface de ces deux matériaux. Lors de la mise en contact de deux matériaux, les différences de potentiels électrostatiques entre les surfaces dictent l’alignement des niveaux d’énergie entre les deux matériaux. En effet, cette mise en contact peut résulter en différent phénomènes tels que l’apparition d’une courbure de bande, de nouveaux états d’interfaces ou encore donner lieu à un dipôle d’interface supplémentaire. La différence de travail de sortie entre deux matériaux est un premier élément qui dicte l’alignement des niveaux d’énergie et la réorganisation des charges à travers l’interface, qui s’exprime à travers une courbure des bandes dans les matériaux. Cette courbure de bande correspond à une zone d’accumulation/déplétion des charges à l’interface qui correspond à la condition d’équilibre atteinte par l’alignement des niveaux de Fermi des matériaux. Un exemple de ce phénomène est présenté par le diagramme d’alignement des niveaux d’énergie à l’interface Alq3/CuPc[68], [69], Figure 19, où la courbure de bande à l’interface est mise en évidence.
L’accumulation de charges à l’interface entre les couches correspond à un dipôle d’interface. La description des modifications du travail de sortie est incomplète dans le cas présenté ici. En effet, le dipôle qui existe à l’interface a pour origine, entre autres, le transfert de charges à l’interface, la redistribution des nuages électroniques ou encore la réactivité chimique aux interface[70]. Ainsi, les variations de travail de sortie observées aux interfaces qui dictent les propriétés d’extractions des charges, résultent de contributions liées à la fois à la redistribution des charges entre le volume des matériaux et l’interface (la courbure de bande) et la valeur du dipôle formé à l’interface, qui résulte elle du réarrangement des charges à travers l’interface. Afin d’illustrer ces considérations, l’étude de l’interface MoO3/Cobalt rapportée par Wang et al.[71] montre les mesures réalisées par photoémission de la valeur du travail de sortie et du maximum de la bande de valence au cours du dépôt de MoO3 sur Co. L’évolution de l’énergie de liaison de la bande de valence permet de déduire la courbure de bande dans MoO3 tandis que la valeur du dipôle d’interface est déduite en retirant la contribution de la courbure de bande au travail de sortie mesuré, voir Figure 20. La valeur du dipôle qui se forme à l’interface les courbures de bandes induites dans les matériaux impactent donc dans les dispositifs la capacité d’une interface à séparer et extraire les charges.
En revanche, comme cela a été introduit plus haut, le contact direct entre le matériau actif d’une cellule solaire et les électrodes mène généralement à une capacité limitée de séparation des charges[24], [72]. En effet, le matériau actif des cellules solaires possède généralement un gap d’énergie faible afin d’absorber le maximum du spectre lumineux, et résulte en une proximité en énergie de la VB et de la CB au niveau de fermi du contact métallique. Cette proximité des niveaux d’énergie ne permet pas une séparation efficace des charges et mène à des courants de fuites et une augmentation du taux de recombinaison des charges, qui sont au détriment des performances des cellules[24]. Ainsi, des couches de transport sélectives sont introduites entre le matériau actif et les électrodes. Par exemple, la Figure 21 illustre l’impact de l’insertion d’une couche de transport de trous entre une couche de pérovskite et une électrode d’or, sur la dynamique des charges[72]. Comme illustré Figure 21(b), la mise en contact directe entre la couche de pérovskite et l’électrode d’or ne permet pas une séparation efficace des charges. L’insertion d’une couche de spiro-OMeTAD entre la couche de pérovskite et la couche d’Au permet d’induire une courbure de bande plus prononcée dans la couche de pérovskite et ainsi, permet par l’alignement des VB, l’extraction des trous vers l’électrode tandis que la différence d’énergie des CB empêche les électrons d’être transférés vers la couche d’or.
L’ajout de la couche HTL résulte ici en une meilleure séparation des charges dans le matériau actif, et également réduit les courants de fuite et les recombinaisons des charges[72], [73].
Figure 21 : Alignement des niveaux d’energie entre une couche de pérovskite et une électrode d’or. (a) avant contact, (b) en contact et (c) avec une couche de transport de trous de spiro-OMeTAD entre la couche de pérovskite et l’electrode Au. Adapté de [72].
De multiples facteurs influent sur l’alignement des niveaux d’énergies aux interfaces et c’est notamment le cas des états de défauts dans les matériaux. L’utilisation de MoO3 comme couche de transport de trous dans les cellules solaires est une illustration frappante de l’impact que peuvent avoir les défauts sur les propriétés d’interfaces. En effet, MoO3 est un semi-conducteur à grand travail de sortie (entre 5 et 7eV selon la stœchiométrie[59]) qui présente souvent un caractère de type N. Des défauts de structures sont généralement présents dans les oxydes métalliques, et sont associés notamment aux lacunes d’oxygène rendant la composition des couches sous-stœchiométrique, comme MoO3-x[24], [59]. La présence de ces défauts se traduit par l’existence d’états dans le gap de MoO3-x. Lors de la mise en contact de MoO3-x avec un autre semi-conducteur, la présence de ces états de défauts induit un transfert d’électron vers MoO3-x et induit ainsi, un fort caractère P à l’interface dans l’autre matériau. Le fort travail de sortie de MoO3-x et le caractère P induit dans la couche active où sont photogénérées les charges favorisent l’extraction des trous dans la couche de MoO3-x. Ce résultat, dont le principe est illustré en Figure 22, a notamment pu être rapporté aux interfaces MoO3/C60[74], MoO3/α-NPD[75], MoO3/P3HT:PCBM[76] et MoO3/MAPbI3[77].
De plus, de nouveaux états peuvent être formés lors de la mise en contact de deux matériaux, notamment à travers la formation de nouvelles espèces chimiques par réactivité entre les matériaux. C’est ce qui a pu être rapporté par exemple, à l’interface MAPbI3-xClx/MoO3 par Liao et al.[78] où les auteurs montrent la formation d’espèces chimiques telles que PbI2, MoO2, et PbMoO4, entre autres, par réactivité entre ces deux couches. La réactivité entre les couches peut donner lieu à de nouveaux états d’interface qui peuvent agir comme états de pièges ou des centres de recombinaison de charges, qui diminuent les performances des cellules solaires.

