La frontière séparant deux territoires frontaliers

La frontière séparant deux territoires frontaliers

Un territoire, tel que nous l’avons défini à partir de la définition de Lévy et Lussault1, est un espace particulier. Il est structuré, c’est-à-dire qu’il a une organisation et une délimitation fixe ; il présente une dimension politique et un système juridique ou organisationnel. Une des délimitations fixes, dans le cas des territoires alsacien (France) et badois (Allemagne), est la frontière franco-allemande, ce qui les caractérise de territoires frontaliers.  Nous verrons que la frontière franco-allemande située sur le Rhin a des dimensions géographique, historique et politique, dimensions précisées par le Groupe frontière dans l’article « La frontière, un objet spatial en mutation ». Nous verrons ensuite la place de la frontière dans la définition des territoires frontaliers. historique soit géographique »2. La frontière franco-allemande est définit par le tracé du Rhin. Le fleuve a aussi définit la limite entre les deux états à d’autres époques. géographique par la présence du Rhin. Louis XIV obtient le statut de frontière entre la France et l’Empire pour le Rhin par le traité de Ryswick en 1697. Le fleuve est considéré juridiquement comme un bras maritime depuis 18053, ce qui sous entend son importance en tant qu’axe de navigation. Cela suppose aussi des dimensions (longueur et largeur) assez importantes pour assurer la navigation. Le Rhin est d’ailleurs le plus grand fleuve d’Europe après le Danube4. De nombreuses villes rhénanes comme Strasbourg ont été construites éloignées du lit du Rhin, qui faisait jusqu’à quelques kilomètres de large, « qui divague entre l’Alsace et le pays de Bade »5. Il inonde les terres, les berges sont marécageuses et les forêts porteuses de moustiques et de fièvres éloignent les habitants. La lutte contre les inondations à Strasbourg s’affermit par la création de digues avec l’aide de collectivités voisines. Les grands travaux de régularisation sont réalisés au XIXème siècle selon les plans de l’ingénieur badois Tulla.

Les constructions sur le Rhin sont coûteuses de part ses dimensions ; elles exigent des techniques élaborées et donc plus coûteuses que pour des constructions terrestres. Son lit tardivement canalisé a éloigné les villes de part et d’autre du Rhin ; les infrastructures pour les relier en passant au-dessus du Rhin n’en sont que plus coûteuses puisque plus longues. Outre les coûts et les techniques nécessaires pour la construction d’infrastructures au- dessus du Rhin, le fleuve ayant été à plusieurs reprises un axe conflictuel, les ponts transrhénans ne sont pas nombreux. Lors de ces conflits, les ponts sont détruits pour éviter les flux entre les deux territoires, entre autres éviter les flux militaires. Les conflits à répétition, plus précisément la destruction de ponts entre les deux rives de Rhin, ont participé au manque d’infrastructures transrhénanes. Pourtant, le développement de la ville de Strasbourg, et celui de son port plus particulièrement, dépasse la limite géographique du Rhin avec la création de la ville de Kehl par volonté étatique française pour fortifier la zone au XVIIème siècle ainsi qu’avec le développement d’un port à Kehl par concurrence à celui de Strasbourg6. Le Rhin ne présentait alors pas une limite à l’urbanisation à l’époque ni au développement économique.

Frontière historique

D’autre part, le tracé de la frontière franco-allemande se justifie par l’aspect historique. Les Romains estimaient le Rhin comme la limite des terres civilisées : d’un côté les Gaulois, de l’autre les Germains, plus précisément, d’un côté les Civilisés, de l’autre les Barbares. La première apparition d’une Allemagne et d’une France se fait en 843 avec le traité de Verdun ; leurs relations sont alors hostiles : « 843, le traité de Verdun. La première apparition dans l’histoire d’une Allemagne et d’une France nettement distinguées, politiquement définies, rivales déjà sinon hostiles. »7 Puisque la « limite », aujourd’hui frontière étatique, a été bien souvent dépassée par l’Allemagne et par la France, cela sous-entend la nature historique de cette frontière ; puisque s’il y a dépassement, c’est qu’il y a quelque chose à dépasser, c’est-à-dire ici la frontière.

 

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