Aspects cliniques
Le mélanome peut survenir, sur n’importe quelle partie du corps, le plus souvent sur peau saine, sur le tronc chez l’homme et sur les jambes chez la femme. Il peut prendre naissance sur un nævus préexistant, mais cette éventualité est rare, sauf dans le cas des nævus géants congénitaux qui peuvent être le siège d’un mélanome (8).
Le plus fréquemment, il se manifeste par l’apparition d’une tache pigmentée qui ressemble à un nævus ; il peut aussi être la résultante d’une modification de couleur et de forme d’un grain de beauté existant. Il est une lésion pigmentée (8).
Les symptômes d’alerte les plus fréquents sont des modifications visibles de taille, de forme, de couleur et d’élévation de cette tache récente ou du grain de beauté existant.
Les signes qui doivent alerter sont :
Une modification de forme
Une modification de couleur, les taches sont alors de couleur brun foncé ou noir et souvent plus de deux couleurs (ou deux teintes)
Une forme et des contours irréguliers qui s’élargissent
L’apparition rapide d’une nouvelle lésion qui persiste, ne guérit pas, colorée ou non, parfois de couleur chair, rosé
Un saignement d’un nævus préexistant. (5)
On utilise la règle ABCDE afin de poser un diagnostic de mélanome cutanée.
Différentes formes de mélanomes cutanés
Quatre principaux sous-types de mélanomes peuvent être identifiés, en fonction de leurs caractéristiques cliniques et histologiques :
Mélanome superficiel extensif
Touchant préférentiellement la femme, le mélanome superficiel extensif est la forme la plus fréquente (60 à 70 % des cas). Il est surtout localisé sur les membres.
Des coups de soleil importants pendant l’enfance et chez les personnes de phototypes I et II augmentent le risque de développement d’un mélanome superficiel. Intra-épidermique, il commence par une macule à croissance horizontale ou radiale et évolue lentement en plaque multicolore Il a une croissance horizontale prolongée, puis progressivement devient invasif (croissance verticale). Son aspect clinique répond complètement aux critères ABCDE.
Mélanome nodulaire
Le mélanome nodulaire peut atteindre toutes les parties du corps avec une préférence pour le haut du tronc, y compris les régions non exposées au soleil et touche principalement les hommes. Il représente 10 à 20 % des cas.Mélanome à évolution très rapide, il commence d’emblée à s’étendre horizontalement, contrairement aux autres types de mélanome.
Mélanome acro-lentigineux
Ce sous-type de mélanome représente 4 à 10 % des cas. Il se manifeste le plus souvent chez le sujet âgé et chez les personnes qui ont la peau foncée (phototypes V-VI).
Il n’est pas lié à une surexposition aux UV. .Le mélanome acro-lentigineux est palmo-plantaire (Figure 15 : mélanome acro-lentigineux) ou subunguéal dans la plupart des cas. Il apparaît habituellement sous la forme d’une lésion foncée plane puis sous forme de nodules. Il est parfois de la couleur de la peau rendant ainsi le diagnostic difficile. Son ulcération est chronique, achromique,à bordure pigmentée.
Mélanome de Dubreuil
Il est également principalement diagnostiqué chez le sujet âgé, représentant 5 à 10 % des cas. Toujours sur peau insolée, en particulier le visage. Il se développe toujours sur une peau surexposée aux rayons ultra-violets UV (visage en particulier, mais aussi sur le cou et les mains). Il apparait sous forme d’une tache brune polychrome hétérogène, s’étendant progressivement en tache d’huile. Longtemps superficiel, il peut devenir invasif après plusieurs années d’évolution.
Facteurs de risques
Le développement d’un mélanome cutané est multifactoriel. On distingue 2 types de facteurs de risques : les facteurs de risque externes, liés à l’environnement et aux modes et conditions de vie et les facteurs de risque internes.
Facteurs de risque externes
Il s’agit évidemment de l’exposition au soleil et aux UV artificiels. (15) (16) Il est maintenant clairement prouvé que l’exposition aux rayons ultraviolets est un facteur de risque majeur dans le développement des mélanomes cutanés.
Dans le spectre électromagnétique, le rayonnement ultraviolet est situé entre la lumière visible et les rayons gamma X (cf. spectre électromagnétique cidessous).
Facteurs de risque internes
Phototypes
Les personnes de phototype I et II ont un risque plus élevé de mélanome que les phototypes III et IV. Ces phototypes diffèrent par la présence d’eumélanine (pigment brun-noir) et de phaeomélanine (pigment rouge).
La synthèse de ces pigments est principalement influencée par le gène MC1R. Ainsi, une mutation de ce gène conduit à la synthèse des phaeomélanines aux dépens des eumélanines (donc phototype plus clair).
Les grains de beauté (nævi)
Comme nous l’avons dit précédemment le nombre important de nævi et/leur taille (plus de 2 mm) multiplie le risque par 4 ou 5.
La présence de nævi atypiques (ou nævus dysplasique) augmente également le risque de mélanome. Il diffère d’un grain de beauté normal par son apparence : il peut mesurer plus de 6 mm de diamètre alors que le grain de beauté normal mesure habituellement moins de 6 mm La forme du grain de beauté atypique est irrégulière et ses bords sont indistincts tandis que le grain de beauté normal est généralement rond. Le grain de beauté atypique est souvent multicolore, variant du rose au brun foncé. Une personne qui a un simple grain de beauté atypique présente un risque faible de mélanome. Ce risque augmente si le nombre de grains de beauté atypiques est supérieur ou égal à 2.
Le nævus pigmentaire congénital (ou nævus à mélanocytes congénital)
Le nævus congénital se développe au cours du premier trimestre de la grossesse. Il apparait comme une tache de vin, ou gros grain de beauté, souvent recouvert de pilosité. Il est présent à la naissance ou peu après. Il est issue d’une prolifération anormale (hyperplasie) de mélanocytes avec une infiltration du derme voir de l’hypoderme.
Le risque de transformation en mélanome est directement relié à la taille du nævus. C’est la raison pour laquelle l’exérèse par un chirurgien plasticien est très souvent proposée.
Il peut être classé comme petit (moins de 1,5 cm), moyen (entre 1,5 et 19,9 cm), grand (plus de 5 % de la surface corporelle d’un préadolescent ou mesure plus de 20 cm chez un adolescent ou un adulte) ou géant si supérieur à 40 cm(rarissime).La majorité des patients ont une vie normale à l’âge adulte sans complication.
Maladies héréditaires
Le xeroderma pigmentosum (XP) (22) (23) est une génodermatose orpheline non curable (moins de 1000 cas dans le monde dont une dizaine en France), caractérisée par une extrême sensibilité aux rayons UV. Le gène contrôlant les réparations de l’ADN (formations de dimères) est muté ; donc la fonction de réparation de l’ADN affecté par les UV est inhibée, conduisant ainsi à un risque accru de développement de cancers cutanés.
Ces patients sont obligés de se protéger de la lumière du jour grâce à des combinaisons spécialement fabriquées, des cosmétiques des filtres sur les vitres des maisons…
Plus de 60% des patients décèdent avant 20 ans par développement de multiples tumeurs dont les plus fréquentes sont le mélanome malin métastatique et le carcinome épidermoïde. L’âge moyen d’apparition de cancer de la peau est de 8 ans chez les patients atteints de xeroderma pigmentosum, comparativement à 60 ans dans la population en bonne santé.
Le syndrome de Werner est une affection héréditaire rare et fatale, caractérisée par un vieillissement prématuré. Le syndrome de Werner est dit «autosomal récessif», c’est-à-dire que le syndrome ne s’exprimera chez un individu que si ses parents sont tous les deux porteurs d’une mutation spécifique affectant un gène précis et qu’ils lui transmettent tous deux cette mutation. On l’observe surtout chez les personnes d’origine japonaise ou en Sardaigne en raison de la fréquence des mariages consanguins (1 cas /3000 contre1 cas/20 millions dans le monde). Les personnes atteintes de cette affection risquent davantage de développer des mélanomes qui apparaissent normalement chez les sujets plus âgés. Remarque : l’étude de ce syndrome est très intéressante pour mieux comprendre les mécanismes du vieillissement « normal ».
immunodépression
Les personnes immunodéprimées ou qui ont reçu un traitement immunosuppresseur ont plus de risque de développer des mélanomes.
Autres
Certains autres facteurs de risques comme la mutation du gène récepteur de la mélanocortine 1, l’exposition à un rayonnement ionisant, l’exposition au biphényle polychloré, la PUVA thérapie, une grande taille à l’âge adulte ont été identifiés comme des facteurs de risques potentiels mais non prouvé à ce jour.