Syndrome dépressif

Syndrome dépressif

Le syndrome dépressif est un trépied composé d’une humeur dite dépressive, d’un ralentissement psychomoteur et de signes somatiques (13). Chacun de ses piliers s’exprime avec une intensité variable d’un individu à l’autre mais également au cours de l’évolution du même épisode chez un individu donné. – L’humeur dépressive est pathologique par sa durée, son intensité et sa réactivité aux stimuli de l’entourage et de l’environnement. Ce n’est pas tant la polarité négative de l’humeur qui serait à évaluer, mais plutôt son absence de réactivité aux stimuli plaisants et agréables. En effet, dans la mélancolie, plutôt qu’un sentiment de tristesse, les patients présentent souvent une anesthésie affective, c’est-à-dire une incapacité à éprouver des sentiments, souvent vécue avec douleur. S’ajoutent à la tristesse, l’anhédonie (la difficulté à ressentir du plaisir), la perte des intérêts, le manque d’envie. L’ensemble constitue la perte de l’élan vital. La vision pessimiste de soi et du monde redéfinit le passé, celui-ci devenant source de remords, de reproches et de culpabilité. Le quotidien est douloureux. Les secondes, les minutes et les heures ralentissent. Le lever apparaît sans intérêt et le sommeil, lorsqu’il est présent, comme une échappatoire à la souffrance omniprésente. Le futur ne prédit que malheur. Finalement, le désespoir apparaît, l’idée d’incurabilité s’immisce. Les idées deviennent plus sombres, allant de l’envie de mourir (avoir une maladie grave, s’endormir et ne plus se réveiller) au véritable scénario suicidaire, la mort apparaissant comme la seule solution pour mettre fin à ce supplice constant, souvent incompris par son entourage. – Le ralentissement psychomoteur s’exprime par un manque d’énergie, une fatigue maximale au réveil, sans amélioration malgré le repos, s’accompagnant de la simple indécision avec manque d’initiative à l’aboulie et à la clinophilie. Le manque d’enchaînements des idées conduit à une raréfaction de la parole, voire au mutisme, 7 avec des ruminations autour des mêmes préoccupations. Les capacités mnésiques et de concentration sont altérées. – Le syndrome somatique comprend une atteinte des fonctions dites instinctuelles que sont le sommeil, l’appétit et la sexualité. Les troubles du sommeil comprennent essentiellement des difficultés d’endormissement en lien avec les ruminations, mais également un sommeil haché, de mauvaise qualité, et classiquement un réveil matinal précoce. L’appétit souvent diminué peut entraîner une perte de poids. Peuvent être présents à l’inverse une hypersomnie et une augmentation de l’appétit. La mélancolie est la forme la plus sévère de dépression. C’est un « état de dépression intense vécu avec un sentiment de grave douleur morale et caractérisé par le ralentissement et l’inhibition des fonctions psychiques et psychomotrices » (14). Elle s’illustre par un ralentissement psychomoteur majeur, parfois de forme stuporeuse, avec une atteinte sévère des fonctions instinctuelles (anorexie, éveil matinal précoce) et des idées de culpabilité, de ruine, d’indignité voire d’incurabilité. Elle peut se compléter par des éléments délirants, congruents à l’humeur, voire revêtir le syndrome de Cotard. Au contraire, la mélancolie anxieuse s’accompagne d’une agitation stérile avec un risque important de raptus suicidaire. Selon le DSM-V, on peut évoquer une dépression lorsque l’humeur dépressive précédemment décrite est quasi-quotidienne et persiste après 2 semaines (15). Le DSM-V a ainsi décrit 9 symptômes dont au moins 5 sont suffisants au diagnostic de l’épisode dépressif caractérisé, et comprenant nécessairement l’humeur dépressive et/ou la perte d’intérêt ou du plaisir (Annexe 1). L’utilisation du DSM-V à visée diagnostique dans la pratique clinique est décriée auprès de certains psychiatres et d’autant plus en psychiatrie de la personne âgée, la 5ème édition s’intéressant à nouveau assez peu à cette catégorie d’âge (16). De plus, la dépression du sujet âgé présente des particularités sémiologiques par rapport au sujet jeune (17).

