L’ENTREPRENEUR ET L’ESPRIT D’ENTREPRENDRE

L’ENTREPRENEUR ET L’ESPRIT D’ENTREPRENDRE

LES THEORIES ECONOMIQUES DE L’ENTREPRENEUR

Pour plusieurs chercheurs, la caractéristique distinctive de l’entrepreneur est sa prédisposition à percevoir et mettre à profit les opportunités existantes sur le marché et non encore exploitées. Donc, sa capacité créatrice. D’après la définition classique, l’entrepreneur est un capitaliste novateur36, distinct d’une variété de capitalistes qui utilisaient les innovations des autres pour gagner de l’argent. L’élément de base reste, semble-t-il, la disposition à prendre des risques en considération du profit.  SHUMPETER (1935) qui a prêté beaucoup d’attention à la notion d’entrepreneur dans le développement, le voyait comme un ‘’novateur’’ qui introduit et conduit l’innovation, qui ‘’réalise de nouvelles combinaisons’’ et fournit ainsi la dynamique du développement économique. DRUCKER (1985), tout comme SHUMPETER, estime que l’innovation est l’aspect essentiel de la fonction entrepreneuriale. Albert SHAPERO est pour une interprétation plus élargie de l’esprit d’entreprise qui inclurait des activités créatrices, impliquant des initiatives qui n’entrent pas dans le cadre des sociétés. Les entrepreneurs comprennent non seulement ceux qui lancent des affaires indépendantes, orientées vers le profit, mais aussi des entreprises à but non lucratif. SHAPERO estime que même la création d’un groupe théâtral ou une organisation gouvernementale indépendante peuvent être considérées comme relevant de l’esprit d’entreprise. Il n’est pas impératif de relier le fait entrepreneurial à la naissance de nouvelles organisations productives: le fait entrepreneurial à lui seul est un acte novateur. Pour SHAPERO, qu’il soit créateur ou chef d’entreprise à plein temps, tout individu a droit à l’appellation d’entrepreneur s’il adopte des initiatives et des comportements risqués. Pour SHAPERO (1980)37, l’entrepreneur caractérise l’inventeur, le vendeur ou toute personne recherchant l’indépendance, qui s’empare d’une opportunité et crée une nouvelle entreprise: « une personne qui prend l’initiative de rassembler certains moyens, dans une certaine forme et pour un certain but. Cette entité dispose d’une relative autonomie et la personne qui en a eu l’idée la dirige et en prend le risque ». Pour d‘autres auteurs, l’entrepreneur est un individu qui valorise le risque calculé, qui privilégie les actions centrées sur le développement plutôt que le fonctionnement, sur l’innovation ou la création. C’est un non-conformiste qui refuse les positions établies. Il a l’esprit d’aventure et voit au-delà de son environnement proche. Il démontre une grande capacité d’analyse des informations complexes. Pour McCLELLAND (1961), c’est un individualiste qui agit au nom de mobiles personnels. Il définit l’entrepreneur comme quelqu’un qui contrôle une production qu’il ne consomme pas personnellement. Pour McCLELLAND, cette définition incorpore  par exemple un gestionnaire d’une unité de production d’acier collectivisée dans l’exURSS. Pour MILLER (1982), c’est quelqu’un de très confiant dans ses actions, très déterminé, et a une image très positive de lui-même, il définit ses projets et ses perspectives en fonction de lui-même. JULIEN & MARCHESNAY39 distinguent l’entrepreneur du dirigeant d’entreprise ou manager. Pour eux, l’entrepreneur, non seulement possède l’esprit d’entreprise, mais il l’actualise en créant et dirigeant une entreprise. Il est le plus souvent innovateur; sans que la réciproque soit nécessairement vraie. L’entrepreneur est donc plus qu’un simple dirigeant d’entreprise. Alfred MARSHALL40 qui ne fait aucune distinction entre les entrepreneurs et les managers, estime qu’un dirigeant doit posséder certaines qualités afin de déceler les opportunités d’offrir de nouveaux biens ou d’améliorer un processus de production existant. De ce fait, l’entrepreneur est un innovateur. HERNANDEZ41 conçoit l’entrepreneur comme un initiateur d’un processus complexe. Initiateur, car il est à l’origine, il ouvre une nouvelle voie; processus, pour montrer l’importance du temps et le caractère organisé des phénomènes en jeu; complexe, pour faire ressortir la grande variété des éléments à considérer et leur interdépendance. Pour  la fonction d’entrepreneur consiste en « l’appropriation et la gestion des ressources humaines et matérielles dans le but de créer, de développer et d’implanter des solutions permettant de répondre aux besoins des individus. (…) Mais l’entrepreneur ne se contente pas de prendre des initiatives lorsque l’occasion se présente et que toutes les conditions favorables sont réunies: il est constamment à la recherche des possibilités et prend tous les moyens de les exploiter avec profit. (…) Le caractère unique de l’esprit d’entrepreneurship est la création et l’implantation de quelque chose de nouveau et de plus efficace » .

