Signification du Programme pour les Acteurs de l’Enseignement Elémentaire

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Cadre conceptuel et recension des écrits

L’objectif de ce chapitre est d’opérationnaliser les concepts choisis qui structureront notre cadre problématique.
Nous présenterons les concepts tels qu’ils apparaissent dans les dictionnaires et les publications spécialisées. Ensuite nous tenterons de les expliciter dans le cadre approprié à l’objet de notre étude.

Education

Dans un sens général, l’éducation est la mise en œuvre par des adultes et éducateurs professionnels des moyens aptes à favoriser le développement des facultés proprement humaines de l’enfant : affectivité, intelligence, volonté, etc. (Foulquié, 1971). Dans une perspective sociologique, «l’éducation est l’action exercée par les générations adultes sur celles qui ne sont pas encore mûres pour la vie sociale. Elle a pour objet de susciter et de développer chez l’enfant un certain nombre d’états, physiques, intellectuels et moraux que réclament de lui et la société politique dans son ensemble et le milieu spécial auquel il est particulièrement destiné» (Durkheim, 1977).
Ces définitions générales, ont aujourd’hui pour cadre particulier d’application et de mise en œuvre les systèmes éducatifs et les institutions scolaires et pédagogiques.
Dans un contexte pédagogique, «l’éducation est une acquisition de bonnes manières, politesse, savoir-vivre, bonne conduite en société, formation et information reçues par une personne pendant ses années d’études» (Legendre, 1993, p.435).
Compte tenu du rôle accru qu’ils doivent jouer dans l’éducation comme processus global, les systèmes scolaires revêtent de plus en plus un caractère obligatoire jusqu’à un certain âge. Partant du cadre de la loi nigérienne qui inclut dans le système éducatif toutes les formes d’éducation formelle, non formelle et informelle, nous nous intéressons aux problèmes de la participation des femmes à l’éducation en matière de santé comme relevant de l’éducation des adultes.
L’éducation des adultes peut-être définie comme «toute activité éducative structurée et organisée dans un cadre non scolaire (apprentissage traditionnel, mouvement de jeunesse, clubs et association diverses). D’autres lieux que les établissements de formation s’offrent à l’adulte pour poursuivre sa formation, par exemple les organisations volontaires d’éducation populaire, les municipalités, les organismes socio-communautaires, les syndicats, les associations professionnelles, les entreprises et les médias» (Legendre 1993, p.446).
Tout comme l’éducation dispensée aux élèves dans les institutions, l’éducation des adultes a elle aussi des structures spécialisées et des programmes. Cependant, les informations éducatives doivent être apprises dans une certaine «organisation de situations d’apprentissage» dont l’enseignement qui donne forme à l’éducation. Le terme enseignement selon le Nouveau petit Robert (2003, p.897), fait penser à «l’action, l’art d’enseigner, de transmettre des connaissances à un élève». Quant au verbe enseigner qui vient du latin «insignire» qui veut dire signaler, il traduit l’idée de «transmettre à un élève de façon qu’il comprenne et assimile (certaines connaissances)». Se référant à Legendre (1993), Raynal et Rieunier (1997) font remarquer qu’enseigner comporte par définition l’intention de faire apprendre et que l’enseignement ne se réduit pas à une simple transmission de savoirs. Certes, l’intention de faire apprendre est inséparable de l’activité d’enseigner. L’enseignement peut à cet effet, transmettre des connaissances aussi bien théoriques que pratiques dans le cadre d’un métier ou d’une activité donnée.
Si les programmes scolaires définissent l’enseignement, dans la formation d’adultes ils renvoient à la formation.
En somme, qu’il s’agisse de l’enseignement ou de la formation, «éduquer, ce n’est pas seulement instruire ou informer. C’est faire adopter des attitudes nouvelles, c’est apporter le changement, c’est l’art de convaincre les gens» (Sillonville, 1979). Le concept d’éducation d’après les définitions précédentes, fait allusion à des stratégies d’acquisition des connaissances au cours desquelles l’individu développe ses potentialités en participant aux activités.
Les concepts «éducation et enseignement» sont employés indifféremment, mais le terme enseignement a un sens plus limité et se réfère surtout aux activités qui se déroulent dans un système scolaire où l’on privilégie la transmission des connaissances» selon Baudin (1996, p.62) qui réaffirme que cette perspective peut-être différente (ou complémentaire) de ce qui se donne dans le cadre de l’éducation des adultes nommée aussi enseignement aux adultes.
Notre étude est axée sur ce que Legendre appelle «éducation non formelle des adultes». A cet égard, l’éducation des femmes en matière de santé et de lutte contre le VIH/SIDA relève de l’éducation non formelle des adultes et trouve bien sa place dans le cadre de la loi nigérienne n°98-12. C’est une éducation alternative qui permet l’acquisition d’habiletés, de connaissances et de compétences pour se protéger du VIH/SIDA et améliorer les conditions d’existence ; d’où une visée dépassant le cadre restreint de l’éducation en matière de santé et de lutte contre le VIH/SIDA et débordant sur des objectifs plus généraux d’éducation globale de la personne et de la personnalité.

L’éducation en matière de santé

«Education pour la santé» ou «l’éducation sanitaire» signifie «l’action qui cherche à informer les populations en vue de leur faire comprendre l’intérêt et ensuite de leur donner le désir et les moyens de chercher à protéger, rétablir ou perfectionner leur propre santé et celle de leur collectivité» (Labusquier, 1982). Dans un sens plus restreint, Isely (1985) définit «l’éducation sanitaire comme l’ensemble des efforts destinés à modifier volontairement le comportement des individus d’une population en face de leur santé». Il apparaît ici que l’éducation pour la santé est aussi un concept englobant dépassant nécessairement le cadre limité de la seule santé.
Ainsi selon le Dictionnaire actuel de l’éducation, l’éducation pour la santé est «une éducation qui vise à faire adopter des attitudes et des comportements favorables au maintien et au développement de la santé chez les personnes, les groupes d’individus et les populations» (Legendre, 1993, p.440).
L’ensemble de ces définitions suppose universelle l’expression d’un point de vue particulier, orienté vers des fins pratiques de l’existence quotidienne.
La participation des femmes à l’éducation en matière de VIH/SIDA qui est au centre de notre étude, n’est pas de nature académique. Elle consiste en une participation à la formation, à son résultat sous la forme de connaissances et de compétences pour se préserver du risque d’infection au VIH/SIDA.
Dans un souci de compréhension plus claire de la participation des femmes à l’éducation en matière de VIH/SIDA, l’approche andragogique part du postulat que «l’adulte est un individu qui a un vécu professionnel et affectif important. Si l’on a la charge de le former, il faut impérativement tenir compte de ce vécu. Si l’on souhaite que la formation ait une quelconque efficacité, il est indispensable que l’individu concerné soit clairement informé des buts de cette formation, ou mieux qu’il ait participé à leur définition, afin d’obtenir son adhésion et garantir ainsi sa motivation» (Raynal et Rieunier, 1997, p.266). A ce titre, participer à un programme de formation pour la santé ne se limite pas pour autant à ce seul domaine, il en déborde.
En effet l’approche andragogique permet de tenir compte du milieu social, économique et culturel qui influence le plus souvent l’accès et la participation des femmes à des programmes spécifiques de formation comme l’éducation en matière de VIH/SIDA.
L’origine socio-économique qui pourrait influencer la participation des femmes à l’éducation en matière de santé intervient de manière significative dans leur décision de suivre ou non cette éducation. Pour toute forme d’éducation, en particulier l’éducation des adultes et singulièrement celle des jeunes filles et des femmes, les facteurs socio-économiques et les attentes personnelles ont un poids relativement important voire déterminant. Dans un rapport de la Banque Mondiale, Odaga et Heneveld (1996) soutiennent que «les facteurs socio-économiques, qui influencent la demande d’éducation des filles interviennent de manière significative dans les décisions d’investir, ou non dans cette éducation. «Parmi ces facteurs», la pauvreté, les coûts prohibitifs de l’éducation, les coûts d’opportunité de l’éducation, le manque de débouchés sur le marché du travail, le manque de possibilité de poursuivre des études et le rôle économique essentiel des filles» jouent un rôle déterminant. (Banque Mondiale, 1996).
Au regard de ce qui précède, il s’avère indispensable de préciser le sens qui sera donné à l’expression « origine socio-économique et culturelle ».

