Fatigabilité des patients porteurs d’un gliome de bas grade

Fatigabilité des patients porteurs d’un gliome de bas grade

Une définition en devenir de la fatigabilité

La fatigabilité fait partie de ces termes dont on a l’impression de connaître la définition concrète sans pour autant pouvoir l’expliquer clairement. Ce terme à la fois tangible et vécu se range pourtant dans la catégorie des termes abstraits. Chacun d’entre nous a fait l’expérience une fois dans sa vie d’être fatigable. Chacun d’entre nous a pu ressentir une variation de cette fatigabilité en fonction de moments de vie, de parcours, d’évènements, d’humeur, de charge de travail, de temps de sommeil, de ressenti général physique… Pourtant ce vécu est difficilement quantifiable et soumis à de nombreux facteurs. Le terme fatigabilité désigne selon le dictionnaire Larousse la propension plus ou moins grande à être fatigué, à être en proie à de la fatigue. Le terme de fatigue quant à lui est apparu aux débuts du XIVe siècle et porte comme sens le fait « d’épuiser ses forces par un effort long ou pénible » (Aimé De Montcassin, Hist. des Normands, éd. V. de Bartholomaeis, II, 7, p. 65). La première édition de l’Encyclopédie, parue en 1751, donne pour définition de la fatigue « l’effet d’un travail considérable ». Dans la fatigabilité on prend en compte un rapport d’augmentation de la fatigue en fonction d’un effort continu. Plus on sera fatigable et plus notre niveau de fatigue sera élevé à la fin d’un même effort continu. Au cours de l’histoire, la définition de la fatigue par la société a bien évolué. L’historien Georges Vigarello a récemment produit un ouvrage sur l’Histoire de la fatigue du Moyen Âge à nos jours (Vigarello, 2020) détaillant le basculement d’une fatigue majoritairement associée à de la fatigue physique dans le Moyen Âge et les débuts de l’industrialisation (fatigue du voyageur en calèche, fatigue du travailleur en usine) à de la fatigue mentale, psychologique plus prégnante de nos jours dans les sociétés occidentales. Le désavantage que Georges Vigarello souligne à cette évolution de la fatigue en tant que concept vers une fatigue psychologique est d’en déterminer l’origine. À l’histoire de la fatigue s’accompagne celle de la résistance face à la fatigue avec les moyens de la diminuer, de la contrer, soit par des produits chimiques tels que les amphétamines pour s’approcher de l’infatigabilité, soit par l’alimentation en lien avec la dépense énergétique, soit plus récemment par le sport et la méditation. Facque Valentine – Thèse de doctorat – 2021 14 Dans notre étude, nous nous attacherons à l’étude de la fatigue et fatigabilité sous l’angle du symptôme. S’intéresser à la fatigabilité est primordial, car son impact dépasse le simple cadre de l’efficience physique pour affecter également nos jugements et prises de décisions ce qui constitue pour les patients un véritable écueil dans la vie quotidienne. 

