Généralités sur la détention préventive

La détention préventive est une notion qui n’est définie ni par la loi, ni par la jurisprudence. Le décret du 6 août 1959 portant code de procédure pénale ne donne pas une définition de la détention préventive, il ne donne que son caractère à son article 28 alinéa 1qui dispose que : « la détention préventive est une mesure exceptionnelle». Partant de ce caractère, le professeur MAKAYA NKIELA SERGE la définit comme étant, « une mesure exceptionnelle privative de la liberté ordonnée par le juge en chambre de conseil prononcée contre la personne poursuivie lorsqu’il pèse dans son chef les conditions de l’article 27 du décret du 6 août 1959 portant code de procédure pénale » . La détention préventive est donc l’œuvre du juge de paix en chambre de conseil, elle prononcée contre une personne lorsqu’elle réunit les conditions de l’article 27 de la loi précitée. Le professeur LUZOLO BAMBI LESSA pour sa part la définit comme « une mesure privative de liberté ordonnée par l’autorité judiciaire (juge du Tripaix en chambre du conseil) » La détention préventive est une mesure exceptionnelle parc qu’elle prive une personne de sa liberté constitutionnellement garantie.

Il s’agit d’une mesure exceptionnelle parce que malgré cette détention le principe demeure celui de la présomption d’innocence impliquant la liberté individuelle. La détention préventive est souvent rattachée à la phase d’instruction préparatoire dans une certaine mesure, cependant, elle peut se rencontrer pendant la phase préalable au jugement où même en pleine instance par décision spéciale et motivée du tribunal. Dans cette dernière hypothèse, le tribunal prononce l’arrestation immédiate qui constitue aussi une mesure de détention préventive. Plus largement, la détention préventive désigne la situation d’une personne privée de sa liberté, sur le fondement d’une décision juridictionnelle, avant que sa culpabilité soit tranchée, parce que la juridiction de jugement est le garant des libertés individuelles et des droits fondamentaux des décisions, le législateur congolais a jugé bon de confier à cet organe judiciaire la gestion de toutes les décisions attentatoires aux libertés privées pendant l’enquête.

Même si une personne est mise en détention préventive, elle est toujours présumée innocente et les garanties liées à la présomption d’innocence demeurent, la personne poursuivie n’est pas coupable, elle attend que sa culpabilité soit tranchée par le juge.

Le droit distingue la détention et l’internement. La détention consiste en la privation de liberté à la suite d’une décision judiciaire. L’internement résulte d’une privation de liberté fondée sur une décision administrative. La détention préventive est donc une mesure privative de liberté ordonnée par l’autorité judiciaire. La détention, est un état de l’individu retenu à quelque titre que ce soit dans un établissement pénitentiaire. Et ce qui est préventif, c’est ce qui tend à éviter la réalisation d’un dommage ou à devancer le dépérissement d’une preuve . Une personne est mise en détention préventive pour prévenir qu’elle puisse entraver l’instruction en détruisant les preuves par exemple. Comme chaque notion, la détention préventive à une histoire; c’est ce qui fait l’objet du point suivant.

HISTORIQUE

L’histoire judicaire du système romano-germanique, auquel appartient le droit congolais nous décrit l’histoire de la détention préventive. Cette mesure ne fut jamais admise par les citoyens du temps ancien et cela ce n’était ni à Rome, ni même à Athènes régis par la procédure accusatoire, les peuples Germaniques ne connurent pas la détention préventive. Ainsi, au temps des Invasions, les inculpés venaient libres et armés, discutés devant l’assemblée populaire de l’accusation portée contre eux.

C’est vers le milieu du 15ème siècle que la procédure Inquisitoire liée à l’apparition des Etats plus puissants, se substitue un peu partout à la procédure accusatoire. Apparut alors le problème de la recherche de l’aveu, dont le meilleur moyen d’obtention sous les mains du Magistrat avec la torture comme conséquence. L’apparition de l’incarcération avant le jugement fut ainsi liée à celle de la torture. Ainsi, la détention préventive est devenue depuis lors, la règle dans toutes les poursuites pouvant aboutir à l’application d’une peine afflictive. Ce sont les anglais, fidèles au système accusatoire qui, à la suite d’un certain tâtonnement, tenteront de trouver une solution à ce problème, notamment avec l’Act of Habeas corpus ad Faciendum, subjieindum, voté en 1769 qui proclamer : « Dès lors, tout individu arrêté peut, dans les six heures de son arrestation obtenir copie du Mandat d’arrêt et se faire conduire devant le magistrat d’arrestation, décidait si l’inculpé et vérifier la sincérité du titre et simple, s’il devait fournir un cautionnement ou si son arrestation devait être maintenue. » .

Au 15ème siècle, lorsqu’une personne était arrêtée, elle devait être conduite devant le magistrat d’arrestation dans les six heures qui suivaient son arrestation, pour décider si l’inculpé devait être maintenu dans son état ou être relâché.

