Virus de l’immunodéficience humaine (VIH)

Virus de l’immunodéficience humaine (VIH)

 Au début des années quatre-vingt, des médecins américains s’aperçoivent que certains de leurs patients présentent des infections généralement observées chez les nouveau-nés ou chez les personnes ayant un système immunitaire affaibli (pneumonies dues à Pneumocystis carinii, sarcomes de Kaposi, etc.). Ces patients étaient tous des hommes jeunes, préalablement en parfaite santé mais avaient des rapports sexuels avec d’autres hommes. L’examen de leur sang a montré une baisse du nombre de lymphocytes, confirmant un disfonctionnement de leur système immunitaire. Le 5 juin 1981, le Center for Disease Control (CDC) d’Atlanta publie dans son bulletin hebdomadaire Morbidity and Mortality Weekly Report (MMWR) la description de ces cas qui ont été observés à Los Angeles entre octobre 1980 et mai 1981 (Pneumocystis pneumonia–Los Angeles, 1981). L’année suivante, le terme SIDA pour « syndrome de l’immunodéficience acquise » est pour la première fois employé dans la littérature afin de désigner cette nouvelle maladie (Update on acquired immune deficiency syndrome (AIDS)–United States, 1982). L’agent viral du SIDA, quant à lui, est identifié en 1983 à l’Institut Pasteur de Paris par l’équipe de Luc MONTAGNIER (Barré-Sinoussi et al, 1983), mais c’est seulement en 1986 que le terme HIV, acronyme de « human immunodeficiency virus », est proposé afin de désigner ce virus (Coffin et al, 1986). Depuis, et selon les estimations du programme commun des Nations Unies sur le VIH/SIDA (ONUSIDA), le virus de l’immunodéficience humaine (VIH) a déjà causé plus de 27 millions de décès (ONUSIDA, 2010). Le nombre annuel de nouvelles infections au VIH a connu un pic en 1996 (3,5 millions de nouvelles infections au VIH) suivi d’une diminution régulière de ce chiffre (estimé à 2,6 millions en 2009) mais qui reste toujours alarmant (Figure 17). En raison de la latence du virus entre le moment de l’infection et celui de la phase symptomatique, le nombre annuel de décès liés au SIDA atteint son paroxysme en 2004 (2,2 millions de décès). Au total, le nombre de personnes vivant avec le VIH en 2009 est estimé à 33,3 millions (ONUSIDA, 2010), mais les régions du globe ne sont pas égales face à l’ampleur de cette épidémie (Tableau 2). Plus des deux-tiers des personnes infectées vivent en Afrique subsaharienne (22,5 millions de personnes), suivie de loin par l’Asie (6,2 millions de personnes).La prévalence des personnes vivant avec le VIH dans le monde entier ne cesse de croître en raison du succès des thérapies antirétrovirales hautement actives (HAART, Highly Active Antiretroviral The rapy) introduites en 1996. Elles permettent aux personnes infectées par le VIH de vivre plus longtemps et dans de meilleures conditions, de réduire les transmissions sexuelles et la transmission mère-enfant (ONUSIDA, 2009). Mais l’accès à ces thérapies est inégalement réparti entre les régions du monde. Les populations des pays à revenu faible ou intermédiaire peuvent difficilement accéder à ces traitements en raison de leur coût élevé et de l’absence d’infrastructures spécialisées nécessaires au suivi de l’infection. Dans ce contexte, plusieurs initiatives de la communauté internationale (ONUSIDA, Fondation Clinton, Fonds mondial de lutte contre le SIDA, la tuberculose et le paludisme, etc.) permettent aux gouvernements des pays à revenu faible ou intermédiaire d’assurer au plus grand nombre l’accès gratuit à ces traitements, ainsi que l’apport d’infrastructures pour le suivi des patients. Toutefois, ces infrastructures sont principalement implantées dans des zones urbaines, d’accès difficile pour les populations des zones rurales dont le suivi des patients est souvent irrégulier. Des efforts doivent encore être faits afin de décentraliser ces centres de soin (Bouchaud et al, 2011). Rappelons que ces thérapies ne permettent pas d’éradiquer le virus, mais seulement de le contrôler, et qu’en raison de la diversité génétique du VIH, aucun vaccin efficace n’a encore été élaboré.

Virus de l’immunodéficience humaine (VIH) 

La classification taxonomique des VIH

 Les VIH appartiennent à la famille Retroviridae. Les membres de cette famille s’appellent communément des rétrovirus. Ce sont des virus à acide ribonucléique (ARN) qui ont la particularité de posséder une enzyme, la transcriptase inverse ou rétrotranscriptase (RT du terme anglo-saxon reverse transcriptase), qui permet de transcrire leur ARN viral en molécule d’acide désoxyribonucléique (ADN) capable de s’intégrer à l’ADN de la cellule hôte. Les rétrovirus sont subdivisés en deux sousfamilles et sept genres suivant leur pathogénicité et leur morphologie : Alpharetrovirus, Betaretrovirus, Deltaretrovirus, Epsilonretrovirus, Gammaretrovirus et Lentivirus dans la sous-famille des Orthoretrovirinae et Spumavirus dans la sous-famille des Spumaretrovirinae. À l’exception des Lentivirus, les rétrovirus de la sous-famille des Orthoretrovirinae induisent des leucémies et des tumeurs chez leur hôte. Ces rétrovirus sont aussi appelés des oncovirus. Les virus T-lymphotropiques humains  (HTLV) et leurs homologues chez les primates non humains (PNH), les virus T-lymphotropiques simiens (STLV) appartiennent au genre Deltaretrovirus. Quant aux Spumavirus, ils sont considérés comme non pathogènes pour leur hôte. Les foamy virus appartiennent à ce genre. Les Lentivirus sont responsables de maladies à évolution lente, caractérisées par une longue période de latence aboutissant à la mort. Ils ont la particularité d’être cytopathogènes, c’est-à-dire qu’ils tuent les cellules qu’ils infectent. Les virus de l’immunodéficience humaine mais également ceux d’autres espèces (féline, bovine, simienne, etc.) appartiennent à ce genre. Actuellement, il existe deux types de VIH : le VIH-1 et le VIH-2. Les différences entre ces deux virus se font principalement au niveau génétique : plus de 50% de leur génome est différent. Au niveau morphologique, seuls les poids moléculaires des protéines et des enzymes constitutives du virus changent. La réplication virale (Marlink et al, 1994) et la transmission (Kanki et al., 1994; De Cock et al., 1993), aussi bien sexuelle que mère-enfant, sont moindres pour le VIH-2. Néanmoins, au stade final, le VIH-2 induit les mêmes symptômes que le VIH1, malgré une phase asymptomatique plus longue (Ancelle et al, 1987). 

Phylogénie et diversité génétique des VIH

 Dans l’arbre phylogénétique des lentivirus (Figure 18), les VIH se placent à proximité des SIV (simian immunodeficiency virus), virus infectant les primates non humains. Chaque espèce de primate est infectée avec une lignée monophylétique spécifique. Par exemple, les SIV infectant naturellement les mangabeys à collier blanc (Cercocebus torquatus), aussi dénommé mangabeys couronnés, SIVrcm, forment une lignée distincte des SIVcol, infectant les colobes guéréza (Colobus guereza). De ces observations, les virus SIV sont nommés en fonction de l’espèce dans laquelle ils sont observés. Pour cela, le sigle SIV est suivi par trois lettres minuscules qui réfèrent au nom commun anglais de l’espèce hôte considérée. Par exemple, SIVsyk réfère à l’espèce Cercopithecus albogularis (cercopithèque à diadème) dont le nom commun anglais est : « Sykes’ monkey ». Si nécessaire, les initiales du nom latin de la sous-espèce peuvent être ajoutées (ex. SIVcpzPtt réfère aux SIV qui infectent naturellement les chimpanzés Pan troglodytes troglodytes et SIVcpzPts les Pan troglodytes schweinfurthii). À l’intérieur des clades correspondant aux VIH-1 et VIH-2, des lignées monophylétiques, que l’on nomme des groupes, sont observées. Chaque groupe correspond à une transmission inter-espèce d’un SIV à l’homme. À ce jour, le VIH-1 dénombre quatre groupes (M, N, O et P) et le VIH-2 huit (A à H). Parmi ces groupes, seuls les virus du groupe M sont responsables de la pandémie.

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