Table des matières

CHAPITRE I : Introduction et état de l’art
A. Contexte : réchauffement climatique et énergies renouvelables
i. Changement climatique : conséquences, causes et objectifs
ii. Positionnement de l’énergie solaire dans la thématique des émissions de CO2
iii. Limites à l’intégration du solaire dans l’écosystème de production d’énergie
B. Du semi-conducteur à la cellule solaire
i. Théorie des bandes, semi-conducteurs et niveaux d’énergie
ii. Jonction P-N
iii. Effet photovoltaïque et cellule solaire
C. Limites et tendances actuelles
i. Limite de Shockley-Queisser et stratégies
ii. Les générations de cellules solaires
D. Surfaces et interfaces dans les cellules solaires
i. Architectures des cellules solaires
ii. Les propriétés de surfaces des matériaux
iii. Propriétés aux interfaces dans les dispositifs
CHAPITRE II : Théorie et méthodes expérimentales
A. Spectroscopie de photoélectrons (PES)
i. Principe et utilisation en science des surfaces et des interfaces
ii. Aspects théoriques
iii. Matériel
iv. Analyse de données : intensité et énergie
v. Mesure du travail de sortie
vi. Mesure des épaisseurs et composition chimique
B. Rayonnement synchrotron et techniques avancées de photoémission
i. Le rayonnement synchrotron
ii. Spectroscopie d’absorption de rayons X (XAS)
iii. Photoémission résonante (RESPES) sur la ligne ALOISA
iv. Photovoltage de surface et photoémission résolue en temps (TR-XPS) sur la ligne TEMPO
C. L’Ultravide
i. Motivation pour les sciences des surfaces
ii. Définitions et aspects techniques
D. Méthodes complémentaires de caractérisation
i. Spectroscopie UV-visible : Absorption et photoluminescence
ii. Diffraction de rayons X (DRX)
CHAPITRE III : Nouvelles molécules et interfaces organiques
A. Introduction
B. Interface C70/TiOx
i. Dépôt de C70 in-situ et évolution des niveaux de coeur
ii. Estimation du taux de couverture et défauts dans le gap
iii. Absorption et RESPES : état d’interface
C. Discussion
CHAPITRE IV : Nanocristaux de pérovskite
A. Introduction
i. Histoire et développement
ii. Structure pérovskite
iii. Stabilité de phase et nanocristaux
iv. Propriétés optoélectroniques
v. Dispositifs et interfaces
B. Propriétés des nanocristaux de FAPbI3
i. Synthèse et propriétés des nanocristaux de FAPI
ii. Propriétés de transport des films de PNC
iii. Niveaux d’énergie et porteurs de charge majoritaires
C. Propriétés aux interfaces
i. Evolution des niveaux de coeurs
ii. Evolution de la nature des PNC aux interfaces avec TiOx et MoOx
D. Conclusion et discussion
E. Ouverture : Déposition par spray sous vide et mesures in-situ
Conclusion et perspectives
Liste des publications
Liste des présentations & posters
Bibliographie

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