Modélisation de la diffraction électromagnétique des surfaces végétalisées

Modélisation de la diffraction électromagnétique des surfaces végétalisées

Radar à synthèse d’ouverture (RSO) 

Afin d’améliorer la résolution en azimut sans pour autant passer par une augmentation physique de la taille de l’antenne, on utilise la nature cohérente des signaux émis et le déplacement du porteur afin de reconstituer une antenne plus grande. On appelle ce système radar à synthèse d’ouverture (RSO) ou « synthetic aperture radar » (SAR) en anglais. Le concept est basé sur un traitement du signal et permet d’obtenir une résolution azimutale comparable à la résolution transversale (quelques mètres). Il est ainsi possible d’obtenir des images radar d’une très grande finesse. On peut montrer qu’en théorie (Poisson, 2013), il est possible d’obtenir une résolution azimutale 𝑟𝑎 = 𝐿 2 où L est la taille de l’antenne dans l’axe de la trajectoire. On constate que ce résultat est indépendant de la distance entre l’antenne et la scène et que la résolution diminue avec la taille de l’antenne. Ainsi, si on reprend notre exemple précédent, pour obtenir une résolution azimutale de 50cm, une antenne de 1m suffit, ce qui est sans commune mesure avec les 1500m que nous avions trouvés sans hypothèse de synthèse d’ouverture. En pratique, un RSO émet un signal modulé en fréquence appelé « chirp ». Pour une bande de fréquence Δf, la résolution transversale est donnée par 𝑟𝑎 = 𝑐 2Δf . 

 Le speckle 

Le chatoiement (appelé speckle en anglais) dans les images radar résulte des interférences cohérentes entre les ondes réfléchies par les nombreux éléments rétrodiffusants dans une même cellule de résolution. Ce phénomène d’interférence peut être destructif ou constructif et s’apparente à une marche aléatoire. Cette variation de phase et d’amplitude donne à l’image un caractère granuleux (Jong-Sen Lee, 2009). Il existe différents algorithmes de réduction de speckle, tous basés sur un moyennage en intensité sur une région de l’image SAR. 

 Interaction des ondes radar avec la végétation 

Comme on l’a vu précédemment, la longueur d’onde radar est une grandeur physique importante qui peut varier du millimètre à quelques mètres pour les SAR. Cette grande différence entre les fréquences basses et les fréquences élevées crée une variabilité dans la réponse radar qui peut être utilisée pour mieux caractériser les objets imagés. Deux phénomènes peuvent être mis en avant : – De manière schématique on peut dire que l’onde interagit en priorité avec des éléments du même ordre de grandeur ou plus grands que la longueur d’onde. – Les grandes longueurs d’onde ont un pouvoir de pénétration plus important dans les milieux. En choisissant correctement la longueur d’onde de notre radar, on peut donc étudier différents aspects d’une scène imagée. Nous allons maintenant présenter les différents mécanismes qui interviennent dans la rétrodiffusion. 

 Mécanismes de rétrodiffusion 

L’intensité d’une onde radar rétrodiffusée dépend non seulement des paramètres liés au système radar (fréquence, polarisation, angle de visée…), mais également de la manière dont l’énergie électromagnétique interagit avec la scène observée. Cette interaction est liée aux paramètres de la scène imagée (permittivité, topographie, description statistique de la végétation…) et rend la caractérisation de la scène difficile. Dans le cas qui nous intéresse, celui des forêts, la réponse radar est principalement influencée par trois mécanismes de rétrodiffusion illustrés dans la Figure 1-3 : l’interaction directe avec la surface (1), l’interaction du double-rebond (2) et enfin l’interaction de volume (3). Les propriétés diélectriques des éléments de la scène jouent également un rôle très important sur la rétrodiffusion, ce qui rend essentielle l’estimation aussi précise que possible de ces propriétés par des mesures terrain. Figure 1-3 : Mécanismes de rétrodiffusion radar dans une forêt (source : Albinet, 2013). Ces trois mécanismes de rétrodiffusion vont varier suivant la fréquence, la géométrie de la scène et du radar, et la polarisation. Tous trois sont présents dans la réponse radar pour chaque polarisation même si certains d’entre eux peuvent devenir prépondérants pour certaines configurations. 

 Interactions avec le volume 

En choisissant bien notre fréquence, l’onde radar peut pénétrer la partie supérieure de la canopée et il se produit un phénomène de diffusion volumique. L’énergie radar diffusée dans un volume est constituée de diffractions provenant des différents éléments diffuseurs des diverses couches à l’intérieur du volume. Dans le cas des forêts, la diffusion peut provenir des feuilles, des branches, ainsi que des troncs. Dans ce même cas, en bande P, les feuilles ne sont quasiment pas visibles et n’influent donc pas ou peu sur la réponse radar. 

