Le Formalisme Eulérien Mésoscopique

Le Formalisme Eulérien Mésoscopique

Dérivation du Formalisme Eulérien Mésoscopique Multi-fluide 

Le FEM ne prend pas en compte la polydispersion en taille des gouttes. Pour prendre en compte cette polydispersion, il est proposé de coupler ce formalisme à l’approche multi-fluide de Laurent and Massot [2001]. Considérant que ces deux approches tendent à résoudre deux dimensions différentes de l’espace des phases, la dérivation du Formalisme Eulérien Mésoscopique Multi-fluide (FEMM) ne pose pas de difficulté particulière, même si quelques précautions doivent être prises avec les quantités transportées. Cette idée de conditionner les statistiques de la phase dispersée en fonction de la taille des particules a déjà été explorée par Massot et al. [2004], et est à la base de l’écriture du FEMM.

Discussion générale sur les approches utilisées

Prise en compte du two-way coupling

 L’influence d’une phase dispersée sur la phase gazeuse a souvent été étudiée sur des cas de Turbulence Homogène Isotrope. Elgobashi and Truesdell [1993], et plus récemment Ferrante and Elghobashi [2003], observent l’effet de la force de traînée d’une phase dispersée sur l’écoulement gazeux. Ils montrent une différence de comportement en fonction du nombre de Stokes. La figure 2.2 montre le spectre d’énergie du champ gazeux en THI, pour différentes caractéristiques de la phase dispersée. Les particules à nombre de Stokes faible (<< 1, cas B) se comportent comme des traceurs. Elles sont piégées par les petites échelles (nombres d’onde élevés). Cependant, en raison de leur forte densité, elles modifient la rhéologie du gaz à ces petites échelles en augmentant la densité effective (comportement de “gaz lourd” (Saffmann [1962])). Cette augmentation conduit à une plus forte dissipation et donc une réduction accélérée de l’énergie des grandes échelles. Les particules à nombre de Stokes élevé(>> 1, cas E) n’interagissent pas avec les petites échelles, en raison de la différence des temps caractéristiques. Cependant la force de traînée induite est à l’origine d’un effort contra-rotatif par rapport au sens des tourbillons (figure 2.3, Ferrante and Elghobashi [2003]) qui conduit à une diminution de leur intensité. Les résultats de Ferrante and Elghobashi [2003] montrent que cet effet de “puits” d’énergie se retrouve principalement aux grandes échelles. Les particules à grand nombre de Stokes interagissent donc avec les grandes échelles de la turbulence.Les particules à nombre de Stokes critique (≈ 1, cas D) ont un comportement intermédiaire par rapport aux deux cas précédents. En effet, elles ont suffisamment de temps pour interagir avec les petites échelles, en augmentant l’énergie de ces dernières et donc la dissipation. Elles agissent aussi sur les grandes échelles, en raison de l’effort contra-rotatif évoqué précédemment. Les particules interagissent donc avec tout le spectre de la turbulence. Elles sont qualifiées de critique parce qu’elles maximisent l’effet de concentration préférentielle de la phase dispersée (forte variation de la concentration de gouttes). Quand on résout toutes les échelles de la turbulence, la question de savoir comment agissent les particules sur la phase gazeuse ne pose de problème particulier, si on « oublie » le problème du conditionnement qui est développé dans la suite. Les interactions entre la phase dispersée et la phase gazeuse se font à toutes les échelles, puisqu’elles sont toutes résolues. Dans le cadre de calculs LES, la question est plus compliquée. En effet, les petites échelles de la turbulence ne sont pas résolues, et on doit se demander comment appliquer le forçage par traînée. Comme l’analyse de Ferrante and Elghobashi [2003] le montre, les comportements du forçage étant différents selon le nombre de Stokes, une procédure de distribution en fonction du Stokes semble nécessaire. A faible nombre de Stokes, le transfert direct d’énergie est faible, les particules étant en équilibre avec le gaz. Cependant les particules agissent sur les petites échelles, en augmentant la densité effective du gaz. L’effet du forçage devra donc apparaître dans un terme de sous-maille pour la phase gazeuse, de manière à augmenter la dissipation d’énergie. A nombre de Stokes critique, les particules interagissent avec tout le spectre de la turbulence. On doit donc prendre en compte l’effet de la traînée sur la quantité de mouvement résolue du gaz, mais aussi sur le mouvement de sous-maille. Ici les particules augmentent l’énergie des petites échelles. La LES introduit un autre nombre de Stokes, associé à l’échelle de coupure. Ce nombre compare le temps de relaxation des particules avec celui de la plus petite échelle résolue de la LES. Si ce nombre est fort, le forçage est effectif sur le mouvement résolu et sur le mouvement de sous-maille. Si ce nombre est faible, seul l’effet sur le mouvement de sous-maille subsiste et sera mixte, à savoir une augmentation de l’énergie des plus petites échelles, et une diminution de l’énergie en s’approchant de l’échelle de coupure. La modélisation de sous-maille devra représenter ces deux effets. A fort nombre de Stokes, les particules interagissent seulement avec le mouvement de grandes échelles, qui est le mouvement résolu en LES. La modélisation ne fait donc intervenir que des échanges entre le mouvement moyen des phases dispersée et gazeuse. Les calculs LES effectués dans le cadre de cette thèse, comme dans les travaux précédents (Riber [2007], Lamarque [2007], Vié and Habchi [2008], Martinez et al. [2009], Martinez [2010], Sanjosé [2009], Jaegle [2009], Vié et al. [2010b]), n’incluent qu’un forçage sur les grandes échelles. Cette simplification de la physique réelle conduit à une modification de la distribution locale d’énergie. La question est donc de savoir qu’elle est l’impact et l’importance d’une telle simplification, et nécessiterait une étude plus approfondie, mais ne fait pas partie des objectifs de cette thèse.

Problème du conditionnement

 Le deuxième point lié au two-way coupling est le problème du conditionnement. La fdp de départ qui permet d’écrire le FEM représente la statistique d’un ensemble de réalisations de la phase dispersée. Dans l’hypothèse d’une phase dispersée à très faible fraction massique et donc d’un couplage « oneway », cette hypothèse est valide. Mais, dans le cas d’un « two-way coupling », chaque réalisation de la phase dispersée modifie différemment la phase gazeuse, et donc le conditionnement par une réalisation unique de la phase gazeuse n’est plus valide. Février et al. [2005] suggère qu’une approche de type FEM pour les écoulements fortement chargés est cependant possible si le temps de réponse des particules est du même ordre que celui des grandes échelles de la phase gazeuse. En effet, il est alors possible de tirer avantage du filtrage LES de la phase gazeuse, en conditionnant les statistiques de la phase dispersée non pas sur une réalisation du gaz mais sur une réalisation du gaz filtrée. Comme expliqué à la section précédente, pour de faibles nombres de Stokes, les particules ne modifient pas le champ filtré du gaz, et le conditionnement par une seule phase gazeuse reste donc valide. Une telle approche ne fait cependant plus appel à l’EWB mais une équation de type Fokker-Planck, qui prend en compte l’effet de la turbulence du gaz non-résolue sur l’équation d’évolution de la fdp (voir Reeks [1991] notamment).

Validité des fermetures des flux décorrélés 

Les fermetures de type viscosité pour le tenseur de second ordre de l’équation de quantité de mouvement ont été déjà validées a priori (Moreau [2006]) et a posteriori (Vié et al. [2009], annexe C) sur des cas tests de turbulence homogène isotrope chargée en particules. Cependant, Riber [2007] avait déjà observé sur le cas de canal de Hishida et al. [1987] que de telles fermetures pouvaient être mal adaptées pour les écoulements cisaillés, comme montré également par Reeks [2005]. Les travaux de Masi [2010], Masi et al. [2010] confirment cette tendance. Dans ces travaux, une couche de fluide est chargée en particules et déposée dans une turbulence homogène isotrope est d’établir des corrélations pour l’évaluation du tenseur de second : extension aux écoulements polydisperses ordre, et de les comparer à des calculs de référence lagrangiens. La figure 2.5 compare les niveaux de dissipation moyenne au travers de la nappe de particules, et la figure 2.6 compare la fdp de dissipation locale à la périphérie de la couche, dans la zone de cisaillement. FIGURE 2.5 – Profil exact (ligne continue) et profil modélisé (triangles) de dissipation moyenne à St ≈ 1 (Masi et al. [2010]). FIGURE 2.6 – Fdp exacte (ligne discontinue) et fdp modélisé (ligne continue) de dissipation locale à St ≈ 1 (Masi et al. [2010]). Deux points importants sont à noter : la dissipation moyenne est largement surestimée en tout point de la nappe, et les zones de dissipation locale négative ne sont pas modélisées. En effet, la figure 2.6 montre que le tenseur de second ordre a aussi un effet anti-diffusif correspondant à un échange du mouvement décorrélé vers le mouvement moyen, ce qui n’est pas reproductible avec le modèle à viscosité utilisé ici. Le travail de Masi [2010] a donc consisté à définir de nouvelles fermetures en prenant en compte d’autres paramètres pour le calcul de la viscosité effective, comme les invariants du tenseur de cisaillement. Elle a proposé ainsi des fermetures permettant de revenir à des niveaux de dissipation moyenne raisonnable, et permettant de résoudre les échanges mouvement moyen – mouvement décorrélé dans les deux sens. Ces travaux nécessiteront certainement d’être intégrés au modèle FEM dans AVBP , même si le traitement de termes anti-diffusifs est un problème délicat. 2.4.4 Flux décorrélé pour les moments en taille des particules dans les approches polydisperses Dans le FEMM, on a considéré que la vitesse moyenne Ul,i(x,t,S) est constante dans chaque section. Cependant, elle ne l’est pas nécessairement. Il faudrait donc prendre en compte dans le calcul de la vitesse moyenne une distribution de vitesse en fonction de la taille : U (p) l,i = 1 m (p) l Z R Z R+ Z Sp+1 Sp ρlS 3/2 6 √ π cp,i fpd~cpdT dS = 1 m (p) l Z Sp+1 Sp ρlS 3/2 6 √ π Ul,i(x,t,s)n(S)dS (2.115) 6

Discussion générale sur les approches utilisées 

En pratique, cela reviendrait à faire apparaître dans chaque équation un terme correctif supplémentaire. Ce terme correctif correspond à la convection de chaque moment avec une vitesse résiduelle supplémentaire δU (p) (~x,t,S) : δU (p) (~x,t,S) = Ul,i(~x,t,S)−U (p) l,i (~x,t) (2.116) Cependant, la définition de ce terme convectif supplémentaire nécessite de présumer la forme de cette vitesse résiduelle, et n’est pas évidente. De plus, le même problème apparaît sur la définition de la vitesse décorrélée δcp,i(~x,t,S) qui doit aussi dépendre de la taille. On a donc choisi dans ce travail de se limiter à une approche à une vitesse corrélée et une vitesse décorrélée par section.

Cours gratuitTélécharger le document complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *