Analyses physiques et chimiques des sols

Les perturbations naturelles sont des agents dynamiques du maintien des mosaïqus forestières, de la biodiversité et des mécanismes fondamentaux de l’écosystème tel le cycle des éléments nutritifs (Perry et Amaranthus 1997). Les écosystèmes se seraient adaptés, au cours des siècles, à un régime particulier de perturbations naturelles ainsi qu’à la dynamique des cycles des éléments nutritifs qui leur est associée. Perry et Amaranthus (1997), en se basant sur un concept de non-équilibre des écosystèmes (Fiedler et al. 1997) qui tient compte des diverses voies successionnelles et de leur influence dans la dynamique des écosystèmes (Niemela 1999, Bergeron et Dubuc 1989, Heinselman 1981), ont établi la résilience d’un écosystème comme étant la capacité d’un système à revenir à un stade donné après perturbation. Ce stade auquel un écosystème résiliant revient après perturbation pourrait être un stade plus ou moins identique à celui qui prévalait avant perturbation. Il contiendrait les mêmes éléments constitutifs soient des habitats similaires, une richesse en espèces équivalente et une fertilité du sol également similaire. En plus, ils ont également défini la résistance comme étant la capacité d’un système à absorber de petits bouleversements pour empêcher leur dégénérescence en de plus larges perturbations qui pourraient entraîner un changement radical de l’écosystème. La résilience et la résistance constitueraient la stabilité d’un système, soit les limites de changements pouvant être supportées par un écosystème avant que ce dernier ne soit fondamentalement transformé.

Le feu est le principal agent dynamisant la forêt boréale mixte en agissant sur les communautés végétales et animales ainsi que sur les processus écologiques (Bergeron 1991). Pour la région à l’étude, le cycle de feu a été estimé à plus de 99 ans (Dansereau et Bergeron 1993, Bergeron 1991). Le régime de feu jumelé aux vagues d’épidémie de la tordeuse du bourgeon de l’épinette ( Choristoneura fumiferana (Ciem.)) (Morin et al. 1993) ont modelé, à l’échelle du paysage, une mosaïque forestière propre à la région. La sévérité, le type et l’étendue de la perturbation ainsi que la composition du peuplement avant perturbation sont des facteurs importants qui ont déterminé l’impact de la perturbation et le choix des voies successionnelles (Bergeron et Dubuc 1989, Carleton et Maycock 1978).

En forêt boréale, au cours de la succession, il peut survenir plusieurs changements au niveau des processus écologiques du sol. De façon générale, on observe une baisse dans la disponibilité des nutriments (Paré et Bergeron 1996, Brais et al. 1995a), une augmentation de la matière organique de surface (Paré et al. 1993, Bormann et Likens 1979) ainsi qu’une diminution des températures du sol minéral et des taux de décomposition (Van Cleve et Viereck 1981). Ces changements sont aussi influencés par le temps depuis le feu, par la présence d’épidémies d’insectes entre les épisodes de feu et par la composition en espèces des peuplements forestiers (Brais et al. 1995a, Paré et al. 1993).

Une perturbation anthropique telle la coupe forestière laisse sur les parterres de coupe ou en bordure de ceux-ci des quantités importantes de rémanents. Contrairement au feu qui, par la combustion d’une partie de la matière organique de surface et des combustibles présents, libérera immédiatement après perturbation une grande quantité de nutriments (Purdon et al. soumis, Adams et Boyle 1982), les débris résultant de la coupe prendront, selon les conditions d’humidité et de température, un certain temps pour se décomposer et libérer leurs éléments nutritifs (Harmon et al. 1986).

Lors de l’exploitation des tiges à valeur commerciale, il y aura également une grande quantité de nutriments exportés à l’extérieur des sites de récolte (Alban et Perala 1990). Kimmins (1977) indique qu’avec l’intensification des activités de récolte forestière et de préparation de terrain, il s’avère de plus en plus important de bien gérer les débris ligneux afin d’éviter un appauvrissement à long terme des écosystèmes forestiers. Ceci est particulièrement vrai dans le cas de l’exploitation du peuplier faux-tremble, auquel l’industrie de la région s’intéresse de plus en plus afin d’exploiter au maximum les territoires de coupe alloués. Cette espèce prédominante après feu (Bergeron et Dubuc 1989) possède une grande capacité à pomper l~s nutriments du sol et à les entreposer dans la biomasse aérienne, en particulier dahs 1 les feuilles et les fines branches (Alban et Perala 1990). Si après exploitation des 1 tiges on ne s’assure pas que les effets de la gestion des résidus de coupe ne débordent pas l’amplitude des changements observés dans la dynamique naturelle (stabilité), on risque, après quelques révolutions, d’appauvrir le sol. De plus, plusieurs études suggèrent que dans le cas d’une coupe par arbre entier, où l’ébranchage est exécuté en dehors des parterres de coupe, les risques d’appauvrissement sont encore plus élevés (Mann et al. 1988, Kimmins 1977). Des études ont démontré que pour les sites mixtes de la région, certains modes de gestion des débris ligneux pouvaient modifier significativement la dynamique de la décomposition et les cycles géochimiques (Brais et al. 1995b, Brais et al. 1996, Brais et al. 2002).

Échantillonnage 

Avant brûlage
Les débris ligneux ont été dénombrés par espèce, par classes de diamètre (0-0,49; 0,5-0,99; 1-2,99; 3-4,99; 5-6,99; 7 cm et plus) et par classes de décomposition (1 à 5) le long des côtés de 30 m de deux triangles équilatéraux par parcelle expérimentale, selon la méthode de la ligne intercepte (McRae et al. 1979). Les classes de décomposition ont été définies par des critères visuels et tactiles  . Pour chaque espèce et chaque classe de diamètre et de décomposition un disque échantillon a été prélevé sur des débris en marge des triangles afin d’établir leur densité selon la méthode de déplacement d’eau et évaluer leur charge à l’hectare. Pour fins de traitement statistique, les classes de décomposition ont été réduites à deux classes fonctionnelles  et à trois classes de diamètre : petit (0-0,99 cm), moyen (1-6,99 cm) et gros (7 cm et plus).

L’épaisseur de la couverture morte (LFH) a été mesurée à tous les 5 m le long de chaque côté des triangles. La couverture morte et l’horizon minéral (0-10 cm) ont aussi été échantillonnés le long des triangles à raison de deux échantillons par côté, soit entre 5 et 10 m ainsi qu’entre 20 et 25 m. LFH a été prélevé à l’intérieur d’un quadrat de 10 cm par 10 cm et pesé sur le terrain. Les échantillons de sol minéral ont été combinés pour ne faire qu’un échantillon par côté de triangle.

Au moment du brûlage
Les horizons LFH et minéral ont été de nouveau échantillonnés à raison de deux échantillons par côté de triangle. Ces échantillons ont été combinés afin de ne faire qu’un seul échantillon et ont servi à évaluer l’activité et la biomasse microbienne (C et N microbien) du sol avant feu. Ces échantillons ont été conservés à 4°C jusqu’à leur analyse.

Après brûlage
Afin d’estimer la sévérité du brûlage sur l’ensemble des parcelles expérimentales, le dénombrement des débris ligneux ainsi que la mesure de l’épaisseur de la couverture morte ont de nouveau été effectués au pourtour de chaque triangle. Afin de déterminer l’effet de la combustion sur les propriétés du sol, cinq placettes d’échantillonnage permanent (PEP) par parcelle expérimentale ont été établies dans des zones brûlées. Les horizons LFH et minéral ont été échantillonnés à raison de deux échantillons par PEP 7 jours, 30 jours et un an après brûlage. Les échantillons ont été combinés deux par deux. Pour chaque période, un sous-échantillon de chacun des deux horizons a été conservé à 4°C jusqu’à l’analyse de l’activité et de la biomasse microbienne. Trente jours après brûlage, l’horizon organique a été échantillonné à l’intérieur de deux quadrats de 25 cm par 25 cm par PEP et pesé sur le terrain. Au même moment, un échantillonnage volumétrique de 100 cm³ a été pratiqué dans l’horizon minéral à l’aide d’une carotteuse à double cylindre.

