Production d’hydrogène et de noir de carbone à l’échelle 50 kW2

Production d’hydrogène et de noir de carbone à l’échelle 50 kW2

Tests de craquage en tube simple dans un réacteur plasma jouant le rôle de source de chaleur externe

Description du réacteur plasma

Le réacteur plasma est présenté sur la Figure 53.  Le design de ce réacteur est très similaire à celui décrit dans [128] mais le concept de chauffage indirect est utilisé dans la présente configuration. La source externe de chaleur (plasma thermique) est située dans la partie supérieure d’une cavité cylindrique verticale en graphite (1,8 m de haut, 0,28 m de diamètre intérieur). Cette source délivre la chaleur nécessaire pour la dissociation du méthane qui parcourt un tube horizontal en graphite (18/26 mm, longueur : 600 mm, distance tube-électrodes : 340 mm). Elle est alimentée par un générateur de courant alternatif triphasé à puissance variable de 366 kW maximum. Trois électrodes consommables en graphite (13 mm de diamètre) sont situées à 120° en haut du réacteur. L’érosion des électrodes est compensée par une avance manuelle. Le gaz plasmagène (azote, 80 NL/min) est admis dans un espace annulaire entre l’électrode et son support et crée un grand volume de gaz plasma dans la chambre du réacteur. Chaque électrode joue successivement le rôle d’anode et de cathode. L’arc électrique tourne à la fréquence du courant (1000 Hz). L’enveloppe du réacteur, en acier inoxydable, est refroidie à l’eau. Celleci est isolée de la chambre de réaction par un feutre graphite. Le tube est chauffé directement sur 240 mm par l’énergie radiative en provenance du plasma et des parois chaudes ainsi que par le gaz plasmagène lui-même qui circule vers le bas de l’enceinte cylindrique. La température du réacteur dépend des conditions opératoires (principalement, la puissance électrique et le débit de gaz plasmagène). Pour indication, la température de paroi était de 1973K pour une intensité du courant de 80 A et une puissance de 45 kW. Un débit d’argon est d’abord introduit dans le tube en graphite pour purger l’oxygène. Ensuite le plasma est initié afin de chauffer le tube à la température cible. Lorsque le régime  permanent est atteint, le méthane est injecté avec l’argon et se dissocie en traversant le tube. La température de la paroi du tube est mesurée en son centre grâce à un pyromètre pointant sur la paroi extérieure du tube. Cette mesure est effectuée à travers une fenêtre latérale en Pyrex, perpendiculairement au tube réactionnel ; le pyromètre est équipé avec un filtre centré à λ = 0,65 μm. Un débit d’azote (3 NL/min) est injecté tangentiellement contre la fenêtre pour la protéger et éviter toute surchauffe. Le pyromètre a été calibré en incluant une correction pour prendre en compte la transmission du hublot en Pyrex. Après refroidissement dans un tuyaux en inox réfrigéré, les produits sont acheminés dans un filtre pour séparer les particules de carbone. Le même appareillage que celui décrit pour le réacteur solaire de 20 kW est utilisé pour caractériser les produits gazeux. Un capteur de pression est positionné à l’entrée du tube afin de contrôler la pression à l’intérieur du tube et de détecter son obstruction éventuelle par un dépôt de carbone. Dès qu’une augmentation anormale de pression est relevée, la réaction est stoppée par l’arrêt de l’alimentation en méthane. 

Résultats principaux 

Concernant l’influence du temps de séjour, de la température et de la fraction molaire en méthane dans le mélange injecté, sur la réaction de craquage, les conclusions sont les mêmes que pour les essais sur le réacteur de 20 kW et ne sont pas à nouveau présentées. En revanche, l’influence du design du tube ainsi que les performances en terme de récupération du noir de carbone dans le filtre sont explicitées dans la suite.

Design du réacteur tubulaire 

La matière première pour la confection des tubes était des cylindres en graphite de 26 mm de diamètre que nous avons percés soit à 15 mm soit à 18 mm afin d’en étudier la potentielle influence sur les performances du réacteur. Six conditions expérimentales, récapitulées dans le Tableau 5, ont été testées pour chaque tube (à 1973K).  Les résultats sont donnés en terme de conversion du méthane, rendements en hydrogène et en carbone (Figure 54). Les courbes ne montrent pas de tendance très claire que ce soit pour la conversion du méthane ou le rendement en hydrogène pour l’un ou l’autre des tubes. L’écart moyen est de moins de 3% pour XCH4 et YH2. Concernant le rendement en carbone, l’écart moyen est de 11% et les résultats montrent que le rendement en carbone est toujours inférieur pour le tube de diamètre intérieur le plus petit. Les résultats présentés précédemment ont montré que la concentration en C2H2 est très sensible au temps de séjour. Ainsi, le tube ayant le plus gros diamètre offre un plus grand temps de séjour et permet d’atteindre un meilleur  avancement de la réaction de dissociation de C2H2. Un effet de surface n’est pas à exclure aussi. D’une part, augmenter le diamètre intérieur améliore le taux de réaction en raison d’une augmentation du temps de séjour (+30%) ; cela laisse aussi plus de place pour la déposition du carbone. D’autre part, un diamètre plus faible permet d’obtenir des vitesses de gaz plus élevées pouvant contribuer à une meilleure évacuation des particules vers le filtre. Néanmoins, les critères de performances évalués pour les deux configurations restent très proches et finalement, le diamètre du tube, dans la gamme étudiée, n’est pas très influent. Ceci peut être expliqué par l’augmentation du coefficient de transfert de chaleur lorsque le diamètre diminue. En effet, pour un écoulement laminaire établi, le nombre de Nusselt (Nu=h.d/λ, avec h le coefficient de transfert de chaleur (W/m².K), d le diamètre du tube (m) et λ la conductivité thermique (W/m.K)) est constant (Nu=3,656 [129])). Etant donné que les expériences ont été menées dans les mêmes conditions de composition, la conductivité du mélange est aussi une constante. Ainsi le rapport des coefficients de transfert pour les tubes de diamètres intérieurs 15 mm et 18 mm (h15mm/h18mm) correspond à l’inverse des rapports des diamètres (d18mm/d15mm). Ainsi, il apparaît que h15mm est 20% plus grand que h18mm. Ceci engendre un meilleur transfert de chaleur dans le plus petit tube et compense partiellement un temps de séjour réduit.

