Rôle de l’aménagement de l’espace de jeu en structure d’accueil de l’enfance ?

En structure d’accueil de l’enfance, l’aménagement de l’espace est un sujet de réflexion central. Chaque lieu d’accueil est emprunt d’un contexte particulier, d’une histoire propre, ce qui lui donne la qualité d’être unique. Tous les locaux ne sont pas conçus dès le départ dans le but d’accueillir de jeunes enfants. Certaines crèches s’installent dans des anciennes écoles, d’autres encore dans des appartements. Quels que soient les locaux, neufs ou non, c’est à l’équipe éducative que revient la tâche de composer avec l’espace à disposition. Ceci consiste, d’une certaine façon, à rendre l’espace praticable à l’accueil de jour. Or, d’un point de vue pédagogique, il s’agit plutôt de créer un véritable support de développement pour l’ensemble des enfants accueillis. C’est pourquoi l’équipe éducative doit parfois redoubler d’ingéniosité pour aménager un espace idéal. L’EDE a en effet pour tâche de créer un milieu favorisant, entre autre, le développement et le bien-être de l’enfant afin qu’il évolue et se construise de façon harmonieuse. De vraies réflexions d’équipe s’élaborent donc autour de cette thématique et cela tout au long de l’année. En effet, un aménagement ne reste jamais statique. Il évolue au fil du temps, au fur et à mesure que les enfants grandissent, en fonction de leurs intérêts et besoins changeants. Le thème de l’aménagement de l’espace demeure continuellement un sujet d’observation, de réflexion et d’amélioration dans toutes les structures d’accueil de l’enfance.

Dans une structure d’accueil pour enfants, chaque pièce peut être support d’activité et de développement. C’est pourquoi, chaque espace nécessite une réflexion approfondie quant à son agencement. J’aimerais démontrer à quel point l’aménagement de l’espace est un élément fondamental dans l’accueil journalier de jeunes enfants. Dans ce but, je souhaite m’informer sur les diverses théories qui y font référence. Je pourrai ainsi décortiquer les enjeux que cela recouvre, tant sur le plan développemental que sur la vie en collectivité. L’aménagement de l’espace joue différents rôles que j’aimerais mettre en lumière afin de lui redonner son importance légitime. L’adulte peut intervenir à deux niveaux dans le processus d’aménagement de l’espace : au niveau architectural et au niveau du matériel et du mobilier. Relativement à l’architecture, il définira entre autre la dimension des pièces et leur emplacement. Concernant le mobilier, sa tâche sera de le choisir avec soin et de définir la position de chacun des éléments, les uns par rapport aux autres. J’aimerais montrer comment l’adulte peut s’y prendre de façon concrète pour répondre à chacun des rôles de l’aménagement de l’espace que j’aurai mis en évidence. Comme en structure d’accueil de l’enfance une démarche ne se réalise rarement seule, j’aimerais également donner des pistes quant au travail d’équipe et à la réflexion qui se trament autour de l’aménagement des lieux d’accueil. Je trouve important d’illustrer, tout au long du texte, mes propos au travers d’exemples concrets. En premier lieu, ceci permettra au lecteur de mieux visualiser les éléments théoriques. En second lieu, j’espère que mes exemples susciteront des idées nouvelles chez ce dernier quant au choix du matériel et de son emplacement.

La relation de l’enfant à l’espace

Lorsqu’il vient au monde, le petit être humain a tout à découvrir autour de lui. Il est pris d’assaut par de nombreux stimuli auxquels il doit faire face. Par ses sens, il perçoit le monde. Cette perception s’effectue d’abord dans un périmètre proche car les sens du nouveau-né ne sont pas aussi aiguisés que ceux d’un adulte. Durant les premiers mois de vie, l’environnement que l’enfant explore se situe principalement au niveau de son corps qu’il apprend à découvrir, puis à reconnaître comme étant sien. La perception devient ensuite excentrée. L’enfant découvre diverses choses qu’il peut toucher et ressentir.  Selon Piaget, il s’agit de la période sensori-motrice qui se déroule de 0 à 3 ans et pendant laquelle l’enfant perçoit des sensations auxquelles il réagit par le mouvement. Rapidement, les sens de l’enfant s’affutent et il parvient à percevoir les stimuli de plus en plus éloignés. Certains lui procurent de l’intérêt, l’encourageant alors à se déplacer, à explorer, à manipuler. D’autres stimuli engendrent chez lui des comportements d’évitement tels que tourner la tête, fermer les yeux ou encore fuir. Dès la naissance, l’enfant possède donc les compétences pour adapter son comportement en fonction de l’espace, des objets et des situations qui l’entourent. Ses réactions sont d’abord associées à des réflexes mais, petit à petit, l’enfant va apprendre à diversifier ses comportements en fonction des stimuli qu’il va rencontrer, élargissant, de ce fait, la palette de ses possibilités . La nécessité de « favoriser chez l’enfant la prise de conscience de lui-même et de son environnement » fait d’ailleurs partie des principes directeurs promus par la pédagogue Hongroise Emmi Pikler.

Selon Winnicott, nous l’avons dit, « il n’y a pas de bébé sans son environnement  ». En effet, pour qu’il se développe, il est nécessaire que l’enfant soit en interaction avec l’environnement à la fois spatial et social dans lequel il se trouve. En l’absence de stimulations sensorielles, l’enfant dépérit. Une expérience visant à isoler un homme de toute stimulation environnementales a d’ailleurs démontré une rapide dégénérescence des cellules de ce dernier, rendant impossible sa survie.

Dans son développement, l’enfant passe par trois postures. Tout d’abord, il est couché, puis parvient à s’assoir et finalement à se mettre debout. L’acquisition successive de ces trois positions lui permet d’observer et d’appréhender son univers sous des angles différents. Lorsqu’il est couché, l’enfant n’observe pas du tout la même chose que lorsqu’il est assis ou encore debout. Vous pouvez vous-même en faire l’expérience. Dans la position plat-ventre ou plat-dos, le nourrisson fait preuve d’une grande vulnérabilité. Comme il est incapable de déplacement, il dépend encore énormément de l’adulte. En développant sa mobilité, l’enfant progresse en autonomie. Il peut désormais réagir face à l’environnement en se déplaçant de façon volontaire en direction d’un objet ou alors en prenant la fuite dans un contexte hostile. De ce fait, plus l’enfant grandit et moins il subit l’espace. Au contraire, il va développer des compétences pour se servir de cet espace dans son activité pour y faire ses expériences d’enfant.

L’avènement de l’espace de jeu

De nos jours, tout le monde s’accordera à dire que le jeu est intimement lié à l’enfance. Le droit au jeu est d’ailleurs un des points fondamentaux dans la Déclaration des droits de l’enfant qui date de 1959. Le septième article stipule que : « L’enfant doit avoir toute possibilité de se livrer à des jeux et à des activités récréatives […], la société et les pouvoirs publics doivent s’efforcer de favoriser la jouissance de ce droit. » Dans les lieux de garde pourtant, cette réalité n’a pas toujours été prise en compte. C’est pourquoi, pendant longtemps, aucun espace n’était prévu à l’activité ludique. Les diverses structures pour enfants étaient alors basées uniquement sur deux principes centraux : celui de garde au sens strict et celui d’hygiène. Dans les années 1945-1950 en particulier, le principe d’hygiène était hautement prépondérant . En effet, à l’époque des premières crèches, de nombreuses maladies sévissaient au sein de la population et la mortalité infantile était moins rare qu’aujourd’hui. Les lieux d’accueil faisaient par conséquent preuve d’une grande vigilance et imposaient des règles d’hygiène strictes. Tout ce qui était susceptible d’attirer la poussière et, par conséquent, les bactéries était prohibé. Peluches, tapis ou encore coussins n’avaient pas leur place dans les lieux de garde pour enfants. Les crèches s’inspiraient alors clairement du milieu hospitalier. L’ouvrage Les temps de l’enfance et leurs espaces nous parle d’aseptisation « à la fois biologique et sociale ». En effet, les crèches étaient des lieux extrêmement fermés, tant par leur architecture que par leur fonctionnement. Chaque matin, le parent passait l’enfant aux nurses, par une sorte de fenêtre qui donnait sur la rue. Ce denier était alors déshabillé puis astreint au rituel du bain. On l’habillait ensuite avec les habits propres de la crèche avant de le placer dans un lit où il attendra jusqu’au repas. L’activité des nurses relevait alors du travail à la chaîne. Aucune intimité n’était possible dans cet alignement de lits à barreaux. Plutôt que de donner les moyens à l’enfant de se développer, on le maintenait en vie. Dans les années 70-80, on constate une forte évolution dans le rôle des lieux des crèches.  Tout d’abord, le terme d’accueil remplace celui de garde et l’on tend à professionnaliser le métier, au travers d’une formation spécifique. L’aspect psychologique de l’enfant prend de plus en plus d’importance grâce aux nouvelles découvertes en la matière. La société semble commencer à porter intérêt à ces institutions puisque, afin de pallier le manque de réflexion basée sur l’architecture et l’aménagement des locaux, certaines communes proposent des guides d’aménagement à l’intention des structures d’accueil. La ville de Paris présente un programme de réalisation des crèches dans lequel elle propose, entre autre, aux structures d’accorder un espace de 13m2 par enfant en incluant le mobilier et 6 m² sans le mobilier. Peu à peu, les lieux s’ouvrent, impliquant alors un aménagement spécifique incluant également le parent dans la structure. Des espaces de jeu voient le jour. Ces derniers sont d’abord aménagés uniquement dans le but de proposer des activités dirigées. L’enfant ne peut donc pas agir de façon autonome. Il doit répondre aux demandes d’un adulte. Ce sont des pédagogues tels que Maria Montessori ou encore Emmi Pikler qui ont insisté sur l’autonomie de l’enfant, proposant alors des espaces propices à celle-ci. C’est ainsi que, petit à petit, en plus de tenir compte de l’hygiène physique des enfants, on tient compte de leur hygiène psychique. Cependant, on a beau penser que les lieux d’accueil pour enfants regorgent de jeux et jouets. A la fin des années 80, Raymonde Caffari déplorait encore l’aspect rudimentaire du matériel d’activités proposé.   De nos jours, je remarque, au travers de ma pratique, un choix certainement plus abondant qu’autrefois, mais je constate aussi qu’il persiste un manque de réflexion au niveau du choix du matériel et de son emplacement.

Table des matières

1. Introduction
1.1. Cadre de recherche
1.1.1. Illustration
1.1.2. Thématique traitée
1.1.3. Intérêt présenté par la recherche
1.2. Problématique
1.2.1. Question de départ
1.2.2. Précisions, limites posées à la recherche
1.2.3. Objectifs de la recherche
1.3. Cadre théorique et/ou contexte professionnel
1.3.1. L’architecture
1.3.2. L’aménagement
1.3.3. L’espace de jeu
1.3.4. La pédagogie
1.4. Cadre d’analyse
1.4.1. Terrain de recherche et échantillon retenu
1.4.2. Méthodes de recherche
1.4.3. Méthode de recueil de données et résultats d’investigations
2. Développement
2.1. Introduction et annonce des chapitres développés
2.2. Présentation des données
2.2.1. La relation de l’enfant à l’espace
2.2.2. L’avènement de l’espace de jeu
2.2.3. Rôles de l’aménagement de l’espace de jeu
2.2.3.1. Soutenir le développement de l’enfant
2.2.3.2. Garantir la sécurité de l’enfant
2.2.3.3. Permettre l’autonomie de l’enfant
2.2.3.4. Correspondre à l’âge des enfants
2.2.3.5. Favoriser l’activité de l’enfant
2.2.3.6. Satisfaire les besoins de tous les acteurs
2.2.4. La conception d’un espace de jeu
2.2.5. L’espace de jeu du point de vue architectural
2.2.6. Résultat des entretiens
2.3. Analyse et discussion des résultats obtenus
3. Conclusion

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