Micro-usinage de surface

Micro-usinage de surface

Paramètres expérimentaux fondamentaux 

On s’intéresse ici aux caractéristiques macroscopiques de l’ablation, c’est-à-dire l’obtention d’un usinage de grande qualité. La majorité des expériences d’ablation de surface présentées dans ce travail concerne les métaux. Bien que la réponse d’un matériau à l’excitation laser dépende étroitement de ses propriétés électroniques* , de grandes tendances de comportement valables pour tous les matériaux (diélectriques inclus) ont été dégagées depuis quelques années. Afin de déterminer les paramètres expérimentaux optimums pour pouvoir réaliser les expériences dans les meilleures conditions, nous présentons ici quelques points clés issus de la littérature à ce sujet. 

Durée d’impulsion 

L’intérêt des impulsions ultra-courtes par rapport aux impulsions nanosecondes a déjà été mentionné au chapitre 5. Cependant, des différences sont observables dans la gamme subpico seconde. Lenzner et al. ont montré dans le cas des diélectriques que la qualité d’usinage pouvait être encore augmentée en diminuant la durée d’impulsion, avec une amélioration notable lorsque l’on passe de quelques centaines à quelques dizaines de femtosecondes. Un système délivrant de telles impulsions est cependant trop complexe et pas encore assez fiable pour envisager à l’heure actuelle un transfert vers l’industrie. Le laser dont nous disposons délivre des impulsions d’une durée de 130 fs, ce qui permet de réaliser un usinage de qualité déjà très acceptable.

Cadence

 Pour éviter d’observer des effets d’accumulation thermique, la cadence des impulsions laser doit tenir compte du temps de refroidissement du matériau usiné, afin que chaque nouvelle impulsion arrive sur un matériau non préalablement chauffé. De manière générale, ceci impose de travailler à des cadences inférieures au GHz pour les métaux et au MHz pour les diélectriques. Pour des raisons de qualité de faisceau, une cadence de 100 kHz a été adoptée pour toutes les expériences présentées dans ce manuscrit.

Fluence

 On peut distinguer deux régimes d’ablation, en fonction de la fluence incidente sur le matériaux. Lorsque l’on considère le taux d’ablation, c’est-à-dire la profondeur ablatée par impulsion, la limite entre les deux régimes se situe aux environs de 1 J/cm² pour les métaux et 10 J/cm² pour les diélectriques, soit approximativement cinq fois le seuil d’ablation. Pour chaque régime, la profondeur L ablatée par impulsion obéit à une loi logarithmique en fonction de la fluence laser F d désigne la profondeur de pénétration, et est la fluence correspondant au seuil d’ablation du matériau. Les valeurs de ces deux paramètres dépendent du régime considéré (basse ou haute fluence), d s’identifie à l’épaisseur de peau seuil d F * en régime basse fluence et à la distance de diffusion thermique électronique** en régime haute fluence. Concernant les mécanismes, Momma et al. ont montré qu’en régime basse fluence, l’ablation femtoseconde se fait par la création de phases de vapeur et de plasma et l’absence de phase liquide. Sur les résultats d’usinage associés, aucune trace de matière fondue n’a été observée en régime basse fluence, alors qu’une fine couche de matériau fondu apparaît pour des fluences plus élevées. La meilleure qualité d’usinage est donc obtenue pour une faible fluence, juste au dessus du seuil d’ablation du matériau. Pour nos expériences, on s’efforcera donc de rester dans le régime basse fluence pour les matériaux usinés. 

Cas des diélectriques Etant donné qu’une expérience d’ablation de surface d’un diélectrique (rubis) a également été réalisée, il semble opportun d’évoquer rapidement les paramètres supplémentaires pour ce type de travail. Commençons par l’influence du nombre d’impulsions. Stoian et al.  distinguent deux régimes d’ablation : la phase douce (″gentle phase″) suivie de la phase forte (″strong phase″). La première phase consiste en la formation de défauts dans le gap, qui agissent comme une réserve d’électrons plus facilement excitables lors des impulsions suivantes (phénomène d’incubation). Cette phase, identifiée comme correspondant aux premières 25-30 impulsions, mène à une très faible efficacité d’ablation par impulsion (~30 nm* ) résultant d’un phénomène de répulsion électrostatique des ions entre eux lorsque les électrons énergétiques ont été éjectés de la surface. Ce mécanisme est connu sous le nom d’explosion coulombienne**, le résultat d’usinage de surface est alors extrêmement propre, pouvant laisser des surfaces plus uniformes que celles initiales. Au-delà d’une trentaine d’impulsions, on entre dans un régime d’ablation plus violent et plus efficace (″strong phase″), la profondeur ablatée par impulsion est dix fois supérieure. Ce mécanisme fait intervenir des changements de phase, l’ablation se produisant par l’expansion thermique du plasma. Une décroissance exponentielle du seuil de dommages Fseuil en fonction du nombre N d’impulsions [115, 128] a également été mise en évidence, seuil F est l’asymptote de la courbe pour un nombre d’impulsions élevé, est la fluence seuil en mono-coup, et k est un paramètre expérimental caractérisant l’influence plus ou moins forte de l’incubation. Cette dépendance exponentielle se distingue de la loi en puissance de N valable pour les métaux. (1) seuil F Enfin, contrairement aux expériences qui seront présentées au chapitre 7, il s’agit ici d’usinage de surface. Alors que dans la masse du matériau l’interaction a lieu dans un milieu présentant une symétrie isotropique, il faut tenir compte ici du fait que la surface d’un matériau est par nature un défaut (états de surface). En particulier, dans les oxydes isolants, la région de la surface est en général riche en défauts ponctuels (lacunes d’oxygène notamment) [129]. Des impuretés ou des défauts peuvent avoir une influence non négligeable sur l’absorption, et ainsi contribuer à diminuer le seuil de dommages. 

Cours gratuitTélécharger le document complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *