LA DEMYSTIFICATION DES MYTHES EUROPEENS

LA DEMYSTIFICATION DES MYTHES EUROPEENS

Si nous avons interprété les discours programmatiques comme des mythes et des récits d’histoires technocratiques, partisans et locaux, les programmes électoraux peuvent aussi êtres mobilisés par le chercheur dans l’objectif de produire des métarécits sur la « réalité européenne ». Cela implique une démarche analytique qui va au-delà du fait de saisir les « sens », les « visions du monde », que les discours du politique mettent en scène. Il est impératif de saisir aussi les configurations génératrices de ces « sens » ainsi que le processus par lequel ils ont été construits et introduits dans les programmes électoraux. Comprendre un discours, ce n’est pas seulement repérer ou reconstituer des informations pour les intégrer à ce M. Weber dans Economie et Société (1922) soutient que pour l’exégèse textuelle, la démarche interprétative doit transférer à l’action l’essentiel des traits d’un texte. Ce qu’elle doit traiter l’action comme une objectivation du sens sous l’aspect de son achèvement, et ainsi soustraire à l’analyse l’accomplissement de l’action. Cette thèse invite à dépasser une démarche herméneutique « pure » laquelle néglige le fait que le sens est lui-même produit et déterminé par une structure génératrice (Quéré, 1999). Les significations se constituent en rapport avec des conditions et des valeurs du contexte, et elles peuvent aussi bien masquer que révéler ces conditions. Une démarche pertinente, selon Habermas (1987), doit compléter une approche herméneutique par une perspective qui prend en compte les cadres institutionnels de l’action sociale, ainsi que les conditions empiriques dans lesquelles les traditions sont transmises, actualisées et éventuellement transformées.

Il s’agit par là de reconnaître l’importance des configurations des contextes dans la constitution de la signification des paroles et des actions, ainsi que leur compréhension. Comprendre un énoncé requiert donc de faire usage d’informations ou de connaissances d’arrière-plan permettant de saisir ce qui entoure les textes. Il en va de même pour la détermination des conduites : les agents ajustent leurs comportements à la configuration dans laquelle ils se trouvent. C’est par la définition qu’ils élaborent des situations, qu’ils spécifient les contraintes objectives auxquelles ils se soumettent. Ceci ne se traduit pas par une démarche explicative de cause à effet, mais par une démarche compréhensive dans laquelle les mythes et leurs configurations sont liés par une relation d’articulation, qui permet la cumulativité des connaissances sur le monde dans lequel on vit. Nous tentons au sein de ce dernier chapitre de mettre en rapport trialogique les continuités/discontinuités des programmes, les modes de production et de diffusion de ces discours et les traits des contextes plus larges qui s’articulent à la fois avec les sens discursifs et les logiques (ou non-logiques) qui animent et orientent les actions dans la production et la diffusion de ces sens.

Ce chapitre est structuré en quatre parties impliquant chacune des configurations hétérogènes avec lesquelles les différents éléments des mythes du politique européen peuvent être articulés. La première partie propose d’appréhender le rôle et la place du Parlement européen au sein de l’Union européenne comme configuration du mythe de « la fin du politique ». Il s’agit, en effet, de mettre en lien les actions et les logiques d’action des agents qui sont impliqués dans l’activité parlementaire avec les traits composants de ce mythe technocratique. La deuxième partie déplace la focale de l’analyse du sens des mythes idéologiques vers l’analyse de la production des programmes inter-partisans afin de discuter le mode de participation des organisations liées aux partis (Organisations de Jeunesse notamment) ainsi que des délégations nationales dans ce processus. Dans la troisième section de ce chapitre, nous abordons les traits caractéristiques des programmes produits par des partis d’origine géopolitique et culturelle commune, en les inscrivant dans les configurations telles qu’elles résultent par le mode du scrutin des élections européennes. Enfin, dans la quatrième partie, dans une perspective de synthèse nous articulons deux constats analytiques issus de cette recherche : (a) l’implication plus active des délégations françaises et l’implication moins active des délégations chypriotes dans la production des manifestes des partis européens ; (b) le fait que les programmes français se révèlent moins cohérents avec les manifestes que les programmes chypriotes. C’est de cette manière que les internautes sont accueillis sur la page officielle du Parlement Européen (PE) : avec des mots qui revendiquent le caractère démocratique de l’institution parlementaire de l’UE. Le PE est « vendu » également comme la seule institution dont les membres sont élus directement par les citoyens. Les citoyens de tous les Etats-membres de l’UE élisent tous les cinq ans leurs représentants nationaux au parlement européen. Mais quel est son  rôle au sein de l’UE ? Quel est le poids dans le processus décisionnel de l’UE, de la seule institution élue directement par les citoyens ? Dans cette partie, nous abordons ces questionnements en les mettant en relation avec le mythe technocratique que les partis produisent. En d’autres termes, le fonctionnement du PE et son rôle dans la procédure décisionnelle de l’UE sont pris comme des configurations impliquant des acteurs et des espaces temps particuliers.

 

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