Origine socio-économique et culturelle

Une société est une «communauté distincte de personnes organisées qui ont des liens durables d’intérêts, des habitudes, des coutumes, des croyances, des fidélités, des valeurs et des institutions communes ainsi que des comportements semblables régis par des lois» (Legendre, 1993, p.1169).
Ces divers éléments que les membres de la société ont en commun sont organisés en systèmes. Ce sont les systèmes culturel, social, économique, politique, éducatif, etc. Ils sont en interaction permanente.
L’origine socio-économique et culturelle des familles dont il est question dans notre recherche se réfère aux systèmes social, économique et culturel de la société.
Le système social c’est «l’ensemble des êtres humains, de leurs diverses interactions et des facteurs conditionnant les rapports interpersonnels dans un milieu» (Legendre, 1993, p.1269). Dans un sens plus précis, le système social se réfère essentiellement aux relations humaines dans un milieu donné.
Quant au système culturel, il désigne « l’ensemble des aspirations, des connaissances, des idéologies, des normes, des traditions, des us et des coutumes qui constituent un fait et qui conditionnent l’existence et les pratiques du système social » (Legendre, 1993, p.1221).
Il faut cependant remarquer que les relations interpersonnelles sont régies par des normes et des pratiques partagées par les membres de la société. Le système social et le système culturel interagissent.
Les sphères sociales et culturelles se combinent avec les sphères économiques, politiques et religieuses pour former un tout au sens des sociologues.
Dans ce «tout», le système économique, désigne « l’ensemble coordonné des ressources humaines, matérielles et financières, des buts, des principes, des règles et des procédés en vue de la réalisation d’une mission complexe particulière » (Legendre, 1993, p.1214).
Le système économique renvoie à la mobilisation de toutes les ressources de la société afin de réaliser des missions spécifiques de production et de reproduction de la vie. Cette mobilisation des ressources ne peut être indépendante des facteurs socioculturels. Les modes de production ont aussi une dimension affective et culturelle.
Ainsi, par origine socio-économique et culturelle nous entendons l’ensemble des facteurs sociaux, économiques et culturels qui coexistent à un moment donné et qui sont susceptibles d’influencer le comportement des membres de la société.
Ici nous nous intéressons à ces variables à l’échelle de la famille.
Dans le contexte restreint de la famille, l’origine sociale désigne «la fonction ou le rôle qu’occupent les membres de la famille dans la société». Parmi les indicateurs de la variable fonction/rôle, nous avons retenu chômeur, ouvrier, employé, cadre supérieur et profession libérale.
Pour nous, la fonction/rôle des individus dans leur groupe social détermine les conditions, les croyances et les attitudes de la famille sur la participation à un programme d’éducation comme l’éducation en matière de santé et de lutte contre le VIH/SIDA.
Nous définissons l’origine économique comme l’ensemble des moyens matériels et financiers propres à faciliter les conditions d’existence des membres de la famille. On peut citer parmi les indicateurs de cette variable, les sources et les revenus des familles, la disposition des commodités, le type de résidence et le quartier de résidence.
L’origine culturelle quant à elle, désigne le niveau d’instruction des membres de la famille. Les niveaux analphabète, alphabétisé, primaire, secondaire et supérieur sont autant d’indicateurs de cette variable. Il y a aussi la variable religion qui a pour indicateurs musulman, chrétien ou autres.
A cet effet, l’origine sociale, économique et culturelle sont en étroite relation. Quant à «L’origine socioculturelle», nous la définissons comme les manières d’être et d’agir partagées par les membres de la famille, à travers les normes et les pratiques partagées par les membres de la société. Dans une certaine mesure, ce sont les manières d’aborder, de concevoir la vie et de l’orienter (aspect culturel) ; déterminer la nature et la qualité des rapports interpersonnels (aspect social). C’est à ce titre qu’une origine socioculturelle et économique regroupe l’ensemble de variables sociales, culturelles et économiques qui coexistent à un moment donné et qui sont susceptibles d’orienter, de déterminer le comportement des membres de la société. Nous nous intéressons à ces variables telles qu’elles se manifestent dans le cadre de la famille.
Avant d’aborder les différentes situations vécues par les filles, les femmes et leurs familles, il est indispensable de nous poser certaines questions par rapport à certaines approches scientifiques relatives à l’éducation en général et en particulier à la scolarisation des filles et des femmes. Ces éclairages permettent de mieux cerner le phénomène de l’accès des femmes à l’éducation. C’est dans cette tentative d’explication et de réflexion que nous consacreront la partie qui suit.

