Nom et lancement de la nouvelle chaîne publique d’information en continu

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Les limites des chaînes d’information en continu

« C’est un sport national, depuis les débuts de la Ve République. Dès que la situation se dégrade, dès que les côtes de popularité sont en berne, les gouvernements rendent les médias audiovisuels et tout particulièrement la télévision, responsable de la situation » écrivait en 2013 Agnès Chauveau, spécialiste des médias dans Le Huffington Post17. Elle poursuit en expliquant que ce ne sont plus les grandes chaînes nationales tels que les journaux télévisés de TF1 ou de France 2 qui sont visés par ces critiques. Il s’agirait désormais des chaînes d’information en continu et d’une en particulier : BFMTV. D’Arnaud Montebourg qui dénonce la « BFMisation » de la vie politique, à Bruno Le Roux faisant mine de confondre Fox News, la chaîne conservatrice et populiste américaine avec BFM, jusqu’au surnom « B-FN » donné par certains, accusant la chaîne de faire monter le Front National, les critiques vont bon train.
En 2008, paraissait un livre de Patrick Eveno, historien des médias intitulé : Les médias sont-ils sous influence ? où il y fait une critique de la télévision souvent reprise pour attaquer les chaînes d’information en continu. Selon l’auteur, la télévision commerciale n’aurait plus aucune prétention pédagogique, culturelle ou informative, mais seulement un cours de l’action et un taux de profit en prise directe sur l’Audimat. Parce ce qu’elles vivent sous la loi de l’Audimat, les chaînes de télévision ne peuvent laisser la place au débat d’idées, qui demande du temps et des longs développements qui feraient fuir les téléspectateurs. Elles se contentent donc des « petites phrases » qui permettent de ne pas lasser le public et de maintenir son attention. « Beaucoup d’intellectuels et d’hommes politiques le font avec talent, soit en dramatisant, ou en racontant de belles histoires pour occuper plus longuement l’antenne »18
Tout cela engendrerait selon l’auteur une « information aseptisée » d’où l’investigation serait bannie, conduisant ainsi à la désinformation des Français, voire à la manipulation de l’opinion. Thierry Devars affirme que saisie en temps réel, l’actualité donnée par les chaînes d’information en continu se dérobe à toute forme de mise à distance. La culture de l’immédiateté rend compte du pouvoir d’attraction du récit journalistique en temps réel et de ses contradictions. En effet, valorisé par le discours promotionnel de BFMTV, l’objectif du tout-voir et du tout-savoir se heurte à la nécessaire impossibilité d’y répondre19.
Tout comme Patrick Eveno, Thierry Devars dénonce dans son ouvrage, la course à l’audience des chaînes d’information continue au profit du « mal journalisme » à la française. Marc Autheman officiait sur BFMTV le week end, à l’occasion des journaux du soir jusqu’à son licenciement en 2014. Il a écrit une lettre adressée à Alain Weill accusant la rédaction de la chaîne de n’être préoccupée que par la « recherche de l’audience » et de s’employer, à dessein, « à la dramatisation excessive d’événements mineurs. »20
Dans son article, Agnès Chauveau souligne les critiques récurrentes faites aux chaînes d’information en continu : « Des heures de direct, un flot d’information sans hiérarchie, des envoyés spéciaux partout, des duplex qui ne servent à rien, des journalistes qui ne racontent pas le monde où ils sont mais qui signifient juste qu’ils y sont. Bref, de la géolocalisation journalistique en guise d’information ». Auxquelles Thierry Devars ajoute dans son livre « l’obsolescence programmée de l’information, le diktat de l’urgence et la recherche du scoop »
Le 7 décembre 2013, Le Monde publie une enquête sur la « BFMisation » de la vie politique.21 Les chaînes d’information en continu y sont décrites comme des « machines infernales » pressées par le temps, donnant à lire l’actualité sous l’angle d’une étourdissante succession de nouvelles qui disparaissent presque aussi subitement qu’elles sont apparues. « Elles ne nourrissent pas, elles abreuvent au risque de l’oubli » affirmait le coprésident d’Ipsos, Jean-Marc Lech22.
