Enseignement et apprentissage du FLÉ

Définition des concepts « Français Langue Seconde » et « Français
Langue Étrangère »

La distinction entre « langue seconde » (LS) et « langue étrangère » (LÉ) est difficile à cerner. La définition de ces deux concepts ne fait pas l’unanimité au sein des chercheurs en linguistique et en enseignement des langues secondes et étrangères. De façon générale, la distinction est déterminée par le statut de la langue dans le pays où elle est enseignée et par le niveau de son utilisation par les apprenants. Ainsi, la langue seconde constitue d’emblée « une langue ayant un statut officiel dans le pays des apprenants qui, par ailleurs, sont susceptibles de la parler de façon significative » (Chartrand et Paret, 1995 :4). La langue étrangère, elle, « serait celle qui est apprise en classe mais qui n’est pas parlée par la communauté environnante et qui ne jouit pas d’un statut officiel dans ce pays » (Chartrand et Paret, 1995 :4). Cette distinction, proposée par plusieurs didacticiens dont Chartrand et Paret, semble simple à priori, mais elle n’est pas partagée par tous les linguistes et elle n’est pas facile à appliquer dans les situations concrètes.

Prescod et Robert (2014), eux, distinguent les deux notions, LS et LÉ, selon qu’elles soient utilisées dans la didactique française ou dans la didactique anglo-saxonne. Ainsi, pour eux, en didactique française :

Le terme de langue étrangère définit une langue non maternelle, langue qui est apprise/enseignée à l’école (université, centre de langue, etc.), dans le pays de l’apprenant (si cette langue n’a pas de statut officiel) […]. La langue seconde est, de son côté, toute langue non maternelle ou non initiale acquise par imprégnation sociale ou immersion scolaire […] la langue seconde est aussi dans les pays où le multilinguisme est officiel, une langue non maternelle bénéficiant d’un statut privilégié (p.139).

Dans la didactique anglo-saxonne, les auteurs précisent que la langue étrangère est« apprise dans le pays de l’apprenant ou dans un pays autre que celui (ceux) où la langue étrangère est parlée. Elle concerne principalement l’enseignement/apprentissage d’une langue non maternelle en milieu scolaire, universitaire ou autre, sans avoir obligatoirement pour but la communication et encore moins l’intégration ». La langue seconde, quant à elle, « est une langue apprise ou acquise dans le pays où cette langue est parlée. C’est une langue apprise chronologiquement après la langue maternelle (ou initiale) » (p.140) .

Malgré que Prescod et Robert semblent faire une distinction entre LS et LÉ selon que ces notions soient utilisées en didactique française ou en didactique anglo-saxonne, il est difficile de percevoir une nuance dans la définition de ces deux concepts selon les deux utilisations.

De leur côté, Mitchell & Myles (2004) croient que l’apprentissage des langues plus «locales » ou plus « éloignées » passe par le même processus. Ils incluent donc dans la définition de LS l’apprentissage de toute langue autre que la langue maternelle, à condition que l’apprentissage de cette deuxième langue s’effectue après avoir acquis la première. Selon eux, “second languages” are any languages other than the learner’s “native language” or “mother tongue”. They include both  languages of wider communication encountered within the local region or community (e.g. at the workplace or in the media) and truly foreign languages, which have no immediately local uses or speakers. They may indeed be a second language learners are working with, in a literal sense, or they may be their third, fourth, or even fifth language (p.5).

En fait, plusieurs facteurs entrent en jeu dans la définition de « langue seconde » et de « langue étrangère ». Prescod et Robert (2014) affirment qu’« on n’attache pas à ces notions la même signification selon les contextes géographique et sociolinguistique particuliers. Mais aussi selon le contexte politique » (p.145).

En ce qui concerne les notions « français langue seconde » et « français langue étrangère » plus précisément (désormais FLS et FLÉ), l’utilisation de la notion FLS parmi les didacticiens non francophones commence à apparaitre au cours de la deuxième moitié du XXe siècle (Auger, 2014). Par la suite, ce concept a été largement utilisé grâce aux travaux de Jean-Pierre Cuq (2001, 2002, 2003). Celui-ci définit le concept de FLS comme suit :

Le français langue seconde est un concept ressortissant aux concepts de langue et de français. Sur chacune des aires où il trouve son application, c’est une langue de nature étrangère. Il se distingue des autres langues étrangères éventuellement présentes sur ces aires par ses valeurs statutaires, soit juridiquement, soit socialement, soit les deux et par le degré d’appropriation que la communauté qui l’utilise s’est octroyé ou revendique. Cette communauté est bi ou plurilingue. La plupart de ses membres le sont aussi et le français joue, dans leur développement psychologique, cognitif et informatif, conjointement avec une ou plusieurs autres langues, un rôle privilégié (Cuq et Gruca cités dans Fenclovà (2014 :148).

Les problèmes que pose l’apprentissage du FLÉ pour les Kabyles :
interférence de l’arabe et de tamazight

Écrire en français langue seconde ou étrangère n’est pas une mince tâche. Si la tâche d’écriture constitue déjà un défi pour un scripteur en français langue maternelle (FLM), elle l’est encore plus pour celui qui rédige en FLS ou en FLÉ. Celui-ci doit non seulement maitriser la langue cible, respecter la grammaire et la syntaxe de celle-ci, mais aussi respecter les règles de rédaction d’un texte. En effet, les difficultés que pose la rédaction en langue maternelle sont différentes de celles que pose la rédaction en langue seconde ou étrangère. Par exemple, si la planification peut aider le scripteur à mieux réussir en langue maternelles (LM), les résultats des études concernant l’impact de la planification sur la rédaction en LS sont partagés. Dans une revue de littérature, Mark D. Johnson (2014) conclut que l’effet de la planification sur la qualité de la production écrite en LS est minime. Selon cet auteur, lorsque le niveau de maitrise de la langue cible est faible, la planification peut même affecter la qualité de la production écrite et la diversité du lexique employé. Mais le problème majeur que rencontrent les scripteurs en LÉ est celui de l’interférence de la langue maternelle. Selon Mitchell et Myles (2004), la performance des apprenants d’une langue seconde est influencée par la première langue qu’ils maîtrisent déjà. Cette influence est notable dans leur accent étranger ou dans leurs erreurs de grammaire, comme c’est le cas d’un apprenant anglophone qui produit l’énoncé suivant en français pour préciser son âge : je suis douze, influencé par l’expression I’m twelve en anglais (Mitchell & Myles, 2004). Ce phénomène est appelé en linguistique « le transfert de la langue ».

Comme nous l’avons mentionné dans l’introduction (p.7-8), les études réalisées jusqu’à présent montrent une influence du tamazight et de l’arabe sur la performance des étudiants kabyles en français langue étrangère. Cela se manifeste principalement par l’emploi fautif des prépositions et des auxiliaires, qui se fait sur la base des deux premières langues des apprenants kabyles. Ainsi, influencés par leur langue maternelle, des étudiants kabyles ont produit des énoncés tels que il a tombé ou encore le retour de ma sœur qui est dans la France.

Table des matières

INTRODUCTION
1. Introduction et problématique
2. Objectif
CHAPITRE 1 : ANCRAGES THÉORIQUES
PREMIÈRE PARTIE : Enseignement et apprentissage du FLÉ
1. Définition des concepts « Français Langue Seconde » et « Français Langue
Étrangère »
2. Les problèmes que pose l’apprentissage du FLÉ pour les Kabyles : interférence de
l’arabe et de tamazight.
DEUXIÈME PARTIE : Cohérence et arrimage des énoncés
1. Cohérence textuelle
2. Pertinence et arrimage des énoncés
2.1 La pertinence
2.2 Arrimage des énoncés
2.2.1 L’arrimage référentiel
2.2.2 L’arrimage événementiel
2.2.3 L’arrimage énonciatif
2.2.4 L’arrimage informatif
CHAPITRE 2 : ÉTAT DE LA QUESTION
1. Coherence in the Argumentative Essays of ADZU College Freshmen: Assessment of
Quality, Angeles, M. S. D.
2. Les marques de cohésion comme outils privilégiés de la textualisation: une
comparaison entre élèves de CM2 et adultes experts, Favart, M &Chanquoy, L.
(2007)
3. La cohérence textuelle, l’évaluer et l’enseigner, Pepin (1998)
3.1. Défauts de cohésion à résolution automatique ou stratégique
3.2. Défauts d’étagement (ou de hiérarchisation)
3.3. Défauts d’une autre nature à résolution automatique ou stratégique
3.4. Défauts d’une autre nature à résolution incertaine
4. Écrire en français, cohésion textuelle et apprentissage de l’expression écrite, ReichlerBéguelin, Denervaud et Jespersen (1988)
4.1. L’interférence de l’oral et de l’écrit
4.2. Ancrage énonciatif et mécanismes référentiels en langue écrite
4.3. Les temps du passé
4.4. Cohérence textuelle et progression de l’information
4.5. L’ordre des compléments dans la phrase
5. Rédaction d’une séquence explicative par de futurs enseignants de français au
secondaire, Gagnon (2014).
CHAPITRE 3 : ANALYSE
1. Méthodologie
1.1 Le corpus de l’étude
1.2 Méthode d’analyse
1.2.1 Ruptures de cohérence au niveau référentiel
1.2.2 Ruptures de cohérence au niveau événementiel
1.2.3 Ruptures de cohérence au niveau énonciatif
1.2.4 Ruptures de cohérence au niveau informatif
2. Analyse proprement dite
Texte 1
Texte 2
Texte 3
Texte 4
Texte 5
Texte 6
Texte 7
Texte 8
Texte 9
Texte 10
Texte 11
Texte 12
Texte 13
Texte 14
CHAPITRE 4 : DISCUSSION
1. Ruptures au niveau événementiel
2. Ruptures au niveau référentiel
3. Ruptures au niveau informatif
4. Ruptures au niveau énonciatif
5. Limites de l’étude
6. Quelques observations générales
7. Conclusion
CONCLUSION

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