Stabilisateurs automatiques et dépenses publiques

Stabilisateurs automatiques et dépenses publiques

Les fluctuations du solde public résultent mécaniquement de la variation des dépenses et des recettes publiques : Si ces variations résultent spontanément des effets du cycle économique on parle de stabilisateurs automatiques. Si ces variations découlent de l’action volontaire d’un gouvernement par exemple accroître la dépense publique dans le cadre d’une politique de relance keynésienne il s’agit de politique discrétionnaire. Des mesures discrétionnaires peuvent jouer soit en accroissant l’action des stabilisateurs automatiques, soit en menant une politique procyclique (procyclique : qui va dans le sens du cycle et l’accélère, par exemple baisser les prélèvements obligataires pour suralimenter une phase de reprise). L’impact des stabilisateurs automatiques sur les finances publiques, est théoriquement « procyclique ». Cet impact a toutefois un effet « autocorrecteur ». En effet :Les stabilisateurs automatiques détériorent le solde budgétaire lorsque l’économie ralentit, mais l’améliore lorsque la conjoncture se fait plus souriante ; Le relâchement budgétaire prévalant en période de récession cède mécaniquement la place à un resserrement budgétaire lorsque l’économie repart. Selon les décompositions du solde public réalisées par les institutions internationales, les stabilisateurs automatiques jouent, essentiellement, du côté des recettes tandis que l’accroissement des dépenses publiques résulte d’abord de décisions discrétionnaires (par exemple, le fait d’avoir baissé la TVA dans la restauration en 2009).

Efficacité et limites d’une politique budgétaire anticyclique

Cadre théorique

Un débat animé a lieu sur le rôle approprié de la politique budgétaire dans le pilotage du cycle conjoncturel, principalement durant une phase de récession économique. Les mesures de relance sont, la plupart du temps, présentées comme un moyen permettant d’atténuer les consé- quences indésirables d’un ralentissement ou d’une récession économique, telles qu’une hausse du chômage. Ce point de vue se vérifie d’autant plus lorsque celles-ci ne se limitent pas à des phénomènes purement cycliques mais altèrent aussi le potentiel de croissance de l’économie. C’est notamment le cas des fameux effets d’hystérésis V. POLITIQUE DE RELANCE 22 S’exerçant sur le chômage, selon lesquels les chômeurs voient la perspective de trouver un nouvel emploi s’éloigner et le chômage cyclique menace de devenir structurel. En pareilles circonstances, les pouvoirs publics peuvent, tant par leurs dépenses que par leurs recettes, tenter de dynamiser l’activité économique. Les mesures budgétaires peuvent stimuler la croissance économique directement par le biais d’une hausse de la consommation ou des investissements publics, mais cela peut également se faire indirectement, par exemple grâce à une augmentation du pouvoir d’achat des ménages moyennant des réductions d’impôts ou un relèvement des allocations sociales. Diverses observations peuvent être formulées sur l’efficacité et la désirabilité d’une telle gestion de la demande par les pouvoirs publics basée sur les théories de John Maynard Keynes. Premièrement, il importe que de telles mesures de relance produisent leurs effets à temps, afin d’éviter que ces derniers ne soient visibles qu’après le retournement conjoncturel et que les mesures ne prennent une orientation pro- cyclique. En réalité́, des retards de tous ordres, pouvant en particulier trouver leur origine dans le processus de décision politique, peuvent être accumulés, non seulement au stade de l’identification du ralentissement économique mais aussi lors de la mise en œuvre des mesures. Deuxièmement, les mesures de soutien à la demande doivent, par définition, être limitées dans le temps et neutralisées dès le moment où la conjoncture se redresse. L’expérience montre également que la mise en œuvre de telles mesures de relance est beaucoup plus attirante pour les responsables politiques que ne l’est leur suppression. Il peut donc arriver 23 que des mesures de relance «temporaires» prennent un caractère permanent, ce qui a pour effet d’aggraver la position budgétaire structurelle. Troisièmement, il est important que les moyens budgétaires destinés à stimuler l’économie soient correctement affectés et que les mesures de relance soient définies et établies sur la base de critères objectifs et tiennent compte du bien-être général. Il est néanmoins difficile d’exclure que les mesures soient dénaturées par divers intérêts privés et groupes de pression. Dans ce cas, l’efficacité́ privés de l’action des pouvoirs publics diminue. Par ailleurs, l’efficacité des mesures de relance est largement déterminée par les réactions des agents économiques privés. À cet égard, différents canaux peuvent saper l’efficacité́ des mesures de relance. Ainsi, l’efficacité́ des réductions d’impôts ou du relèvement des allocations en faveur des ménages peut être amoindrie si, à la suite de l’incertitude entourant leur situation financière future, ces ménages choisissent d’épargner une grande partie du montant de l’économie ainsi réalisées. De même, les réductions d’impôts en faveur des entreprises n’ont pas nécessairement pour conséquence que celles-ci investissent davantage, engagent ou continuent à employer plus de travailleurs. Par temps incertains, les entreprises peuvent préférer consacrer les moyens supplémentaires ainsi dégagés au renforcement de leur bilan, surtout lorsqu’elles se trouvent confrontées à une importante surcapacité́ résultant d’un net recul de la demande. Dans la littérature économique, ce type de réaction, qui peut sensiblement limiter l’efficacité́ d’une 24 politique de relance budgétaire, est connu sous le nom d’« effet non keynésien ». En outre, il doit être tenu compte du fait qu’une détérioration de la situation budgétaire et un volume plus important d’emprunts contractés par les pouvoirs publics exercent une pression à la hausse sur les taux d’intérêt et compromettent ainsi l’efficacité des mesures de relance. Ces effets inhibiteurs peuvent être atténués lorsque la politique budgétaire est assortie d’une politique monétaire accommodante.

Résultats empiriques en matière de multiplicateurs budgétaires

Il existe aussi une littérature empirique très vaste sur l’efficacité d’une politique budgétaire active de soutien à la demande. Il y est souvent fait mention de ce qu’on appelle les multiplicateurs budgétaires. Ceux-ci reflètent la mesure dans laquelle une impulsion budgétaire déterminée stimule la croissance de l’activité. Ces travaux ne parviennent toutefois pas à des conclusions univoques en ce qui concerne tant l’ampleur de ces multiplicateurs que l’efficacité́ relative des différentes mesures en matière de recettes et de dépenses. Les résultats empiriques semblent conformément à la théorie être en grande partie tributaires des circonstances précises et, souvent, également du modèle utilisé pour évaluer ceux-ci. Ils doivent donc être interprététés avec la plus grande circonspection. La littérature empirique permet néanmoins de dégager prudemment quelques conclusions. 26 Bien que les estimations empiriques en matière de multiplicateurs budgétaires couvrent un large éventail de résultats, allant de valeurs (keynésiennes) de 1 ou plus à des valeurs négatives, elles sont, dans la majorité́ des cas, positives, ce qui signifierait que les mesures budgétaires de relance sont effectivement à même de donner une impulsion positive à la croissance économique. La plupart des études conduisent toutefois à des multiplicateurs budgétaires inférieurs à 1 et, dans de nombreux cas, l’impact d’une politique de relance temporaire de l’activité économique est très limité. De plus, les multiplicateurs divergeraient selon le type de mesures de relance prises en compte. Nombre d’études démontrent que ce sont les hausses temporaires de la consommation et des investissements publics qui ont le plus grand impact positif et immédiat sur l’activité économique, bien que, d’ordinaire, cet effet s’attenue rapidement. Par contre, à long terme, la diminution des recettes publiques bénéficierait davantage à la croissance économique que l’augmentation des dépenses publiques. Les études empiriques confirment également que l’ampleur des restrictions de liquidités et de crédits joue un rôle dans l’efficacité d’une politique de relance budgétaire. Plus le nombre de ménages et d’entreprises confrontés à de telles restrictions est important, plus les multiplicateurs budgétaires des réductions d’impôts sont élevés. Il semble, en outre, que l’impact des mesures de relance soit plus limité dès lors que la situation des finances publiques généralement estimée sur la base de l’encours de la dette publique ou de la croissance de celle- 27 ci se détériore. Ceci est lié au fait que les mesures de relance poussent les taux d’intérêt à la hausse, ce qui pèse sur l’investissement privé, et à un taux d’épargne de précaution plus élevé des ménages en période de difficultés budgétaires. Enfin, on constate une nette divergence des multiplicateurs budgétaires selon les pays. Ainsi, l’impact des mesures de relance serait plus faible selon que l’économie est plus petite ou plus ouverte, étant donné qu’une partie importante de l’impulsion budgétaire peut s’exporter. Différentes études observent des multiplicateurs plus réduits pour les économies développées que pour les économies en développement, du fait de restrictions de liquidités de plus grande ampleur dans ces dernières. Dans la perspective d’une récession qui se prolongerait dans la durée, l’argument selon lequel les plans de relance économique arrivent toujours trop tard n’est pas pertinent. D’ailleurs, en raison de la récession, il est possible que davantage de ménages et d’entreprises soient confrontés à des restrictions de liquidités ou de crédits que dans des circonstances plus normales, ce qui devrait accroître l’impact des mesures de relance. Enfin, dans les circonstances évoquées, soutenir l’activité économique est souhaitable afin d’enrayer la spirale négative et de limiter les effets d’hystérésis sur le chômage.

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