Particularités sémiologiques

Le sujet âgé exprime peu sa tristesse et verbalise plutôt un sentiment de lassitude, voire présente une indifférence ou devient plus irritable. La perte d’intérêt et de plaisir pour les activités habituelles est plus marquée, mais peut être difficile à évaluer en cas de perte d’autonomie associée (18). La plainte algique est plus fréquente avec une tendance à l’hypocondrie, autour de douleurs ostéoarticulaires ou digestives notamment. Il peut être difficile de ne pas attribuer cette douleur à une comorbidité somatique préexistante. Elle doit cependant alerter en l’absence de cause somatique retrouvée (19). Les atteintes des fonctions instinctuelles s’accompagnent plutôt d’une perte d’appétit que d’une augmentation, et d’un raccourcissement du sommeil plutôt que d’une hypersomnie. La plainte cognitive est fréquente, angoissante car elle ramène le sujet à la crainte d’une maladie neurodégénérative sous-jacente. Cependant, en dehors d’une telle pathologie associée, Il existe régulièrement une discordance entre la plainte et la profondeur des troubles constatés. Les idées délirantes, notamment de persécution, de vol ou de ruine accompagnent plus fréquemment l’épisode. La mélancolie et le syndrome de Cotard sont plus fréquents. En effet, le syndrome de Cotard est une forme qui se voit notamment dans les populations au-delà de 55 ans et qui s’accompagne d’une évolution plus longue en l’absence de traitement (20). Chez le sujet âgé, il s’agit classiquement d’un délire de négation d’organe touchant la nutrition ou la digestion avec la croyance erronée que l’estomac ne digère plus ou que les intestins ne fonctionnent plus .

Masques dépressifs

 La dépression du sujet âgé peut également revêtir différentes formes et s’éloigner du tableau typique de l’épisode dépressif caractérisé observable chez l’adulte. Ont été décrits 8 tableaux nommés « masques dépressifs » dans lesquels la douleur morale va s’exprimer par des symptômes physiques au premier plan sans verbalisation de tristesse de l’humeur, voire un déni de celle-ci (3, 17, 18). Le masque somatique peut avoir pour seul symptôme la plainte algique. Le sujet nie tout sentiment de tristesse et attribue la limitation de ses activités à ses douleurs. Le masque hypocondriaque est une forme anxieuse où le sujet se plaint d’un mauvais fonctionnement organique et enchaîne les examens et consultations avec revendication. Le masque délirant se construit autour d’idées délirantes essentiellement de préjudice, de persécution voire de jalousie, généralement de mécanisme interprétatif et imaginatif, mais parfois également avec des hallucinations auditives ou visuelles. Il n’existe pas d’éléments en faveur d’une pathologie psychotique sous-jacente, notamment pas de désorganisation ni d’hallucinations intrapsychiques. Le masque hostile est marqué par un changement brutal du caractère de la personne qui devient agressive, y compris vis-à-vis de son entourage, émotionnellement labile, susceptible, avec des accès d’agitation, et opposante aux soins. Le masque anxieux est généralement déclenché par un événement de stress, notamment traumatique. Une inquiétude permanente est entrecoupée de paroxysmes anxieux sans cause identifiée. De façon plus extrême, le sujet peut être physiquement inhibé, n’usant que de piétinement et de ruminations, alors que son psychisme est empreint de ruminations. Le masque confusionnel est une continuité ascendante du masque anxieux où les propos du sujet âgé peuvent paraître incohérents et celui-ci désorienté. Il n’y a pas de d’altération de la vigilance ni d’hallucinations mais plutôt des interprétations erronées de la réalité.

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