  Interactions avec le sol 

Le fait qu’une surface apparaisse lisse ou rugueuse dépend de la longueur d’onde du radar. On parle de surface lisse lorsque la variation verticale de la surface est très petite devant la longueur d’onde. Dans le cas contraire, on parle de surface rugueuse. Le critère de Rayleigh donne une indication qualitative de la rugosité de la surface. On considère qu’une surface est lisse si pour une longueur d’onde λ et une incidence θ données, la différence de hauteur Δh entre deux points de la surface est telle que : ∆ℎ sin 𝜃 < λ⁄8 (1.3) La rugosité d’une surface joue sur la manière dont elle impacte l’image radar. Une surface lisse devant la longueur d’onde telle qu’une route apparait en noir sur une image radar (faible intensité dans l’écho radar), tandis qu’une surface rugueuse apparait brillante en contraste (forte intensité de l’écho radar). Dans le cas d’une surface lisse, l’énergie rayonnée est principalement dirigée loin du radar (angle de réflexion égal à l’angle d’incidence), on parle de réflexion spéculaire (Figure 1-4 à gauche). Quand le sol est rugueux, le rayonnement se propage dans toutes les directions. De ce fait, une partie significative du signal est rétrodiffusée vers le radar (Figure 1-4 à droite). La pente du terrain joue également un rôle dans la rétrodiffusion étant donné que l’angle d’incidence est considéré localement par rapport à la normale du sol.