Paramètres dérivés
Le poids sec (sans cendre) à l’hectare de l’horizon organique a été évalué à partir du poids de la couverture morte auquel on a multiplié le pourcentage de matière organique. La capacité d’échange cationique effective (CECe) a été calculée en sommant les concentrations en bases échangeables et l’acidité du sol. La saturation en base (SB) et la saturation des bases individuelles ont été calculées à partir de la somme des concentrations ou des concentrations respectives des bases échangeables divisée par la CECe. Le contenu en éléments échangeables et totaux de la couverture morte a été calculé en multipliant les concentrations en éléments au poids sec de la couverture morte. La quantité de nutriments libérés par combustion a été calculée en sommant le contenu en éléments totaux de la couverture morte brûlée (concentrations en nutriments multipliées par la perte de biomasse suite au brûlage) et le contenu en nutriments des débris brûlés (concentrations en nutriments des débris (Purdon, non-publié) multipliées par la perte de biomasse suite au brûlage toutes classes confondues). Le coefficient respiratoire du sol (qC02) a été calculé en divisant le taux de respiration par la concentration en Cmlc du sol.

Analyses statistiques
Les points d’échantillonnage étant appariés dans le temps, un test de comparaison simple (test de t) a été appliqué sur les différences entre la première période d’échantillonnage (avant brûlage) et les trois autres périodes, soit 7 jours, 30 jours et un an après brûlage. Le seuil d’acceptation de l’hypothèse nulle a été fixé à 0,1 et afin de tenir compte de la non-indépendance des comparaisons et de mettre en lumière les tendances qui se dégagent, le seuil a été abaissé à 0,03 suite à une correction de Bonferroni (Legendre et Legendre 1998). Les paramètres ne respectant pas les conditions d’homogénéité des variances selon le test de Bartlett’s (Steel et Torrie 1980) ont subi des transformations logarithmiques ou angulaires. Les analyses statistiques ont été exécutées à l’aide du logiciel SAS (SAS Institute inc. 1988).

Table des matières

CHAPITRE 1 : INTRODUCTION GÉNÉRALE
CHAPITRE 2 : CARACTÉRISATION DES EFFETS DE BRÛLAGES DIRIGÉS SUR LES SOLS ARGILEUX MÉSIQUES DE PEUPLEMENTS DE PEUPLIER FAUX-TREMBLE DANS LE NORD-OUEST QUÉBÉCOIS
2.1 RÉSUMÉ
2.2 INTRODUCTION
2.3 MATÉRIELETMÉTHODE
2.3.1 Site d’étude
2.3.2 Dispositif
2.3.3 Échantillonnage
2.3.4 Analyses physiques et chimiques des sols
2.3.5 Analyses microbiennes des sols
2.3.6 Paramètres dérivés
2. 3.7 Analyses statistiques
2.4 RÉSULTATS
2.4.1 Caractérisation des brûlages dirigés
2.4.2 Effets sur les propriétés physico-chimiques du sol
2.4.3 Effets sur les communautés microbiennes
2.5 DISCUSSION
2.6 CONCLUSION
2.7 REMERCIEMENTS
2.8 RÉFÉRENCES
CHAPITRE 3 : L’IMPACT DE QUATRE TRAITEMENTS DE RÉSIDUS LIGNEUX SUR LES SOLS ARGILEUX MÉSIQUES DE PEUPLEMENTS DE PEUPLIER FAUX-TREMBLE DU NORD-OUEST QUÉBÉCOIS
3.1 RÉSUMÉ
3.2 INTRODUCTION
3.3 MATÉRIELETMÉTHODE
3.3.1 Site d’étude
3.3.2 Dispositif
3.3.3 Charge en débris ligneux et en copeaux
3.3.4 Échantillonnage des sols
3.3.5 Taux de décomposition
3.3.6 Biomasse végétale
3.3. 7 Mesures de type abiotique
3.3.8 Analyses physiques et chimiques des sols
3.3.9 Analyses microbiennes des sols
3.3.10 Paramètres dérivés
3. 3.11 Analyses statistiques
3.4 RÉSULTATS
3.4.1 Effets de l’enlèvement du couvert végétal
3.4.2 Caractérisation des traitements de résidus ligneux
3.4.3 Effet des résidus sur la couverture morte
3.4.4 Effets des résidus sur le sol minéral
3.4.5 Analyses de coefficients de direction
3.5 DISCUSSION
3.6 CONCLUSION
3.7 REMERCIEMENTS
3.8 RÉFÉRENCES
3.9 ANNEXES
CHAPITRE 4. CONCLUSION GENERALE

Cours gratuitTélécharger le document complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *