Le Polype antrochoanal de killian

Décrit pour la première fois par Killian, le polype antrochoanal (PAC) ou polype de Killian est une tumeur bénigne nasosinusienne qui prend naissance au niveau du sinus maxillaire dont elle sort par l’ostium au niveau de la fosse nasale puis par la choane dans le cavum. Il réalise ainsi une tumeur en bissac avec une composante intrasinusienne et une composante intranasale. C’est une tumeur peu fréquente qui touche essentiellement l’enfant et l’adulte jeune. Son étiopathogénie reste obscure. La symptomatologie clinique est non spécifique ; l’endoscopie nasosinusienne permet le diagnostic en montrant un aspect typique du PAC. La tomodensitométrie nasosinusienne permet de rattacher souvent le diagnostic d’un polype choanal au sinus d’origine. Plusieurs techniques opératoires ont été pratiquées de par la littérature. La chirurgie endonasale per endoscopique connaît ici l’une de ses principales indications. Cette chirurgie permet l’exérèse tumorale tout en préservant la fonction sinusienne. La chirurgie par voie externe est préconisée dans les insuffisances de la chirurgie endonasale. Le PAC est certes une tumeur bénigne des fosses nasales mais la chirurgie d’exérèse partielle, pratiquée depuis longtemps, est pourvoyeuse d’une poursuite évolutive. Nous avons réalisé une étude rétrospective à propos de 40 cas de PAC colligés au service d’ORL et de chirurgie cervico-faciale durant une période de 10 ans avec revue de la littérature en insistant sur les aspects épidémiologiques, cliniques, para-cliniques, thérapeutiques et évolutifs du PAC.

EPIDEMIOLOGIE : 

Fréquence : 

Le polype antrochoanal est une affection assez rare évaluée à environ 3 et 6% de l’ensemble des polypes nasaux [1,2] Une étude statistique faite par HECK en 1950 couvrait 1720 cas de polypose nasale et donnait une distribution de 64 polypes choanaux, soit 3,7% des cas étudiés [3]. L’étude réalisée par HELSINSKI en 1967 et portant sur 118374 patients trouvait 1298 cas de polypes choanaux soit 0,09% pour toute la pathologie ORL et 6,2% des polypes nasaux [4]. L’étude de PECH (29 cas) précise une fréquence du polype antrochoanal à 4% par rapport aux polypes nasosinusiens [5]. Dans l’étude de D’AKTAS, les PAC représentaient 9,8% des polypes nasaux [6]. Une étude rétrospective réalisée à l’université fédérale en Brésil entre 1991 et 2001 a trouvé 16 cas de polypes de Killian parmi 74 cas de polypes nasaux soit une prévalence de 21,6% : Cette prévalence élevée par rapport à la littérature est expliquée par le fait que les auteurs n’ont inclus dans leur étude que les patients avec un diagnostic anatomopathologique de polypes inflammatoires avec exclusion des autres tumeurs nasosinusiennes pouvant être des diagnostics différentiels [7]. En revanche, le polype antrochoanal reste le plus fréquent de tous les polypes choanaux originaires d’autres cavités sinusiennes notamment sphénoïdale et éthmoïdale, ainsi, les auteurs dans leur étude sur 51 cas de polypes nasaux bénins unilatéraux notent qu’il s’agissait d’un polype antrochoanal dans 46 cas, d’un polype ethmoïdochoanal dans 5 cas et d’un seul cas de polype sphénochoanal [8]. Dans notre série, le PAC représente 0,4% de la pathologie ORL de notre service et 8% de l’ensemble des polypes nasaux , ce qui rejoint les résultats de la littérature.

Côté atteint :

Le polype antrochoanal est majoritairement unilatéral et touche d’une façon égale les sinus maxillaires droit et gauche [12,23]. Cependant, la prédominance de l’atteinte gauche est constatée dans certaines études [24]. La forme bilatérale est possible mais est extrêmement rare, une dizaine de cas est rapportée dans la littérature [25]. Frosini et coll ont retrouvé 3 cas de PAC bilatéraux dans leur série englobant 200 patients [12]. Dans notre série, la forme unilatérale était la règle pour tous les patients.

TERRAIN : 

Allergie : 

Il a été rapporté que le PAC peut être associé à des affections allergiques ou inflammatoires [7]. Dans la série de BAHU et al, seuls 2 patients sur 12 présentaient des antécédents allergiques : un cas d’asthme et de rhinite allergique et un cas d’eczéma, contre 4 cas dans notre série. Par ailleurs, l’association à une hyper éosinophilie sanguine est inconstante : 2 cas (7% et 9% d’éosinophilies) sans antécédent allergique clinique noté. Aucun test cutané n’a été pratiqué [21]. BRAUSEWETTER et al ont montré que 50 % des patients porteurs de PAC ont un terrain allergique confirmé par des tests cutanés [15]. COOK et al dans une étude sur 33 cas de PAC, ont montré que 69 % de leurs patients avaient une rhinite allergique suggérée par l’histoire de la maladie et confirmée par des tests cutanés et par un bilan allergologique [26]. Selon l’étude de YANG-GI MIN [10], il n’existe pas d’allergie nasale chez des patients porteurs de PAC. Ceci a été confirmé par des tests cutanés négatifs, une éosinophilie nasale ne dépassant pas 5 % et une éosinophilie sanguine ne dépassant pas 7,5 %.

L’association à une pathologie allergique ou inflammatoire chronique n’est plus à retenir pour certains auteurs , bien que d’autres retrouvent 23,4% à 69 % de sujets allergiques dans leurs séries  .

Inflammation et infection : 

L’inflammation peut être une réponse à des agressions bactériennes. Il semble que des lésions de sinusite maxillaire ou ethmoïdale antérieure ou postérieure puissent être à l’origine du polype de Killian. Dans une série rapportée par SCHRAMM [13], plusieurs patients de moins de 10 ans ayant un polype de Killian présentaient une sinusite maxillaire au moment de l’intervention. Selon cette étude, des patients ont présenté une rhinorrhée purulente ou une sinusite évidente sur des radiographies préopératoires sans qu’interviennent de facteurs d’allergie. RUGINA et al, dans une étude de 19 cas de PAC, ont montré que 8 cas soit 42,1% présentaient des antécédents de sinusites purulentes homolatérales au PAC [9]. COOK et al rapportent une association du PAC à la sinusite chronique avec un taux supérieur à 50% [26]. Ce facteur reste néanmoins très controversé dans la littérature, car d’autres auteurs lui réfutent toute participation dans la genèse de ce polype [16]. D’après des études expérimentales sur 65 lapins [32], il a été constaté que la muqueuse des sinus des animaux devient siège de polypes 3 semaines après une infection artificielle par le pneumocoque alors que les sinus controlatéraux non infectés restent indemnes. Des études similaires ont montré l’implication des germes autres que le pneumocoque dans le développement des polypes comme les bactéroïdes fragilis NCTC 9343 et le staphylococcus aureus V8 [33]. Ceci suggère que la réaction inflammatoire est le principal facteur dans le processus de formation des polypes (lésion épithéliale – œdème –infiltration lymphocytaire) plutôt que l’infection bactérienne. La capacité de n’importe quel microorganisme à provoquer une lésion muqueuse ou une desquamation épithéliale semble essentielle pour induire la genèse de polype.