D’après Thierry Devars, en donnant la priorité au direct, BFMTV a placé l’événement au centre de sa stratégie éditoriale. Une position, qui, dans un contexte d’hyperabondance d’information, pose un problème de distinction entre l’événement et le buzz. Celui-ci constitue une catégorie-reine en matière de notoriété et les chaînes d’information en continu ont donc tendance à placer trop souvent sur le devant de la scène, des actualités anecdotiques et triviales qui vont faire du bruit, au détriment d’une actualité dont la portée et la signification résisteront au temps.
L’auteur donne un exemple : En 2015, trois actualités ont particulièrement concentré l’attention des médias au moment où elles sont survenues : les attentats de Paris de janvier, le crash de l’Airbus A320-211 le 24 mars et la naissance du deuxième enfant de Kate Middleton et du prince William le 2 mai. Celle-ci, beaucoup plus légère, a pourtant obtenu le statut d’événement, au même titre que les deux précédentes.
« C’est du moins sous cet angle que les chaînes d’information en continu, entre autres, les ont ostensiblement données à lire », indique l’auteur.
Le projet d’une information délivrée en temps réel, sans médiation ni délai de réflexion, interroge la qualité de l’information délivrée au téléspectateur et le rapport des journalistes à l’information. En effet, « le travail du journaliste consiste précisément à convertir son expérience immédiate sur le terrain en point de vue distancié sur le monde, un processus qui, en toute logique, prend du temps », écrit Thierry Devars. Or, le travail d’immédiateté des journalistes des chaînes d’information en continu les empêche de prendre de la distance sur les événements.
C’est ce qu’il s’est passé le 8 janvier 2015. Alors qu’une prise d’otages était en cours dans l’Hyper Casher à Porte de Vincennes, Dominique Rizet, spécialiste police-justice de BFMTV a indiqué en direct qu’une femme était cachée dans la chambre froide du magasin, compromettant ainsi sa sécurité. Le journaliste a dit amèrement regretter ces 17 secondes d’antenne mais l’épisode a fait beaucoup parler de lui et certains ex-otages d’Amedy Coulibaly ont même décidé de porter plainte an avril contre la chaîne d’information pour mise en danger de la vie d’autrui. La plainte a été retirée mais BFMTV a dû verser 60 000 euros au Fonds Social Juif Unifié pour le soutien des victimes du terrorisme23.
Cet épisode a remis au centre du débat le traitement de l’information par les chaînes en continu, souvent épinglées. En effet, la plainte des ex-otages s’appuyait notamment sur une mise en garde du Conseil Supérieur de l’Audiovisuel (CSA) le 11 février 201624. Après avoir analysé 500 heures de programmes, le CSA avait adressé à 16 médias, 36 avertissements pour avoir, pendant les directs sur les prises d’otages de janvier, révélé des informations sensibles, susceptibles de mettre en péril la vie des otages. « Les méthodes de travail des médias en temps réel dans ce genre de situation, sont des pousse-au-crime », a dénoncé auprès de l’AFP Patrick Klugman, l’avocat des plaignants.
D’après Arnaud Mercier, spécialiste des médias qui a accordé une interview au Figaro25 le 12 février 2015, le fonctionnement des chaînes d’information en continu conduit forcément à des dérapages déontologiques : « La France a hélas une certaine habitude des attentats sur son sol, si on regarde l’histoire depuis les années 1980. En revanche, de tels faits, avec un tel scénario et une telle scénographie, couverts à l’ère d’internet et des chaînes d’information continue triomphantes, c’est inédit. Les médias ont donc agi sans cadre de référence, dans un environnement fait de concurrence exacerbée puisque même les chaînes généralistes se sont mises à faire de longues heures de direct et de temporalité effrénée : l’urgence imposant son diktat au détriment de tout recul et du temps nécessaire pour recouper les informations. Il était donc inévitable qu’il y ait des dérapages déontologiques, même si certains ont été plus graves car ils ont mis en danger la vie de personnes en contact avec les terroristes. Autofascinés par les possibilités qui sont les leurs de traiter un événement en direct, les journalistes des chaînes d’information en continu tendent à s’abandonner à la satisfaction narcissique d’utiliser à plein régime ces moyens, au risque de mettre de côté les réflexes déontologiques de base ». Il propose la solution de « créer un poste en interne, confié à un professionnel chevronné, qui aurait pour mission de garder la tête froide, de ne pas plonger, grisé, dans le tempo de l’urgence, et qui soit donc là pour calmer les ardeurs, pour repérer tout de suite les dérapages en cours, et tirer le signal d’alarme chaque fois que de besoin ».
A vouloir donner une information avant ses concurrents pour répondre à une exigence de rapidité, certaines chaînes peuvent alors commettre des faux pas et négliger l’étape de la vérification des sources. Nous passons cette fois du côté d’iTélé. Le 5 avril 2011, à 20h, la présentatrice annonce que Laurent Gbagbo, qui vit peut-être ses dernières heures à la présidence de la Côte d’Ivoire, serait retranché dans son bunker, et négocierait sa reddition. Au même moment, le téléspectateur pouvait lire sur le scroll* que Laurent Gbagbo s’était rendu et qu’il demandait la protection de l’ONU, d’après la source Reuters. A 20h15, la présentatrice affirme que d’après un communiqué de l’Elysée, la reddition de Laurent Gbagbo n’est pas encore effective. Gros rétropédalage de la chaîne qui, à l’antenne comme sur le scroll, fait donc marche arrière sur l’information qu’elle donnait un quart d’heure plus tôt. La présentatrice explique ensuite que la reddition de Laurent Gbagbo « avait été indiquée par un document interne des Nations unies et confirmée par l’agence de presse britannique Reuters. » En réalité, l’agence Reuters n’a rien confirmé, elle a annoncé la reddition de Gbagbo sur la foi d’un document interne des Nations Unies. Deux minutes plus tard, un bandeau réapparaît à l’écran, affirmant la reddition du Président. A 20h25, le ministre de la Défense, Gérard Longuet, déclare qu’il ne peut confirmer la reddition. En définitive, Laurent Gbagbo ne s’est jamais rendu mais a finalement été arrêté six jours plus tard, le 11 avril 2011 par les forces d’Alassane Ouattara26.
D’après un diaporama sur prezi.com27, les trois principaux fondements du travail journalistique (le grand reportage, le travail intellectuel et la libre sélection de l’information) sont mis à mal avec l’information en continu : on passe en effet d’un journalisme de terrain à un journalisme « assis » ou « de bureau » puisque le rythme accéléré de production empêche les journalistes de construire un reportage de terrain qui serait trop long à réaliser. Les chaînes envoient alors sur place des envoyés spéciaux qui « permettent de montrer qu’ils peuvent intervenir à tout moment mais qui surenchérissent surtout une information déjà révélée ». Le travail intellectuel est mis à mal à cause du travail de recherche moins poussé et une analyse plus superficielle qui se concentre sur l’événement et non sur les causes ou les points de vue. Enfin, travailler dans l’urgence pousse le journaliste à sélectionner une information aléatoire, parfois sans vérification de la source, afin « d’avoir en premier les images et être les premiers à annoncer une information », devenu le principal critère de l’excellence journalistique.
D’autre part, une enquête réalisée par Télérama en 201228, pointe du doigt un dernier aspect de ces chaînes, qui dérange profondément le public : « Menacées d’être réduites à un média de transmission de l’actualité plus qu’à un média d’information, ces chaînes d’information continue usent et abusent d’experts et de commentateurs en tous genres pour redonner du sens à ce flux. Les mêmes passent souvent d’un plateau à l’autre au risque de donner une vision monochrome des événements ». Toujours les mêmes spécialistes et donc toujours les mêmes points de vue. Ces chaînes se voient alors reprocher d’imposer une façon de voir et de penser le monde, laissant peu de place à la réflexion.
Et pourtant, elle peuvent parfois battre des records d’audience.

Un succès indéniable

Ce sont les événements exceptionnels et inattendus qui favorisent la concentration du public sur les chaînes d’information en continu. Les pics d’audience atteints lors de l’affaire Mohammed Merah en 2012, de l’affaire du Sofitel en 2015 ou plus récemment, les attentats commis à Paris en janvier et novembre 2015 ont permis à BFMTV et iTélé d’atteindre des records d’audience historiques : Samedi 14 novembre, au lendemain des attentats de Paris, BFMTV a frôlé la barre des 10 % d’audience en moyenne, contre 2% habituellement, devenant la troisième chaîne la plus regardée de France derrière TF1 et France 229. Cependant, la chaîne appartenant au groupe NextRadioTV n’a pas pour autant dépassé son record historique, réalisé le 9 janvier dernier après les attaques de Charlie Hebdo avec 13,3 % de part de marché. Pour ce qui est d’iTélé, la chaîne a battu son record historique le 14 novembre, en atteignant près de 5 % de part de marché en moyenne tout au long de la journée, loin devant ses 0,8% habituels30. Cette affluence des téléspectateurs sur les chaînes d’information en continu à certaines occasions, témoigne en partie d’une stratégie de captation efficace : il s’agit pour ces chaînes de susciter l’attention du public et surtout de la préserver, grâce à la composition visuelle de l’écran, avec une multiplicité de cadres qui se succèdent les uns aux autres, au rythme incessant des allers-retours entre le plateau, le terrain et les reportages, le dynamisme de leur composition et l’actualisation en temps réel de l’information31.
Mais d’après Agnès Chauveau32, « les chaînes d’info en continu sont devenues incontournables, même quand l’actualité n’est pas portée par la drogue dure du direct. iTélé est à 0,8% de part d’audience, LCI à 0,3% et BFMTV représente 2% des parts d’audience en France soit 10 millions de téléspectateurs par jour, s’imposant ainsi comme une télé populaire ».
Selon Laurent Drezner, secrétaire général de BFMTV et ancien directeur de la rédaction de LCI, le succès de la chaîne tiendrait à la nouveauté de sa démarche :
« Le concept a fonctionné, car il était innovant et que les moyens technologiques ont alors permis de diffuser du direct depuis n’importe quel endroit en France et à l’étranger. Ce succès n’est pas acquis mais je crois que la chaîne réussit parce qu’elle tient ses promesses : la restitution en temps réel des événements et le traitement en 20 minutes de l’essentiel de l’actualité33 »
Avec le lancement de la TNT et l’accès gratuit à BFMTV et iTélé, l’information en continu gagne à la fois en visibilité et en notoriété.
Ghyslaine Pierrat, Docteur en communication politique et économique, affirmait dans Le Huffington Post34 que « la place de toutes ces chaînes d’information en continu est capitale, parce qu’ensemble elles vitalisent le pluralisme de l’information ». Pour elle, ces chaînes font plus qu’informer : « elles tissent un lien social précieux et indispensable, fabriquent un imaginaire collectif, sensibilisent les individus, et provoquent des indignations, des adhésions, des conversations, des implications collectives en rassemblant leur public ». Mais surtout, ces chaînes seraient le reflet du monde dans lequel nous vivons. Elles « respirent le temps présent ».
Dans une émission diffusée sur France Culture en juillet 201535, Jean-Michel Charon, sociologue des médias et chercheur au CNRS disait que « le tout info est l’idéal du journalisme. Depuis que le journalisme existe, c’est la lutte contre le temps, cette idée qu’on essaye en permanence depuis le XVIe, XVIIe siècle de se rapprocher dans le traitement même de l’événement et de son déroulement. Avec l’information en continu on a eu enfin la possibilité d’être à la fois dans l’instantanéité et de suivre l’événement sous forme de live, c’est-à-dire dans sa continuité. »
Si critiquable soit-il, le modèle proposé par BFMTV semble avoir inspiré sa consoeur iTélé. Ses effets se font également sentir à l’échelle des grandes chaînes généralistes, soucieuses de s’adapter aux codes médiatiques contemporains : dynamisme et réactivité, tout en préservant le principe structurant de la hiérarchie de l’information36. Les audiences de BFMTV son en constante progression et atteignent 2,3% de PDA (part de marché) en mars 201537.
Le direct, le breaking news et le flux continu, propres aux chaînes tout info ont donc leurs vertus. Ils ne doivent pas pour autant empêcher la réflexion sur la hiérarchie de l’information, la véracité des faits et la fiabilité des sources.

Présentation et objectifs de la nouvelle chaîne d’information en continu

Ligne éditoriale, nature de la chaîne et public visé

Le projet d’une chaîne publique d’information en continu remonte à l’année 2000 mais n’avait pas pu aboutir à l’époque. « En 2000, il y avait un projet de chaîne d’information publique. On a raté l’échéance, et tant pis ? Bah non ! » C’est par cette phrase, que Delphine Ernotte Cunci, actuelle présidente de France Télévisions, a présenté, en commission parlementaire, son projet de chaîne d’information en continu, le 28 octobre 2015. Un projet qui existe déjà depuis un moment puisqu’au premier semestre 2015, est paru un rapport présenté par un conseiller d’État, Marc Schwartz, où figure la création d’une chaîne d’information continue, parmi d’autres mesures censées définir France Télévisions à l’horizon 2020.
A peine installée à la tête de la grande société télévisuelle, la nouvelle présidente a officiellement donné le coup d’envoi le 24 août 2015, dans une interview au Monde38 de son premier grand projet : « Dans un monde qui est en train de se fragmenter, où beaucoup de téléspectateurs ne font plus confiance à ce qu’ils entendent, nous voulons une chaîne qui aille plus loin que donner l’information », peut-on y lire. « Et qui permette de comprendre, d’exposer des points de vue différents, d’éclairer et de décrypter, au-delà de l’information brute et parfois brutale que l’on peut voir sur les chaînes en continu ». Ainsi, la nouvelle chaîne souhaite proposer un angle éditorial différent des trois autres chaînes d’information en continu présentes sur la TNT.
Gerard Dagognet, directeur délégué à l’information chargé du projet de la chaîne d’information France Télévisions, a annoncé lors de la conférence « Quatre chaînes d’info, est-ce trop ? » au Centre de Congrès Vinci pour les Assises du Journalisme qui se sont déroulées le 10 mars 2016, en présence de Hervé Béroud, directeur de la rédaction BFMTV, Nicolas Charbonneau, directeur adjoint de l’information TF1/LCI, et Guillaume Zeller, directeur de la rédaction iTélé, que l’objectif serait celui « d’apporter une nouvelle ligne éditoriale qui se différencie de la simple sphère de l’information en continu diffusée de manière linéaire. Nous voulons apporter plus de pédagogie, de décryptage et d’analyse plutôt que de jouer sur les émotions et les sensations. »39 Selon un article de Libération40, la chaîne produira des courtes vidéos sans son, incluant de nombreuses infographies et du texte, adaptées au format mobile. Ces modules seront diffusés sur YouTube, les réseaux sociaux ou le site France TV Info. Privilégiant le décryptage et l’explication, ils sont au cœur de l’objectif pédagogique de la chaîne : celle-ci se différencierait alors des propositions des concurrents en cherchant moins l’immédiateté et la répétition. « Les rédactions de France Télévisions et de France Info se sont retrouvées sur les mêmes valeurs, celles de prendre le temps de vérifier et recouper une information », indique Estelle Cognacq, rédactrice en chef de l’agence de France Info et enseignante à la section journalisme du CELSA. « On est prêts à perdre cinq minutes pour être sûrs de délivrer une information correcte ». Elle explique que si France Télévisions et France Info n’ont pas la même information, les rédactions seront mises en relation pour en discuter et si besoin, un supérieur tranchera entre les deux versions.
Pour Julia Cagé, économiste française auteure du livre : Sauver les médias: Capitalisme, financement participatif et démocratie, le fait d’émaner du service public peut permettre à la nouvelle chaîne de se démarquer de ses concurrentes privées : « Tout le défi de cette nouvelle chaîne va être de proposer quelque chose de différent et de ne pas simplement reproduire à l’identique l’existant. On a vu, par exemple au moment des attentats, les dérives des chaînes privées, qui ont diffusé de fausses informations ou mis en danger des otages tout simplement pour augmenter leur audience. La chaîne du service public devra s’avoir éviter de tels écueils. Et à terme, pourrait devenir une chaîne de référence pour les spectateurs français à la recherche d’une information fiable ».41
Ivan Valerio, rédacteur en chef du service web de BFMTV dénonce quant à lui le risque de voir une nouvelle chaîne reproduire un travail similaire a celui de ses concurrentes42 : « Ils veulent faire du décryptage mais je pense que le jour où il y aura un attentat, ils seront en direct comme tout le monde, je ne vois pas comment il pourrait en être autrement. Si faire du décryptage c’est mettre quatre personnes autour d’une table et faire un talk, ce sont des choses que l’on fait depuis des années. A BFMTV, il y a du talk, du débat et des invités tous les jours à 8h35,19h, 20h et 21h ». Rien d’innovant, donc, de la part de France Télévisions. Et Germain Dagognet en est bien conscient : « Tout le monde fait du décryptage et de l’analyse. On essayera de le faire différemment et que le meilleur gagne ». Il ne souhaite pas pour autant la disparition des autres chaînes d’information en continu présentes sur la TNT. « La France est le seul pays en Europe qui ne dispose pas de chaîne de service public d’information. Notre but n’est pas de faire de l’ombre aux trois autres chaînes. Des approches différentes ne peuvent être que bénéfiques ».

Table des matières

INTRODUCTION
I-Vertus et impasses de l’information en continu
A- Historique et présentation des chaînes d’information en continu
B- Les limites des chaînes d’information en continu
C- Un succès indéniable
II- Présentation et objectifs de la nouvelle chaine d’information en continu
A- Ligne éditoriale, nature de la chaîne et public visé
B- Les partenaires
C- Les programmes
D- Nom et lancement de la nouvelle chaîne publique d’information en continu
III- Que va faire la concurrence ?
A- Y a t-il de la place pour tout le monde ?
B- Une sixième chaîne d’information en continu est-elle nécessaire ?
C- Le problème de l’audience
D- La nouvelle chaîne peut-elle pousser la concurrence à se réinventer ?
E- Les conséquences d’une nouvelle chaîne sur les effectifs de la concurrence
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXES
RÉSUMÉ
MOTS-CLÉS

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