Les travaux de recherche sur la scolarisation des femmes

Dans cette partie, nous présentons différents travaux de recherches sur la scolarisation des femmes. L’accès des femmes à l’éducation dans les systèmes scolaires des pays d’Afrique subsaharienne dépend de nombreux facteurs dont l’origine sociale, culturelle et économique. Actuellement, il est ordinaire de considérer que les origines sociale, culturelle et économique sont susceptibles d’influencer l’accès des femmes à l’éducation créant aussi des variations dans les performances scolaires (Hyde, 1996).
La plupart des études consultées ont été établies pour répondre à la demande de divers bailleurs de fonds en vue de clarifier les principaux problèmes que pose l’éducation des femmes. Ces études aident à orienter la formulation des politiques et programmes d’éducation. Il est évident que beaucoup d’efforts ont été consacrés à ce sujet, lesquels ont produit quelques aperçus intéressants sur les facteurs qui limitent les possibilités d’éducation des filles.
Ces études démontrent une complexité de plus en plus grande des interactions entre les divers facteurs qui entravent la scolarisation des femmes en Afrique. Ce qui est moins évident, c’est de déterminer, parmi ces facteurs, ceux qui sont susceptibles de promouvoir la participation des femmes dans l’éducation.
Nous présentons quelques écrits d’auteurs qui ont traité de la question, suivant différentes approches, le problème d’accès des femmes à l’éducation de façon théorique et empirique, aussi bien en Afrique en général qu’au Niger en particulier. Mais avant, un aperçu historique de l’éducation des filles en Afrique est nécessaire.

Aperçu historique de l’éducation des filles en Afrique subsaharienne

La participation limitée des filles dans les systèmes éducatifs d’Afrique subsaharienne a des précédents historiques bien connus. Ce qui suit met en évidence les facteurs identifiés dans la littérature et qui restreignent l’accès des filles à l’éducation formelle.
L’islam, et le christianisme figurent parmi les facteurs qui ont introduit l’éducation non indigène c’est-à-dire exogène en Afrique subsaharienne. L’éducation des filles n’était alors envisagée que dans la mesure où elle favorisait le développement de l’islam ou du christianisme et la consolidation des communautés religieuses. Lorsque l’administration coloniale a pris l’enseignement en charge, l’éducation des femmes n’avait pas d’importance. D’ailleurs l’école occidentale a suscité des résistances à ses débuts, car l’idée d’envoyer les filles semblait absurde aux indigènes.
Quand l’éducation des femmes a été finalement incorporée dans les programmes de développement des communautés indigènes, le type d’enseignement dispensé visait à développer les vertus domestiques. Les femmes africaines formées ne le sont que pour devenir de bonnes ménagères, et de bonnes mères principalement au profit d’une nouvelle classe d’employés et au profit de l’église. C’est ainsi que naît l’idée de la femme épouse, mère et ménagère, confinée au foyer et économiquement dépendante de son mari dans la culture africaine. Cette optique occidentale et patriarcale ignore la valeur essentielle de la femme africaine dans les sphères publiques et économiques de la société. Les femmes qui ont eu une éducation occidentale ne pouvaient choisir que la profession d’infirmière, ou occuper un emploi connexe dans le secteur des soins de santé, le métier d’enseignante, et le mariage (Banque Mondiale, 1993). Ces options perdurent encore aujourd’hui.
Tous ces facteurs, pratiques et traditions ont limité la demande sociale d’éducation des femmes en Afrique subsaharienne. Leur persistance nous amène à poser la question : Quels sont les facteurs qui limitent les possibilités d’éducation des filles et des femmes en Afrique actuellement ?

La scolarisation des femmes à travers l’Afrique subsaharienne

La littérature est relativement abondante sur le sujet de la scolarisation des filles. C’est le fait en grande partie des agences de développement international comme la Banque Mondiale, l’Unicef, l’Unesco, etc.
La littérature sur la scolarisation des femmes a fait l’objet d’analyses diverses, visant à signaler son importance pour le développement économique et la santé des populations. Les sources consultées énumèrent les facteurs qui entravent l’accès des filles à l’éducation. Ce sont les études de Akpaka et Gaba (1991) ; Brock et Cammish (1991) et (1994) ; Banque Mondiale (1993), (1998), Davidson et Kanyuka (1992) ; Hyde (1993) ; Koukou (1992) ; Lawson-Body (1993) ; Maïga (1991) ; Sall et Michaud (2002) ; Unesco/Unicef (1992) (1994) ; Unesco/Onu sida (2001) ; Unesco/IIPE (2003) etc.
Nous avons exploré certaines approches caractéristiques qui ont privilégié des facteurs explicatifs d’ordre socioculturel, socio-économique, institutionnel et politique. Cette analyse nous permettra de mieux comprendre ce que ces auteurs considèrent comme susceptible d’entraver l’accès des filles à la scolarisation à partir d’observations empiriques.
Ces facteurs peuvent être classés de différentes manières. Certains d’entre eux relèvent des politiques et pratiques institutionnelles, d’autres sont liés aux coutumes, convictions et attitudes spécifiques à chaque pays à l’égard des rôles, des responsabilités et des capacités des femmes. Notre analyse regroupe la documentation disponible sous deux catégories : celles traitant des facteurs socio-économiques d’une part et celles relatives aux facteurs socioculturels d’autre part. Les facteurs socio-économiques et socioculturels qui influencent la demande d’éducation des filles interviennent de manière significative dans les décisions familiales d’investir dans l’éducation des filles. En effet, les idéologies qui règnent un peu partout en Afrique au niveau des familles et des communautés favorisent le plus souvent les garçons au détriment des filles et entraînent des différences d’opportunités et de résultats sur le plan de l’éducation.
Selon Unesco/Unicef (1993), environ 36 millions de filles ne vont pas à l’école en Afrique subsaharienne. Ces écarts entre les enrôlements scolaires masculins et féminins semblent être plus marqués dans certains pays du Sahel comme le Burkina Faso, le Mali, le Niger et le Tchad où les effectifs féminins baissent lors du passage d’un niveau d’enseignement à un autre. En 1990, les filles représentent 45% des élèves du primaire, 40% du secondaire, et 31% du supérieur dans ces mêmes pays (Unesco, 1996). Bien que les filles soient plus nombreuses que les garçons en Afrique, leur accès à la scolarisation se rétrécit partiellement entre les niveaux primaire et secondaire. Ceci est dû aux faibles performances de ces dernières aux examens nationaux et aussi à l’insuffisance de l’offre d’éducation. Il ressort d’une analyse de l’éducation des filles en Côte d’Ivoire que celles-ci, une fois l’enseignement primaire achevé, ont 37% de chance de moins que les garçons d’aller au secondaire et, lorsqu’elles ont terminé le premier cycle du secondaire (collège), elles ont 14% de chance de plus que les garçons de poursuivre dans le deuxième cycle du secondaire (lycée) (Appleton et All, 1990).
L’accès à l’enseignement primaire n’est qu’une partie du problème qui se pose aux filles. Une fois scolarisées, elles ont souvent des taux de redoublement, d’échec et d’abandon qui se traduisent par de faibles taux d’achèvement du primaire. L’abandon scolaire chez les filles est associé à leurs faibles performances scolaires et il est évident selon Hyde (1994) que les filles ont souvent des résultats inférieurs à ceux des garçons dans les enseignements primaire et secondaire. Cette situation trouve son explication dans la pauvreté des familles et l’analphabétisme élevé des femmes en Afrique. L’Unesco (1995) affirmait que «les femmes et les filles sont prisonnières d’un cycle qui fait que les mères analphabètes ont des filles, qui l’étant aussi, se marient très jeunes, et sont condamnées à leur tour à la pauvreté, à l’analphabétisme , à un taux de fécondité élevé et à une mortalité précoce» (Unesco, 1995, p.44).
Une étude sur les redoublements et les abandons dans les écoles primaires effectuée au Mozambique conclut que le facteur le plus important qui entraîne les mauvais résultats scolaires est le travail pour la survie de la famille (Palme, 1993). En Côte d’Ivoire, les effectifs féminins des écoles secondaires publiques et privées sont restés aux alentours de 30% au cours des dix dernières années et il y a une forte proportion de redoublement et d’abandon entre le premier et le deuxième cycles de l’enseignement secondaire (Eholie, 1993). Au niveau universitaire, les taux de redoublement et d’abandon sont aussi élevés chez les filles. Les taux sont de 3% pour les homme

Revue de la littérature

La presque inexistence de documents sur le sujet spécifique nous a amené à axer notre réflexion sur les études qui ont été faites sur l’Education en général et sur l’islam, Et, également sur les études traitant de la relation entre l’éducation et l’islam particulièrement dans les écoles.

