Quantification des processus de la dynamique forestière

La mortalité des arbres en forêt

La mortalité est un paramètre à la fois fondamental à prendre en compte et difficile à estimer : fondamental car son impact sur le bilan en surface terrière ou en volume de l’ensemble du peuplement (Clark et Clark, 1996) ainsi que sur la sylvigénèse (Pascal, 1996) est important. Difficile à estimer car c’est un évènement rare et fortement aléatoire dans le temps et dans l’espace (surtout chez les individus de gros diamètre ou pour les espèces peu fréquentes, c’est-à-dire pour les populations à faible effectif).Dans son travail à Paracou, Gourlet-Fleury (1997) note qu’en forêt non perturbée, la mortalité naturelle touche un peu plus de 1% du peuplement vivant (7 individus/ha/an), répartis entre les différents types de la manière suivante : 48% de morts sur pied (3,3/ha/an), 29% de chablis primaires (2/ha/an) et 23% de chablis secondaires (1,7/ha/an). Ces chiffres sont très variables d’une année à l’autre, le taux de mortalité global pouvant varier du simple au double. Dans notre travail, nous allons recenser les arbres morts en distinguant deux types de mortalité (Durrieu de Madron, 1994) : la mortalité sur pied (l’arbre meurt en restant debout ; il aura tendance à se désagréger petit à petit) et le chablis (l’arbre meurt en tombant). Un classement par type de mortalité sera appliqué aux individus morts au courant de cette étude. L’étude du taux de mortalité par classe de diamètre pour une espèce donnée permet de mieux comprendre la structure diamétrique d’une population. En théorie, si l’on considère la population constituée de tous les individus depuis le stade plantule, on observe une courbe de mortalité par classe de diamètre en U (Alvarez-Buylla, 1994), c’est-à-dire un taux de mortalité fort pour les plantules, puis plus faible pour les individus matures et enfin de nouveau fort pour les individus de gros diamètres en phase de sénescence. Par contre, si l’on ne considère que les arbres à partir de 10 cm de diamètre, les avis sont partagés quant à l’existence d’une relation significative entre le taux de mortalité et le diamètre (Alder, 1983, Durrieu de Madron, 1993). Deux approches sont possibles pour tester l’hypothèse que le taux de mortalité est différent selon la classe de diamètre considérée, mettant en jeu (1) le nombre de morts entre les temps t1 et t2 et le nombre de vivants au temps t1, pour k classes de diamètre ou (2) le nombre de morts entre les temps t1 et t2 et le nombre de morts théorique si l’on applique un taux de mortalité moyen et constant, pour k classes de diamètre. Le problème consiste à définir la kième classe de diamètre. En effet, le nombre de morts devient rapidement très faible dans la population des arbres de gros diamètre et les résultats des tests peuvent varier en fonction de la manière dont on configure cette dernière classe (Gourlet-Fleury, 1997).

Le recrutement

Le recrutement donne une image du renouvellement des effectifs. C’est une variable importante pour comprendre la dynamique à long terme des populations. Les valeurs du recrutement peuvent être quantifiées à partir d’unités d’échantillonnages et par période de temps, en effectif, en surface terrière et en volume par espèce, groupe d’espèces ou toutes espèces confondues. On en déduit les valeurs moyennes et la variabilité dans l’espace et dans le temps du recrutement (Favrichon et al., 1998).Le recrutement est fonction de deux éléments : (1) du nombre d’individus appartenant à la classe de diamètre inférieure au diamètre de précomptage (par exemple, la classe des moins de 10 cm de diamètre si ce seuil est fixé à 10 cm), représentant le potentiel de recrutement ; (2) de la vitesse de croissance de ces individus (Durrieu de Madron, 1993). Dans les forêts tropicales, Kariuki et al. (2006) notent que le nombre d’arbres recrutés dépend des espèces et de la densité des arbres de grand diamètre (≥ 40 cm) cinq à dix ans avant les nouvelles mesures de grosseur (Kariuki et al., 2006).

La croissance des arbres en forêt

La croissance moyenne en diamètre varie en fonction des classes de diamètre selon une courbe généralement en cloche dont le maximum passe par les classes de 40 à 60 cm. Les arbres de cette taille ont atteint la voûte et privilégient alors la croissance en diamètre, les plus petits privilégient encore la recherche de la lumière, donc la croissance en hauteur et les plus vieux sont entrés dans une phase de sénescence et voient leurs performances diminuer (Frontier et Pichod-Viale, 1993). Dans les forêts denses équatoriales en Guyane, Gazel (1983) note que l’accroissement moyen sur le diamètre est estimé à moins de 1,6 mm par an. Plusieurs auteurs soutiennent cependant que dans les forêts tropicales, l’accroissement annuel moyen en diamètre varie de 0,1 à 0,5 cm avec la majorité d’arbres tendant vers la valeur la plus basse (Horne et al., 1982, Korning et al., 1994, Gourlet-Fleury, 1997, Favrichon, 1998 et Finegan et al., 1999).

Le tempérament des espèces, un facteur lié à la vitesse de croissance

Les espèces d’arbre peuvent être classées en trois groupes, dont les limites tracées dans des continuums de caractères biologiques tels que la vitesse de croissance, le besoin de lumière, la longévité, la longueur du cycle reproductif, etc. restent parfois arbitraires ou mal définies. Les pionnières sont définies comme des espèces susceptibles de participer les premières à la reconstitution d’un couvert végétal, et dotées (1) d’une capacité de germer dans les conditions de lumière forte, (2) d’une grande rapidité de croissance leur assurant un avantage sur leurs voisines. Elles ont une durée de vie courte (Swaine et Whitmore, 1988). Avec l’évolution de la forêt, d’autres espèces ont la capacité de s’établir en sous-étage d’un couvert forestier : ce sont des espèces tolérantes à l’ombre. Celles-ci dominent le couvert forestier lorsque la forêt atteint un stade de développement avancé. D’autres espèces, nommées espèces de transition ou semi-tolérantes, sont favorisées par des ouvertures modérées du couvert forestier. Ces espèces vont s’implanter lors de la création des petites trouées dues au renversement de quelques arbres (petits chablis) (Swaine et Whitmore, 1988).La liaison entre la croissance et le tempérament des espèces a été mise en évidence. Les espèces tolérantes et semi-tolérantes à l’ombrage ont des faibles accroissements moyens alors que les espèces pionnières possèdent des accroissements élevés en pleine lumière.Selon Doucet (2003), une autre manière de classer les espèces en fonction des tempéraments est celle d’Oldeman et Van Dijk (1991). Ils reconnaissent six classes sur base notamment des caractéristiques du houppier et des feuilles. La figure 2 illustre ces six groupes.

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