La problématique de l’entrepreneurship

Faut-il vraiment s’attarder à faire la preuve de l’importance et de la plàce qu’occupent les PME dans le développement d’une économie capitaliste? Compte tenu des différentes définitions, les PME représenteraient entre 97.2% à 99.9% du total des entreprises au Canada. Le nombre des PME s’est accru de 48% depuis 1979 {Statistique Canada, 1994). Au niveau de la répartition de l’emploi, en incluant les travailleurs indépendants, un peu plus de 47,1% de tous les Canadiens actifs travaillaient pour des entreprises de moins de 100 employés et près de 40.0% d’entre eux travaillaient pour des sociétés de moins de 50 employés {Industrie, Sciences et Technologie Canada, 1991 ).

L’engouement pour les PME est également grand aux États-Unis. À preuve, Thomas J. Dean (1989) a répertorié dans une bibliographie, plus de 380 titres, essentiellement américains, portant sur l’entrepreneurship et les PME. Et au Canada, Louis Jacques Fil ion (1991) liste près de 300 ouvrages dans la bibliographie sélective de son livre « Vision et relations: clefs du succès de l’entrepreneur ». Beaucoup de ces publications sont du type normatif et un écart important semble exister entre la place qu’occupent les PME dans l’économie et celle occupée dans la littérature scientifique {Wortman, 1987). Il reste néanmoins que la très grande majorité de la littérature consacrée à la gestion privilégie une approche normative pour la grande entreprise. Il est présomptueux de croire que la gestion d’une PME puisse se calquer sur l’approche managériale des Ansoff, Levitt, Kotler, et Porter. Toutefois, principalement depuis les années 85, un effort significatif existe pour combler l’insuffisance d’études empiriques et par conséquent, de modèles de gestion appropriés aux petites et moyennes entreprises {Wortman et Birkenholz, 1991 ).

Généralement, malgré un taux de mortalité variant selon le secteur d’activité, plus d’une nouvelle PME sur deux disparaîtrait avant ses cinq ans (Bizaguet, 1991 ). Entre 1990 et 1991, 158 000 entreprises ont cessé leurs activités, ce chiffre représente un taux de fermeture de 17%. Ce taux de mortalité excessif est attribué à diverses causes, allant d ‘ un sousfinancement chronique, à des erreurs d’appréciation du marché lui-même, ou à une carence de ressources nécessaires à l’exploitation d’une occasion d’affaires. Il nous faut s’interroger sur les véritables causes des difficultés des propriétaires-dirigeants de PME à survivre à leur croissance (Lalonde 1985).

Il devient donc absolument essentiel de mieux cerner la problématique de gestion particulière aux PME à l’aide d’études empiriques. La bonne gestion de ces dernières passe par le développement d’une approche normative qui leur soit propre. Une PME n’est pas une grande entreprise (Shama, 1993). Mais si sa gestion est adéquate, elle le deviendra peut-être, si tel est l’objectif de croissance de son propriétaire dirigeant. À tout le moins, et cela peut demeurer un objectif de développement fort valable, elle se maintiendra parmi le groupe des PME les plus performantes. Pour réussir, une PME devra développer des outils de gestion bien à elle, et devra fuir les solutions mécanistes qu i étouffent ses principales forces que sont l’imagination, la flexibilité et l’audace (Whiting, 1988).

UNE TYPOLOGIE DE L’ENTREPRENEURSHIP 

Généralement, plusieurs considèrent que la vision entrepreneuriale est essentielle à la croissance économique. Certains avancent même que le phénomène entrepreneuria 1 serait le ca ta lys eu r de la « main invisible » d’Adam Smith. Pour Paui-Athur Fortin, directeur général de la Fondation de l’entrepreneurship, le plein emploi passe par le goût d’entreprendre, par la création de nouvelles entreprises . Gérald D’Amboise ( 1989) est d’avis que les petites entreprises « assurent fe développement et fe maintien d ‘un tissu économique et social propice à l’évolution de nos divers milieux de vie « . Mais , sait-on vraiment en quoi consiste l’entrepreneurship? Savons-nous réellement ce qu’est une PME? Connaît-on le rôle d’agences gouvernementales et d’associations telles Statistique Canada, le Bureau de la petite entreprise, la BFD, le Ministère de l’industrie et du commerce ·(Québec), Industrie, Sciences et Technologie Canada, la Fondation de l’entrepreneurship, l’Institut national de développement de l’entrepreneurship et autres, dans le développement des PME et l’impact de ces dernières sur l’économie? Toutes ces institutions ont une vision, une définition et une classification de ce qu’est l’entrepreneurship et une PME. Bien que certains de ces organismes tentent de définir l’entrepreneurship comme une religion, un acte de foi, une proposition ou un mouvement social, fondamentalement, l’entrepreneurship est d’abord une affaire de degré. Afin d’illustrer cette affirmation, nous pourrions comparer l’ouverture d’une nouvelle succursale McDonald à celle d’un restaurant- indépendant de toute forme de franchise. Bien que les deux puissent être l’oeuvre d’entrepreneurs, la première bénéficie non seulement d’un réseau d’affaires établi et reconnu, mais aussi d’un support logistique et administratif, alors que la deuxième doit s’efforcer de tout bâtir.

Toutefois, malgré certains points communs, aucun consensus ne permet de définir clairement une typologie universelle propre aux PME (Rosa, 1986). Au contraire, nous y retrouvons une grande diversité de définitions ou de limites qui varient selon les industries, les pays et même selon le contexte économique (Toulouse, 1979; D’Amboise, 1989; Cunningham et Lischeron, 1991; Bizaguet 1992). De plus, ce qui ne simplifie pas la situation, le terme entrepreneurship lui-même, est utilisé pour définir différentes formes d’acitivités liées à la création, à la formation, à l’adaptation ou même à l’administration de nouvelles entreprises. Ainsi, nous retrouvons dans la littérature une diversité de définitions pour une PME, allant du simple critère quantitatif du nombre d’employés (variant de 100 à 500), à une définition englobant plusieurs mesures de taille d’entreprise (nombre d’employés, total des ventes annuelles, actifs totaux) précisées par des critères qualitatifs (degré d’autonomie et nature de la gestion) . Plusieurs auteurs s’entendent toutefois pour reconnaître que le nombre d’employés est la mesure la plus souvent utilisée pour qualifier une entreprise de PME, et ce même si ce critère spécifique présente des difficultés d’homogénéité évidentes . Pour sa part, 0 ‘Amboise ( 1989) propose, pour le contexte canadien, les critères suivants :
• les dirigeants jouissent d ‘une autonomie décisionnelle, les filiales et les franchises sont exclues;
• l ‘entreprise réalise moins de 20 millions de dollars de ventes annuelles et occupe moins de 500 employés;
• l’entreprise ne domine pas dans son secteur d’activité économique, son chiffre d’affaires est inférieur à celui des leaders.

Le phénomène PME n’est pas nouveau . La création d’une PME s’inscrit comme une remise en cause de valeurs économiques et socia les établies (Staber et Schaefer, 1986). Ce n’est pas un décalque en plus petit d’une grande entreprise, ni même une future grande entreprise. Une PME est d’abord une création, c’est l’exploitation d’une occasion d’affaires ou la mise en marché d’un savoir « mieux » faire. La PME est une certaine contestation sociale d’un ordre rigoureux observé par des grandes entreprises bureaucratiques, contrôlées et rigides . La PME est la concrétisation commerciale du désormais célèbre essai de E. F . Schumacher, « Small is beautiful », c’est le retour aux qualités humaines, à la souplesse, à la simplicité des structures, à la motivation et à la priorité de l’action.

Ce secteur d’activités est en croissance. Des statistiques révèlent que le nombre de PME canadiennes s’est accru de 42% entre 1978 et 1986, c’est ainsi qu’il existerait aujourd ‘hui plus de 840 000 PME qui ensemble ont réussi, de 1984 à 1988, à créer plus d’un million de nouveaux emplois sur la création totale de 1 267 000 d’emplois au pays (Industrie, Sciences et Technologie Canada, 1991 ).

Néanmoins, les auteurs reconnaissent dans le phénomène entrepreneurial, un amalgame complexe de construits ayant des répercussions particulières dans un environnement de PME, tels le management des petites et moyennes entreprises, le management du changement, l’innovation, la turbulence technologique et environnementale, le développement de nouveaux produits et services, l’individualisme de l’entrepreneur et l’évolution de l’industrie. Bien que le but de l’exercice n’est pas de proposer une définition universelle, il nous apparaît important, pour mieux saisir la dynamique dans laquelle gravitent les PME, de dresser un bref survol de ces construits.

LES CARACTÉRISTIQUES DES PME 

L’effort de Gasse et Carrier (1992) pour suggérer une organisation plus rationnelle de la croissance des PME souligne, du même coup, l’absence d’un modèle unique et rigoureux susceptible de s’appliquer partout et pour toutes les formes de PME. Il en va de chaque PME de modeler son approche afin de bénéficier d’avantages reliés à sa petite taille. Autant le Sma/1 Business Act des États-Unis que le Bolton Report d’Angleterre, qualifie l’indépendance comme la caractéristique principale des PME . Or, selon des particularités propres à la gestion des PME, les caractéristiques suivantes présentent certaines tendances lourdes allant à l’encontre du management conventionnel vécu dans les plus grandes organisations.

Le management des petites et moyennes entreprises 

Il ne s ‘agit pas de remettre en question le management stratégique des Porter, Drucker et Levitt, mais bien de souligner un ordre de préoccupations managériales différent pour les petites et moyennes entreprises. Un ordre lié d’abord à son propriétaire/dirigeant, à ses intérêts et à ses ressources. En contrepoids des auteurs qui traitent de management conventionnel, Marchesnay (1993) questionne le management classique dans une perspective de PME, en critiquant les procédures et les modèles prescriptifs plutôt que d’avoir recours à des a na lyses de processus et des approches descriptives des phénomènes particuliers à celles-ci. Reconnaissant le caractère unique, déviant et dynamique des PME, il condamne le globalisme méthodologique en faveur de l’individualisme méthodologique . L’observation des pratiques et des mises en oeuvre concrètes, telles qu’ont effectué les Gasse et Carrier (1993), Fi lion (1990, 1991) ou Toulouse (1979), devrait tracer la voie à un management stratégique plus approprié aux entreprises de plus petite taille tel que nous le suggère Rochebrune (1993) dans un récent éditorial.

Même si la petite et moyenne entreprise assure 41% des ventes totales au pays et 63% des emplois du secteur privé au Canada en 1988 (Statistique Canada, 1988), son environnement économique est plus ou moins structuré et fortement influencé par les grandes entreprises et par l’appareil gouvernemental . Paradoxalement, même si la PME est en soi fort vulnérable, son influence sur le tissu socio-économique d’une région est majeure (Kirchoff et Phillips, 1987). Elle est vulnérable parce que la création d’une entreprise représente une réponse nouvelle à un problème , une solution qui introduit un changement et par conséquent à tout changement, il y a un risque associé. Enfin, son influence tient surtout du fait que, généralement une PME est fortement impliquée dans son milieu , soit comme employeur, soi t comme supporteur de la vie sociale et économique .

Table des matières

INTRODUCTION
CHAPITRE 1 LA PROBLÉMATIQUE DE L’ENTREPRENEURSHIP
1.1 UNE TYPOLOGIE DE L’ENTREPREUNEURSHIP
1 .2 LES CARACTÉRISTIQUES DES PME
1 .2.1 Management des petites et moyennes entreprises
1 .2.2 La turbulence technologique et environnementale
1 .2.3 La nature de l’entrepreneur
1 .2.4 Le dévelopement de nouveaux produits et services
1 .2.5 L’innovation
1 .2.6 Le management du changement
1.2. 7 L’univers de la PME
1 .3 LE PHÉNOMÈNE ENTREPRENEURIAL ET LE MARKETING
1.3.1 Une vision entrepreneuriale du marketing
1 .3.2 Les contraintes de la vision marketing
1 .3.3 La conciliation de la philosophie entrepreneuriale et de la fonction marketing
1 .4 CONCLUSION: LES ÉLÉMENTS DE SUCCÈS ET D’ÉCHECS POUR UNE PME
CHAPITRE II ÉVOLUTION ET PLACE DU MARKEïiNG DANS LES PME
2.1 LE MARKETING DANS LES PME
2.2 LE MARKETING DE PME DE SERVICES AUX ENTREPRISES
CHAPITRE III LA PLACE DE L’ENTREPRISE DE SERVICES DANS LE SYSTÈME ÉCONOMIQUE
3.1 L’ÉVOLUTION ÉCONOMIQUE CONTEMPORAINE: LA POSTINDUSTRIALISATION
3.1.1 L’ère agricole
3.1 .2 La révolution industrielle
3.1 .3 La tertiarisation de l’économie
3.2 LES DÉFINITIONS DES SERVICES
3.2.1 Une typologie des services
3.2.2 La conception de P. Hill: l’interpénétration
3.3 TENDANCES ET CROISSANCE DES SERVICES
3.3 CONCLUSION
CHAPITRE IV PROBLÉMATIQUE DU MARKETING DES SERVICES
4.1 LES CARACTÉRISTIQUES DU MARKETING DE SERVICES
4.1 .1 L’intangibilité
4.1.2 L’hétérogénéité
La simultanéité
L’inséparabilité
4.1 .5 Conclusion
3.2 LA QUALITÉ DES SERVICES
4.2.1 Le personnel en contact
4.2.2 Les éléments du service
4.3 LE CONCEPT DE PERSONNALISATION
4.3.1 La personnalisation sélective
4.3.2 La personnalisation programmée
4.3.3 La personnalisation adaptée
4.3.4 Conclusion
4.4 LE MARKETING DE SERVICES: LE CAS DES SERVICES AUX ENTREPRISES
4.5 CONCLUSION
CHAPITRE V LES AVENUES DE RECHERCHES DISTINCTIVES DU MARKETING DE PME DE SERVICES AUX ENTREPRISES
CONCLUSION

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