Ouvrages généraux sur l’Education

Nous avons retenu un certain nombre d’ouvrages parmi les plus célèbres travaux en sociologie de l’Education. Ainsi, nous avons d’abord consulté l’ouvrage de Pierre Bourdieu et Jean Claude PASSERON intitulé « la REPRODUCTION, élément pour une théorie du système d’enseignement » où ces derniers développent l’idée selon laquelle la reproduction serait l’une des caractéristiques fondamentales de l’institution scolaire.
Les auteurs y soutiennent que « tout système d’enseignement doit les caractéristiques spécifiques de sa structure et de son fonctionnement au fait qu’il faut produire et reproduire, par les moyens propres de l’institution, les conditions institutionnelles dont l’existence et la persistance (autoproduction de l‘institution) sont nécessaire tout à l’exercice de sa fonction propre d’inculcation qu’à l’accomplissement de sa fonction de reproduction d’un arbitraire culturel dont il n’est pas le producteur (reproduction culturelle) et dont la reproduction contribue à la reproduction des rapports entre les groupes et les classes (reproduction sociale) »7
Ainsi Bourdieu et PASSERON montrent l’importance du système d’enseignement dans ce qu’ils appellent la reproduction.
Nous avons retenu également l’ouvrage de Pascal Mukéné intitulé L‘ouverture entre l’Ecole et le Milieu en Afrique Noire pour son traitement de la gestion de l’Education en général et particulièrement en Afrique Noire.
L’auteur y développe l’idée de la difficile relation de cohabitation et de symbiose entre l’Ecole moderne et le milieu africain (traditionnel). En effet, l’auteur soutient qu’en Afrique, « S’il faut parler de reproduction qui prend appui sur l’école, c’est une reproduction de deuxième degré, qui résulte d’une superposition ou d’une hybridation de deux cultures et qui reflète la situation anormale d’une école aliénante qui ne s’ouvre pas totalement au milieu et sur lui »8.
Ainsi, l’auteur montre la difficile ouverture en Afrique de l’Ecole au milieu traditionnel et vice-versa. En effet, le premier ouvrage notamment celui de Bourdieu et Passeron nous permettra de voir comment, par le biais de cette institution scolaire de base, la société essaie d’assure sa reproduction avec ses valeurs islamiques. Et, le second ouvrage nous permettra de montrer la difficulté d’insérer des valeurs non occidentales et de surcroît religieuses dans l’univers scolaire en Afrique et particulièrement au Sénégal.

Ouvrages généraux sur l’islam

Nous avons retenu d’abord le livre d’Abou Hamid alGhazali intitulé La Revivification des sciences de la religion dans son Tome 1.
En effet, l’auteur y montre les vertus du savoir, de l’instruction et de l’enseignement dans l’islam.
Il y rapporte des paroles de Dieu et de son prophète sur les vertus de la science de l’enseignement et de l’instruction à travers des preuves traditionnelles et logiques.
Ghazali affirme que « Dieu a accordé au monde le savoir qui est son attribut le plus particulier. Le Maître est comme un magasinier dont les magasins sont les âmes. Il lui est accordé de distribuer de son savoir à quiconque en a besoins. Quelle position est plus glorieuse pour l’homme que d’être un intermédiaire entre Dieu et ses créatures, de rapprocher ceux-ci de leur créature et de les guider vers le paradis ? Que dieu nous compte parmi eux et que chaque homme soit béni »9
Tout cela pour montrer l’importance du savoir, de l’instruction et de l’enseignement dans l’islam. Ensuite, nous avons l’ouvrage publié sous la direction de Paul Poupard et intitulé Dictionnaire des religions qui retrace le projet de civilisation de l’islam par le biais de l’éducation et avec comme objectif la construction de la cité idéale de Médine (de Mohamed (PSL) et des quatre califes « bien dirigée », 622-661). Autrement dit, selon celui-ci, les musulmans veulent réaliser un projet islamique de civilisation par le biais de l’éducation.

Ouvrage spécifique sur l’éducation religieuse, islamique dans l’Ecole sénégalaise

Nous n’avons trouvé qu’un ouvrage spécifique à notre étude en l’occurrence l’œuvre du Ministère de l’Education Nationale du Sénégal intitulé l’Ecole Nouvelle.
En effet, il y est développé tout ce qui concerne l’Education religieuse dans « l’école Nouvelle » du Sénégal.
On y soutient qu’ « après avoir rappelé la nécessité d’introduire l’éducation religieuse à l’école, la C.N.R.E.F a défini les principes de cette éducation, ses objectifs et son statut, elle a traité des problèmes concernant la langue d’enseignement, les structures de mise en œuvre, les personnels »10
Et, le professeur Iba DER THIAM, ministre de l’Education Nationale d’alors, y soutient que « l’Ecole Nouvelle sera laïque, tout en intégrant la dimension religieuse dans la tolérance et la liberté de pensée et de conscience »11. Autrement l’introduction de l’éducation religieuse ne peut pas et ne doit pas changer le caractère laïc de l’Ecole sénégalaise.
Nous avons également consulté des écrits de journaux, particulièrement le dossier du Journaliste Jean PIRES intitulé : « Enseignement religieux à l’école primaire sénégalaise » paru dans le Journal « Le Soleil » N° 10188 du 18 Mai 2004.
En effet, PIRES y étale un document conséquent consacré à l’enseignement religieux introduit dans le système scolaire sénégalais par les autorités étatiques, notamment celle du Ministère de l’Education Nationale Chargé de l’Enseignement Primaire.
Il y passe en revue tout le processus d’introduction de cet enseignement et les difficultés qu’il rencontre dans le système scolaire sénégalais.

Analyse conceptuelle

L’utilisation de concepts est nécessaire dans toute recherche ; car le concept doit guider la recherche en lui procurant au départ un point de vue.
Nous avons utilisé des concepts clés comme la socialisation, la laïcité, l’éducation, l’école, l’islam, valeurs et modèle.

La socialisation

Elle est définie par Guy Rocher comme étant « le processus par lequel, la personne humaine apprend et intériorise tout au cours de sa vie les éléments socioculturels de son milieu, les intègre à la structure de sa personnalité sous l’influence d’expériences et d’agents sociaux significatifs et par là s’adapte à l’environnement social où elle doit vivre »12 .La socialisation consiste donc d’abord « à comprendre comment , selon le mot de Margaret Mead, un enfant manu devient un Manu et un enfant arapesh un Arapesh »13
Dans cette étude, ce concept de socialisation est utilisé en rapport avec l’école et notamment le programme d’enseignement islamique.
Ainsi, il s’agit de l’acquisition de valeurs religieuses notamment islamiques par les élèves par le biais de l’enseignement. Et ceci dans le but de son intégration dans leurs personnalités respectives en vue de leur adaptation à leur environnement social.
Autrement dit, produire de futurs citoyens musulmans en vue de la pérennisation des valeurs islamiques.

La laïcité et la laïcisation

Elle est définie par le dictionnaire des religions comme étant « le respect par l’Etat de la culture de la Nation considérée dans toutes ses composantes (…). Elle est la garantie juridique de la liberté des consciences de tous les citoyens face à la contrainte étatique. Elle implique en eux tous au sein de la nation, la tolérance à l’égard des croyances »13. La laïcité désigne, plus spécifiquement, la conception française de la séparation de l’Etat et des institutions religieuses.
En ce qui nous concerne dans cette étude, il s’agit de l’exclusion de toute religion dans l’organisation de l’enseignement dans son fonctionnement.
Par ailleurs, l’application de ce principe de laïcité a connu bien des avatars historiques car il n’est pas d’Eglise qui n’ait pas une conception globale de la vie sociale, ni d’Etat qui n’essaie de mettre les Eglises au service de sa politique.
On appelle laïcisation, le processus moderne d’autonomisation de la société et de la politique par rapport à la religion. Le mot désigne « le processus par lequel les diverses institutions sociales conquièrent leur autonomie par rapport à la religion. »14
Ceci posant dans notre contexte, l’utilisation par l’Etat du Sénégal dans sa politique d’éducation, des valeurs islamiques.

L’éducation

Pris dans le sens le plus général, le terme « éducation » recouvre selon le dictionnaire de sociologie, « toute activité sociale visant à transmettre à des individus l’héritage collectif de la société ou ils s’insèrent »15
L’école est ici l’instance d’éducation où se forme des individus par le biais d’un enseignement. L’ONU, dans sa déclaration universelle des droits de l’homme souligne que « toute personne a droit à l’éducation. L’éducation doit être garantie, au moins en ce qui concerne l’enseignement élémentaire et fondamental ; l’enseignement primaire est obligatoire…
L’éducation doit viser un plein épanouissement de la personnalité humaine et au renforcement du respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales »

L’école

Elle peut être définie comme un établissement où se donne un enseignement collectif. Et comme le souligne Pascal Mukéné, l’école en Afrique noire est un « réseau officiel éducatif mis en place pour une scolarisation normale et régulière »15.
Par ailleurs, Gilles Ferréol souligne que « l’école ne se contente pas de faire circuler des cohortes d’élèves. Elle fait aussi circuler le savoir »16.
Dans notre cas, il s’agit de l’école élémentaire qui est la base dans le système éducatif du Sénégal et qui se charge des premiers pas dans l’éducation et la scolarisation de l’enfant.