La fatigue, un symptôme fréquent 

Fatigue et pathologies

La fatigue est un symptôme fréquent dans la population générale. Chacun d’entre nous à un point de notre vie a fait l’expérience de la fatigue. Une enquête IPSOS en mars 2000 avait d’ailleurs montré que près d’un français sur deux (47%) avait éprouvé de la fatigue au cours de l’année. Une enquête conduite en Irlande avait également relevé la fréquence du symptôme de fatigue auprès d’un médecin généraliste. La prévalence de ce symptôme était de 25% (Cullen, Kearney, & Bury, 2002). Malheureusement, la fatigue peut avoir différentes origines ayant pour extrêmes un simple manque de sommeil, des allergies ou un rhume à des pathologies plus complexes comme l’anxiété, ou encore un traumatisme crânien. On considère que la fatigue devient une caractéristique liée à une pathologie lorsque sa durée excède plus de 3 mois (Jason, Evans, Brown, & Porter, 2010). Dans la lignée de ce critère, on peut citer par exemple la sclérose en plaques, où 85% des patients reportent a minima des niveaux de fatigue modérés (Ford, Trigwell, & Johnson, 1998) ou plus largement toute pathologie neurologique (Chaudhuri & Behan, 2004). Une étude (Kluger, Krupp, & Enoka, 2013) a d’ailleurs étudié la propension de la fatigue dans la population en fonction des différentes pathologies neurologiques et on retrouve par exemple pour la sclérose multiple 38- 83% de prévalence, 28-58% dans la maladie parkinson, 36-77% après un AVC ou encore 45- 73% pour les traumatismes crâniens. C’est le cas également dans les pathologies psychiatriques où la fatigue est un critère diagnostique pour l’anxiété généralisée, la dépression majeure et les dysthymies (Ayres, 2015). Plus récemment, la fatigue en tant que symptôme a été mise en avant dans le cas de la pandémie mondiale de la COVID-19. La fatigue est d’ailleurs l’un des symptômes d’une infection par la COVID-19 selon l’OMS. Une récente revue de littérature (Almqvist et al., 2020) constate que les virus de type SARS-CoV-2 engendrent pour 44 à 64% des patients un  symptôme de fatigue. En plus de cette analyse au moment de l’infection, de nombreuses études ont étudié la fatigue lors d’un suivi plus long terme avec l’émergence de la forme longue de cette pathologie. Ces études (Kamal, Abo Omirah, Hussein, & Saeed, 2021; Tran et al., 2021) relèvent dans un suivi au long cours que la fatigue est le symptôme le plus récurrent chez les patients (72-88% des patients). Les patients ayant un cancer sont particulièrement à risque de ressentir de la fatigue au long de leur parcours clinique. Soixante à quatre-vingt-dix pour cent d’entre eux rapportent de la fatigue (Mitchell, 2010). Ce symptôme avait été décrit comme étant le symptôme le plus important tout type de cancer confondu (Servaes, Verhagen, & Bleijenberg, 2002). La fatigue liée au cancer est décrite comme étant « un sentiment pénible, persistant et subjectif de fatigue ou d’épuisement physique, émotionnel et/ou cognitif lié au cancer ou à son traitement, qui n’est pas proportionnel à l’activité récente et interfère avec le fonctionnement habituel » (Berger et al., 2010). Selon plusieurs études, il est principalement lié à l’inflammation, le système immunitaire, des étiologies métaboliques et neuroendocrines, et des biomarqueurs génétiques (Saligan et al., 2015). Cependant, son développement et sa persistance restent inexpliqués : les variables démographiques, les variables liées au traitement, ou celles psychologiques ne semblent pas en lien avec la fatigue liée au cancer (Prue, Rankin, Allen, Gracey, & Cramp, 2006).

Fatigue et gliome de bas grade

Définition du gliome de bas grade Les gliomes diffus de bas grade, tels que définis par la classification de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), constituent un sous-groupe hétérogène de tumeurs primitives du système nerveux central. Les gliomes diffus de bas grade correspondent aux gliomes de Grade II de malignité, souvent appelés « gliomes de bas grade ». Dans la classification de l’OMS en 2017, les gliomes mutés au niveau du gène de l’isocitrate déhydrogénase (IDH-muté) constituent l’essentiel des gliomes diffus de bas grade. Ils incluent les astrocytomes et les oligodendrogliomes (respectivement sans ou avec codeletion 1p19q). Les gliomes diffus de bas grade représentent environ 15% de toutes les tumeurs gliales avec une incidence de l’ordre de 1/100 000 habitant/an. Ces tumeurs naissent des cellules gliales qui se situent dans le cerveau et la moelle épinière. Ces tumeurs sont caractérisées par une Facque Valentine – Thèse de doctorat – 2021 16 infiltration du cerveau et par une prolifération cellulaire moins importante que pour les gliomes de haut grade, ce qui explique leur moindre agressivité. Cette pathologie touche généralement des patients âgés en moyenne entre 30 et 50 ans. 

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