Cependant, il est paradoxal d’observer que, dans la plupart des pays du système germanique, l’organisation du procès pénal a repris les grandes lignes de l’Instruction préparatoire dans la procédure Inquisitoire. En RDC, nous remarquons l’institution de cette détention depuis le décret du 17 avril 1889 jusqu’aux réformes entreprises à ces jours sur ladite mesure.

Sur le plan judiciaire, le principe de cette situation est que l’organisation de l’instruction préparatoire au Congo-belge était calquée sur un modèle Militaire en droit belge. L’instruction et la poursuite étaient donc confiées au seul Ministère Public et par ricochet toute la procédure de la détention préventive. En cette matière, il est remarquable de noter qu’avant le décret du 06 Août 1959 portant code de procédure pénale, la détention préventive était organisée par le décret du 27 avril 1889 aux articles 26 à 31, modifié et complété par les décret du 11 juillet 1923 (Art.31 à 52), du 16 Mars 1926 et en 1936 .

Au Congo-belge, le modèle de l’instruction préparatoire était calqué sur celui du droit militaire belge, la détention préventive y compris.

Cependant comme en matière d’organisation politico-administrative, cette institution n’avait pas échappé au régime discriminatoire des justiciables. On observe en effet que le délai et les conditions de la détention préventive étaient moins stricts pour les indigènes que pour les non indigènes, auxquels avaient été assimilés les immatriculés et les titulaires de la carte de mérite critique. Le parquet et les juges utilisaient à cet effet leur pouvoir comme si à l’égard des justiciables locaux leur arrestation et la détention étaient la règle, le prétexte étant que l’indigène est toujours difficile à retrouver . Ce décret caractérisait par la discrimination des justiciables en matière de détention préventive fut modifié et complété par plusieurs textes, il a fallu alors attendre l’année 1959 pour qu’un nouveau texte voit le jour, c’est celui du 6 Août 1959 portant code de procédure pénale, lequel est applicable à ces jours, qui à son tour, a connu des modifications dont celle du 03 juillet 1978 relative à l’exercice des attributions des O.P.J. près les juridictions de droit commun qui a institué la garde à vue, ensuite celle du 31 Mars 1982, elle a expressément décrété que la détention préventive est une mesure exceptionnelle et en fixe le régime à suivre.

Comme toutes les matières, la détention préventive n’avait pas échappée au régime discriminatoire, il y avait discrimination des justiciables au Congo belge, les conditions et le délai de la détention étaient moins stricts pour une certaine catégorie des personnes et pour les autres non.

Table des matières

INTRODUCTION
I. POSITION DU PROBLEME
II. INTERET DU SUJET
III. DELIMITATION DU SUJET
IV. METHODES ET TECHNIQUES DE RECHERCHE
A. METHODES
B. TECHNIQUES
V. PLAN SOMMAIRE
CHAPITRE 1: GENERALITES SUR LA DETENTION PREVENTIVE
SECTION I. CADRE SOCIOLOGIQUE DE LA DETENTION PREVENTIVE
§1. DEFINITION ET HISTORIQUE
A. DEFINITION
B. HISTORIQUE
§2. DUREE ET BUT DE LA DETENTION PREVENTIVE
A. DUREE
B. BUT
SECTION II. CADRE JURIDIQUE DE LA DETENTION PREVENTIVE
§1. AUTORITE COMPETENTE ET PROCEDURE DE LA DETENTION
PREVENTIVE
A. AUTORITE COMPETENTE
B. PROCEDURE DE LA DETENTION PREVENTIVE
§2. FONDEMENT ET CONDITIONS DE LA DETENTION PREVENTIVE
A. FONDEMENT
B. CONDITIONS
CHAPITRE 2 : LA PRATIQUE DE LA DETENTION PREVENTIVE
Section 1. QUELQUES CAS D’ABUS EN MATIERE DE LA DETENTION
PREVENTIVE
§1. 1èr CAS : RMP : 0621/PTPL/017/MBE en cause en Ministère public contre NSIBU
MAYIZOLA MAMIE
A.ANALYSE
B.OBSERVATIONS
§2. 2ème CAS : il s’agit du RMP : 0527/PTPL/MBE en cause ministère public contre le
prévenu GISHIYO
A. ANALYSE
B. OBSEVATIONS
Section II. CRITIQUES AU REGARD DES DIFFERENTES PRATIQUES ABUSIVES
COMMISES PENDANT LA DETENTION PREVENTIVE
§1. CRITIQUES ADDRESSEES AU POUVOIR PUBLIC
A. L’inexistence d’un service officiel chargé d’identification des personnes
B. Le manque de clarté de la loi
§2. CRITIQUES ADRESSEES AU MINISTERE PUBLIC
A. La mise en détention préventive sur base des situations subjectives
B. La mauvaise compréhension de la loi
CONCLUSION

Cours gratuitTélécharger le document complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *