Modélisation thermodynamique de l’équilibre de phases

Modélisation thermodynamique de l’équilibre de phases

Ce chapitre s’inscrit dans la continuité de la démarche expérimentale décrite précédemment. Pour rappel, notre expérience vise à mesurer la cinétique de carbonatation de la portlandite à 160 bars et pour une gamme de températures entre 80 et 200˚C : Portlandite + CO2 → Calcite + eau Nous avons choisi de mesurer trois jeux de paramètres. 1. Le taux de carbonatation de la portlandite en calcite est déterminé directement au niveau de la fraction solide par diffraction de rayons X. 2. Le flux compensatoire de CO2 entrant dans la cellule au cours de la réaction est enregistré via le déplacement du piston de la presse chauffante assurant le maintien de la pression. 3. L’évolution de la fraction molaire en eau de la phase vapeur du fluide réactionnel est quantifiée par l’analyse en chromatographie en phase gazeuse de micro-échantillons prélevés in situ. L’un des principaux intérêts de cette approche multiple tient à la possibilité de confronter et de recouper les trois jeux de données afin de s’assurer de leur cohérence respective et de la validité, in fine, des mesures cinétiques. Cette comparaison n’est possible qu’à travers la modélisation thermodynamique des densités molaires et des équilibres de phases au sein de la cellule tout au long de la réaction. Relier le flux de CO2 entrant dans le réacteur au déplacement du piston de la presse, nécessite en effet de calculer finement les variations de pression induites dans la cellule par la consommation de CO2. De la même manière, convertir les mesures des fraction molaire en eau dans la phase vapeur en quantité d’eau produite par la réaction de carbonatation de la portlandite passe par un modèle d’évolution des équilibres de phases du système CO2-H2O. Objectifs La démarche de modélisation exposée dans ce chapitre a pour principal objectif de calculer le bilan de matière dans le réacteur à chaque instant de la réaction de carbonatation de la portlandite. Ce bilan, à pression et température constantes, dépendra de l’état de phase du système (présence ou non d’un équilibre liquide-vapeur) et de la densité molaire du mélange du fluide réactionnel. L’exercice s’articule en plusieurs étapes : le choix d’une équation d’état destinée à représenter le comportement volumétrique du mélange CO2-H2O, le choix d’une méthode de résolution des équilibres de phases, la programmation d’un code permettant de calculer l’évolution du bilan de matière au cours de la réaction. Cet outil permettra alors, connaissant l’avancement de la réaction (mesuré par DRX sur la fraction solide par exemple) de calculer le flux de CO2 injecté par la presse pour compenser le CO2 consommé, et de relier l’avancée du piston à l’avancement la réaction. D’autre part, le modèle développé permettra de construire les diagrammes de phases du mélange CO2-H2O correspondant aux conditions de nos expériences et d’y placer les évolutions de composition attendues. Ces prévisions sont primordiales lors de la phase de dimensionnement de l’étude ; notamment pour le choix du volume des cellules et celui des compositions initiales du fluide réactionnel (cf. chap. 2). 

Diagrammes de phases du système CO2-H2O 

Sans toutefois revenir aux bases de la thermodynamique, il nous a semblé utile de présenter dans les paragraphes suivants quelques notions concernant les diagrammes de phases des corps purs et des mélanges.

Définition 

Un diagramme de phases désigne une représentation graphique des équilibres physiques et chimiques, conséquences des interactions moléculaires, d’un corps pur ou d’un mélange en fonction de variables thermodynamiques du système : pression, température et volume molaire par exemple. La figure 3.1 montre un diagramme de phases pressiontempérature pour le corps pur CO2. Aux conditions de notre étude, le CO2 pur se situe dans le domaine supercritique, c’est-à-dire au-delà du point critique. Ce dernier peut être défini comme une limite physique à partir de laquelle la densité de la phase vapeur est equivalente à celle de la phase liquide et l’interface (ou l’équilibre) entre ces deux phases disparaˆıt. La pression critique (Pc) et la température critique (Tc) du CO2 et de l’eau sont détaillées dans le tableau 3.1.

 L’équilibre liquide-vapeur 

Les phases liquide et vapeur peuvent coexister dans un domaine précis du champ PVT : dans un diagramme pression-température (cf. Fig. 3.1), ce lieu est représenté par la ligne d’équilibre liquide-vapeur, tracée à partir des pressions de vapeur saturante. Une autre visualisation, peut-être plus évidente est offerte par un diagramme représentant la pression en fonction du volume molaire (cf. Fig 3.2). La région d’équilibre y est délimitée par la courbe de saturation, définie comme la réunion de la courbe de rosée, lieu d’apparition de la première goutte de liquide, et de la courbe de point de bulle, lieu d’apparition de la première bulle de vapeur. Par définition, le point critique se situe à la jonction de ces deux courbes ou se vérifie l’égalité des densités liquide et vapeur. Notons qu’il correspond à un point d’inflexion sur l’isotherme critique, ce qui peut se traduire par la relation :

Diagrammes de mélange du système binaire CO2-H2O

Le diagramme de phase du système CO2-H2O est considéré comme étant de type III selon la classification de van Konynenburg et Scott (1980). La figure 3.3 représente le diagramme PT du binaire CO2-H2O pour une composition fixée. Y sont représentés : – les courbes de pression de vapeur saturante des corps purs, terminées par les points critiques des corps pur ; – le lieu d’équilibre triphasique entre une phase liquide aqueuse, une phase liquide riche en CO2 et une phase vapeur ; – les lignes des points critiques du mélange. La première est comprise entre le point critique du composé le plus volatile, le CO2, et le point UCEP (Upper Critical End Point) marquant la terminaison du domaine triphasique. Le seconde débute au point critique de l’eau et se prolonge vers les hautes pressions. Nous avons tracé sur cette même figure le domaine pression-température concerné par notre étude : 80-200˚C à 160 bars. Une “coupe” du diagramme PT, à température constante, permet alors de représenter, en fonction de la composition, l’état de phase caractéristique de nos expériences (cf. Fig. 3.4). Nous sommes dans le cas le plus simple : le mélange n’admet pas de point critique et présente un unique équilibre liquide-vapeur entre une phase liquide aqueuse contenant un peu de CO2 dissous, et une phase vapeur riche en CO2.

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