Bilan matière 

La Figure 55 représente la fraction molaire en H2, CH4 et C2H2 pour une expérience à 2073K et une fraction molaire en méthane variant entre 10 et 50% dans le mélange d’alimentation. Le débit d’alimentation total est maintenu constant à 7 NL/min afin de garantir des temps de séjour équivalents pour chaque expérience. Lorsqu’on augmente la fraction molaire en méthane dans l’alimentation, la fraction molaire en H2 en sortie augmente sensiblement. Les mêmes tendances sont observées pour les espèces CH4 et C2H2 mais dans une moindre proportion. Finalement, la conversion du méthane excède 98% dans chaque cas, alors que le rendement en H2 oscille entre 81% et 85%. Ainsi, une bonne conversion peut être maintenue pour des fractions molaires en méthane allant jusqu’à 50% en entrée, ce qui permet d’améliorer l’efficacité thermochimique du réacteur. Néanmoins, il faut garder toujours à l’esprit qu’une dilution est nécessaire afin d’évacuer au mieux les particules de carbone. A la fin de l’expérience (après plus de 40 min.), la production d’hydrogène augmente rapidement alors que les fractions molaires en CH4 et C2H2 diminuent. Ceci rend compte de l’obstruction du tube qui engendre une augmentation de pression et donc un plus long temps de séjour. L’expérience est alors stoppée et le tube doit être nettoyé. Cet aspect reste un problème de design à résoudre pour une production à grande échelle. L’utilisation de graphite ne permet pas un nettoyage des tubes par oxydation du dépôt, méthode généralement utilisée. Un nettoyage mécanique est requis. Cependant ce design avec un tube simple permet d’obtenir des résultats positifs en terme de bilan matière.L’intégration des données de la Figure 55 a permis d’établir les bilans matière sur le carbone et sur l’hydrogène. La procédure est tout à fait similaire à celle utilisée pour les bilans matière sur le réacteur de 20 kW. Le tube ainsi que le filtre ont été pesés avant et après les expériences. La quantité de carbone accumulée dans le tube était de 14,4 g alors que 9,91 g de carbone ont été récupérés dans le filtre. Au total, 92,7 NL de méthane ont été introduits dans le réacteur. En faisant le rapport des espèces H et C en sortie et en entrée, on obtient un ratio de près de 100% (Eq. (24)) pour le carbone et 97% (Eq. (25)) pour l’hydrogène. Selon le bilan sur H (Figure 56), 84% des atomes d’hydrogène initialement contenus dans le méthane sont récupérés sous forme d’hydrogène gazeux (H2), 12% sont contenus dans C2H2, 1% reste sous la forme CH4. Les 3% manquants sont attribués à d’autres hydrocarbures. On remarque tout de même que le méthane est efficacement converti en H2 avec un rendement en H2 de 84%.Concernant le bilan sur C (Figure 57), 50% du carbone en provenance du méthane injecté est contenu dans le C2H2, 49% est récupéré sous forme solide, soit dans le tube (29%), soit dans le filtre (20%). Ainsi, il est possible de récupérer 10 fois plus de carbone dans le filtre avec la présente configuration qu’avec la configuration « double tube » utilisée pour le réacteur solaire de 20 kW. 1% du carbone reste sous la forme de méthane. En conclusion, le méthane n’est pas aussi bien converti en carbone qu’il ne l’est en hydrogène en raison de la présence substantielle de C2H2. Si le produit visé est le noir de carbone, il faudra encore augmenter le temps de séjour, ce qui peut se traduire en terme de procédé par un recyclage. 

Noirs de carbone 

Des échantillons de noirs de carbone ont été analysés par microscopie électronique en transmission. Les images sont reportées sur la Figure 58 pour deux températures différentes (2073K et 1843K). On observe des particules nanométriques. Les plans de graphène de l’échantillon à plus haute température semblent être plus organisés rappelant que les plus hautes températures favorisent la graphitisation. On peut distinguer des particules coalescées (sur l’échantillon obtenu à plus faible température) ayant probablement grandi autour de deux centres de croissance.  

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