En 1988, les constats observés chez 15 patients opérés ont amené les auteurs [34] à considérer que les polypes peuvent prendre naissance à partir des kystes intramuraux du sinus maxillaire qui sont consécutifs à l’inflammation du sinus. Dans leur cas particulier à propos d’un polype antrochoanal dérivé d’un granulome apicodentaire, les auteurs ont conclu que l’inflammation chronique induite par les phénomènes infectieux entretenus à l’intérieur du granulome serait le point de départ de la formation du polype de Killian et ils ont, ainsi, réfuté l’implication directe du granulome apicodentaire [35]. Des études récentes ont révélé le rôle des métabolites de l’acide arachidonique dans la pathogénie du polype antrochoanal, et ont conclu que la régression des produits de la voie de la lipoxygénase peut être impliqué dans la pathogénie du polype antrochoanal [36,37].Une étude égyptienne [38] vient supporter les hypothèses précédentes en se basant sur le profil moléculaire du polype antrochoanal qui laisse supposer que ce dernier représente une réaction inflammatoire due à l’hyperproduction des facteurs de croissance tissulaires [38].

Origine génétique : 

Des cas familiaux ont été rapportés dans la littérature et supportent une possible prédisposition génétique au développement du polype antrochoanal [39]. Aucun cas familial n’a été rapporté dans notre série.

Mucoviscidose : 

Aucun cas de polype antrochoanal n’a été décrit associé à cette pathologie, contrairement à la polypose nasosinusienne [40].

La polypose nasosinusienne : 

Le PAC ne partage pas une filiation avec la polypose nasosinusienne. En effet, le rapport d’éosinophile/cytokines (IL5) est inférieur dans le PAC par rapport à la polypose nasosinusienne. Ceci sépare ces deux entités nosologiques [30].

Table des matières

INTRODUCTION
MATERIERL ET METHODE
I. MATERIEL
II. METHODE
RESULTATS
I. EPIDEMIOLOGIE
1. Fréquence
2. Age
3. Sexe
II. ETUDE CLINIQUE
1. Antécédents
1.1. Antécédents personnels
1.2. Antécédents familiaux
2. Délai de consultation
3. Signes fonctionnels
3.1. Obstruction nasale
3.2. Rhinorrhée
3.3. Autres signes
4. Signes physiques
III. ETUDE PARACLINIQUE
1. Bilan radiologique
2. Bilan pré -thérapeutique
3. Bilan histologique
IV. PRISE EN CHARGE THERAPEUTHIQUE
1. Intervention chirurgicale
1.1. Anesthésie
1.2. Position du malade et préparation des fosses nasales
1.3. Geste opératoire
1.4. Base d’implantation du polype
1.5. Aspect macroscopique
2. Soins post opératoire
3. Etude anatomopathologique
V. SURVEILLANCE ET EVOLUTION
1. Rythme de surveillance
2. Moyens de surveillance
3. Résultats de surveillance
DISCUSSION
I. EPIDEMIOLOGIE
1. Fréquence
2. Age
3. Sexe
4. Côté atteint
II. TERAIN
1. Allergie
2. Inflammation et infection
3. Origine génétique
4. Mucoviscidose
5. Polypose naso-sinusienne
III. ETUDE CLINIQUE
1. Signes fonctionnels
1.1. Période de latence
1.2. Période de maturation
2. Signes physiques
2.1. Examen ORL
2.2. Examen général
IV. EXPLORATIONS PARACLINIQUES
1. Endoscopie naso-sinusienne
1.1. Instruments
1.2. Technique
1.3. résultat
2. Radiologie naso-sinusienne
2.1. Radiographies standards
2.2. TDM naso-sinusienne
2.3. Imagerie par résonnance
3. Bilan allergique
4. Anatomie pathologie
4.1. Macroscopie
4.2. Microscopie
4.3. Cytologie des sécrétions nasales
4.4. Formes histologiques inhabituelles
V. DIAGNOSTICS DIFFERENTIELS
VI. PRISE EN CHARGE THERAPEUTIQUE
1. But
2. Moyens
2.1. Traitement médical
2.2. Traitement chirurgical
3. Indications
4. Surveillance post opératoire
4.1. A court terme
4.2. A moyen terme
4.3. A long terme
CONCLUSION 

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