Table des matières

Introduction générale
Chapitre 1 Acquisition RSO et grandeurs d’intérêt en télédétection radar. Modélisation électromagnétique
A – Généralités sur la télédétection
1.1 La télédétection
1.2 Le spectre électromagnétique
1.3 Principe du radar imageur
1.3.1 Généralités
1.3.2 Géométrie de visée
1.3.3 Résolution d’un radar à ouverture réelle
1.3.4 Radar à synthèse d’ouverture (RSO)
1.3.5 Le speckle
1.4 Interaction des ondes radar avec la végétation
1.4.1 Mécanismes de rétrodiffusion
1.4.2 Interactions avec le volume
1.4.3 Interactions avec le sol
1.4.4 Interaction sol/canopée
1.5 Grandeurs d’intérêt
1.6 Géométrie radar
1.7 Données radar
1.7.1 Radiométrie
1.7.2 Polarimétrie
1.7.3 Interférométrie radar
1.7.4 PolInSAR
1.7.5 Tomographie
B – Approche théorique
1.8 Introduction
1.9 Diffusion par un ensemble de particules
1.9.1 Matrice de diffraction
1.9.2 Approximation de Foldy
1.9.3 Matrice d’extinction
1.10 Modélisation de la permittivité diélectrique
1.10.1 Modélisation de la permittivité de la végétation
1.10.2 Modèle de la permittivité du sol
1.11 Modèle de diffraction d’un cylindre
1.12 Modèle de diffraction d’une ellipse
1.13 Modélisation du sol
1.13.1 Modèle de Oh
1.13.2 Le modèle optique géométrique (GO)
1.13.3 Modèle Integral Equation Method (IEM)
1.14 Modélisation incohérente
1.15 Modélisation cohérente
Chapitre 2 Mise en œuvre d’un outil de simulation électromagnétique et d’outils expérimentaux pour
l’étude de la rétrodiffusion de zones végétalisées non planes
2.1 Introduction
2.2 Présentation du code de simulation électromagnétique : MIPERS NG
2.2.1 Rappel du contexte et des objectifs
2.2.2 Description géométrique des diffuseurs et de la scène
2.2.3 Lancer de rayon
2.2.4 Placement des diffuseurs : méthode du rejet
2.2.5 Convention FSA et BSA
2.2.6 Prise en compte de la pente dans le calcul du double rebond et du sol direct
2.2.7 Calcul des coefficients d’extinction pour chaque mélange
2.2.8 Calcul de la contribution du volume
2.2.9 Calcul du double rebond
2.2.10 Calcul de la rétrodiffusion du sol direct
2.2.11 Calcul du champ tota
2.2.12 Traitement d’image
2.2.13 Conclusion
2.3 Validations théoriques de MIPERS NG
2.3.1 Étude des symétries sur un volume orienté aléatoirement (RVOG : Random Volume OverGround)
2.3.2 Polarimétrie : étude de la cohérence HH/VV sur RVOG
2.4 Étude des effets de relief sur le signal rétrodiffusé
2.4.1 Type de forêts étudiées
2.4.2 Étude sur sol plan incliné
2.4.3 Terrain vallonné
2.4.4 Sol vallonné incliné
2.4.5 Discussion
2.5 Présentation des protocoles et moyens expérimentaux utilisés durant la thèse
2.5.1 Introduction
2.5.2 Calibration d’une sonde d’humidité pour mesurer la permittivité des sols
2.5.3 Protocole de mesure de la taille et de l’humidité de la végétation
2.5.4 Radar de proximité sur un banc translatant 81
2.6 Conclusion
Chapitre 3 Validation et exploitation de MIPERS NG sur le cas de forêts tropicales
3.1 Introduction
3.2 Étude de la rétrodiffusion d’une zone forestière à partir d’une vérité terrain détaillée : mise en application la forêt d’Ankasa au Ghana
3.2.1 Introduction
3.2.2 Présentation du site de mesures
3.2.3 Suivi de l’évolution de l’humidité dans les arbres et le sol
3.2.4 Caractérisation géométrique de la végétation
3.2.5 Simulations électromagnétiques
3.2.6 Analyse de l’influence de l’humidité sur la forêt d’Ankasa
3.2.7 Étude de l’influence du sous-bois sur la rétrodiffusion
3.2.8 Récapitulatif des résultats
3.3 Étude de la rétrodiffusion d’un zone forestière à partir d’une vérité terrain partielle : mise en application sur la forêt de Mondah au Gabon
3.3.1 Introduction
3.3.2 Présentation du site de mesures
3.3.3 Vérité terrain
3.3.4 Construction d’un modèle de descriptif de la végétation
3.3.5 Comparaison entre les données aéroportées et les données simulées
3.3.6 Étude des variations de la rétrodiffusion dues à la pente
3.3.7 Étude des variations de la rétrodiffusion dues à l’humidité du sol
3.3.8 Récapitulatif des résultats
3.4 Conclusion et perspectives
Chapitre 4 Étude de l’influence des hydrocarbures sur la rétrodiffusion radar des surfaces continentales
4.1 Introduction
4.2 Généralités : Signaux radar en présence d’hydrocarbures sur surfaces continentales
4.2.1 Bibliographie sur les effets des hydrocarbures sur le sol et la végétation
4.2.2 Les techniques de détections envisageables
4.2.3 Positionnement de la thèse
4.2.4 Sites d’étude des effets indirects de la présence d’HC dans le sol
4.3 Mesure de permittivité de mélanges et de sols en présence d’hydrocarbures
4.3.1 Introduction
4.3.2 Mesures des permittivités de mélanges sols/huiles
4.3.3 Mesures de permittivité en présence de boue contenant des hydrocarbures
4.3.4 Conclusion sur les mesures de permittivité en présence d’hydrocarbures
4.4 Mesures radar des effets directs et indirects de la présence d’hydrocarbures sur ou dans le sol
4.4.1 Introduction
4.4.2 Mesure des effets directs sur le signal rétrodiffusé d’un versement contrôlé d’hydrocarbures sur du sable et de la terre
4.4.3 Mesures Sentinel-1 sur les sites d’étude
4.4.4 Conclusion sur les mesures radar
4.5 Simulations et analyse de sensibilité des effets directs et indirects de la présence d’hydrocarbures sur le sol
4.5.1 Simulation du signal rétrodiffusé d’un sol recouvert d’hydrocarbures (effets directs)
4.5.2 Simulations électromagnétiques des zones avec et sans HC pour différentes dates de visite (effets indirects)
4.5.3 Analyse de sensibilité des zones avec et sans hydrocarbures
4.5.4 Simulation radar de forêts tropicales avec des hydrocarbures sur le sol
Analyse de sensibilité sur la forêt de Mondah
4.6 Conclusion et perspectives
Chapitre 5 Utilisation de MIPERS NG dans un processus d’inversion des propriétés bio-géophysiques de la forêt de Mondah.
5.1 Introduction
5.2 Stratégie d’inversion des données radar
5.3 Présentation de l’analyse de sensibilité
5.4 Présentation des modèles de substitution
5.4.1 Différents types d’apprentissage statistique (« Machine learning »)
5.4.2 Présentation des méta-modèles statistiques
5.4.3 Construction du plan d’expérience
5.5 Présentation de l’inversion
5.6 Inversion d’images radar de la forêt de Mondah au Gabon
5.6.1 Présentation du problème
5.6.2 Analyse de sensibilité de Sobolsur MIPERS NG associé au code de croissance de la végétation
5.6.3 Réduction de l’espace des paramètres d’entrée du problème d’inversion
5.6.4 Analyse sensibilité locale
5.6.5 Inversion des humidités et de la géométrie de la forêt de Mondah sur une cellule de résolution
5.6.6 Inversion des images aéroportées
5.7 Conclusions et perspectives sur l’inversion
Conclusion et perspectives
Annexes
Bibliographie

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