Droits de l’Homme et du Citoyen

Droits de l’Homme et du Citoyen

Un principe compromis

Parmi les 17 articles de la Déclaration des Doits de l’Homme et du Citoyen, plusieurs intéressent, directement ou indirectement, le droit pénal et la procédure pénale. Les articles 7 à 9 de ce texte consacraient le droit à la sûreté personnelle. L’article 9 posait le principe de la présomption d’innocence bien qu’occulté de sa dimension procédurale. L’Assemblée Constituante, en œuvrant dans l’urgence et sous la pression de la Commune de Paris (Paragraphe 1), maintenait le système de la preuve légale incompatible avec un principe qui supposait l’innocence de l’accusé (Paragraphe 2). Paragraphe 1. Des évènements qui paralysent l’article 9 L’effervescence de la rue allait rendre chaotique la réalisation d’un idéal de justice souhaité par les députés (A), et les réformes immédiatement réalisées sous la pression ignoraient la présomption d’innocence (B). A. L’urgence empêche la compréhension du principe Discutée, puis votée dans l’enthousiasme de l’été révolutionnaire, la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen adoptée le 26 Août 1789 (870) qui constitue, comme le définit Albert SOBOUL, « le catéchisme de l’ordre nouveau » ( 871), consacre l’individu et ses droits (872), c’est à dire l’organisation et la protection de la liberté individuelle face aux contraintes judiciaires dont dispose l’état. Cette volonté affichée de libérer les individus des entraves et des pesanteurs de cette société d’Ancien Régime, fut cependant suivie « d’une incapacité à concevoir et à concrétiser le régime réalisant les droits de tous en préservant les droits de chacun »(873). Le contenu pénal exprimé dans ce texte (874) demeurait par trop évanescent pour qu’il puisse recouvrer une réelle effectivité. L’article 9 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen, partie de ce triptyque d’articles consacrés aux garanties judiciaires (875), participe plus de cette reconnaissance de la liberté individuelle que de la consécration du principe procédural de présomption d’innocence. En imposant la nécessité de limiter et d’encadrer toute mesure coercitive, ou plus précisément, comme on a pu l’écrire, en exprimant ce besoin »de concilier la protection des droits individuels et les nécessités sociales de la répression des infractions »(876), les Constituants montrent toute l’importance qu’ils attachent à la sûreté personnelle de chacun, tout en éclipsant le fait que cette présomption d’innocence puisse également être le ferment d’un nouveau mécanisme probatoire. Se trouve ainsi mise en évidence une ambivalence entre la volonté de promouvoir une autre justice, conformément aux souhaits exprimés dans les Cahiers de doléance, et la difficulté de faire immédiatement disparaître une Ordonnance criminelle dont l’empreinte laissait en grande partie par PUSSORT, paraissait indélébile (877). Durant les quatre jours de discussion qui aboutirent à la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen les grands principes débattus, notamment sur le droit criminel, restent, dans leur application concrète, soumis à l’hésitation des députés. Toutefois, sous la pression de la rue (878), la jeune Assemblée fut alors contrainte d’examiner, comme le note l’un des observateurs privilégiés de ces évènements révolutionnaires (879), un arrêté de la Commune de Paris (880) qui exigeait que »la procédure soit plus rapprochée du droit naturel, et que l’examen public des accusés fasse encore plus distinguer l’innocence et l’erreur d’avec les complots perfides qu’il importe de dévoiler promptement, et de punir avec toute la rigueur de la loi »(881). C’est da ns ces conditions que les députés, dont certains contestaient le procédé ou qui estimaient nécessaire de faire disparaître l’Ordonnance criminelle de 1670 (882), se voyaient soumettre avec insistance l’examen de mesures qui, pour provisoires qu’elles fussent, altéraient cependant un monument législatif. C’est pourquoi, l’Assemblée Constituante décidait, le 10 Septembre 1789, de créer « un comité de sept personnes, qui, dans trois jours, apportera une déclaration provisoire qui statuera sur la publicité de la procédure criminelle, l’admission des preuves justificatives et d’un conseil »(883). L’urgence imposait d’effacer les abus les plus criants de cette justice criminelle et de promouvoir de nouveaux mécanismes procéduraux prenant mieux en compte les droits de l’accusé. Composé de trois avocats Guy Jean Baptiste TARGET, François Denis TRONCHET et Jacques Guillaume THOURET, de Trophime Gérard, Marquis de LALLYTOLLENDAL « représentation vivante des erreurs de l’ancien régime »(884), et enfin de trois parlementaires modérés, Bon Albert BRIOIS de BEAUMETZ (885),

 L’évocation fugace d’une présomption d’innocence

 Les Constituants cherchent à renforcer les droits des accusés par la mise en place de véritables garanties judiciaires, ferment des droits de la défense. Aussi, considéraient-ils qu’il fallait, en préalable à l’établissement d’une autre justice criminelle, « rendre la procédure publique, accorder un conseil à l’accusé, admettre en tout état de cause les faits qu’il propose pour sa justification »(896). Les représentants de la nation entendaient inscrire des dispositions procédurales pratiques qui s’harmonisaient avec les vœux des Cahiers de doléance. En adoptant immédiatement plusieurs mesures transitoires (897), ces derniers effaçaient quelques uns des articles dont la seule lecture constituait un motif d’indignation et de critique permanent puisqu’ils niaient les droits les plus élémentaires de la personne (898), sans pour autant écarter un texte consacré par le poids des ans (899). Leur volonté consistait à formaliser des règles nouvelles qui assureraient effectivement les droits de l’accusé (900). Le rapport préparé par le « Comité des sept » reste donc emprunt des seules circonstances conjoncturelles imposées par la rue ; de sorte que la portée réelle des principes établis par la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen, ne fut réellement perçue mais surtout intégrée au travail effectué par ce comité. L’article 9 qui proclame cette présomption d’innocence demeure sans véritable incidence sur les conditions qui doivent présider à la démonstration de la culpabilité. Les premières mesures souhaitées et adoptées montrent une certaine cécité sur ce que doit être la preuve pénale.

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