L’islam

Ce terme est défini dans le dictionnaire des religions comme « la soumission à Dieu » L’ensemble constitue une communauté maternelle (umma) ; c’est l’islam en tant que société unitaire ou tous et chacun se sentent solidaires et frères malgré les nombreuses différences.
Il s’agit dans notre cas de valeurs islamiques qui constitue le modèle dans l’éducation de tout musulman notamment le coran (livre saint), les « hadithss »(sentences du prophète), la pratique cultuelle ou « Fikh », la « Siira » qui retrace l’histoire du prophète Mouhamed (PSL) et des autres prophètes, et enfin, le « Tawhid » qui s’occupe de la pureté de la foi.

Valeurs

La valeur est l’importance accordée à une personne, une action, ou un objet ; finalité idéale poursuivie par une collectivité.
Le concept de valeur ne peut être utilisé en sociologie qu’avec précaution en raison à la fois de l’importance des faits qu’il évoque, mais aussi en raison de sa polysémie.17
Chez Durkheim comme chez Weber, l’unité sociale est assurée par les valeurs inculquées aux individus, et finalement partagées et assimilées par eux. Ces valeurs, souvent qualifiées d’ « ultimes » et de « finales », sont présentées comme relevant de l’expérience religieuse.

Modèle

Dans les pratiques sociales, réalité ou image exemplaire que l’on s’efforce de reproduire.
Le concept renvoie « aux multiples pratiques par lesquelles un acteur individuel ou collectif cherche à reproduire, à imiter une forme objective ou imaginaire ou s’en inspirer.»18 s et de 20% pour les femmes à l’Université de Makerere en Ouganda (Naidu, 1992).

Table des matières

INTRODUCTION
Première partie : Cadre Général et Méthodologie de la Recherche
Chapitre I : Cadre Général de la Recherche
Section I : Problématique
Section II :Objectifs de la Recherche
Section III :Hypothèses de la Recherche
Section IV : Présentation du Cadre Théorique et Revue de la Littérature
IV.1 : Présentation du cadre théorique
IV.2 : Modèle théorique
IV.3 : Revue de la littérature
Section V : Analyse Conceptuelle
Chapitre II : Présentation des Cadres d’Etude
Section I : L’Ecole Primaire de Yoff Aéroport
Section II : Les Ecoles Primaires El Hadji Elimane THIAM (Yoff 5) et El Hadji Talla DIAGNE (Yoff 2)
Section III : L’Ecole Primaire Ouakam-Camp
Section IV : L’Ecole Primaire PAC
Section V : L’Ecole Primaire Castors Forces Armées
Section VI : L’école primaire Grand Yoff 2/A
Section VII : L’IDEN de Dakar-Banlieue
Chapitre III : Méthodologie de la recherche
Section I : Stratégie de la Recherche
I.1 : La recherche documentaire
I.2 : La consultation des personnes ressources
I.3 : Procédure de l’échantillonnage
Section II : Présentation des Outils de la Recherche
II.1 : Le questionnaire
II.2 : Le guide d’entretien
II.3 : Déroulement de l’enquête
Section III : Difficultés et Facilités rencontrées
Deuxième partie : Présentation, Analyse et Interprétation des données de l’enquête
Chapitre III : Vue d’ensemble sur le Programme
Section I : Le Contenu du Programme et son Opérationnalisation
I.1 : Le Contenu du Programme
I.2 : L’Opérationnalisation du Programme
I.2.a : L’Aménagement de la Pédagogie
I.2.a.1 : Les méthodes
I.2.a.2 : La formation des enseignants du programme
I.2.b : La Logistique
Section II : L’Evaluation du Programme et ses Dispositions Juridiques
II.1 : L’évaluation du programme
II.2 : Les Dispositions Juridiques
Section III : Les Entraves qui affectent le Programme
Chapitre IV : Signification du Programme et sa Dimension en matière de Socialisation
Section I : Signification du Programme pour les Acteurs de l’Enseignement Elémentaire
I.1 : Signification pour l’Etat
I.2 : Signification pour les parents d’élèves
I.3 : Signification pour les élèves
Section II : La Dimension du Programme en matière de Socialisation
II.1 : Former un bon musulman
II.1.a : La formation théorique
II.1.2 : La formation pratique
II.2 : Former un citoyen modèle
Chapitre V : Enseignement Islamique et Laïcité de l’Ecole Sénégalaise
Chapitre VI : Solutions envisagées par les Acteurs
Section I : Actions contextualisées
I.1 : Actions dans l’enseignement
I.2 : Actions dans le champ socio-religieux
Section II : Actions de Coordination et Conjonction des Théories et Pratiques
II.1 : Actions de coordination
II.2 : Conjonction des théories et pratiques
CONCLUSION
Bibliographie
Annexe

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