La théorie de l’efficience X de LEIBENSTEIN

 Cette théorie développée initialement pour la grande entreprise, a été appliquée par la suite à l’analyse du rôle de l’entrepreneur. LEIBENSTEIN décrit les caractéristiques essentielles de l’environnement dans lequel évolue l’entrepreneur. L’efficience X représente la mesure dans laquelle l’entreprise ne profite pas pleinement de son potentiel productif. Elle représente le degré d’inefficacité dans l’utilisation des ressources de l’entreprise en raison d’une mauvaise utilisation des ressources ou d’un gaspillage de ces ressources dus à l’irrationalité ou à une inertie psychologique des agents économiques de l’entreprise. LEIBENSTEIN considère la fonction d’entrepreneur comme une réponse créative à l’efficience X. Car l’efficacité des entreprises qui emploient des agents sans objectifs compatibles avec un effort maximum, constitue une opportunité pour les entrepreneurs qui se sentent capables de concurrencer ces organisations. 

Le processus de marché de V. HAYEK et I. KIRZNER

 Pour HAYEK, le marché présente le meilleur système de signalisation afin de canaliser l’information vers les personnes qui en ont besoin pour améliorer l’efficience dans l‘affectation des ressources. Selon lui, les marchés aident les individus à communiquer leurs découvertes aux autres et à prendre celles qui ont pu être faites par les autres. Ce qui permet aux agents de coordonner leurs décisions et de progresser vers un état d’équilibre. KIRZNER Pense qu’il existe une motivation permanente pour améliorer le fonctionnement du marché compte tenu des possibilités de profit créées par un déséquilibre du marché. L’ajustement des prix constitue le rôle principal de l’entrepreneur qui arbitre et tire profit des opportunités existantes sur le marché. Pour lui, la vigilance face aux déséquilibres du marché est la caractéristique distinctive de l’entrepreneur. Ces deux auteurs prônent la théorie de l’ignorance. L’entrepreneur prend des décisions dans un environnement incertain. Son rôle clé, est d’organiser et de mobiliser des ressources productives en assumant les risques de perte ou d’échec dans un environnement changeant et incertain. Les situations de déséquilibre du marché sont sources d’opportunités nouvelles, donc de profit. A l’opposé de l’entrepreneur 102 Shumpétérien innovateur, ici, l’entrepreneur valorise une opportunité à partir d’une situation indépendante de son action. Dans sa théorie de l’entrepreneur, Marc CASSON43 distingue deux approches: fonctionnelle et indicative pour cerner le concept d’entrepreneur. L’approche fonctionnelle vise à spécifier la fonction de l’entrepreneur; et par là, la personne qui remplit cette fonction. Quant à l’approche indicative, elle donne une description détaillée de l’entrepreneur grâce à la description de ses caractéristiques propres. Selon CASSON, « un entrepreneur est quelqu’un de spécialisé dans la prise ( intuitive ) de décisions ( réfléchies ) relatives à la coordination de ressources rares ». L’auteur a estimé que tous les termes de cette définition fonctionnelle sont importants et méritent d’être analysés mot par mot. – un entrepreneur est quelqu’un…; en d’autres termes, l’entrepreneur est un individu, pas une équipe ni un comité, ni une organisation. Seuls les individus sont capables de prendre des décisions. – …spécialisé…; tout le monde est amené à prendre des décisions intuitives et réfléchies à un moment ou à un autre sans pour autant être des entrepreneurs. L’entrepreneur se spécialise et remplit sa fonction non seulement pour son propre compte mais encore pour celui d’autres personnes. Dans une économie de marché, les services d’un spécialiste peuvent se louer; aussi certains individus peuvent décider de la nature des services qu’ils vont offrir en fonction de l’avantage comparatif qu’ils détiennent. – …en prenant des décisions réfléchies…; le concept de décision étant au centre de la théorie économique; une décision réfléchie correspond au fait que des individus différents, partageant les mêmes objectifs et agissant dans un même contexte, peuvent prendre des décisions opposées. Ceci résulte du fait qu’ils ont des perceptions différentes de la situation en raison d’un type d’accès différent à l’information, ou d’une interprétation différente de celle-ci. – …relatives à la coordination…; la coordination peut être définie ici comme une ré allocation avantageuse des ressources. C’est donc un concept dynamique par opposition à celui d’affectation qui est statique. 

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